Je penfe comme lui, trois amufent plus qu'une. Mais c'est trop pour un homme entreprendre à la fois. On ouvre ; les voici qui viennent toutes trois. SCENE I V. (Il s'en va.) ISABELLE, LUCINDE, MELANIE. ISABELLE. 'AUROIS, à toutes deux, quelque chofe à vous J'Audire. Mon cœur, pour s'épancher, cherche votre entre tien. MELANIE. Je voudrois auffi vous inftruire LUCINDE. Moi, j'ai de mon côté, tout examiné bien, MELANIE. Isabelle, courage, ouvrez-nous votre cœur ; Vous avez parlé la premiere. ISABELLE. Je ne me ferai pas beaucoup prier, ma fœur. L'une & l'autre, écoutez. Dans cet appartement Nous fommes feules. LUCINDE. Oui, dévoilez hardiment Vos fentimens à notre vûe. ISABELLE. Je ne veux pas au moins que la chofe foit fçûe. MELANIE. Votre fecret fera gardé fidelement, Puifque le nôtre auffi demande un grand filence. ISABELLE. J'ai, depuis peu de jours, fait, non pas un amant ; Car ce n'est pas chez moi l'ouvrage d'un moment: Mais une aimable connoiffance. C'est un jeune homme plein d'efprit & d'enjoue ment, Qui joint les agrémens à beaucoup de science, Et fait des vers les plus jolis de France. Il m'a parlé pour la premiere fois. Où ? MELANIE. ISABELLE. Dans un fpectacle bourgeois, Où je l'ai vû jouer la Comédie, Et la jouer, mais dans un vrai parfait. Il fait tout ce qu'il veut, l'Amoureux, le Valet, LUCINDE. Voilà des talens merveilleux. ISABELLE. Du refte, il eft galant, & plus badin que tendre. MELANIE. Je vous en félicite, Ifabelle ; tant mieux Il doit vous plaire davantage, Et rien n'affadit plus qu'un langoureux hommage. ISABELLE. Auffi n'eft-il pas de mon goût. Notre amour pour l'efprit,&pour les vers fur-tout, Eft, dans le fond, le feul noeud qui nous lie: S'il recherche mon entretien, C'est Et fi je préfere le fien, pour faire tous deux briller notre génie, De cultiver la Poëfie. Si je devois pourtant faire choix d'un époux, J'aimerois mieux, je l'avoue entre nous Puifqu'il faut que mon cœur fans fard fe montre J'aimerois mieux que ce fût lui qu'un autre. Mes fœurs, à cet égard, dites, me blâmez-vous ? MELANIE. Rien n'eft plus naturel. LUCIND E. Mui, loin que je vous blâme, Je vous applaudis fort, on ne peut mieux penser, Ma fœur ; & fans plus balancer Votre exemple m'invite à vous ouvrir mon ame peu de temps, Je connois,comme vous,depuis fort Un jeune homme des plus charmans. Savant fans le paroître, il perce, en badinant, MELANIE. Vous en gardez, ma fœur, une moitié LUCINDE. moi-même. pour vous. Au Concert, chez Harmophilette, J'y chantois dans un Concerto. Il me loua beaucoup, & nous nous fîmes Politeffe de l'œil, d'abord incognitò; Enfuite il s'approcha;de plus près nous nous vîmes. Tome VIII. L Nous parlâmes à fond Musique, & nous finîmes Par chanter enfemble un Duo. On nous battit des mains, & nous nous applaudî mes. Ce n'eft pas, vous le voyez bien, Une ardeur déclarée, un amour véritable Qui compofe notre lien. Non, c'est de fentiment un rapport favorable. Et chérir tout au plus comme un confrere aimable. La préférence eft jufte & raisonnable. Vous, Mélanie, allons, parlez préfentement. C'est votre tour. LUCINDE. Suivez ce confeil falutaire, Ne perdez pas un feul moment. L'aveu que je viens de vous faire MELANIE. Depuis huit jours auffi, j'ai fait la connoiffance Mais à mes yeux ce qui le rend parfait, |