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V

L'ITALIE ET LE SAINT-SIÈGE

La prise de possession des États de l'Église par les troupes de Victor-Emmanuel et l'érection de Rome en capitale du nouveau royaume d'Italie marquèrent la fin de la puissance temporelle de la Papauté.

Mais Pie IX et ses successeurs ayant refusé toutes les propositions de transaction qui, depuis le projet Ricasoli (10 sep.tembre 1861), leur furent soumis, la situation juridique du SaintSiège, par rapport à l'Italie, n'a jamais été définie. On se trouve en présence d'un état de fait qui réduit le Pape au rôle d'un souverain purement spirituel, n'ayant conservé de son ancien pouvoir temporel que certaines prérogatives diplomatiques.

La loi dite des garanties, votée par la Chambre italienne, bien qu'elle ne constitue, au regard du droit international, qu'un acte unilatéral, en déterminant ces prérogatives diplomatiques, a néanmoins établi une sorte de droit public coutumier, dont les règles principales dominent encore les rapports de quelques. puissances catholiques avec le Saint-Siège, bien que les premières et celui-ci les aient toujours officiellement ignorées.

Le Parlement et le Gouvernement italiens, dans le but de donner à la loi des garanties l'apparence d'intangibilité que son caractère unilatéral lui refusait, ont toujours repoussé toutes les demandes de modifications issues de l'initiative parlementaire. C'est ainsi notamment que fut rejetée une proposition tendant à créer, du Vatican à Ostie, une bande de territoire neutralisée qui aurait permis au Pape de sortir d'Italie par mer.

LA LOI DES GARANTIES

(LOI du 13 mai 1871 sur les prérogatives du Souverain Ponlife et du Saint-Siège et sur les relations de l'État avec l'Eglise.)

TITRE PREMIER

Prérogatives du Souverain Pontife et du Saint-Siège.

ARTICLE PREMIER. sacrée et inviolable.

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La personne du Souverain Pontife est

ART. 2. L'attentat contre la personne du Souverain Pontife et la provocation à le commettre sont punis des peines établies pour l'attentat et la provocation à le commettre contre la personne du Roi.

Les offenses et les injures publiques, commises directement. contre la personne du Pontife, par des discours, des actes, ou par les moyens indiquées dans l'article 1er de la loi sur la presse, sont punies des peines établies à l'article 19 de cette même loi.

Lesdits délits tombent sous l'action publique et sont de la compétence de la cour d'assises.

La discussion sur les matières religieuses est pleinement libre.

ART. 3.

Le Gouvernement italien rend au Souverain Pontife, sur le territoire du royaume, les honneurs souverains et la prééminence d'honneur qui lui est reconnue par les souverains catholiques.

Le Souverain Pontife a la faculté de conserver le nombre accoutumé de gardes attachés à sa personne et à la garde des palais, sans préjudices des obligations et du devoir résultant pour ces gardes des lois en vigueur dans l'État.

ART. 4. Est conservée en faveur du Saint-Siège la dotation d'une rente annuelle de 3.225.000 lires.

Avec cette somme, égale à celle inscrite au budget romain sous le titre Palais apostoliques, sacré collège, congrégations

ecclésiastiques, secrétairerie d'État et représentation diplomatique à l'étranger, il sera pourvu au traitement du Souverain Pontife et aux divers besoins ecclésiastiques du Saint-Siège, à la manutention ordinaire et à la garde des palais apostoliques et de leurs dépendances, aux salaires, gratifications et pensions des gardes dont il est parlé dans l'article précédent, et des attachés à la Cour pontificale, et aux dépenses éventuelles, ainsi qu'à la manutention et à la garde des musées et bibliothèques qui en font partie, et aux traitements, gages et pensions de ceux qui y sont employés.

Ladite dotation sera inscrite au grand livre de la Dette publique sous forme de rente perpétuelle et inaliénable au nom du Saint-Siège, et pendant la vacance du Saint-Siège, on continuera à la payer pour faire face aux nécessités de l'Église romaine dans cet intervalle.

Elle sera exempte de toute espèce de taxe et de charge gouvernementale, communale ou provinciale, et elle ne pourra être diminuée quand bien même le Gouvernement italien se résoudrait postérieurement à prendre à sa charge la dépense concernant les musées et les bibliothèques.

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ART. 5. Le Souverain Pontife, outre la dotation établie dans l'article précédent, continuera à jouir des palais apostoliques du Vatican et de Latran, avec tous les édifices, jardins et terrains qui en dépendent, ainsi que de la villa Castel-Gandolfo, avec toutes ses attenances et dépendances.

Lesdits palais, villa et annexes, comme aussi les musées, les bibliothèques et les collections d'art et d'archéologie y existant, sont inaliénables, exempts de toute taxe ou charge, et d'expropriation pour cause d'utilité publique.

ART. 6.

Durant les vacances du Siège pontifical, aucune autorité judiciaire et politique ne pourra, pour quelque cause que ce soit, apporter ni empêchement, ni restriction à la liberté personnelle des cardinaux.

Le Gouvernement pourvoit à ce que les assemblées de conclaves et de conciles œcuméniques ne soient troublés par aucune violence extérieure.

ART. 7. Aucun représentant de l'autorité publique ou

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agent de la force publique ne peut, pour accomplir des actes de son office, s'introduire dans les palais et lieux qui sont la résidence habituelle ou la demeure temporaire du Souverain Pontife, ou dans lesquels se trouve rassemblé un conclave ou un concile œcuménique, sinon avec l'autorisation du Souverain Pontife, du conclave et du concile.

ART. 8. Il est interdit de procéder à des visites, perquisitions ou sequestres de papiers, documents, livres ou registres dans les offices ou congrégations pontificales investies d'attributions purement spirituelles.

ART. 9. Le Souverain Pontife est entièrement libre de remplir toutes les fonctions de son ministère spirituel et de faire afficher à la porte des basiliques et églises tous les actes du susdit ministère.

ART. 10. Les ecclésiastiques qui, par leurs fonctions, participent à Rome à l'émanation des actes de l'autorité spirituelle du Saint-Siège ne sont sujets, à raison de ces actes, à aucune recherche, investigation, ni poursuite de la part de l'autorité publique.

Tout étranger, investi à Rome d'une fonction ecclésiastique, jouit des garanties personnelles appartenant aux citoyens italiens en vertu des lois du royaume.

ART. 11. — Les envoyés des gouvernements étrangers près de Sa Sainteté jouissent dans le royaume de toutes les prérogatives et immunités accordées aux agents diplomatiques selon le droit international.

Les offenses dont ils seraient l'objet seront punies des peines portées contre les offenses faites aux envoyés des puissances étrangères près le Gouvernement italien.

Les envoyés de Sa Sainteté près des gouvernements étrangers sont assurés, dans le territoire du royaume, des prérogatives et des immunités en usage suivant le même droit, tant pour se rendre au lieu de leur mission que pour en revenir. ART. 12. Le Souverain Pontife correspond librement avec l'épiscopat et avec tout le monde catholique, sans aucune ingérence du Gouvernement italien.

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A cette fin, faculté lui est donnée d'établir au Vatican ou

dans ses autres résidences des bureaux de poste et de télégraphe servis par des employés de son choix.

L'office postal pontifical pourra correspondre directement sous paquet cacheté avec les bureaux de poste d'échange des administrations étrangères ou remettre ses propres correspondances aux bureaux italiens. Dans les deux cas, le transport des dépêches ou des correspondances munies du timbre de l'office pontifical sera exempt de toute taxe ou frais sur le territoire italien.

Les courriers expédiés au nom du Souverain Pontife seront assimilés dans le royaume aux courriers de cabinet des gouvernements étrangers.

Le bureau télégraphique pontifical sera relié avec le réseau télégraphique du royaume aux frais de l'État.

Les télégrammes transmis par ledit bureau avec la mention certifiée de pontificaux seront reçus et expédiés avec les prérogatives établies pour les télégrammes d'État, et avec une exemption de toute taxe dans le royaume.

Les mêmes avantages sont assurés aux télégrammes du Souverain Pontife ou envoyés par son ordre qui, munis du timbre du Saint-Siège, seront présentés à quelque bureau télégraphique que ce soit dans le royaume.

Les télégrammes adressés au Souverain Pontife seront exempts des taxes mises à la charge des destinataires.

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ART. 13. Dans la ville de Rome et dans les six sièges suburbains, les séminaires, les académies, les collèges et les autres institutions catholiques, fondés pour l'éducation et la formation des ecclésiastiques, continueront à dépendre uniquement du Saint-Siège, sans aucune ingérence des autorités scolaires du royaume.

ART. 14.

TITRE II

Relations de l'État avec l'Église.

Est abolie toute restriction spéciale à l'exercice de droit de réunion des membres du clergé catholique. Le Gouvernement renonce au droit de legazia

ART. 15.

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