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Rabaut-Saint-Etienne, moins distingué encore par son érudition et ses succès littéraires, que par le courage avec lequel il combattit dans la Convention le despotisme sanguinaire qu'on organisait au nom de la liberté. L'on n'a pas oublié le discours éloquent dans lequel, s'élevant contre les pouvoirs illimités que s'arrogeait l'assemblée, il se déclarait pour sa part fatigué de sa portion de tyrannie, et impatient de l'abdiquer.

(4) Je n'ai cité que deux des libelles publiés alors contre les protestans, et je n'ai rapporté aucune phrase de ces libelles. Voici quelques mots qui prouveront quel esprit les avait dictés. « Vipères iugrates,» dit Pierre Romain, en parlant des protestans et en s'adressant aux catholiques, « vipères ingrates, que l'engourdis» sement de leurs forces mettait hors d'état de vous nuire, ré» chauffees par vos bienfaits, elles ne revivent que pour vous don»ner la mort. Ce sont vos ennemis nés. Vos pères ont échappé "comme par miracle à leurs mains sanguinaires. » Indépendam'ment de ces deux libelles, on en distribua dans le même temps plusieurs autres, sous le titre de Réponse à la lettre de M. le duc de Melfort; Français, réveillez-vous: Paul Romain à Pierre Romain; Avis important à l'armée française, etc.

(5) Dans cette délibération, les soi-disant catholiques demandaient que la religion catholique fùt déclarée la religion de l'Etat, et qu'elle jouit seule des honneurs du culte public; que le pouvoir exécutif suprême fût rendu au roi; que Ś. M. discutât dans sa sagesse les décrets qu'elle avait sanctionnés forcément ; qu'il ne fut fait aucun changement dans la hiérarchie ecclésiastique, ni aucune réforme dans les corps séculiers et réguliers sans le concours des conciles nationaux, etc.

(6) Voyez, dans le rapport de M. Alquier, sur les troubles de Nimes, le 19 février 1791, le texte de la lettre des soi-disant catholiques aux diverses municipalités du royaume.

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(7) « Le 3 mai, une fermentation très-vive se manifesta. Dès le » matin il y eut des attroupemens ; des hommes armés de haches, » de sabres, de baïonnettes et d'épées, parcourent les rues. Ils paraissaient très-animés contre les protestans. Plusieurs furent » insultés, et grièvement blessés. Des travailleurs de terre traî>> naient une corde et criaient c'est pour pendre les protestans. » A midi, la place, les cours, les escaliers, et quelques salles de » l'hôtel-de-ville étaient remplies de travailleurs de terre deux » jeunes gens s'y étant rendus pour voir donner l'ordre, et ayant » été reconnus pour protestans, furent injuriés et maltraités. Un » soldat du régiment de Guyenne passa devant les fenêtres de » l'hotel-de-ville. Il fut attaqué par les légionnaires. Deux de leurs » officiers lui sauvèrent la vie. Le maire parut et apaisa le dé>> sordre..... Les boutiques furent fermées : on fut obligé d'aller à la place de la Salamandre pour prendre l'ordre qui se donnait chaque jour à l'hôtel-de-ville..... Les soldats du régiment » de Guyenne étaient aussi l'objet de la fureur..... Un soldat fut » blessé d'un coup de sabre. Un grenadier, nommé Laugier, fut > assassiné d'un coup de fusil, et mourut de sa blessure.......... Le 4,

» la ville était tranquille; la loi martiale fut proclamée. » Même rapport, p. 12 et 13.

(8) Lettre du sieur Descombiez à M. de Bouzol.

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..... Les dragons protestans ont attaqué, sur les six heures du soir, les catholiques...

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Lettre du sieur Froment à M. de Bouzol.

« Les dragons protestans ont attaqué et tué plusieurs de nos catholiques désarmés..... >>

Extrait du procès-verbal de l'assemblée électorale.

« L'assemblée a vu avec indignation que ces hommes privés de » caractère, rejetaient sur les victimes de leur agression. et sur >> celles de leurs complices, le coupable projet d'insurrection dont >> ils sont eux-mêmes les auteurs, et que, d'après un exposé aussi >> infidèle, ils avaient sollicité l'un et l'autre le secours du régiment » de dragons en garnison à Sommières. »

(9) « Les troupes étaient en bataille vis-à-vis les Capucins, lors» que, vers une heure, elles furent assaillies de plusieurs coups » de fusil. Le quatrième témoin, jardinier des Capucins, dé» pose qu'étant dans l'église, il entendit quatre coups de fusil qui » fui paraissaient partis du couvent; qu'il monta dans les corri» dors, et ne découvrit personne. Le quatorzième, que des coups » de fusils furent tirés des fenêtres des Capucins. Le quarante» troisième voit d'une fenètre l'éclat d'une arme à feu dans un >> corridor des Capucins, donnant sur l'esplanade, et en même » temps il entend plusieurs autres coups de fusil qu'il juge partis » de ce corridor. Le soixante-troisième, major de la légion, voit >> faire feu du couvent des Capucins. Le trentième voit à ses côtés >> un sappeur blessé par un coup de fusil qu'on lui dit à l'instant » même avoir été tiré des Capucins. Le quarante-quatrième voit, » de la fenêtre du dernier étage d'une maison, un homme sans >> chapeau dans le clocher des Capucins; il voit aussi un autre » fusil, et ne peut pas apercevoir l'homme qui le tenait. Le quarante-cinquième voit, de la fenêtre d'un second étage, un >> homme armé d'un fusil dans le clocher des Capucins. Le cin» quante-sixième voit deux coups de fusil partant du clocher des » Capucins un officier municipal étranger est tué de l'un de ces » coups de fusil. Enfin, le curé de Boissières, cent-dixième té» moin, dépose que les troupes furent assaillies de plusieurs coups » de fusil, mais que la frayeur qu'il éprouva, et le soleil qui don» nait à plomb, l'empêchèrent d'apercevoir d'où provenait le >> feu. »

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« Je me suis attaché aux détails de ce fait, a continué le rappor»teur, et j'ai cru important de mettre dans tout son jour la preuve »que, du couvent des Capucins on avait tiré sur les troupes, » parce que cet événement est un de ceux que les instigateurs, » soit connus, soit cachés, des troubles de Nîmes, ont présenté » de la manière la plus fausse et la plus perfide, pour échauffer » l'imagination du peuple, et pour rendre vraisemblable par des >> crimes commis dans un premier mouvement de rage, le projet »>insensé du massacre des prêtres et des catholiques qu'ils fer

»gnent d'attribuer aux protestans. » Rapport de M. Alquier, page 56.

Il est fâcheux de voir le premier magistrat d'un département rappeler comme excuse ou explication de forfaits commis presque sous ses yeux, des faits prouvés faux en 1790. « A peine la révolution» dit M. le marquis d'Arbaud-Jouques, dans sa brochure intitulée : Troubles et agitations du département du Gard, « com» mençait-elle la longue série de ses excès et de ses crimes, qu'elle » se signala à Nîmes par un épouvantable massacre de catholiques. >>

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(10) « Dans les campagnes où le peuple était trompé sur la vraie » cause des troubles de la ville, où des insinuations perfides lui annonçaient que la religion catholique était en danger, où il › croyait devoir la venger en versant le sang des protestans, des » forfaits exécrables furent commis avec un sang froid qui glace » d'épouvante..... Plusieurs citoyens qui fuyaient Nîmes, furent » arrêtés, et à chaque fois il fallait, pour sauver leur vie, qu'ils » fissent preuve de catholicité. » Même rapport, p. 65. Faute de cette preuve, des femmes, des vieillards, des enfans furent impitoyablement massacrés.

Je supprime les noms et les faits particuliers, bien que ceux-ci soient malheureusement aussi incontestables qu'horribles, parce qu'encore une fois ce n'est le crime de personne, mais l'innocence des protestans que je veux prouver.

(11) Voyez tout le rapport ci-dessus indiqué, et les pièces imprimées dans le Moniteur de 1791.

(12) Voyez le rapport de M. Alquier, p. 72.

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(13) Je ne eiterai que deux passages de ce mémoire curieux sous tant de rapports, mais sur lequel je me suis fait la loi de n'insister que le moins qu'il me sera possible. « Mon plan, dit l'auteur, p. 4, tendait uniquement à lier un parti et à lui donner autant » qu'il serait en moi de l'extension et de la consistance. Le véritable argument des révolutionnaires étant la force, je sentais » que la véritable réponse était la force alors, comme à présent, j'étais convaincu qu'on ne peut étouffer une forte passion que par une plus forte encore; » et en conséquence l'auteur voulait réveiller le zèle religieux. Ce zèle étant réveillé, veut-on savoir l'usage qu'il en aurait fait? Ecoutons ses propres paroles. « J'ex>posai sans détour les moyens qu'on devait employer pour assurer le triomphe des royalistes du Gevaudan, des Cévennes, etc. » Pendant la chaleur de la discussion, M*** me dit : Mais les opprimés et les parens des victimes ne chercheront-ils pas à se » venger? Eh qu'importe ? lui dis-je, pourvu que nous arri» vions à notre but. — Voyez-vous, s'écria-t-il, comme je lui ai fait » avouer qu'on exercerait des vengeances particulières ! Plus » qu'étonné de cette observation, je dis à M***: Je ne croyais pas » qu'une guerre civile dût ressembler à une mission de capucins. Pag. 34-35.

Certes, après avoir lu ces paroles, et rapproché 1790 de 1815, on doit conclure aujourd'hui comme alors qu'il est faux que les

protestans aient excité les troubles de Nimes; qu'ils ont été en butte à la haine d'un parti, aussitôt qu'un parti s'est formé contre la constitution, et qu'ils sont devenus l'objet d'un vil ramas de calomnies artificieuses, pratiquées contre eux pour exciter des troubles et faire éclater une contre-révolution dans le midi de la France. Rapport de M. Alquier, p. 71.

(14) Voyez Impartial, p. 7.

(15) Voyez l'Impartial, p. 8.

(16) Un royaliste avait placé sur sa porte cette inscription : les Bourbons ou la mort. Elle fut effacée par la police.

(17) Expression de M. le marquis d'Arbaud-Jouques, en parlant des inquiétudes que les protestans éprouvèrent sur la liberté de leur religion en 1814, avant que les intentions royales fussent

connues.

(18) Quand le bien-aimé reviendra.

(19) Café de l'île d'Elbe.

(20) Reproche adressé aux protestans dans les mémoires concernant les troubles du mici, imprimés chez Michaud.

(21) L'auteur de l'Impartial avoue assez naïvement que les ennemis des protestans avaient chanté ces fameuses chansons dont le refrain était, nous laverons nos mains dans le sang des protestans. Pourquoi, dit-il, les protestans ne se contentaient-ils pas de dire qu'ils se laveraient les mains dans le sang des royalistes? » p. 50. (22) Le 13 avril 1814, on reçut à Nimes la nouvelle de la restauration. Le spectacle fut donné gratis. Au milieu des cris de vive le Roi! vivent les Bourbons! la tranquillité fut troublée tout-à-coup par d'autres cris, à bas le maire. (M. de Castelnau, protestant.) (23) Il est à remarquer que les signataires de cette adresse prirent le titre de catholiques de Nimes, comme les rédacteurs de la fameuse adresse du 20 avril 1790. Je ne cite ce fait que pour pronver que les uns et les autres n'ont pas encore renoncé à l'espoir de trouver des ressources dans ce qu'ils appellent le zèle religieux. Voyez la note 13). Certes, si l'on considère l'esprit public de l'immense majorité de la France, et son attachement aux garanties constitutionnelles, et si l'on réfléchit que cette majorité professe le culte catholique, on se convaincra facilement que ce n'est pas comme catholiques que certains hommes veulent ramener des institutions détruites; mais ils se disent catholiques, parce que ce nom leur paraît préférable à celui de partisans de l'arbitraire et d'ennemis de leur pays.

(24) Cette pétition fut déposée chez un notaire nommé Bazile, frère d'un conseiller à la cour royale de Nîmes.

(25) Le drapeau tricolore ne fut arboré à Nîmes que le 3 avril.

FIN DE LA CINQUIÈME PARTIE.

DES OUVRAGES

Publiés sur le Gouvernement représentatif et la Constitution actuelle de la France, formant une espèce de Cours de Politique constitutionnelle;

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CHEZ P. PLANCHER, ÉDITEUR DES ŒUVRES DE VOLTAIRE ET DU MANUEL DES BRAVES, que Poupée, no 7.

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