la liberté de la presse; elle a dans ce moment quatorze mois d'existence, elle n'est point formellement renouvellée, elle n'existe plus. Germain: On nous condamne, parce qu'on déclare que dans des écrits nous avons provoqué le renversement de la constitution; ne commettez-vous pas le même délit, vous qui osez violer la constitution en ressuscitant une loi qu'elle abroge? Blondeau Je suis condamné comme ayant provoqué, par des discours et des écrits imprile renversement de la constitution! Un seul témoin, démenti par quatre autres, et même le mouchard Romain. . . . mes, par Le président Je vous retire la parole. Blondeau : Un seul témoin prouvé menteur et voleur, et fabricateur de faux assignats. Le président : Je vous retire la parole. Blondeau : Des écrits imprimés! mais qu'on m'en montre donc un seul que j'aie écrit, ou si-. gné, qui porte mon nom, ou qu'on puisse m'attribuer! Vous êtes une bande de brigands. Réal parle sur l'application de la loi, et soutient qu'aucun délit résultant de la loi du 27 germinal, n'a été reproché à aucun des accusés. Il termine ainsi son discours. t « Souvenez-vous que le tems approche où le public demandera un compte sévère de votre toute-puissance; pensez aux juges de Grenelle, et si vous n'osez commuer la peine, si vous n'osez prononcer que d'après le vœu de la constitution, la loi du 27 germinal n'existe plus, consultez le corps législatif. La République sera-t-elle en danger, parce que vous aurez retardé pendant vingtquatre heures un meurtre judiciaire? Les misérables qui veulent la mort de ces deux hommes, vous blameront; les sauvages qui voudroient déjà boire dans leurs crânes le sang dont ils ont soif, vous blâmeront; mais tous les hommes justes vous applaudiront. >> Le tribunal s'est retiré pour délibérer. Pendant ce tems, les accusés condamnés à la déportation ont demandé à embrasser les condamnés à mort. Darthé regrettoit de ne point périr seul; Ba. bœuf ne fut ému qu'au moment où il recommanda à tous les patriotes ses trois enfans et sa femme. L'homme qui va mourir, disoit-il, voit mieux que celui qui tient encore à la vie ; dites de notre part aux amis de la patrie qu'ils se pardonnent, se serrent ou qu'ils périront avec la liberté. Je méprise toujours nos ennemis, disoit Darthé; mais je n'ai plus le courage de les haïr. Le tribunal rentre; les accusés se séparent ; le silence règne. Le président prononce Vu l'article de la loi du, etc. le tribunal condamne à la peine de mort Baboeuf et Darthé. A ces mots, Darthé (il avoit une main sous sa chemise entr'ouverte ) s'écrie: vive la Républi̟que! Le sang qui jaillit annonce qu'il vient de se frapper. Les gendarmes se lèvent; il veut se donner un second coup; on le désarme. A côté de lui, Bahœuf, sans rien dire se perçait d'un fort fil d'archal aiguisé, et tomboit mourant. Des cris d'horreur retentissent; les cris aux armes se font entendre; tous les soldats courent à leurs postes ; les femmes effrayées sortent. On enlève Babœuf et Darthé; Darthé revient à lui, il s'étoit mortellement blessé ; le fer est resté dans le corps de Baboeuf; il respiroit encore à huit heures', et ne cessoit de demander à voir sa femme ou son fils. L'homme juste l'est par-tout, et par-tout: que Baboeuf, que Darthé aient commis des crimes, qu'ils aient voulu détruire l'ordre social, et anéantir les lois dans le sang des meilleurs citoyens, leur supplice eût été utile à la société. Mais ce n'est pas sur ce crime qu'ils ont été jugés; c'est pour avoir écrit sur la fórme d'un gouvernement contraire à celui qu'a établi la constitution de 1795! C'est pour avoir usé de la plus belle faculté donnée à l'homme, du pouvoir de communiquer sa pensée ; c'est sur une loi que le tems a abrogée qu'ils ont été envoyés à l'échaffaud! Hommes vraiment vertueux, vraiment phílantropes, couvrez-vous d'un voile funèbre ! Deux hommes, Baboeuf et Darthé, viennent d'être assassinés! Grand Dieu! et il n'existe pas de puissance à qui l'on puisse demander vengeance de ce crime ! སྙ* Dans un tems où les arts réclament plus que jamais les encouragemens et les secours du gouvernement, il est bon de voir une artiste distinguée, Mile. Raucourt, les accueillir avec cè zèle qui n'entre que dans une âme fortement passionnée pour la gloire et la prospérité. du Théâtre. Combien n'a-t-elle pas eu à lutter contre les efforts efforts de ceux qui vouloient faire rentrer l'art dramatique dans le cahos: elle a fait plus ; pour écarter les atteintes des ennemis de son art, elle s'est mise elle-même à la tête de l'établissement de la rue de Louvois; persuadée que dans sa position les conseils donnés à ses confrères ont force de loix. Le Public a vu avec plaisir, théâtre se former sous les auspices de Mlle. Raucourt; il a espéré la renaissance des beaux jours. de la scène Française, et cet espoir, loin d'être trompé, a été au-delà de ce qu'on osoit concevoir. Chaque jour en ajoutant à nos plaisirs, étend encore nos espérances, chaque jour aussi fait connoître un nouveau trait de Mile. Raucourt en faveur de ses confrères et des artistes qu'elle regarde comme ses confrères. En voici un, sur tout, qui prouve sa délicatesse, et dont les amis des arts lui sauront gré. Un littérateur âgé de 38 ans, qui joint auxconnoissances les plus profondes de mathématiques et de toutes les littératures, celles de l'art dramatique, s'est trouvé, comme tous les employés, privé des appointemens qui lui sont dus. Dans cette situation cruelle, son ame répugnant à toute idée de bassesse et d'intrigue, il a essayé," pour en sortir, de faire parvenir à mademoiselle Raucourt une comédie en trois actes, faite depuis long-tems informée de sa détresse, mademoiTome VI. F |