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No 219

LE COMTE DE BARRAL AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Berlin, le 12 juin 1866.

Je viens à l'instant de rencontrer le ministre d'Autriche, qui m'a abordé, et, en m'annonçant son départ, m'a dit : Nous ne serons pas toujours ennemis, et, si comme je l'espère nous battons la Prusse, je puis vous confier que nous nous arrangerons avec vous pour la cession de la Vénétie.

Signé BARRAL.

N° 220

LE COMTE DE BARRAL AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Florence, le 12 juin 1866.

Bismarck m'a dit qu'il ne doute pas que, dans la séance d'aprèsdemain à Francfort, la majorité de la Diète se prononcera pour la mobilisation de l'armée fédérale, et que, comme cette mobilisation ne peut être dirigée que contre la Prusse, l'intention du gouvernement prussien est de protester en adressant en même temps une sommation de démobilisation.

Dans l'opinion de Bismarck, la Diètè répondra par un refus formel, et alors les hostilités pourraient bien commencer lundi prochain, soit que l'Autriche, se prévalant du vote de la Diète, ne trouve plus d'inconvénient à attaquer la première, soit que la Prusse juge de son intérêt de prendre l'initiative.

C'est par la Saxe, peut-être, et simultanément par le Hanovre, que commenceront les premières opérations de la Prusse.

Signé: BIRRAL.

No 221

LE GÉNÉRAL DE LA MARMORA AU CHEVALIER NIGRA A PARIS

Paris, le 12 juin 1866.

Il est important que l'Empereur sache aussi que Bismarck a plusieurs fois proposé à Barral et à Govone d'attaquer nous l'Autriche. Vous nous rendriez un grand service, disait-il.

Signé: LA MARmora.

N° 222

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Florence, le 12 juin 1866.

J'ai vu l'Empereur; je lui ai répété ce qu'il avait déjà appris, que Bismarck nous pousse à attaquer les premiers, promettant de nous suivre, et lui ai demandé si dans certains cas il ne convient pas que nous prenions l'initiative.

L'Empereur m'a dit que nous ne devons pas prendre l'initiative, et donné nouvelle du rappel de l'ambassadeur d'Autriche à Berlin.

Lui ayant demandé la réponse du duc de Gramont, il m'a dit que l'Autriche avait assuré qu'en tout cas elle respecterait le statu quo ante

bellum.

Signé NIGRA.

No 223

LE GÉNÉRAL DE LA MARMORA AU CHEVALIER NIGRA, A PARIS

Florence, le 12 juin 1866.

Malaret vient de me communiquer un télégramme de Drouyn de

Lhuys, et le Roi en reçoit un du prince Napoléon.

Il s'agit d'une dépêche de Gramont, qui assure que la reine de Prusse, écrivant à l'empereur d'Autriche, l'aurait assuré que le roi de Prusse lui avait donné sa parole qu'il n'existait pas de véritable traité entre la Prusse et l'Italie, et que si l'Italie attaquait l'Autriche la Prusse n'était pas tenue de la suivre.

Ce sera le cas de poser carrément la question à Bismarck.

Mais comme celui-ci pourrait nous répondre qu'il y a eu, entre nous et l'Autriche, des propositions pour la cession de la Vénétie (5 et 6 mai), je désire savoir si l'Empereur admet que nous puissions riposter, que l'Autriche nous fit réellement proposition de nous céder la Vénétie si nous restions neutres, mais que nous avons refusé pour rester fidèles au traité.

Signé: LA MARMORA.

N 224

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 12 juin 1866.

Votre dernier télégramme m'arrive après l'audience de l'Empereur. Il n'est pas nécessaire de demander à l'Empereur ce que nous aurions à répondre à Bismarck s'il nous accuse de négocier avec l'Autriche.

Veuillez vous rappeler que l'Autriche ne nous a fait aucune proposition, et que nous n'avons pas eu à lui répondre.

Les propositions autrichiennes ont été faites à la France. L'Autriche n'a jamais voulu traiter avec nous.

Signé NIGRA.

N 225

LE CHEVALIER NIGRA AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Paris, le 12 juin 1866

Aujourd'hui j'ai vu l'Empereur à deux heures. Le but de la visite

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ARCH. DIPL. 1873. -IV.

était de répondre aux télégrammes que Votre Excellence m'a expédiés dans les deux derniers jours, et par lesquels Elle me demandait la manière de voir de l'Empereur.

Voici ce que j'ai recueilli soit de la bouche de l'Empereur, soit par d'autres moyens :

Quand l'Autriche a envoyé la réponse à l'invitation au Congrès, elle l'a accompagnée d'instructions dont je vous ai envoyé la teneur par une dépêche d'office. Dans ces instructions, l'Autriche laissait entrevoir la possibilité de la cession de la Vénétie, quand elle aurait fait des conquêtes sûres et équivalentes en Allemagne.

L'Empereur a pris occasion de cette phrase pour faire quelques propositions à l'Autriche, et il en a chargé le duc de Gramont, qui se trouvait en congé à Paris et qui est parti d'ici pour Vienne ces jours passés. Votre Excellence se rappellera qu'il y a sept semaines ou à peu près l'Autriche avait proposé de céder la Vénétie à la France, quand elle se serait emparé de....., à condition que l'empereur Napoléon garantit la neutralité de la France et de l'Italie.

L'empereur Napoléon n'a pas accepté la proposition, parce qu'alors il ne pouvait garantir la neutralité de l'Italie.

Par contre, aujourd'hui, reprenant lui-même pour son compte la proposition autrichienne, il a chargé Gramont de demander à Vienne : 1° Que l'Autriche promette de céder la Vénétie, si elle est victorieuse et conquérante en Allemagne;

2o Que l'Autriche promette, en tout cas, de respecter le statu quo territorial en Italie.

Si l'Autriche faisait ces promesses, l'Empereur resterait neutre.

La réponse du cabinet de Vienne est arrivée. Je crois ne pas me tromper en affirmant que l'Autriche a promis sans réserve le maintien du statu quo en Italie, qui est la seconde des deux demandes à elles faites. Quant à la première demande, la réponse n'a pas été négative; nais elle n'a pas été non plus explicitement affirmative, puisque l'Autriche aurait dit qu'à cet égard elle ne ferait rien sans consulter l'empereur Napoléon.

Quand ce dernier a eu une telle réponse, il a pensé que c'était suffisant pour promettre la neutralité, et il l'a promise.

L'Empereur m'a dit que le roi de Prusse avait donné à l'empereur d'Autriche l'assurance d'honneur qu'il n'avait signé aucun traité avec l'Italie, et que, si l'Italie attaquait l'Autriche la première, la Prusse n'était pas obligée à déclarer la guerre.

A cette question, j'ai demandé à l'Empereur si, à la dernière extrémité, et quand il serait bien démontré qu'il n'y a pas d'autre moyen d'engager la lutte, il ne croyait pas utile et peut-être nécessaire que

l'Italie prît l'initiative, à condition, bien entendu, qu'elle eût la promesse formelle de la Prusse de la suivre le jour d'après.

L'Empereur à répandu sans hésiter que jamais il n'aurait conseillé pareille chose. Du reste, pendant que j'étais justement chez l'Empereur, est arrivée la nouvelle que l'Autriche rappelle son ambassadeur de Berlin.

L'Empereur croit que cela fait présager l'imminence des hostilités; ensuite il croit plus que jamais que nous commettrions une grave erreur en prenant la responsabilité de l'initiative des hostilités.

L'Empereur m'a dit une parole qui m'a ouvert un vaste horizon. Il a dit que pendant la campagne il pourrait advenir qu'il fût utile que l'Italie ne fit pas la guerre avec trop de vigueur; mais j'ai dit à l'Empereur que nous commencerions la guerre avec une grande énergie, que nous ignorions les assurances données par l'Autriche à la France. Et que, si pendant la guerre on faisait des propositions, alors ce serait le cas d'examiner la conduite à tenir.

Signé NIGRA.

No 226

LE COMTE D'USEDOM AU GÉNÉRAL DE LA MARMORA

Florence, le 12 juin 1866.

Par un télégramme arrivé cette nuit, le comte de Bismarck me fait savoir qu'il s'attend à un commencement des hostilités dans peu de jours.

le comte de Bismarck

Par rapport à l'affaire hongroise . m'ordonne en ce moment même de communiquer à Votre Excellence, que le gouvernement est prêt à fournir une moitié des fonds nécessaires à l'affaire hongroise et slave, si le gouvernement italien veut se charger de l'autre.

On aurait besoin :

1o D'un million de francs pour le prime-abord et les préparatifs; 2o De deux millions pour le moment d'une entrée en campague effective de la part des populations en question.

Ce serait donc pour chaque gouvernement respectif un million et demi.

Le comte de Bismarck, dans le cas que la proposition fût acceptée

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