LA MERE COQUETTE, COMÉDIE. ACTE PREMIER. SCENE PREMIERE. LAURETTE, CHAMPAGNE. LAURETTE. Tun'es donc pas content? vraiment c'est une honte; Je t'ai baisé deux fois. CHAMPAGNE. Quoi! tu baises par compte? Après un an d'absence, au retour d'un amant, Tu crois que deux baisers ce soit contentement? LAURETTE. Eh! mon Dieu! patience; un de ces jours j'espere Mais parlons de ton maître, et sans déguisement. CHAMPAGNE. N'ai-je pas là-dessus écrit bien amplement? LAURETTE. Oui, qu'on t'avoit fait faire en vain un grand voyage Et que, A ce compte il est mort? CHAMPAGNE. Cela ne veut rien dire; Et ta maîtresse encor n'a que faire de rire. Mais toi, tu me crois donc un sot comme autrefois? LAURETTE. Le mieux du monde. CHAMPAGNE, Ta maîtresse survint qui nous fit séparer: LAURETTE. C'est ta faute. CHAMPAGNE. Ma faute! LAURETTE. Oui, je te le proteste. CHAMPAGNE. Si tu m'aimois assez... LAURETTE. Va, je t'aime de reste. CHAMPAGNE. Quel secret entre amans doit-on jamais avoir? LAURETTE. Tu ne saurois rien taire, et tu veux tout savoir. CHAMPAGNE. Va, va, j'ai vu le monde, et je suis bien changé! LAURETTE. Encor quel secret pourroit-ce être ? CHAMPAGNE. Un secret qui me perd s'il est su de mon maître; Son vieux pere surtout, fâcheux au dernier point, Est homme là-dessus à ne pardonner point. LAURETTE. Je ne puis donc prétendre à savoir ce mystere? |