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que l'on choisisse les électeurs héréditaires parmi tout ce qui s'est montré de plus hostile depuis la restauration; qu'on aille les chercher, si l'on veut, dans ce qui reste de la convention et des clubs; et le trône constitutionnel y trouvera d'aussi ardens défenseurs que la tyrannie de Bonaparte y a trouvé de complices.

N'ayant plus à craindre que la Charte ne devienne quelque jour un instrument de destruction contre son autorité, le prince s'habitue insensiblement à la nouvelle position qu'elle lui a faite, et cesse d'en conspirer le renversement. Plus de gouvernement occulte, plus de notes secrètes, plus de congrégations, plus de jésuites.

Alors aussi, mais seulement alors, les libertés publiques auront des défenseurs de bonne foi. Tout par la liberté, les électeurs héréditaires ne seraient rien sous le

despotisme. C'est sur leur dévouement à remplir leur devoir envers le pays, que reposerait leur considération. Voyez les parlemens: ils étaient composés de riches propriétaires; un grand nombre de leurs membres tenaient aux plus hautes familles de la noblesse, et possédaient les titres les plus éminens. Ils étaient recherchés par la comblés de ses plus insignes

cour,

faveurs; et cependant ces mêmes hommes se montraient, dans toutes les circonstances, les plus ardens défenseurs des priviléges des communes. Était-ce vertu, patriotisme? Il y aurait de la témérité à l'affirmer, du moins pour toutes les occasions où ils se sont mis en opposition avec la couronne; mais plus on se croira fondé à attribuer leur résistance à des motifs d'ambition personnelle, plus j'aurai de motifs moi-même pour présenter l'hérédité

des électeurs comme la garantie la plus solide des libertés publiques, puisqu'à part tout autre sentiment, l'intérêt même et l'éclat de cette hérédité porteraient les électeurs, comme les membres des parlemens, à s'opposer de tout leur pouvoir, à l'envahissement des droits de la nation.

Cette hérédité offrirait encore un avantage inappréciable: celui de mettre le système électoral en rapport avec l'institution de la chambre des pairs et avec l'hérédité de la couronne.

Il y a, dans toutes les choses de ce monde, une harmonie nécessaire, et qui se fait sentir à toutes les intelligences. Une monarchie ne peut se soutenir avec des institutions républicaines. Le grand éclat du trône a besoin de se fondre, pour ainsi dire, dans des éclats secondaires, pour ne pas blesser trop vivement les yeux. L'héré

dité de la couronne, ainsi que celle de la chambre des pairs, ne peuvent s'introduire dans les mœurs, si elles sont les seules qui soient établies dans l'État. Elles trancheraient trop brusquement avec toutes les égalités dont elles se verraient entourées. Il faut qu'elles descendent jusqu'au peuple par des hérédités successives qui s'emparent de son esprit, et se présentent à sa conviction comme une seconde condition de l'état de société. Alors il s'habitue à l'hérédité du pouvoir, comme à l'inégalité des fortunes, et il vit heureux et tranquille sous cette double nécessité de tout gouvernement. Mais quand il voit chaque jour le pouvoir et la richesse devenir la proie du plus fort ou du plus adroit, peut-il ne pas croire bientôt que la couronne est aussi destinée au même sort? Il n'en est pas des flots du peuple comme des flots de la mer; et

Dieu n'a point écrit sur les degrés des trònes comme sur les rives de l'Océan : Non ibis ampliùs,

Pourquoi la nature de cet ouvrage ne me permet-elle pas de décrire les bienfaits que ces majorats répandraient dans les campagnes; les mœurs adoucies, l'agriculture encouragée, les paysans protégés contre les agens inférieurs de l'administration; le désir de s'instruire stimulé par l'exemple; et les arts, les sciences, la politesse et l'élégance de la ville, portés jusqu'aux extrémités les plus reculées de la France!

N'est-il pas temps aussi, dans l'intérêt des bonnes mœurs, de ramener la considération publique sur des situations sociales qui tirent leur éclat d'ailleurs que de la fortune? Qu'est-ce qu'un peuple où l'argent est tout? A quelle corruption n'est-il pas livré? Quelle vertu peut naître au milieu

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