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tel est le glorieux privilége qu'il nous a mérité par la victoire de sa croix sur la mort. Son sang versé pour nous nous a rachetés; il a réconcilié l'homme avec Dieu son Père; il nous a donné la vie en imprimant sur notre chair mortelle le sceau de la céleste régénération. Marchons tous, s'il est possible, sous cette bannière sacrée; elle est pour nous le chemin de la vie, elle nous montre la route qui mène au paradis, au royaume des cieux. Devenus par elle les enfants de Dieu, nous vivrons à jamais avec lui; renouvelés par le sang du divin Rédempteur, nous triompherons à jamais avec lui, dans la compagnie de Jésus-Christ, associés à sa gloire, à ses immortelles félicités, faisant retentir à jamais le cantique d'actions de grâces. Peut-on n'être pas heureux, peut-on n'être pas à jamais reconnaissant, lorsque de la mort l'on passe à l'assurance de l'immortalité ?

VI.

DE LA VANITÉ DES IDOLES ".

Que les idoles ne sont pas des dieux ; qu'il n'y a qu'un seul Dieu; qu'il faut croire à Jésus-Christ pour être sauvé.

Que ceux dont le paganisme a fait des dieux ne méritent pas ce titre, pour s'en convaincre il suffit de remonter à leur histoire. C'étaient des rois dont la reconnaissance des peuples avait conservé la mémoire après leur mort. On leur érigea des temples, on voulut perpétuer leur souvenir par des statues, on offrit des sacrifices, on institua des fêtes en leur honneur; et ce qui n'avait été que l'expression d'un simple regret devint par la suite un objet de culte. Vérifions les faits par quelques exemples. Mélicerte et Leucothoë ayant été précipités dans les eaux de la mer, on en fit des dieux marins. Les deux jumeaux Castor et Pollux meurent et renaissent l'un après l'autre. Esculape foudroyé devient un dieu. Hercule

a Il est facile de reconnaître que ce traité n'est qu'un extrait de Tertullien.

Pline: Hic est vetustissimus referendi gratiam bene merentibus mos, ut numinibus adscribantur. (Hist. nat., lib. II, cap. 7.)

T. I.

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se fait brûler sur le mont OEta pour mériter son apothéose". Apollon fut un simple berger à qui Admète avait donné le soin de ses troupeaux. Neptune, employé par Laomédon pour lui construire une muraille, fut assez mal récompensé de son travail. On fait voir en Crète la caverne qui servit de retraite à Jupiter, et l'on y montre encore son tombeau. Saturne, chassé par son fils, aborde dans l'Italie et donne à la contrée où il s'était tenu caché le nom de Latium. Il y avait porté la connaissance de l'écriture, de la monnaie, de l'agriculture, qui lui doivent leur origine dans ce pays; d'où vient que l'on nous parle de l'épargne ou trésor de Saturne, qu'on lui met une faux dans la main, peut-être aussi pour désigner son antiquité. Il était venu se réfugier chez Janus; les mots de Janicule, et de janvier donné à l'un des mois de l'année, attestent l'hospitalité donnée par lui au roi fugitif. On le représente à deux visages, parce que ce mois tient le milieu entre l'année qui finit et l'année qui commence. Il est notoire que les peuples de la Mauritanie mettent leurs rois au nombre des dieux, et qu'ils ne se mettent pas même en peine de justifier cette qualification. De là la multiplicité des religions. Le culte des dieux se diversifie chez les différents peuples, et subit tous les changements qu'il plaît à chacun de lui imposer, parce que l'unité de Dieu n'est pas reconnue par tous, mais que chacun d'eux s'attache au culte qui lui vient de ses ancêtres. Alexandre le Grand, dans un écrit remarquable adressé à sa mère, lui mandait qu'il avait fait découvrir par

a Cicéron s'en moquait : Non video quo pacto ille cui in monte OE theo illatæ lampades fuerunt, ut ait Accius, in domum æternam patris ex illo ardore pervenerit. (Lib. 11, de Nat. Deor.)

force à un prêtre ce mystère de la naissance des dieux". On savait les noms des rois qui en avaient été les an cêtres, et parce que la mémoire s'en était perpétuée, de là l'usage de les honorer et de célébrer des sacrifices en leur honneur. S'il a pu naître des dieux quelque part, pourquoi n'en verrions-nous pas naître encore aujourd'hui ? à moins que peut-être il n'en faille accuser la vieillesse impuissante de Jupiter, ou que Junon ne soit devenue incapable d'être mère ". A quel titre croyez-vous ces dieux en état de servir les Romains, quand ils n'ont pu défendre contre la puissance romaine les peuples qui les adoraient? Ces Romains eux-mêmes avaient leurs dieux indigènes; nous les connaissons. Qu'était-ce que ce Romulus, devenu dieu, grâce au mensonge attesté par le serment de Proculus? Qu'étaient-ce que Picus, Tiberinus, Pilumnus, Consus, celui-là dont Romulus, après son perfide enlèvement des Sabines, fit un dieu sous le nom de dieu des conseils ou de l'artifice? Tatius trouve une idole dans un cloaque, il en fait une déesse qu'il appelle Cloacina. Hostilius érige en divinités la crainte et la pâleur. Après lui, la fièvre et deux prostituées, Acca

a Tertullien: Quod Ægyptii narrant, et Alexander digerit, et mater legit. Athénagore et saint Augustin affirment l'anecdote. Y avait-il moyen d'en douter, après le récit qu'en fait Plutarque dans sa Vie d'Alexandre ?

Tout ce qu'il y avait de Romains lettrés avait lu dans Pline le naturaliste : Matrimonia quidem inter deos credi, tantoque ævo ex his neminem nasci, et alios esse grandævos, semperque canos, alios juvenes atque pueros, atricolores, aligeros, claudos, ovo editos, et alternis diebus viventes, morientesque, puerilium prope deliramentorum est. (Hist. nat., lib. II, c. 7.)

e Cloacinæ simulacrum in cloaca maxima repertum Tatius consecravit, et quia cujus esset effigies ignorabat, ex loco illi nomen imposuit. (Arnob., lib. 1.j

et Flora, obtiennent des autels". Et la preuve que les Romains ont inventé les noms qu'ils ont déifiés, c'est qu'ils comptent parmi leurs divinités un certain Viduus qui, en séparant l'âme du corps, rend celui-ci veuf; dieu malencontreux qu'ils relèguent hors des murs, lui faisant son procès, plutôt qu'ils ne lui rendent hommage. Ils ont aussi leur dieu Scansus, ou des degrés, Forculus (aforibus), des postes, Limentinus (a limine), du seuil de la porte, leur déesse Cardea (a cardinibus), des gonds, Orbana (ab orbitatibus), des pertes de parents. Voilà les dieux que Rome adore. On nous parle encore de Mars de Thrace, de Jupiter en Crète, de Junon honorée à Argos, à Samos, à Carthage, de Diane en Tauride, de la mère des dieux qui avait son temple sur le mont Ida, des monstrueuses divinités de l'Egypte. Pour peu qu'ils eussent eu de pouvoir, ils auraient sauvé et leur pays et leurs propres autels. Enée fuyant en Italie y porte avec lui ses pénates vaincus. Nous avons une Vénus chauve. Lequel était plus déshonorant pour elle, ou d'être dépouillée de ses cheveux, ou de s'être laissé blesser par Diomède dans Homère?

Quant à la prospérité des empires, c'est la fortune plutôt que le mérite qui la détermine.

Avant la domination romaine, nous comptons l'empire des Assyriens, des Mèdes, des Perses, des Grecs, des Egyptiens; les révolutions humaines amè

a Cicéron : Amor, dolus, metus, labor, invidentia, fatum, senectus, mors, tenebræ, miseria, querela, gratia, fraus, pertinacia, Parcæ, Hesperides, somnia: quos omnes erebo et nocte natos ferunt: aut igitur hæc monstra probanda sunt, aut primo tollenda. (De Nat. Deor., lib. 1.)

b Urbe a Gallis capta, obsessi in Capitolio Romani cum ex mulierum capillis tormenta fecissent, ædem Veneri calve consecraverunt. (Lactant., lib. I, c. 20.)

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