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que nous leurs distribuons gratuitement, pour › pour leur en faire connoître les dogmes et la morale. La tolérance du gouvernement, et la manière dont il se conduit à l'égard des chrétiens, nous font espérer de jouir de la paix dans cet empire. Sous le gouvernement du nouvel empereur nous n'éprouvons plus de persécutions. Les mandarins ne reçoivent plus les dénonciations que les païens avoient coutume de faire contre nous, pour cause de religion. Les assemblées religieuses se tiennent publiquement et sans obstacle de la part des gouverneurs des villes. Les préfets de police prennent même la défense des chrétiens dans les vexations qu'ils éprouvent quelquefois de la jalousie des infidèles. Nous l'avons vu cette année dernière, d'une manière assez remarquable, dans plusieurs districts de cette vaste pro

vince.

Dans celui de la ville de Tong-king, un chrétien qui avoit refusé de donner de l'argent pour contribuer à une cérémonie superstitieuse, fut chassé par les collecteurs, d'une manufacture de soieries où il travailloit pour gagner sa vie. Ce néophyte, indigné de se voir forcé d'abandonner son métier par ces particuliers, leur intenta un procès; le mandarin jugea en faveur du néophyte, et dit à ses adversaires Puisque les chrétiens ne vous demandent point d'argent pour l'exercice de leur religion vous ne devez pas les forcer pour le culte de vos idoles.

Dans un district, quelques particuliers ennemis du nom chrétien ayant maltraité un catéchiste, l'ac

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eusant de prêcher une mauvaise doctrine, le mandarin, après l'avoir examiné, reprit fortement les accusateurs, leur reprochant de causer du trouble, en s'opposant par voie de fait, à une religion qui s'exerce publiquement à Pékin, et que l'empereur ne proscrit nulle part. Ensuite, il donna un décret dans lequel il déclare n'empêcher personne de se faire chrétien il oblige les dénonciateurs à réparer l'injure qu'ils ont faite au catéchiste, et le renvoie au mandarin supérieur qui le met aussitôt en liberté.

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Dans un autre district de la partie méridionale, un chrétien ayant refusé de contribuer à une comédie où les païens faisoient l'éloge de leurs idoles, fut frappé par les collecteurs. L'affaire ayant été portée devant le gouverneur du lieu, celui-ci ordonna d'arrêter les collecteurs, et fit donner à chacun quinze coups de houpade, pour avoir voulu, de leur autorité privée, forcer les chrétiens à contribuer à une cérémonie contraire à leur religion.

Enfin, les néophytes tiennent publiquement leurs assemblées sans aucun obstacle de la part du gouvernement; et on prêche la religion dans les places publiques et dans les marchés, sans que la proximité des prétoires y mette obstacle. D'après une tolérance si marquée, il y auroit tout lieu d'espérer de voir la religon faire ici les plus grands progrès, s'il nous venoit un nombre suffisant d'ouvriers évangéliques pour administrer cette vaste province.

Selon l'almanach impérial, qui s'imprime tous les aus par ordre de l'empereur, la province de Sutchuen, a trois cents lieues de l'est à l'ouest, et trois

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cent vingt du nord au sud; on y compte douze villes du premier ordre, dix-neuf du second, cent dix du troisième, et dix autres, qu'on appelle Ting, qui sont un démembrement de celles du premier ordre; on la divise en quatre parties, celles de l'est, de l'ouest, du sud et du nord. La religion est à peu près également répandue dans chacune de ces quatre parties, et y fait à peu près, les mêmes progrès. Dans la partie orientale, on compte cent dix-sept chrétientés, ou peuplades de chrétiens, cent soixantedouze dans l'occidentale, quarante - trois dans la septentrionale, et cent trente-deux dans la méridionale : le nombre des chrétiens se monte en totalité à quarante-huit mille; il n'y en avoit que vingtquatre en 1785. Ces chrétientés étant pour la plupart très-éloignées les unes des autres, il faut parcourir un pays immense pour visiter tous les néophytes et les administrer. A cet effet, il y a seulement quatré missionnaires du séminaire de Paris, y compris l'évêque, et dix-neuf prêtres chinois. Les chrétiens peuvent à peine voir un prêtre une fois dans une` année. Il y en a même qui sont privés des sacremens plusieurs années de suite.

On travaille, autant qu'il est possible, à former un clergé national. Les écoles où l'on enseigne publiquement la religion chrétienue, ne sont point inquiétées. Les païens nous demandent quelquefois d'y admettre leurs enfans pour leur apprendre à lire les livres classiques, et à écrire leurs caractères. Nous avons dans cette province, soixante - quatre écoles chrétiennes, dont trente-cinq de garçons, et

vingt-neuf de filles. Il est fâcheux qu'on ne puisse pas multiplier suffisamment ces sortes d'institutions; la pauvreté des habitans y met obstacle dans plusieurs endroits. Pour former un nombre suffisant de

prêtres de pays, il nous faudroit un plus grand nombre de prêtres d'Europe, et quelques fonds pour l'entretien des colléges; l'un et l'autre nous manquent. L'empereur a appelé à Pékin deux nouveaux missionnaires lazaristes, qui sont partis l'été dernier de Canton, pour se rendre à la capitale.

On voit par ces dernières lettres, que les attroupemens des séditieux, qui en 1803 mettoient le trouble dans l'empire, sont entièrement dissipés, et que les nouveaux bruits de guerre civile répandus par quelques négocians mal instruits, ne méritent aucune croyance.

Extrait d'une lettre écrite de Macao, le12 novembre 1806.

On ne trouve plus à Pékin les missionnaires ni les chrétiens; on continue à y être observé de plus près, et à y avoir bien moins de liberté qu'auparavant; il faut espérer que la constance que les fidèles de cette capitale ont montrée l'année dernière dans leurs peines; que leur patience à tout souffrir plutôt que de trahir leur conscience; que les tortures que quelques-uns ont endurées, les cachots, l'exil, l'esclavage que plusieurs endurent encore en témoi

guage de leur foi; enfin, que la fidélité de ces généreux confesseurs, attirera sur cette Eglise des grâces spéciales dont on ne tardera pas à sentir les heureux effets.

« Le missionnaire de Pékin qui a été exilé en Tartarie, est plus libre et mieux traité qu'il n'étoit dans le principe. On espère que l'empereur ne tardera pas à lui permettre de rejoindre ses confrères. La persécution que celle de Pékin faisoit craindre dans les provinces, n'a heureusement pas eu lieu. Tout s'est borné à quelques édits que l'on a publiés, mais qui n'ont point été exécutés, excepté peut-être ceļui qui enjoint de veiller plus strictement pour empêcher l'entrée de nouveaux missionnaires...

>>> Le missionnaire italien qui fut arrêté dans l'été de 1805, et conduit dans les prisons de Canton, y est encore. La sentence de l'empereur le condamne

à

y rester trois ans. Pendant quelque temps, il a été fort maltraité. Le geolier, dans la vue d'extorquer de l'argent, suivant l'usage, ne se contentoit pas de lui mettre de très-gros fers aux pieds, et fréquemment aux mains; il lui faisoit mettre pour la nuit, une barre de fer dont une extrémité attachée aux jambes, et l'autre lui passant sous le menton, tenoient son corps étendu, fixe et immobile, d'une manière très-gênante. On est venu à bout de trouver un intermédiaire qui a réussi à traiter avec ce geolier; et, moyennant une somme qu'on lui donne tous les mois, et une plus forte qu'on lui a donnée d'abord, le prisonnier n'a plus à souffrir que les incommodités inséparables de la prison. On peut lui

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