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OCTOB. 22,

trafie, pour confondre fes accufateurs. Il ne lui fut pas difficile de prouver fon innocence. Mais fes ennemis ne lui pardonnerent point. Le Comte Innocent l'attendit en chemin à fon retour, & le mena à Ponthion dans le Pertois, où il lui fit fouffrir les plus indignes traitemens. Il le relâcha enfuite, mais fes fatellites le fuivirent, & le mirent à mort fur les bords de l'Aifne, où ils jetterent fon corps. Des bergers l'y découvrirent miraculeufement. Divers prodiges attefterent la fainteté du Serviteur de Dieu. On l'honore comme Martyr en ce jour, à Châlons-fur-Marne, où l'on conferve une partie de fes Reliques. Le refte fut brûlé dans l'incendie de la Cathédrale, arrivé par la foudre le 19 Janvier 1668. M. de Choifeul-Beaupré, Evêque de Châlons-fur-Marne, mort en 1763, donna quelques offemens de S. Louvent à la Cathédrale de Mende.

Voyez Saint Grégoire de Tours, Hift. Fr. 1. 6. c. 37. Baillet, fous le 22 d'Octobre ; & le P. Longueval, Hift. de l'Eglife Gallicane, T. 3. p. 176.

SAINT MORAN,

E vê QUE DE RENNES, puis Abbé en Italie.

SAINT

AINT Moran, (a) iffu d'une famille noble, naquit vers le milieu du feptieme fiecle. Ses vertus le firent admettre dans le Clergé de l'Eglife de Rennes. Devenu Evêque de cette ville vers l'an 703, il gouverna fon Diocèfe avec beaucoup de

(a) Eu latin MODERAMNUS.

zele & de prudence pendant l'espace d'environ quatorze ans. Le défir qu'il avoit de vifiter le OCTOB. aa, tombeau des Apôtres, lui infpira le deffein de faire un pélerinage à Rome. Mais il voulut, avant de partir, aller prier fur le tombeau de S. Remi de Reims. On le reçut avec honneur dans le Monaftere qui portoit le nom de ce Saint. II partit de Reims avec des Reliques du faint Evêque, dont on lui avoit fait préfent. Il ́en laiffa une partie dans le Monaftere de Berzetto, fitué dans le territoire de Parme. Luitprand, Roi des Lombards, touché de fa vertu & des miracles opérés par les Reliques de faint Remi, lui donna le Monaftere avec toutes fes dépendances. Moran, de retour en France, foumit l'Abbaye de Berzetto à celle de Saint-Remi de Reims. Arrivé dans fon Diocèfe, il fe fit donner un fucceffeur, & fe retira en Italie, pour y prendre le gouvernement du Monaftere qui lui avoit été donné par le Roi des Lombards. Il y finit faintement fes jours en 719 ou 730. On fait fa fête à Reims, en ce jour.

Voyez Flodoard, Hift. Rem. L. 1. c. 20. Baillet; & D. Lobineau, Vies des SS. de Bretag. p. 174.

SAINTE NUNILLON,
ET SAINTE ALODIE,

VIERGES ET MARTYRES EN ESPAGNE.

RODERIC ayant détrôné Vitiza, Roi des Goths d'Espagne, s'empara de la fouveraine puiffance en 711. Le Comte Julien, dont il avoit déshonoré la fille, réfolut de s'en venger en invitant les Maures ou Sarrafins d'Afrique à paffer

- en Espagne. Moufa, Gouverneur de ces Infideles, OCTOB 22. envoya, du confentement du Calife Miramolin, douze mille hommes qui, fous la conduite du Général Tarif, s'emparerent du Mont-Calpé & de la ville d'Héraclée, qu'on appella depuis Gibraltar ou Mont de Tarif, du nom de leur Général. Ils fe maintinrent dans cette fortereffe ; & avec les nouveaux fecours qu'ils reçurent d'Afrique, ils défirent les Espagnols dans l'Andaloufie. On n'entendit plus parler du Roi Roderic après cette bataille. Mais deux cens ans après, on découvrit fon corps dans une Eglife de la campagne en Portugal; ce qui a fait conjecturer qu'il s'étoit enfui dans ce pays, & qu'il y

étoit mort.

Tarif fe rendit maître de différentes places, entr'autres de Tolede, capitale de l'Empire des Goths. Moufa, jaloux de fes fuccès, paffa le Détroit, & réduifit fous fa puiffance Séville, Mérida, & plufieurs autres villes. Enfin les Sarratins fe virent maîtres de toute l'Efpagne au bout de trois ans. La méfintelligence s'étant mife entre Tarif & Moufa, Miramolin les rappella l'un & l'autre, donna le gouvernement de l'Efpagne à Abdalafifa; fils de Moufa, & fit de Séville la capitale de fes nouveaux Etats.

En 716, les Goths d'Espagne placerent fur le trône, Pélage, le feul Prince du fang royal qui leur reftât. Celui-ci raffembla une armée fur les montagnes des Afturies, reprit ce pays, avec la Galice & la Bifcaye, & jetta les fondemens d'un Royaume Chrétien, dit des Afturies, puis d'Oviédo, enfin de Léon. Sa valeur & fa piété lui mériterent de grands fuccès. Alphonfe, fon fucceffeur, furnommé le Catholique, marcha fur fes traces, & cut le même bonheur.

Les Gouverneurs Sarrafins, & fur-tout le troifieme, nommé Abdéramene, fe conduifirent OCTOB. #2, avec beaucoup de cruauté. Ils porterent fouvent leurs armes dans le Midi de la France. Mais ils furent vigoureufement repouffés par Charles Martel. En 759, Abdéramene, furnommé Adahil, s'affranchit de la dépendance des Sultans d'Egypte, prit le titre de Roi, & fixa fa Cour à Cordoue. Les autres Gouverneurs Sarrafins fuivirent fon exemple. Lorsque le feu de la guerre eût été amorti, ces Princes Infideles tolérerent les Chrétiens dans leurs Etats; ils leur permirent même, à certaines conditions, de bâtir des Eglifes & des Monafteres; mais dans le neuvieme fiecle, la perfécution contre le Chriftianifme recommença à Cordoue, & continua fous les regnes d'Abdéramene II, & de fon fils Mahomet.

Une multitude innombrable de Martyrs fcellerent leur foi par l'effufion de leur fang. On compte parmi les plus célebres, Nunillon & Alodie. C'étoient deux fours d'une extraction noble. Leur pere étoit Mahométan, & leur mere Chrétienne. Celle-ci, devenue veuve, fe remaria à un autre Mahométan. Nunillon & Alodie, qui avoient été élevées dans la Religion Chrétienne, eurent beaucoup à fouffrir de la brutalité de leur beau-pere, qui occupoit un rang diftingué dans la Caftille. On voulut inutilement engager les deux Saintes dans le mariage; elles avoient réfolu de fervir Dieu dans la virginité. Enfin elles obtinrent la permiffion de fe retirer chez une tante, qui étoit une Chrétienne pleine de ferveur. Elles eurent alors une entiere liberté de vaquer aux exercices de leur Religion, qu'elles n'interrompoient qu'autant qu'elles y étoient forcées par d'autres devoirs.

La ville où elles vivoient fe nommoit Barbite

ou Vervete. On croit que c'eft Caftro - Viejo, OCTOB. 21 près de Najare en Caftille, fur les frontieres de la Navarre. Cette ville étoit foumife aux Sarrafins, lorsqu'Abdéramene fit publier fes Edits contre les Chrétiens. Nunillon & Alodie étoient trop connues par leur naiffance, leur ferveur & leur zele, pour qu'on ne les arrêtât pas des premieres. Ayant été conduites devant le Juge, elles montrerent une conftance inébranlable. On voulut inutilement les intimider par des menaces & les féduire par des careffes. Tous les moyens. qu'on avoit employés étant inutiles, on les livra à des femmes impies, dans l'efpérance qu'elles viendroient à bout de les gagner ou de les corrompre. Mais Jefus-Chrift protégea fes épouses par les lumieres & la force de fa grace. Enfin les femmes, à la méchanceté defquelles on les avoit abandonnées, déclarerent aux Juges que rien n'étoit capable de les faire renoncer au Chriftianifme. On les condamna donc à être décapitées dans la prifon où elles avoient été renfermées. La Sentence fut exécutée le 22 Octobre 851 (a). On les enterra dans le même lieu. On garde la plus grande partie de leurs Reliques dans l'Abbaye de Saint-Sauveur de Lejer en Navarre. Leur fête fe célebre avec un concours prodigieux de peuple, à Bofca & à Huesca en Arragon.

Voyez faint Euloge, Memorial. I. 2. c. 7. Moralès, in Schol. ad Eulog. p. 286. Mariana, &c.

(a) Moralès met leur martyre en 840.

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