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grande autorité à cet égard, nous promet d'écrire de manière que les Portugais nous favoriseront (1). Nous ne savons ce que les Chinois feront, mais Dieu est par-dessus tout: Et ipse perficiet consummabitque. Seulement il paroît nécessaire de n'y point faire d'éclat, ni qu'à force de bons traitemens on nous donne trop en spectacle aux Chinois.

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La fermentation commence à s'apaiser. On pense très-bien à la cour de la religion on y condamne généralement et publiquement, les excès qui ont été commis dans les provinces, au sujet de cette malheureuse affaire.

On paroît craindre, ou du moins on a craint, que si on nous remettoit en liberté, nous ne rentrassions dans nos provinces : c'est la raison que le premier ministre apportoit pour nous faire condamner à une prison perpétuelle. Cependant, l'édit qui nous met en liberte, est sans aucune restriction. Les missionnaires de Pékin ont fait ces derniers jours, une tentative auprès d'un grand favori de l'empereur, et d'un de ses premiers ministres, pour savoir si on pouvoit proposer à sa majesté, de permettre aux missionnaires délivrés de rentrer dans leurs provinces, de sorte qu'il n'y en auroit que deux dans chacune, avec l'obligation de se rendre à Pékin sitôt que l'empereur les manderoit. On a conseillé de n'en rien faire, sous prétexte que l'empereur ayant

(1) On a reçu à Macao, des lettres de M. l'évêque de Pékin, en faveur des missionnaires, et on est disposé à les bien recevoir et à les protéger.

détruit

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détruit toutes les églises, il n'étoit pas probable qu'il voulût favoriser la religion.

On pense à un autre projet, qui présenté moins d'inconvéniens, qui réussira mieux, mais qui reculera l'exécution ou le succès de cette grande affaire.

J'ignore absolument l'état de notre mission du Sutchuen. J'ai écrit, en partant pour Pékin, à monseigneur d'Agathopolis, et je lui ai conseillé d'ordonner au plutôt trois prêtres de plus, qui peuvent certainement l'être dans un cas de si grande néces sité. Il paroît qu'ils sont maintenant tranquilles. C'est précisément dans le temps de la huitième lune qu'ils ont dû recevoir la nouvelle de l'exil de nos courriers, si cependant ils ont été envoyés, car les mandarins du Sutchuen, qui étoient très-bons, les ont chargés le moins qu'ils ont pu et un d'eux me disoit : Nous n'écrivons point telle chose, car en l'écrivant, il seroit à craindre que tel courrier ne fut exilé. volgy ob

- Comme M. Dufresse et moi n'avons pas envie de faire grande figure à Macao, ni de manger des ortolans, je vous prie d'envoyer, pour le Sutchuen, au moins la moitié de notre viatique la prison. nous a appris à nous contenter de peu. Vous sentez que, dans cette mission, ayant très-peu à espérer des chrétiens, pauvres, pour la plupart, il seroit très-difficile, dans les circonstances actuelles, d'exiger d'eux des contributions: cependant il· faut que les prêtres chinois vivent. J'aurai l'honneur de vous en dire plus long, quand j'aurai celui de Vous voir; mais je prie Dieu que ce soit le moins

long-temps possible : vous m'entendez. Je pense à la route par le Fokien ; celle de l'Yunnam, par le Pégou, paroît impraticable. Voyez, préparez les voies, priez pour nous. Respects, amitié, confiance:

Totus in Domino.

JEAN DIDIER, évêque de
Caradre, coadjuteur, etc.

Extrait d'une lettre de M. Dufresse, du 10 novembre 1785.

Vous connoissez le dernier édit de l'empereur; enfin la liberté nous a été rendue.

Un événement si inopiné, et où le doigt de Dieu paroît si manifestement, combla de joie les prissionnaires de Pékin; ils nous le firent annoncer aussi→ tôt set, le 10 au matin, on nous fit sortir de prison; on nous ôta nos chaînes, et l'on nous conduisit au prétoire, où nous trouvâmes plusieurs missionnaires de chaque église, qui étoient venus nous recevoir. Les mandarins nous remirent entre leurs mains; et ees messieurs, dans les témoignages de la plus grande joie, nous firent conduire à l'église méridionale des missionnaires portugais, qui est la cathédrale de Pékin. Nous trouvâmes monseigneur l'évêque de Pékin à la porte, qui nous attendoit, à la tête de son clergé. Il donna à monseigneur de Caradre la croix pectorale et l'anneau; il lui pré

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senta de l'eau bénite : nous nous mimes à genoux. Monseigneur de Caradre fit l'aspersion, après quoi, étant tous entrés dans l'église, et ayant adoré le saintSacrement, on chanta le Te Deunt. De l'église, nous nous rendimes à la maison où nous saluâmes monseigneur l'évêque de Pékin', et tous les autres messieurs. Cependant, monseigneur nous ayant fait la lecture de l'édit de l'empereur, nous dit déxxminer sérieusement devant Died, notre vocation pour rester ici, ou pour retourner à Macao, et de lui rendre réponse au plutôt, la cour voulant une réu ponse prompte. Nous diames là, et après dîner nous fumes distribués dans les quatre églises. Monseigneur de Caradre, le père Emmanuel et moi nous nous rendimes à l'église des Français, où nous fumes reens avec les témoignages de la plus sincère amitié ; et nous sommes confus chaque jour de nous voir si bien traités. Le 1, nous célébrânies notre première messe à Pékin. Le 15 novembre, tous les missionnaires et les chrétiens de la ville se rendirent à la cathédrale, pour y rendre de solennelles actions de grâces à Dieu. Pendant la cérémonie, monsei gneur de Caradré, revêtu d'une chappé, étoit assis sur le trône épiscopal, à la droite de monseigneur de Pékin. Après la messe et le Te Deum, il fit aux chrétiens un sermon analogue à la circonstance. La cérémonie avoit commencé à neuf heures, et ne finit qu'à une heure après-midi. Le 16, nous fumes au cimetière des missionnaires français, à deux lieues de Pékin, et où ces messieurs ont une petite mai son de campagne, avec une chapelle. Monseigneur

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de Caradre y étoit venu la veille; il célébra la messe de Requiem, après laquelle nous allâmes, processionnellement, et les cierges à la maiu, au cimetière (il n'y avoit que les missionnaires français). Monseigneur fit d'abord une absoute générale, puis une particulière sur les tombeaux de MM. Devaut et Delpont. Ils sont placés l'un à côté de l'autre, dans deux caveaux construits en briques, et une même tombe de briques les couvre tous les deux; leur épitaphe, est gravée sur la même pierre. Ce pieux monument honore également, et la foi des confesseurs, et la religion de ceux qui l'ont érigé.

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Monseigneur de Pékin nous invita, le même jour, le père Emmanuel et moi, à une assemblée des missionnaires sortis de prison, qui devoit se faire, à deux heures après-midi, dans l'église occidentale, qui est celle de la Propagande ; il vouloit connoître les intentions de chacun, sur le parti, qu'il avoit à prendre, ou de rester à Pékin, ou de retourner à Macao. Nous nous y rendimes après - dîner. Monseigneur, de Caradre voulut s'y trouver aussi. Monseigneur de Pékin prononça un discours bien capable de nous éclairer, et de nous faire éviter toute illusion, relativement à notre vocation particulière. Il recueillit ensuite les avis. Les missionnaires de la Propagande, qui sont le plus grand nombre, les donnèrent par écrit, avec leurs motifs, monseigneur voulant les envoyer à la sacrée congré gation les autres les donnèrent de vive voix. De. douze, il y en eut quatre qui se déterminèrent à rester (à Pékin); deux de la province de Chang

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