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du travail, de la vertu, en peignant for rement leurs avantages.

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-, ' Si la volonté tend à s'éloigner de l'objet, c'est la Haine, on l'excite par les moyens oppofez à ceux qui produifent l'amour, les Verrines, les Philippiques, les Catilinaires de Ciceron, en fourniffent des exemples brillans.

Ces deux paffions, l'amour & la haine, font le fond de toutes les autres ; parce qu'elles comprennent les deux

s deux rapports de notre ame avec le bien & le mal. Si le mal eft préfent, c'eft Trifteffe, Douleur; s'il eft abfent, avec quelque apparence qu'on pourra l'éviter, c'eft Crainte; fi on ne peut l'éviter, c'eft Défefpoir; s'il eft dans d'autres, mais de maniere à pouvoir tomber auffi fur nous, c'eft Compaffion.

Il en eft de même du bien. S'il eft préfent, il caufe la Joie. S'il eft abfent, & qu'il y ait quelque moyen de l'obtenir, c'eft l'Efpérance. S'il eft dans d'autres à notre préjudice, c'est l'Envie. Si on veut nous l'arracher quand nous le poffedons, il produit la Colere. Il feroit aifé de pouf fer loin ces détails & de multiplier les exemples, tous les tragiques en font pleins

d'un bout à l'autre. D'ailleurs on les fent affez, quand on les trouve dans les Au teurs. S'il s'agit de les exprimer laut les éprouver en foi-même, & on n'arrive point à les fentir, ni par fyftême, ni par regles. Nous traiterons ci-après de la mat niere de les exprimer.

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ARTICLES ECO ND.

LA

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A Difpofition dans l'Art oratoire con fifte à arranger toutes les parties fournies par l'Invention, felon la nature & l'intérêt du fujet qu'on traite. La fécon dité de l'efprit brille dans l'invention: la prudence & le jugement dans la difpo

fition.

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Tout ouvrage doit avoir, s'il eft en tier un commencement un milieu, une fin. Il y aura donc dans le difcours oratoire, un exorde; enfuite viendront les récits, ou les preuves, & enfin une conclufion, quelle qu'elle foit, qui avertiffe au moins que tout eft dit.

L'Exorde eft la partie du difcours qui prépare l'auditeur à entendre le refte. Le Récit eft l'expofé clair & court d'un fait. Une Preuve eft un raifonnement qui établit la vérité d'une propofition. On entend affez ce que c'eft que conclufion. Les chofes claires s'obfcurciffent quand on veut les expliquer. Reprenons' toutes ces parties, & voyons ce que l'art prefcrit à l'orateur par rapport à chacune d'elles.

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L'Exorde eft une partie très-importante dans le difcours. Il s'agit de difpofer les efprits à recevoir favorablement ce qu'on va leur adreffer. Et pour cela, les maî tres de l'art veulent que l'Exorde foit ingénieux, modefte, court, & tiré du fond même du fujet.

Les orateurs Grecs & les Romains en avoient ordinairement des provifions de toutes efpeces, tirez de la perfonne même qui parle, ou de celle des auditeurs ou de celle de l'accufé, de l'accufateur, des juges, ou des circonftances des lieux, des tems, &c. Ils les accommodoient au fujet le mieux qu'il étoit possible, sauf

à les retravailler ou à en fubftituer d'autres, quand le difcours fe donnoit au public. Aujourd'hui on ne veut point tant d'art. S'il faut parler, fur le champ, on faifit l'exorde qui fe préfente, ou s'il ne s'en préfente point, on entre en matiere fans autre apprêt.

On veut que l'Exorde foit ingénieux. Ce qui ne fignifie pas qu'il fera petillant, étincellant de pointes & d'antithefes; mais raisonnable, & affaisonné dans un degré qui donne bonne opinion du talent, du génie, du bon fens de l'orateur; qui annonce bien ce qui doit fuivre, & qui détermine l'auditeur à écouter avec

attention.

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Il fera modefte. Qualité qui rehauffe le prix du talent & de la vertu, & que l'orateur ne doit jamais montrer plus qu'à l'entrée de fon difcours. L'amour-propre de l'auditeur eft fi délicat, si aisé à blesfer, le perfonnage de quiconque s'éleve pour faire la leçon aux autres, eft fi voifin de l'orgueil, qu'il faut beaucoup d'art pour faire les premiers pas fans déplaire. A la bonne heure que ceux qui ont miffion, fe préfentent avec confiance, comme ambaffadeurs de la vérité, pro Chrifto legatione

legatione fungimur. Mais on fait diftinguer la confiance du miniftere de la confance du miniftre. L'une redouble les forces de l'éloquence, l'autre les détruit, les anéantit.

que

Il fera court, c'est-à-dire, proportionné à l'étendue du difcours. On ne mettra point la tête d'un pygmée fur les épaules d'un géant, ni celle d'un géant fur le cou d'un pygmée. S'il falloit que la proportion ne s'y trouvât pas, il feroit mieux qu'il fût trop court que trop long. Rien ne déplaît tant à l'auditeur la perfpective d'une longue difcuffion. On diftingue deux fortes d'Exordes ; l'un qui fe fait par la voie de l'infinuation; quand il s'agit de difpofer peu à peu les efprits à prendre la route qu'on veut qu'ils fuivent, ou de les ramener doucement de leurs préventions. Tous les plaidoyers, tous les fermons, tous les difcours qu'on addreffe à des auditeurs de fang froid, doivent commencer de cette forte. Et un orateur qui, en pareil cas, éclateroit dès le premier mot, reffembleroit, dit Ciceron, à un homme ivre au milieu d'une affemblée à jeun, ebrius inter fobrios. Mais quand une vive douleur, Tome IV.

D

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