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Un duel met les gens en mauvaise posture;

Et notre roi n'est pas un monarque en peinture.
Il sait faire obéir les plus grands de l'état,

Et je trouve qu'il fait en digne potentat.

Quand il faut le servir, j'ai du cœur pour le faire; Mais je ne m'en sens point, quand il faut lui déplaire. Je me fais de son ordre une suprême loi :

Pour lui désobéir cherche un autre

que moi. Je te parle, vicomte, avec franchise entière, Et suis ton serviteur en toute autre matière. Adieu.

SCÈNE XI.

ÉRASTE, LA MONTAGNE.

ÉRASTE.

Cinquante fois au diable les fâcheux!

Où donc s'est retiré cet objet de mes vœux?

Je ne sais.

LA MONTAGNE.

ÉRASTE.

Pour savoir où la belle est allée,

Va-t'en chercher par-tout; j'attends dans cette allée.

FIN DU PREMIER ACTE.

BALLET DU PREMIER ACTE.

PREMIÈRE ENTRÉE.

Des joueurs de mail, en criant gare, obligent Éraste à se retirer.

SECONDE ENTRÉE.

Après que les joueurs de mail ont fini, Éraste revient pour attendre Orphise. Des curieux tournent autour de lui pour le connoître, et font qu'il se retire encore pour un moment.

ACTE SECOND.

SCÈNE I

ÉRASTE.

Les fâcheux à la fin se sont-ils écartés?

Je pense qu'il en pleut ici de tous côtés.

Je les fuis, et les trouve; et, pour second martyre,
Je ne saurois trouver celle que je desire.

Le tonnerre et la pluie ont promptement passé,

Et n'ont point de ces lieux le beau monde chassé :
Flût au ciel, dans les dons que ses soins y prodiguent,
Qu'ils en eussent chassé tous les gens qui fatiguent!
Le soleil baisse fort, et je suis étonné

Que mon valet encor ne soit point retourné.

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ALCIPPE.

Console-moi, marquis, d'une étrange partie
Qu'au piquet je perdis hier contre un Saint-Bouvain,
A qui je donnerois quinze points et la main.
C'est un coup enragé qui depuis hier m'accable,
Et qui feroit donner tous les joueurs au diable,
Un coup assurément à se pendre en public.

Il ne m'en faut que deux, l'autre a besoin d'un pic :
Je donne, il en prend six, et demande à refaire;
Moi, me voyant de tout, je n'en voulus rien faire.
Je porte l'as de trèfle (admire mon malheur),
L'as, le roi, le valet, le huit et dix de cœur ;
Et quitte, comme au point alloit la politique,
Dame et roi de carreau, dix et dame de pique.
Sur mes cinq cœurs portés, la dame arrive encor,
Qui me fait justement une quinte major.

Mais mon homme avec l'as, non sans surprise extrême,
Des bas carreaux sur table étale une sixième:

J'en avois écarté la dame avec le roi.

Mais lui fallant un pic, je sortis hors d'effroi,

Et croyois bien du moins faire deux points uniques.
Avec les sept carreaux il avoit quatre piques,
Et, jetant le dernier, m'a mis dans l'embarras
De ne savoir lequel garder de mes deux as.
J'ai jeté l'as de cœur, avec raison, me semble;
Mais il avoit quitté quatre trèfles ensemble,
Et par un six de cœur je me suis vu capot,
Sans pouvoir, de dépit, proférer un seul mot.
Morbleu! fais-moi raison de ce coup effroyable ;
A moins que l'avoir vu, peut-il être croyable?

ÉRASTE.

C'est dans le jeu qu'on voit les plus grands coups du sort.

ALCIPPE.

Parbleu! tu jugeras toi-même si j'ai tort,

Et si c'est sans raison que ce coup me transporte;
Car voici nos deux jeux qu'exprès sur moi je porte :
Tiens, c'est ici mon port, comme je te l'ai dit;

Et voici...

ÉRASTE.

J'ai compris le tout par ton récit,

Et vois de la justice au transport qui t'agite:
Mais pour certaine affaire il faut que je te quitte.
Adieu. Console-toi pourtant de ton malheur.

ALCIPPE.

Qui, moi? j'aurai toujours ce coup-là sur le cœur ;
Et c'est pour ma raison pis qu'un coup de tonnerre.
Je le veux faire, moi, voir à toute la terre.

Il s'en va,

et rentre en disant:

Un six de cœur! Deux points!

ÉRASTE.

En quel lieu sommes-nous?

De quelque part qu'on tourne, on ne voit que des fous.

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Monsieur, je n'ai pu faire une autre diligence.

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