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Où fans votre bonté fuprême

Mes ans alloient finir & voir trancher leur fil.

O que mon cœur fe fent heureux
Quand au miroir je vois les creux
Et les marques de ma vérole!
Je les prens pour facrés témoins,
Suivant votre fainte parole,

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Que je ne fuis de ceux que vous aimez le

moins.

Je les prens, dis-je, ô Souverain,
Pour un cachet dont votre main
Voulut marquer mon innocence:
Et cette confolation

Me fait avoir la connoiffance

Qu'il ne faut s'affliger de cette affliction.

Mais, grand Dieu ! mon travail est vain : Il faut un efprit plus qu'humain

Pour bien raconter vos merveilles :
Et ce grand excès de bonté

Charmant les yeux & les oreilles,
Excede mon pouvoir & non ma volonté.

Dans les Mémoires de Mademoiselle Perrier, on trouve ramaffées 23 autres piéces de Vers de cette Demoiselle étant jeune.

NS

Pour le Liv. VII. nomb. yil.

II. PIECE JUSTIFICATIVE.

Entretien de la Sœur Marie-Gabrielle Hove avec M. Chamillard.

Q

Du 20 Janvier 1665.

,

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Uand je fus hier à M. Chamillard, il me dit: Oh fus ma bonne fille n'êtesvous pas ma fœur Marie-Gabrielle ? Il y a long-tems que j'ai envie de vous parler; mais parce que vous m'avez écrit que vous me priez de ne vous plus demander, je ne l'ai pas voulu faire, quoique j'aie toujours beaucoup de charité pour vous, ma bonne fille, je vous en affûre, & j'ai auffi bien de l'efpérance que vous nous ferez voir des effets de la docilité d'efprit que j'ai reconnue en vous. C'eft pourquoi j'ai cru que la charité m'obligeoit de vous avertir de l'état où font les choses. Vous vous étiez imaginée que le Pape feroit pour vous, qu'il n'approuveroit pas la conduite que M. l'Archevêque a tenue fur vous & qu'il vous délivreroit, & c'est tout le contraire: car ce n'eft plus à M. l'Archevêque que vous avez faire, c'eft au Pape-même qui entreprend d'achever ce que M. l'Archevêque n'a fait que commencer. Car il envoie une Bulle, & un Formulaire au bas qu'il a fait lui-même, & qu'il veut qu'on figne. Ce n'eft plus le Formulaire de l'Affemblée dont il eft question c'est celui du Pape. Quoiqu'il ne foit pas encore venu, je fçais néanmoins ce qu'il contient; je m'en vas vous le dire: Je me foumets aux Conftitutions d'Innocent X. & d'Alexandre VII. qui ont condamné les V Propofitions

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tirées du Livre de Janfenius, & je condamne lefdites Propofitions dans le fens de cet Auteur. Eh bien, ma bonne fille, voilà ce que le Pape vous commande de foufcrire. Madame de Champigny m'a dit que vous lui aviez dit que quand le Pape auroit commandé de figner, vous le feriez.

Monfieur, ai-je dit, je n'y ai jamais pensé. Mais, ç'a-t'il dit, il ne faut pas laiffer que de le faire; car il y va d'être chaffée de l'Eglife, privée non feulement des Sacremens comme vous l'êtes déja, mais de toute participation aux chofes faintes, de l'office divin, de toute affiftance fpirituelle,& même de fépulture après la mort, & ce qui eft bien plus, être damnée éternellement.

Ce font de grandes peines, M. pour bien peu de fujet;c'eft pourquoi je ne le faurois croire;car je penfe qu'il n'y a que le péché qui nous puisse féparer de Dieu, felon ce que dit S. Paul: Quis nos feparabit à charitate Dei? An perfecutio? An gladius? Certus fum quia neque mors, neque vita, neque angeli &c. Cela eft-il vrai, Monfieur ?

Oui, il est vrai, mais c'est auffi vous-même qui vous féparez de J. C. en defobéiffant au Pape, & en faifant fchifme dans l'Eglife. Dieu nous en garde d'être fchifmatiques. Vous l'êtes en refufant de figner ce que le Pape ordonne; car c'eft vous séparer du corps de J. C. que de vous féparer de fon chef vifible, qui eft le Pape.

Monfieur, je ne m'en féparerai jamais ; j'obéirai au Pape en tout ce qui ne fera point contre les Commandemens de Dieu. Il faut voir ce que porte fon Ordonnance, & fi toute I'Eglife la recevra ; & je pous promets que

quand toute l'Eglife univerfelle aura figné, & que je ferai affurée qu'il n'y aura point de pé ché à le faire, je le ferai.

On ne manquera pas de vous fignifier l'Ordonnance du Pape, & vous la verrez : mais après cela vous ne laifferez pas d'être toujours excommuniées en attendant, par le refus-même que vous ferez de figner; car l'Ordonnance porte ipfo facto.

Monfieur, Notre-Seigneur dit dans l'Evangile que celui qui croit au Fils de Dieu, n'eft point jugé; mais que celui qui n'y croit pas, eft déja jugé par cela même qu'il n'a pas cru au Fils unique de Dieu. Vous en dites de même du Fait de Janfénius; car il ne s'agit que de cela; puifque pour ce qui eft de la foi on nous a rendu témoignage que nous y avions entiérement fatisfait. Vous égalez donc l'homme à Dieu & vous voulez qu'on rende le même hommage à la parole de l'homme, qu'à

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celle de Dieu.

Le fait de Janfénius eft joint à la foi; c'est pourquoi fi vous ne le condamnez, votre foi eft fufpecte. Ce n'eft pas à la parole de l'homme que vous vous foumettez, c'est à celle de Dieu;

car

c'eft par l'Ecriture fainte que le Pape a découvert les héréfies de Janfénius; ainfi vous êtes obligées de les condamner puifqu'il vous l'ordonne; comme vous êtes obligées de le croire quand il vous annonce les vérités de l'Evangile; & en l'un & en l'autre, c'est à Dieu que Vous croyez, & à qui vous obéissez en croyant & obéiffant à fon Vicaire.

Mais, Monfieur, Dieu me défend de mentir, de jurer en vain & de porter faux témoignage.

C'eft au Pape à vous expliquer les Commandemens de Dieu, & vous vous y devez fou

mettre.

Pourquoi donc, Monfieur, S. Paul a-t'il dit: Quand nous-mêmes ou un Ange du Ciel vous annonceroit autre chose que ce que vous avez appris de l'Evangile, tenez-le pour anathême ; & tant d'autres paffages par lefquels il nous avertit de nous donner de garde des féducteurs, parce qu'il viendra même des Pasteurs qui n'épargneront point le troupeau? Nos ames ont-elles fi peu coûté au Fils de Dieu qu'il les faille expofer à la mort du péché fur la parole d'un homme ? S'il y a du péché, comme je le crois, dans cette fignature, Notre-Seigneur ne me reprochera-t'il pas à fon Jugement les avertiffemens qu'il nous a donnés dans l'Evangile, que plufieurs viendront en fon nom difant, Je fuis le Chrift & qu'ils en féduiront plufieurs.

Vous parlez en fille, c'est-à-dire, que vous ne fçavez ce que vous dites; car toute la science des filles, quelque efprit qu'elles aient, n'eft que vanité, parce qu'elles ignorent les principes des choses.

Pardonnez-moi, Monfieur, je fçais bien ce que je veux dire; c'eft que je crains d'offenler Dieu en atteftant un Fait contesté dont je n'ai aucune connoiffance par moi-même. Je crois que c'eft mentir que d'en faire une profeffion de foi ne le croyant point.

Mais vous le devez croire puifque le Pape l'a dit.

Monfieur, cela n'eft pas fuffifant pour m'en rendre perfuadée.

Vous ferez donc excommuniée ipfo facto on vous privera même de l'office divin;

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