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gée dans les grandes toux aufquelles elle étoit fujette, on voulut encore effayer de ce même reméde. Mais il eut un effet bien différent de celui qu'il avoit eu par le paffé. La fluxion se fixa tout-à-fait fur la poitrine, & l'oppreffion s'enfuivit, qui ne tarda guére à amener le râle. Elle étoit âgée de 77. ans. Elle avoit été Religieufe 70. ans, Supérieure & Directrice 62. Dieu avoit manifefté dès avant fa mort, combien les priéres de fa fervante lui étoient agréables, par la guérifon miraculeufe de la Sœur Cécile de fainte-Sufanne Champagne, qui fuivit une Neuvaine que la Mere Agnès avoit faite pour elle l'Hiftoire en eft rapportée plus haut.

On a d'elle plufieurs Ecrits qui prouvent la folidité de fon efprit & fon intelligence dans les chofes de Dieu. Les piéces les plus confidérables font 1°. Les Avis dictés aux Religieufes au commencement de la perfécution, pour leur marquer les différentes conduites qu'il falloit tenir dans les conjonctures différentes. Voici le jugement que M. Arnauld en porta dans le tems: » Je vous renvoie l'écrit de » la Mere Agnès ; je l'ai lu exactement; & je Vous avoue que je n'ai jamais rien vu ni de plus édifiant ni de plus folide, pourvu qu'on » en retranche ce que j'ai marqué avec du Liv. VII. crayon. On en trouvera l'extrait à l'endroit nomb. XXIV. cité de cette Hiftoire, 2. Le livre qui a pour titre, l'Image de la Religieufe parfaite & de la Religieufe imparfaite ouvrage généralement eftimé,& qui dans le tems même de la perfécu tion fut excepté par M. de Péréfixe des livres qu'il avoit profcrits, & dont il interdifoit la lecture aux Religieufes captives. Cet ouvrage eft imprimé in douze 3. Le livre des Conftis ? I

Lutions de P. R. qui a eu tant d'éditions, & qui eft fi goûté du public; il fut composé par la Mere Agnès en 1647. Le réglement des enfans qui s'y trouve joint, eft de la Sœur fainteEuphémie Pafcal.

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Je ne puis paffer fous filence une chofe trèsremarquable, qui regarde la maniére fingu liére dont la Mere Agnès écrivoit de petits difcours de piété qu'on lui ordonnoit de mettre fur le papier. C'eft elle-même qui en rend compte. Toute autre qu'elle qu'on entendroit、 ainfi parler, feroit traitée de vifionnnaire : mais M. le Maître fon neveu qui n'étoit point affurément petit efprit,& qui favoit bien juger de toutes chofes rend témoignage dans le récit qu'il fait de ce que lui a dit fa tante, qu'elle lui parla avec une fincérité & une humilité admirable. Vingt ans auparavant elle en avoit dit autant au Pere Condren de l'Oratoire fon Confeffeur. Voici comment elle parle à M. le Maître. Je rougis quand on 5 m'ordonne de mettre fur le papier les penfees » qui me viennent dans l'efprit, mais je ine confole quand on les corrige; parce qu'alors je m'imagine qu'on n'y laiffe que ce qui eft bon & qui ne vient point de moi. Car je fuis affurée qu'il ne vient point de moi, ne fongeant jamais à ce que j'écris avant que de l'écfife, & ne donnant aucune peine à mon "efprit en l'écrivant. Je me mets devant Dieu; je le prie de me donner ce qu'il veut que je donne; & après cette priére courte ou longue, je prens la plume. J'écris ce qui fe préfente à moi fans étude, fans méditation, fans penfer à l'arrangement des mots. Auflitôt que j'ai achevé d'écrire, j'oublie ce que j'ai écrit, n'ayant fait que paffer par mon efprit

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Mort de la

» fans y arrêter. Et fi je me fouviens de quel »que chofe, c'eft un figne qu'elle n'eft pas de » Ďieu, mais de moi: & j'ai remarqué que » c'eft d'ordinaire ce qui ne vaut rien & mérite » d'être retranché. » Le Lecteur penfera ce qu'il jugera à propos de tout ceci : j'ai cru ne devoir pas le lui laiffer ignorer.

Je crois devoir compter parmi les morts de XV. P. R. une grande Princeffe, dont les entrailPrincefle de les y ont été enterrées, & qui a eu pendant fa Conti. Son vie une grande liaifon d'eftime avec Mrs de mariage & fa P. R. en ayant eu même un d'entre eux (M. Sonverfion. Lancelot) pour Précepteur des Princes fes en

fans. C'eft la Princeffe de Conti morte en 1672, époufe du Prince de ce nom fi renommé par fa pénitence & par fa piété, belle-four de Madame la Princeffe de Longueville, & niéce du Cardinal Mazarin. Anne-Marie Martinozzy étoit fille d'une fœur de ce Cardinal. Elle vint en France avec fa mere en 1653. à peu près. Le Prince de Conti qui s'étoit brouille avec la Cour dans les guerres de Paris, défirant rentrer en grace, penfa à époufer cette Demoiselle, pour mettre le Cardinal Mazarin dans fes intérêts. Il avoit déja gracieufé cette Eminence, en lui réfignant tous fes Bénéfices, qui étoient confidérables & en assez bon nombre, l'Abbaye de faint Denis & quatre ou cinq autres des plus confidérables du Royaume. Car il avoit été engagé tout jeune dans l'Etat Eccléfiaftique : il avoit même foutenu une Thè fe de Théologie avec un grand éclat fous la préfidence du Pere Defchamps Jésuite, dans Jaquelle il avoit défendu la doctrine de Molina. Mais il ne demeura pas longtems Eccléfiaftique: il prit le parti des armes, comme plus conforme à l'amour qu'il avoit pour la vie des

paffions. Il fit donc demander au Cardinal fa niéce en mariage. Le Cardinal flatté d'une telle alliance, y donna les mains bien volontiers. Le Mariage fe fit en 1654. La Demoiselle cut pour dot deux cent mille écus du Cardinal, cinquante mille du Roi, outre de groffes penfions qui furent données au Prince fur tous les bénéfices dont il avoit fait démission.

M. le Prince ayant été touché de Dieu en 1655. lorfqu'il alla préfider aux Etat de Languedoc, s'étoit mis entre les mains de M. l'Evêque d'Alet, qu'il trouva à Pézenas, pour travailler fous fa conduite à fa converfion. 11 voulut auffi amener tout doucement fon époufe au parti de la piété. Dans ce deffein il pria le faint Prélat de prendre l'appartement de la Princeffe pour les rendez-vous qu'il vouloit bien lui donner à lui-même. Ainfi la Princeffe fe trouvoit préfente comme par hazard aux inftructions touchantes de ce faint homme. Le Prélat s'apperçut que la Princefle n'y prenoit pas goût. Eh! comment y auroit-elle pris goût ? Elle avoit caché jufque-là fous un dehors de modeftie affectée une ambition déméfurée. Son ambition parvenue à la plus haute élévation par fon mariage avec un Prince du SangRoyal, ne fatisfaifant point fon cœur, & la Religion ne venant pas au fecours pour remplir ce vuide défefpérant, que toutes les grandeurs & les plaifirs du fiécle laifoient dans fon ame, dans cet état d'inquiétude,, infuportable à elle même, elle effaya pour s'en délivrer, d'éteindre, fi elle le pouvoit, les reftes d'une foi languiffante, Mais elle n'y réuffit pas. Elle fe réduifit à attendre avec une malheureufe intrépidité l'heure fatalequi devoit faire évanouir toutes ces grandeurs, & décider de ce

qu'elle deviendroit pour l'autre vie. Une groffe maladie qui furvint & qui la conduifit à l'extrémité, ne changea rien dans fon cœur.

Cependant le faint Evêque qui voyoit le cœur de la Princeffe fermé à ce qu'il difoit en fa préfence à fon Epoux, confeilla à celui-ci de fe contenter pour le préfent d'édifier fon épou fe par fes exemples, de faire fes exercices de piété en fa préfence, & de beaucoup prier pour elle. Le moyen réuffit d'une manière qui tient de la merveille. Tout d'un coup & fans favoir comment cela fe fit, elle fe fentit toute chan gée'; fit appeller le Prince de Conti, & lui dit comme une bonne nouvelle : Je crois

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Monfieur, que Dieu m'a convertie : je vous 5 prie de in'envoyer M. l'Abbé de Ciron; c'é toit le Confeffeur du Prince. Elle commença donc à imiter la régularité de fon mari, & devint une excellente chrétienne; enforte qu'en 1661. M. le Prince étant Gouverneur de Languedoc, & voulant faire une retraite à Alet fur la fin du Carême, la Princeffe fe mit de la partie. M. le Prince logea à l'Evêché avec fon monde, & la Princeffe demeura dans la Communauté des Filles Regentes, parce que jamais les femmes ne logeoient dans la maison Epifcopale. Elle s'y rendoit tous les jours pour quelques exercices qui lui étoient communs avec fon époux, & elle pratiquoit les fiens en particulier dans la maifon de ces bonnes filles. A l'Eglife elle fe mettoit dans la Nef du côté des femmes car elle n'entroit pas dans le Chœur. Ce fut pendant cette retraite que M. d'Alet Sa foumif- entra en matière avec leurs Alteffes fur les granfion à la con- des reftitutions qu'il leur falloit faire, tant pour l'abus que le Prince avoit fait des biens Eccleßaftiques, que pour des dommages enci

XVI.

duite de M.

d'Alet.

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