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ÉLISE.

Et moi je l'ai trouvée fort courte.

URANIE.

C'est que les beaux esprits, cousine, aiment

la solitude.

ÉLISE.

Ah! très humble servante au bel esprit! vous

savez que ce n'est

pas là que je vise.

URANIE.

Pour moi, j'aime la compagnie, je l'avoue.

ÉLISE.

Je l'aime aussi, mais je l'aime choisie; et la quantité des sottes visites qu'il vous faut essuyer parmi les autres est cause bien souvent que je prends plaisir d'être seule.

URANIE.

La délicatesse est trop grande de ne pouvoir souffrir que des gens triés.

ÉLISE.

Et la complaisance est trop générale de souffrir indifféremment toutes sortes de personnes.

URANIE.

Je goûte ceux qui sont raisonnables, et me divertis des extravagants.

ÉLISE.

Ma foi, les extravagants ne vont guère loin sans vous ennuyer, et la plupart de ces gens-là ne

sont plus plaisants dès la seconde visite. Mais, à propos d'extravagants, ne voulez-vous pas me défaire de votre marquis incommode? Pensezvous me le laisser toujours sur les bras, et què je puisse durer à ses turlupinades perpétuelles?

URANIE.

Ce langage est à la mode, et on le tourne en plaisanterie à la cour.

ÉLISE.

Tant pis pour ceux qui le font, et qui se tuent tout le jour à parler ce jargon obscur. La belle chose de faire entrer aux conversations du Louvre de vieilles équivoques ramassées parmi les boues des halles et de la place Maubert! La jolie façon de plaisanter, pour des courtisans ! et qu'un homme montre d'esprit lorsqu'il vient vous dire : Madame, vous êtes dans la place royale, et tout le monde vous voit de trois lieues de Paris, car chacun vous voit de bon œil! à cause que Bonneuil est un village à trois lieues d'ici. Cela n'es-il pas bien galant et bien spirituel ? Et ceux qui trouvent ces belles rencontres n'ont-ils pas lieu de s'en glorifier?

URANIE.

On ne dit pas cela aussi comme une chose spirituelle; et la plupart de ceux qui affectent

ce langage savent bien eux-mêmes qu'il est ridi

cule.

ÉLISE.

Tant pis encore de prendre peine à dire des sottises, et d'être mauvais plaisants de dessein formé. Je les en tiens moins excusables; et si j'en étois juge, je sais bien à quoi je condamnerois tous ces messieurs les turlupins.

URANIE.

Laissons cette matière qui t'échauffe un peu trop, et disons que Dorante vient bien tard, à mon avis, pour le souper que nous devons faire

ensemble.

ÉLISE.

Peut-être l'a-t-il oublié, et que...

SCÈNE II.

URANIE, ÉLISE, GALOPIN.

GALOPIN.

Voilà Climene, madame, qui vient ici pour

vous voir.

URANIE.

Hé! mon Dien! quelle visite!

ÉLISE.

Vous vous plaigniez d'être seule : aussi le ciel

vous en punit.

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Diantre soit le petit vilain! Je vous apprendra bien à faire vos réponses de vous-mčane.

GALOPIN

Je vais lui dire, madame, que vous voulez étre

sortie.

URANIL.

Arretez, anima, et ia laissez monter, plusque la sotuse est faite.

GALOPIN.

Elie parle encore a un homme dans in tur.

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Ai cousine, que cetic Visit In Callaszt a T'heure qu'il est .

ÉLIST

I est vra que & aduc est un peu Callas

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lité, c'est la plus sotte bête qui se soit jamais

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Allez, allez, elle mérite bien cela, et quelque chose de plus, si on lui faisoit justice. Est-ce qu'il y a une personne qui soit plus véritablement qu'elle ce qu'on appelle précieuse, à prendre le mot dans sa plus mauvaise signification?

URANIE.

Elle se défend bien de ce nom pourtant.
ÉLISE.

Il est vrai, elle se défend du nom, mais non pas de la chose; car enfin elle l'est depuis les pieds jusqu'à la tête, et la plus grande façonnière du monde. Il semble que tout son corps soit démonté, et que les mouvements de ses hanches, de ses épaules et de sa tête, n'aillent que par ressorts. Elle affecte toujours un ton de voix languissant et niais, fait la moue pour montrer une petite bouche, et roule les yeux pour les faire paroître grands.

URANIE.

Doucement donc. Si elle venoit à entendre...

ELISE.

Point, point: elle ne monte pas encore. Je me

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