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notre collection ne seroit digne de la confiance et de l'estime publique, que si elle étoit 1.o entière et sans omission; 2.° faite ou sur les manuscrits originaux, ou sur les éditions les meilleures et les plus correctes; 3. régulièrement distribuée; 4.° exempte de tous accessoires superflus: enfin, qu'elle devoit offrir Bossuet, tout Bossuet, rien que Bossuet.

Ces conditions étoient trop sages pour que nous hésitassions à y souscrire et à les remplir.

Nous nous sommes donc appliqués, 1.o à rechercher et à nous procurer toutes les éditions générales et particulières, et tous les recueils partiels qui en ont paru; afin qu'aucune pièce légitime ne nous échappât, et que nous pussions affirmer avec vérité que notre collection étoit complète. Les ouvrages imprimés du vivant de l'auteur offroient peu de difficultés; mais les posthumes exigcoient plus d'attention. On sait en effet, que l'authenticité de plusieurs de ces derniers a été contestée, qu'on les a suspectés d'interpolation, et que des savans étrangers, que le cardinal Gerdil, entr'autres, n'a pas craint d'avancer qu'on devoit se défier de tous. L'opinion d'un personnage aussi grave, sage que le cardinal Gerdil, méritoit d'être approfondie. Nous l'avons donc examinée et pesée à la rigueur; dans la notice de ces ouvrages, en tête de chacune des classes où nous les plaçons, nous

aussi

donnons les preuves de leur authenticité, si claires et si convaincantes, qu'elles doivent dissiper jusqu'à l'ombre du doute.

:

On a beaucoup parlé, on parle beaucoup encore de plusieurs manuscrits inédits de Bossuet, et il est vrai qu'il existe une prodigieuse quantité de papiers écrits de sa main mais ce ne sont pas des ouvrages, ce sont des notes ou des matériaux qu'il a pour la plupart employés. Ce qu'en a dit, il y a soixante ans, un homme qui les a eus long-temps à sa disposition, qui étoit très en état de les apprécier, qui même en a publié trois volumes, C. F. Le Roi, nous laissoit si peu d'espoir de trouver quelque chose à glaner après lui, que nous étions fort tentés de nous abstenir de les rechercher. Cependant, pour en parler avec plus d'assurance, nous avons vu et lu avec attention ceux au moins qui offroient l'apparence d'un travail suivi. Les premiers que nous ayons examinés étoient des abrégés de Grammaire, des observations sur les Langues, la Rhétorique, les Tropes oratoires, espèces de Rudimens très clairs sans doute et très-exacts, mais superficiels, et rédigés par l'habile instituteur pour son utilité propre, et pour se préparer aux leçons qu'il avoit à donner à son anguste élève. Le plus complet de ces manuscrits a pour titre la Logique; il paroît qu'on avoit eu dessein de le publier, car

il est muni de l'approbation d'un censeur, datée du 24 avril 1749, et d'ailleurs il est énoncé dans le second privilége obtenu par l'Evêque de Troyes pour l'impression des OEuvres posthumes de son oncle. Cependant il n'a point paru, et en le lisant on juge aisément pourquoi. Quand Bossuet l'écrivit, la Logique de Port-royal étoit déjà connue, couroit dans beaucoup de mains, étoit même imprimée : il en fit donc un abrégé, changea quelque chose à l'ordre des chapitres, et aux exemples allégués substitua d'autres exemples: eut-il jamais la pensée qu'un tel abrégé dût être publié? Son neveu a donc agi prudemment en supprimant un opuscule indifférent à la gloire de son oncle, et d'autant plus inutile au public, que la Logique de Port-royal, très-perfectionnée dans les éditions qui ont suivi la première, jouit et jouira long-temps de l'estime la mieux méritée.

Dans un genre supérieur nous avons trouvé quelques fragmens dignes d'intérêt, et nous les ferons remarquer en les imprimant: mais pouvionsnous adopter des traités ébauchés, incorrects, imparfaits, sur différens points de dogme, de discipline et de morale ? un grand volume en partie lacéré, sur la méthode des anciens Pères d'expliquer au peuple l'Ecriture sainte et les mystères de la religion; tous essais informes d'un jeune homme plein de grands talens, qui les cultive

et s'exerce à les développer. Publier de tels écrits, ce seroit trahir Bossuet, et ajouter un misérable surcroît à la collection de ses excellens ouvrages (1).

Pour éviter de nous répéter, nous nous réser→ vons de parler des manuscrits sur l'Ecriture sainte en tête de nos observations sur les ouvrages imprimés de cette classe.

2. Notre édition est faite ou sur les manuscrits originaux, ou sur les éditions les plus correctes. On sait, et, en parcourant les manuscrits de Bossuet, on voit qu'il ne cessoit de retoucher ses ouvrages, ceux même qui étoient déjà publiés; car tous sont chargés d'additions et de corrections de sa main. Le soin des éditeurs, après lui, a donc dû être de réformer les premières éditions, et de ne donner les nouvelles, qu'avec les changemens faits par l'auteur. C'est ce qui rend inexcusable l'abbé Pérau, et ce qui déprécie réellement plusieurs volumes de l'édition de Paris, où ces rectifications, comme nous l'avons dit, ont été négligées; et par la raison des contraires, c'est ce qui rend précieuses les éditions données par l'abbé Le Queux et C. F. Le Roi, parce qu'ils y ont fidèlement inséré toutes les cor

(1) Ajoutons ici le témoignage du nouvel historien de Bossuet. Dans l'Avertissement, en tête du tome I, pages vi et vi, il dit : « Tous les manuscrits de Bossuet » ont été mis à ma disposition; je n'y ai rien trouvé » d'important qui ne fût déjà connu par les différentes » éditions qu'on a données de ses ouvrages. »

rections des manuscrits originaux. Nos soins à cet égard ont égalé les leurs, et nous n'avons rien négligé pour que l'édition de Versailles, que nous offrons aujourd'hui, balançât au moins le mérite de toutes celles qui ont paru jusqu'ici.

3.° Quant à la distribution des traités, nous y avons long-temps réfléchi; et après un mûr examen, nous sommes forcés de convenir qu'il ne nous a pas paru possible d'en former une exactement méthodique. Plusieurs de ces traités, par l'affinité de leur sujet, peuvent appartenir à diverses classes, et être arbitrairement placés dans l'une ou dans l'autre. Puisqu'il falloit se décider, nous avons au moins évité deux inconvéniens, l'un de trop multiplier les divisions, l'autre de mettre ensemble des traités sur des matières absolument disparates.

Nous partageons donc le tout en six classes majeures: la première contient les écrits de Bossuet sur l'Ecriture sainte et sur son interprétation; la deuxième, ce qu'il a composé, comme évêque, pour l'usage, la discipline et l'instruction particulière de son diocèse: de plus, ce qu'il a composé au nom et comme l'aigle du clergé de France; la troisième, ses oraisons funèbres, sermons, discours, et ses livres de piété; la quatrième, ses ouvrages de controverse et de critique; la cinquième, ce qu'il a écrit pour l'éducation du grand Dauphin; la

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