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il nous dit quelles font les prérogatives de ces deux charges; la féance folennelle tenue dans la femaine de Pâques par les trois Académies nous procure un réfumé de leur hiftoire & de leurs règlemens qui a fon prix; les vifites du Czar aux Gobelins & à la Monnoie font le prétexte de digreffions intéreffantes fur les débuts & les procédés de ces deux établissemens. Il est affez fingulier, en revanche, qu'il n'ait pas fongé à retracer l'hiftorique de l'Académie royale de peinture & fculpture, à propos des membres nouvellement élus ou décédés, & bien regrettable qu'il n'ait pas eu l'occafion de nous parler du plus grand artiste de fon tems fur qui, même après Gerfaint, Mariette & Caylus, il auroit pu nous apprendre quelque chofe de nouveau: mais quoi! Watteau fut reçu académicien le 30 août 1717 & l'Hif toire journalière s'arrête au mois de mai. Nous aurions fouhaité auffi quelques détails fur les bibliothèques publiques ou privées; Dubois eft, à cet égard, moins complet que l'édition de Germain Brice donnée à la même époque, & s'il décrit avec foin les Médailles fur les principaux événemens du règne de Louis le Grand, c'eft que ce beau livre étoit alors l'œuvre

capitale de l'Académie des infcriptions dont

il rappeloit l'histoire.

Malgré des lacunes que les livraisons fucceffives euffent fans doute fait difparoître, l'Hiftoire journalière répondoit trop bien aux promeffes de fon auteur pour ne pas exciter des jaloufies qui lui furent fatales. Son privilège dûment concédé & enregistré ne le protégea pas contre les réclamations du Mercure & du Journal des favants. Il reçut l'ordre d'en refter là ", difent les continuateurs de Moreri. J'ai vainement demandé la trace de cette fuppreffion aux papiers du fyndicat de la librairie confervés à la Bibliothèque nationale dans le fonds Aniffon-Duperron, & les registres de la Maifon du Roi, à qui l'affaire dut être tranfmife, offrent précisément alors une lacune de dix années (de 1707 à 1717) qu'aucun autre document officiel ne fauroit fuppléer. Il faut donc conftater cette disparition fans fe flatter d'en connoître jamais les véritables motifs.

C'eft feulement huit ans plus tard que fe renoue le fil, fi fouvent brifé, de la biographie de Dubois. « Le 25 janvier 1725, difent les Procès-verbaux de l'Académie royale de peinture

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& de fculpture (1), M. Dubois de Saint-Gelais s'eft présenté, défirant avoir l'honneur d'entrer dans la compagnie en qualité d'hiftoriographe pour écrire la vie des habiles peintres & fculpteurs", &, afin de montrer qu'il étoit digne de cette tâche, il donne tout auffitôt lecture des notices fur La Foffe, Jouvenet & Bon Boullongne jadis inférées dans l'Hiftoire journalière; l'Académie, conftatant fon mérite, l'a reçu en qualité d'hiftoriographe, afin de laiffer à la postérité des marques des habiles gens qui ont compofé cette illustre compagnie (2)». Le 3 février, Dubois emprunte en

(1) Publiés par M. Anatole de Montaiglon pour la Société de l'histoire de l'art françois. Six volumes fur neuf ont actuellement paru. Toute l'hiftoire de l'Académie eft condenfée dans ces procès-verbaux dont la communication a été fi longtems refusée aux travailleurs, & c'est grâce à leur mife au jour que plus d'un érudit fe fait gloire aujourd'hui d'une recherche fort fimple, mais dont il conviendroit au moins de toujours indiquer la fource.

(2) A diverses reprises, dans le cours du dix-huitième fiècle, l'Académie royale manifefta la velléité de raffembler & d'imprimer les éloges des membres défunts & même d'y joindre les portraits dont la chalcographie du Louvre poffède actuellement la plupart des planches; en 1752 parurent les Vies des premiers peintres du Roi par lefquelles elle entendoit inaugurer une longue férie, puifque

core à l'Hiftoire journalière les vies de Benoît, Flamen & Colombel, & il prend la plume au lieu du fecrétaire incommodé (François Taver

les titres courans portoient Hiftoire des peintres. Mais ces cinq Vies, dues à Desportes, Caylus, Ch. Coypel & Watelet, n'étoient qu'une foible partie de fes richeffes. Les Mémoires inédits, édités en 1854 par MM. L. Duffieux, Ph. de Chennevières, A. de Montaiglon, Paul Mantz & Eud. Soulié, n'ont rien omis de ce qui pouvoit être extrait des archives de l'Académie telles que M. Mérimée père, fecrétaire de l'École des Beaux-Arts de 1807 à 1836, les avoit retrouvées, fauvées & reconftituées. Ils comportent principalement les éloges rédigés par Guillet de Saint-Georges, Lépicié & quelques honoraires amateurs comme Caylus, Watelet, le chevalier de Valory. Que font donc devenus ceux de Dubois dont les Procèsverbaux enregiftrent périodiquement la lecture? Tout en conftatant que la majeure partie femble irrévocablement perdue, il faut, je crois, établir une diftinction entre les Vies écrites par Dubois lui-même fur les mémoires " (c'eft-à-dire les notes) de l'Académie, circonstance qu'il n'oublie jamais de mentionner, - & celles de fes prédéceffeurs auxquelles il fe contentoit de faire fubir de légères retouches. Quoi qu'il en foit, les pertes font encore plus nombreuses que ce qui a été recouvré; j'ai donc pris le parti de renvoyer en note aux Mémoires inédits pour celles de ces notices qui nous font connues; fouhaitons qu'une trouvaille inespérée vienne combler un jour les vides accufés par les procès-verbaux de quel intérêt ne feroit pas pour nous, par exemple, la vie des frères Le Nain écrite par un contemporain?

nier) fans que cela puiffe tirer à conféquence

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pour l'avenir". Le 7 avril, il lit un projet d'histoire de l'Académie; le 5 mai, la vie de Thibaut Poiffant (1) & une defcription du grand portrait de Louis XIV, peint par Henri Testelin (2); le 2 juin, l'Académie, après avoir entendu un projet de l'histoire de fon propre établissement par Tavernier, reconnoît l'exactitude des faits & invite Dubois à s'y conformer dans l'histoire qu'il doit écrire. Bien qu'il n'entre officiellement en fonctions que le 28 feptembre (Tavernier étoit mort le 10 du même mois), il avoit donné lecture, le 4 avril précédent, d'une vie de Ph. de Champaigne,

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compofée fur les mémoires que l'Académie lui a fournis ", puis viennent celles de Corneille le père, Van Obstal, Bourdon (3) d'Egmont (7 décembre 1725); de Boullongne

(1) Par Guillet de Saint-Georges (16 juin 1691), Mémoires inédits, I, 318.

(2) Ce difcours anonyme, claffé par Guillet avec les mémoires fur Guillain & Thibaut Poiffant, eft reproduit dans les Mémoires inédits, I, 229.

(3) Ces deux Vies par Guillet, retouchées au dix-huitième siècle par Caylus, font reproduites dans les Mémoires inédits, tome I, p. 87 & 174.

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