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No 165

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 29 mai 1866.

L'Empereur a reçu avec satisfaction les assurances que je lui ai données en votre nom.

Il me dit que si le Congrès devait avoir un résultat, ce résultat serait la cession de la Vénétie, et que son intention était bien arrêtée là-dessus.

Il est très-probable, mais pas encore certain, que les ministres des affaires étrangères des puissances assistent à la Conférence.

Signé : NIGRA.

No 166

LE COMTE DE BARRAL AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Berlin, le 29 mai 1866.

Si les puissances en font la demande officielle, Mensdorff et Bismarck iront au Congrès. Seulement Bismarck exprimera le désir que la Conférence ne soit pas de longue durée, et que pour la commencer on n'attende pas le plénipotentiaire de la Confédération-Germanique, dont l'arrivée souffrira certainement un retard.

En me donnant ces informations, il m'a paru extrêmement soucieux, et a fini par me dire avec un accent de profond mécontentement : L'Empereur des Français veut maintenant la paix à tout prix.

Cette confidence jointe au langage de l'ambassadeur de France jusqu'ici aussi belliqueux, indique que depuis quelques jours il s'est fait à Paris un revirement dans le sens pacifique.

Signé BARRAL.

N° 167

LE COMTE DE BARRAL AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Berlin, le 30 mai 1866.

Bismarck a accepté l'invitation officielle faite hier par l'ambassadeur de France de se rendre au Congrès, en exprimant le désir que la durée sera courte. Il n'est plus douteux que tous les différents ministres d'État se rendront à Paris.

Signé BARRAL.

N° 168

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 31 mai 1866.

L'époque de la réunion de la Conférence dépend de l'arrivée du prince Gortschakoff qui est le plus éloigné. On pense qu'on pourra se réunir du 8 au 10.

Nous pouvons nous attendre à bien des désagréments dans les Conférences, mais vous pouvez être sùr que si le Congrès a un résultat, ce doit être la cession de la Vénétie.....

Signé: NIGRA.

N° 169

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 31 mai 1866.

Il n'est pas impossible que l'Empereur ouvre en personne la Conférence et prononce un discours que lui seul aura fait.

Bismarck parait finalement décidé à accorder à la France le terri

toire compris entre la Moselle et le Rhin, en échange d'une coopération armée de la part de la France. J'ai appris cela d'une façon confidentielle mais sûre.

Je vous dirai cela lorsque vous serez ici. Cette combinaison serait la plus utile pour nous, parce que la victoire serait certaine, la guerre de courte durée, et l'intervention française aurait lieu en Allemagne et non en Italie. L'amour-propre de notre armée, je dirai même celui du pays, serait sauvé.

Mais cette combinaison est soumise à l'issue du Congrès.

L'Empereur préfère décidément une solution pacifique; il me l'a dit très-explicitement hier soir; mais il a ajouté que, pacifiquement ou par les armes, il était certain que nous obtiendrions la cession de la Vénétie.....

La situation se présente ainsi bien définie à mes yeux et peut se formuler:

Ou une solution pacifique impliquant la cession de la Vénétie;
Ou une triple alliance.

Cette seconde alternative n'est pas encore certaine, mais elle paraît probable.

Ayez donc bon courage et dites au Roi que notre position, soit diplomatique, soit militaire, est bonne.

L'important est que pendant la Conférence il ne se présente pas d'actes d'hostilité ou des désordres intérieurs. Je vous conjure d'y veiller, parce que l'on croit ici, à tort, que les volontaires attaqueront. Malgré mes assurances bien positives, cette croyance existe toujours.

Signé NIGRA.

N° 170

LE COMTE DE BARRAL AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Berlin, le 31 mai 1866.

Le gouvernement prussien était certainement de connivence avec le départ et l'acceptation de la couronne du prince de Hohenzollern; mais maintenant qu'il espère qu'à l'aide des vœux des populations et du fait accompli, le Prince pourra peut-être se maintenir, il manoeuvrera de

manière à ne pas heurter la politique de la Russie, qu'il a le plus grand intérêt à ménager.

Le prochain Congrès des différents ministres des affaires étrangères à Paris a donné une nuance moins belliqueuse à la situation.

No 171

Signé BARRAL.

LE GÉNÉRAL DE LA MARMORA AUX MINISTRES DU ROI A LONDRES, PARIS ET SAINT-PÉTERSBOURG

Florence, le 1er juin 1866.

Monsieur le Ministre, les représentants de la Grande-Bretagne, de la France et de la Russie auprès du gouvernement du Roi sont venus aujourd'hui me remettre des notes identiques, au nom de leurs gouvernements respectifs, pour inviter l'Italie à prendre part à des délibérations qui auraient lieu à Paris à l'effet de résoudre, par la voie diplomatique, les trois principales questions qui menacent d'une guerre prochaine l'Italie et l'Allemagne.

Le gouvernement du Roi adhère à cette proposition avec l'empressement que réclame l'urgence des complications actuelles. Il apporte d'autant plus volontiers son concours à la noble entreprise des trois grandes puissances neutres, qu'il est loin de craindre, pour les intérêts qui le concernent le plus directement, l'épreuve d'un débat solennel.

C'est un devoir, selon nous, pour les gouvernements engagés dans le conflit, de ne point éluder les difficultés qui l'ont provoqué; l'efficacité de l'œuvre de la Conférence est à ce prix. Pour notre part, la netteté de notre situation vis-à-vis de l'Autriche nous rend ce devoir facile à remplir.

Le double objet du différend existant entre la Prusse et l'Autriche a été précisé dans les notes que les ministres des trois puissances ont bien voulu me remettre; à défaut de bases de solution reconnues d'un commun accord, c'est là du moins un point de départ qui permettra à la Conférence de donner dès l'abord une direction utile à ses discussions. Le gouvernement du Roi désire pouvoir contribuer à ce que la réunion des plénipotentiaires des puissances ait des conséquences favorables aux intérêts de l'Allemagne.

Quant au différend qui divise depuis longtemps l'Autriche et l'Italie, il semble qu'il n'ait pas même été jugé nécessaire d'en déterminer l'objet.

Sous quelque point de vue qu'on le considère, il est impossible de méconnaître ce fait, que la domination de l'Autriche sur des provinces italiennes crée entre l'Autriche et l'Italie un antagonisme qui touche aux bases mêmes de l'existence des deux États. Cette situation, après avoir constitué, pendant de longues années, un danger permanent pour la paix générale, vient d'aboutir à une crise décisive.

L'Italie a dû s'armer pour assurer son indépendance; elle est persuadée d'autre part que la réunion convoquée à Paris aidera à la solution déjà jugée indispensable, il n'est pas téméraire de le dire, dans la conscience de l'Europe.

Je vous prie, monsieur le Ministre, de donner sans retard communication du contenu de la présente dépêche à S. Exc. M. le ministre des affaires étrangères.

Agréez, etc.

No 172

Signé LA MARMORA.

LE COMTE DE MENSDORFF AU PRINCE DE METTERNICH, A PARIS

Vienne, le 1er juin 1866.

Monsieur l'Ambassadeur, vous trouverez dans l'annexe copie de la dépêche qui m'a été communiquée le 29 mai par M. le comte de Mosbourg, et qui transmet au gouvernement impérial l'invitation de prendre part à des délibérations communes qu'il s'agirait d'ouvrir prochainement à Paris. Une invitation semblable nous a été adressée en même temps et en des termes presque identiques par les cours de Londres et de Saint-Pétersbourg.

Les trois cabinets nous informent que ces délibérations auraient pour objet de résoudre, dans l'intérêt de la paix, par la voie diplomatique, la question des duchés de l'Elbe, celle du différend italien, enfin celle des réformes à apporter au pacte fédéral allemand en tant qu'elles pourraient intéresser l'équilibre européen.

Nous nous plaisons à rendre hommage au sentiment qui a dicté la démarche des trois puissances. L'Autriche surtout est trop sensible

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