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SCÈNE III.

ALAIN, GEORGETTE.

GEORGETTE.

Ses regards m'ont fait

Mon dieu ! qu'il est terrible! mais une peur

peur,

Et jamais je ne vis un plus hideux chrétien.

ALAIN.

Ce monsieur l'a fâché; je te le disois bien.

GEORGETTE.

horrible

Mais que diantre est-ce là, qu'avec tant de rudesse Il nous fait au logis garder notre maîtresse?

D'où vient qu'à tout le monde il veut tant la cacher, Et qu'il ne sauroit voir personne en approcher?

ALAIN.

C'est que cette action le met en jalousie.

GEORGETTE.

Mais d'où vient qu'il est pris de cette fantaisie?

ALAIN.

Cela vient... Cela vient de ce qu'il est jaloux.

GEORGETTE.

Oui mais pourquoi l'est-il ? et pourquoi ce courroux?

ALAIN.

C'est que la jalousie... entends-tu bien, Georgette?
Est une chose... là... qui fait qu'on s'inquiéte...
Et qui chasse les gens d'autour d'une maison.
Je m'en vais te bailler une comparaison,
Afin de concevoir la chose davantage :

Dis-moi, n'est-il pas vrai, quand tu tiens ton potage,
Que, si quelque affamé venoit pour en manger,
Tu serois en colère et voudrois le charger

GEORGETTE.

Oui, je comprends cela.

ALAIN.

C'est justement tout comme

La femme est en effet le potage de l'horome;

Et quand un homme voit d'autres hommes parfois Qui veulent dans sa soupe aller tremper leurs doigts, Il en montre aussitôt une colère extrême.

GEORGETTE.

Oui : mais pourquoi chacun n'en fait-il pas de même, Et que nous en voyons qui paroissent joyeux

Lorsque leurs femmes sont avec les beaux monsieux'

ALAIN.

C'est que chacun n'a pas cette amitié goulue

Qui n'en veut que pour soi.

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SCÈNE IV.

ARNOLPHE, ALAIN, GEORGETTE.

ARNOLPHE, à part.

Un certain Grec disoit à l'empereur Auguste,
Comme une instruction utile autant que juste,
Que, lorsqu'une aventure en colère nous met,
Nous devons, avant tout, dire notre alphabet,
Afin que dans ce temps la bile se tempère,
Et qu'on ne fasse rien que l'on ne doive faire.
J'ai suivi sa leçon sur le sujet d'Agnès,
Et je la fais venir dans ce lieu tout exprès,
Sous prétexte d'y faire un tour de promenade,
Afin que les soupçons de mon esprit malade
Puissent sur le discours la mettre adroitement,
Et, lui sondant le cœur,
s'éclaircir doucement.

SCÈNE V.

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ARNOLPHE, AGNÈS, ALAIN, GEORGETTE.

Venez, Agnès.

ARNOLPHE.

(à Alain et à Georgette. }

Rentrez.

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C'est dommage: mais quoi! Nous sommes tous mortels, et chacun est pour soi. Lorsque j'étois aux champs n'a-t-il point fait de pluie ?

AGNÈS.

Non.

ARNOLPHE.

Vous ennuyoit-il?

AGNÈS.

Jamais je ne m'ennuie.

ARNOLPHE.

Qu'avez-vous fait encor ces neuf ou dix jours-ci?

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