Images de page
PDF
ePub

dont on puisse se servir quand on ne veut pas énoncer des nombres de degrés précis. Car, dans mon avant-dernier article de 1843, p. 701, j'ai prouvé, par le calcul, que, d'après les éléments adoptés par Ptolémée, ce maximum s'opère rigoureusement dans les deux élongations 57° 2′ 33′′ et 122° 57′ 27′′; de sorte que l'inégalité est encore très-peu différente de la plus grande valeur dans les élongations voisines, sextile et trine, ou 60° et 120°. Les Arabes ne pouvaient pas faire ce calcul de maximum, non plus que Ptolémée lui-même. Mais les longitudes où il s'opère sont marquées dans la seconde colonne de la table numérique générale d'anomalie, annexée au chapitre VII du livre V de l'Almageste. Car la plus grande valeur de la correction, appelée dans cette table la prostraphérèse de l'apogée, est placée au-devant des nombres 114° et 246°, lesquels, étant doubles de l'élongation correspondante, comme Ptolémée l'explique dans la page suivante, donnent la même indication que mon calcul direct, savoir, 57° et 123°. Ceci a pu suffire aux commentateurs pour en déduire leur énoncé de trine et de sextile, 60° et 120°. La seconde remarque, sur laquelle j'insisterai, c'est que l'inégalité appelée par Tycho la variation, et dont Newton a montré la cause physique, est, par sa nature, comme dans son application, absolument indépendante de la position de l'apogée lunaire. Conséquemment, l'inégalité que décrit ici l'auteur arabe, et qui dépend de la position de cet apogée, ne peut pas être la variation. C'est pourquoi Tycho ne trouva celle-ci qu'après avoir satisfait aux précédentes, et à l'oscillation de l'apogée comme à tout le reste. Il la fit ensuite isolément applicable à la longitude, indépendamment de cette oscillation, ce que la théorie newtonienne a pleinement confirmé. Cela seul décide indubitablement la question, pour tout géomètre qui connaît ces théories.

CHAPITRE XI. Le mouvement égal (moyen) du centre du cercle de circonvolution de la lune se fait autour du centre du monde. (Fol. 100 r°.)

« Item, lorsque nous avons considéré les mouvements de la lune, d'après nos observations et les observations des anciens, dans les temps où le centre du cercle de circonvolution est entre l'apogée et le périgée du cercle excentrique, la lune étant alors à ses deux distances extrêmes (périgée et apogée) du cercle de circonvolution, nous n'avons pas trouvé à ce mouvement d'inégalité, relativement au cercle excentrique. Et, si le mouvement égal (moyen) de la lune s'opérait autour du centre de l'excentrique, ou autour de quelque autre point différent du centre du monde, on trouverait dans le mouvement de la lune, en ces instants-là,

une inégalité quelconque, indépendante de la troisième inégalité appelée inégalité du mohadzat. Il est donc manifeste que le mouvement égal de la lune se fait autour du centre du cercle des signes du zodiaque.

REMARQUES. Autant que je puis comprendre ce dernier chapitre dans son obscurité, il présenterait l'alternative de deux sens également faux. Le premier, ce serait que le mouvement moyen de la lune, déduit des observations grecques comparées aux Arabes, ne différerait pas de celui que Ptolémée a établi par les observations plus anciennes comparées aux siennes propres. Cela prouverait qu'Aboulwéfa n'a pas réellement fait cette comparaison, ou l'a faite inexactement; car on sait aujourd'hui que le mouvement moyen de la lune s'est progressivement accéléré depuis les Chaldéens jusqu'aux Grecs, des Grecs jusqu'aux Arabes, et des Arabes jusqu'à nous. La seconde interprétation, qui ne me paraîtrait pas moins possible, serait que, selon la comparaison qu'Aboulwéfa dit avoir faite, la lune n'aurait pas d'autres inégalités que celles qu'il a décrites. Cela serait encore faux, puisque Tycho a montré qu'il faut y ajouter la variation, outre beaucoup d'autres inégalités moins sensibles, qu'il n'a pu atteindre et que nous connaissons aujourd'hui. Enfin, comme me l'a fait remarquer M. Munk, il se pourrait bien encore que ce dernier chapitre ne fût qu'un équivalent inintelligent du chapitre Ix du livre V de l'Almageste, où Ptolémée examine si le mouvement de l'excentrique ne produirait pas quelque inégalité sensible dans les syzygies, à cause du déplacement qu'il opère dans le lieu du centre de l'épicycle. Mais, dans tous les cas, l'alternative ne mérite pas d'être décidée.

RÉSUMÉ. Voilà en quoi consiste la théorie de la lune, exposée dans le manuscrit d'Aboulwéfa. La suite de son ouvrage traite des astres qu'il appelle supérieurs, et des moyens par lesquels on peut se rendre compte de leurs mouvements. On ne saurait voir, dans cette théorie de la lune, qu'un résumé des hypothèses et des résultats de Ptolémée, dépouillé d'observations réelles et de démonstrations rigoureuses, dans lequel, loin de pouvoir chercher de nouvelles découvertes, on ne trouve pas même un exposé exact des méthodes de l'astronome grec. Les notions les plus indispensables y sont omises par exemple, les périodes moyennes, le mouvement de latitude, la rétrogradation des nœuds. Si l'on avait traduit dès l'abord ces douze pages du texte arabe, ou seu. lement si on les avait lues avec attention, cela aurait évité l'inconvénient de se faire illusion à soi-même et aux autres. Maintenant que

l'ouvrage sera connu par notre publication, il ne fera plus d'illusion à personne. Son insignifiance, comme exposition de doctrines astronomiques, sera évidente. Mais on peut regretter le temps perdu à établir une vérité si stérile.

BIOT.

ANTONIO PErez et Philippe II.

CINQUIÈME ARTICLE 1.

1° Retrato al vivo del natural de la fortuna de Antonio Perez. En Rhodanusia, a costa de Ambrosio Traversario. 1625, petit in-8° ou in-12, contenant Relacion sumaria de las prisiones y persecuciones de Antonio Perez, etc.; El memorial que Ant. Perez presentò del hecho de su causa en el juyzio del tribunal del justicia de Aragon, etc.

2° Processo que se fulmind contra Antonio Perez, secretario de estado del don Phelipe segundo y del despacho universal y por su mandado sobre la muerte de Juan de Escobedo, etc. Manuscrit.

[ocr errors]

rey

24

3° Collection manuscrite de Llorente, Biblioth. royale, en 17 volumes, sur l'inquisition en Espagne, sous le n° 103, et contenant, dans les XIII, XIV, XV, XVI et XVIIes volumes, les pièces originales relatives au procès de Perez devant l'inquisition d'Aragon et aux insurrections de Saragosse.

La victoire remportée le 24 mai 1591 par le peuple de Saragosse sur l'inquisition n'était rien moins que définitive. Philippe II, qui avait un moment ressaisi Perez, ne devait pas permettre qu'on le lui arrachât de nouveau. D'ailleurs, il ne pouvait pas souffrir ce mépris du saint office et cette défaite de son autorité. Cependant il ne précipita rien. Outre la lenteur ordinaire de ses résolutions dans les cas graves, il avait alors des raisons de ne pas céder à la colère qu'il ressentit en apprenant le succès de cette révolte populaire. En guerre avec les Turcs dans la Méditerranée; ayant à se défendre dans l'Océan contre les Anglais, qui attaquaient les colonies de l'Amérique et les côtes de l'Espagne pour se venger du projet d'invasion de leur île par la fameuse Armada en

1 Voir les cahiers d'août et décembre 1844, janvier et février 1845.

1588; toujours exposé, en Portugal, aux incursions de don Antonio de Crato, qui, à la tête d'une armée, avait déjà tenté deux fois de lui enlever ce royaume; obligé de poursuivre, dans les Pays-Bas, une lutte acharnée et ruineuse avec les insurgés des sept Provinces-Unies; conduit, par des intérêts de parti et des projets de domination, à soutenir de son argent et de ses soldats la ligue catholique de France, qui résistait avec peine aux armes victorieuses de Henri IV, il n'aurait pas voulu qu'à des ennemis si nombreux et si redoutables s'en joignissent d'autres dans l'intérieur même de ses États. Le soulèvement d'un royaume comme celui d'Aragon, dont la situation était forte, dont le peuple passait pour être belliqueux, dont les lois étaient l'objet d'un attachement universel et opiniâtre, lui semblait pouvoir ébranler sa puissance et compromettre ses diverses entreprises.

Il était donc disposé à montrer de la clémence, si les Aragonais revenaient à la soumission. Ceux-ci en étaient d'autant moins éloignés qu'ils n'avaient pas une grande confiance dans leur force. Habitués depuis soixante et quinze ans à jouir de leurs droits sous la dynastie Castillane, sans avoir eu à les défendre, ils ne savaient pas s'ils seraient en état de les maintenir les armes à la main. Ils craignaient de tout perdre en exigeant tout. De part et d'autre on était donc porté à une transaction, qui, sous une forme trompeuse, sauvât l'orgueil aragonais en donnant satisfaction au roi, et conservât l'exercice apparent du droit de manifestation en le subordonnant en réalité à la juridiction du saint office.

L'utilité de cette transaction dut paraître d'autant plus évidente à Philippe II que l'inquisiteur don Pedro Pacheco, ayant commencé, en juillet 1591, une instruction secrète à Madrid sur les troubles du 24 mai, découvrit des projets de nature à éveiller la défiance de ce prince. Don Pedro Pacheco reçut les dépositions de dix-huit témoins 2, parmi lesquels étaient les deux lieutenants du justicia mayor, les docteurs Geronimo Chalez et Juan Francisco Torralba, qui avaient été privés de leurs fonctions d'assesseurs et obligés de quitter Saragosse pour s'être montrés contraires à Perez3; trois de principaux serviteurs

1

3

[ocr errors]

Cette information remplit tout le tome III de la Collection Llorente manuscrite, vol. XIV. — Ibid. 15 à 220. P. .... Avian sido desterrados del reino dos jueces de la corte del gran justicia de Aragon... Micer Chalez y Micer Torralba, y en la residencia que se teniò en el mismo tiempo, de la qual quieren decir que avia resultado que estos jueces y el marques de Almenara se entendian, y que ellos no guardaban el fuero, lo quebraban ō dissimulaban, y fueron condenados en el juicio de la residencia, el qual consta de 17 ciudadanos, los quales salen

du marquis d'Almenara, le page de Perez, Antonio Añon, et son dénonciateur Diego Bustamente, si longtemps attaché à sa personne et si bien placé pour connaître ses desseins. Dans une déposition curieuse, celui-ci déclara «que l'orgueil et l'arrogance de Perez étaient tels, qu'il lui avait entendu dire, au temps où il était avec lui, qu'il devait se trouver libre aux premières cortès auxquelles figurerait le roi, et qu'il aurait alors à réclamer de lui la restitution de deux cent mille ducats dont il lui avait fait tort, comme aussi qu'il le forcerait à changer la teneur du désistement qu'il avait donné à Saragosse 1.» Il ajoutait «qu'il voulait se rendre aux cortès avec des housses d'apparat qui devaient avoir quatre parties les coins de la housse porteraient en peinture des fers et des chaînes; sur le milieu devait être un appareil de torture tout dressé; pour bordure, il y aurait des châteaux forts et des prisons, et autour de l'appareil de torture des devises latines qui diraient gloriosa pro premio en haut, decora pro fide en bas, avec cette devise en castillan au centre, fraude et désabusement. L'explication de ces devises et le sens des autres emblèmes étaient développés par lui d'une manière fort injurieuse 2. Il fit tracer ces emblèmes et devises des housses sur un papier par le moyen de maître Basante, qui enseigne la grammaire... Le déclarant donna huit réaux, par ordre d'Antonio Perez, audit Basante, pour qu'il les remît au peintre qui avait dessiné sur du papier lesdites housses, à ses couleurs, bleu et jaune. Il disait encore qu'à Notre-Dame-del-Pilar il voulait mettre une grande lampe, supérieure à toutes celles qui s'y trouvaient, en argent, à l'extérieur de laquelle, et sur un cercle du pourtour, il y aurait une devise latine disant Captivus pro evasione ex voto rediit: majora rediturus pro uxoris natorumque liberatione de populo barbaro iraque regis iniqui et de po

a

a

:

- ་

n

ms.;

por suertes, y esto se hace todas las veces que ai quien denuncio. » Proceso, Relaciones de Ant. Perez, p. 237-238. Que era tanta y es su soberbia y arrogancia, que le oyò dezir en el tiempo que estava con el que avia de hallarse libre a las primeras Cortes, en que estuviese el rey nuestro señor, y que avia de pedirle restituyese dozientos mil ducados que le avia hecho de daño, y assi mismo avia de hazer que reformase el tenor de la separacion que Su Magd avia hecho en « Zaragoça. » Collection Llorente ms. de la Biblioth. royale, t. III, vol. XIV, fol. 72. — 1a Decia que avia de yr a las Cortes con unos reposteros los quales avian de ser en aquatro partes. Las esquinas del repostero pintadas grillos y cadenas, y en el medio tendido un potro, y por la orla castillos y carzeles, y junto al potro unas letras que dixeren gloriosa pro præmio en lo alto, y en lo baxo decora pro fide, y en el medio una letra en castellano que dixese barato, desengaño. Y la declaracion de las dichas letras y significacion de las demas cosas era muy descomedida segun el la declarava. » Ibid.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

C

« PrécédentContinuer »