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Mes motifs, quels qu'ils foient, en rompant ces

liens,

N'étaient pas, à vos yeux auffi puiffans qu'aux

miens.

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Mon intérêt, peut-être, a combattu le vôtre.
Ii eft tems aujourd'hui d'éclairer l'un par l'autre.
Quand les mêmes dangers s'affemblent contre nous,
Je viens vous implorer pour moi-même & pour

vous.

ÉRONIME.

Jugez mieux de mon cœur : il méritait, peut-être, Qu'avant de le bleffer, on daignât le connaître. Croyez, quelques foupçons que vous ayez conçus., Qu'aimé de votre fils ce cœur a des vertus. Achevez, & croyez que mon ame attendrie, S'ouvre à tous vos chagrins & chérit Ifménie.

ISMÉNIE.

Eh bien, apprenez donc vos malheurs & les miens..
Tremblez en préparant ces funeftes liens.

Votre amant veut regner; le Peuple le couronne.
Si ce n'eft qu'à ce prix que votre main fe donne,
Sachez que votre main n'eft qu'un affreux préfent,
Qu'elle approche la mort du cœur de votre amant.
Tous nos Républicains, les Sénateurs, fon frere,
Lui jurent, dès ce jour, une éternelle guerre.
Entouré d'ennemis, entouré d'affaffins,
C'est vous qui le livrez à leurs barbares mains..

Je ne vous donne point de frivoles allarmes
Et ce n'eft point à vous de foupçonner mes larmes.
Hélas! vous entendez la douleur & les cris
De ce cœur maternel qui tremble pour un fils.
Ne vous obftinez point contre la destinée.
Corinthe avec horreur verrait cet hymenée.
Jamais le fang des Rois ne peut regner fur nous,
Timophane vous aime, il n'obéit qu'à vous;
Vous feule vous pouvez l'arracher à vous-même.
C'eft du moins un bonheur de fauver ce qu'on
aime.

Il vivra par vos foins; faites-vous cet effort.
Commandez à l'Amour, & commandez au Sort ;
J'ofe attendre de vous un trait fi magnanime,
Et jugez fi mon cœur eftimait Éronime!

ÉRONIME.

Madame, pardonnez à mon faififfement :
Tant de coups fi cruels portés en un moment;
Ce jour, ce jour affreux qui vient frapper ma vue,
Qui luit avec horreur dans cette ame éperdue
A jetté trop d'effroi dans mes fens interdits
Voilà donc les revers que j'avais preffentis!
Il faudrait renoncer à cette erreur fi chere!
Il ne m'eft pas permis de vous nommer ma mere!
Mais je faurai du moins retrouver dans mon cœur
La force néceffaire à l'instant du malheur :
Vous attendez de moi le plus grand facrifice;
Vous m'en croyez capable, ... & me rendez juftice,
Le fort de votre fils m'eft remis aujourd'hui....
Je ne vous réponds pas de mon pouvoir fur lui;

Je vous réponds de moi.... C'en est assez peut

être.

Mais fongez que ce cœur dont le mien fut le maître, Que ce fils n'a que vous pour confoler fes jours. Qu'il foit heureux par vous; qu'il foit heureux > toujours.

C'est à vous, confie

c'eft aux Dieux que mon amour

Le foin de fon bonheur & le foin de fa vie. Aimez ce fils.... Hélas! vous apprendrez de lui Quel était cet amour que j'immole aujourd'hui ; S'il était généreux, digne enfin de vous plaire : Vous vous plaindrez aux Dieux de n'être point

ma mere.

Adieu, Madame.

SCENE VII.

IS MÉNIE, feule.

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Vous! Dieux, long-tems ennemis! Épargnez les vertus, & me rendez mon fils.

Fin du quatrieme Acte.

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Ous le voyez, amis; le ciel en fa colere A réfolu de perdre ou Corinthe ou mon frere.

Vainement j'ai parlé : vertueux autre-
fois,

Ce peuple trop féduit à méconnu ma voix ;
Et des vrais citoyens qui reftent dans Corinthe,
Ses cris impétueux ont étouffé la plainte.
Timophane, enivré de fes heureux fuccès,
D'un pouvoir odieux fait hâter les apprêts.
Un Thrône eft par fon ordre élevé dans la place;
Il eft prêt à faifir les fruits de fon audace.
Mais tandis qu'occupé de ces coupables foins,
Il nous laiffe en ces lieux raffemblés fans témoins,
Avant que de paffer à des partis extrêmes,

Jugeons encor nos droits,nos projets, & nous-mêmes;

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