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Vite, puisque monsieur à cela se résout,

Donnez un siège ici.

SGANAKELLE.

Je veux parler debout.
VALÈRE.

Vous souffrir de la sorte!

SGANARELLE.

Ah! contrainte effroyable!

VALÈRE.

Cette incivilité seroit trop condamnable.

SGANARELLE.

C'en est une que rien ne sauroit égaler,
De n'ouïr pas les gens qui veulent nous parler.

Je vous obéis donc.

VALÈRE.

SGANARELLE.

Vous ne sauriez mieux faire.

(Ils font de grandes cérémonies pour se couvrir.) Tant de cérémonie est fort peu nécessaire.

Voulez-vous m'écouter?

VALÈRE.

Sans doute, et de grand cœur.

SGANARELLE.

Savez-vous, dites-moi, que je suis le tuteur
D'une fille assez jeune et passablement belle,
Qui loge en ce quartier, et qu'on nomme Isabelle?

Dui.

VALÈRE.

SGANARELLE.

Si vous le savez, je ne vous l'apprends pas.

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Que vos secrets desirs lui sont assez connus,

Et

que c'est vous donner des soucis superflus De vouloir davantage expliquer une flamme Qui choque l'amitié que me garde son ame. VALÈRE.

C'est elle, dites-vous, qui de sa part vous fait...

SGANARELLE.

Oui, vous venir donner cet avis franc et net;
Et qu'ayant vu l'ardeur dont votre ame est blessée,
Elle vous eût plus tôt fait savoir sa pensée,
Si son cœur avoit eu, dans son émotion,
A qui pouvoir donner cette commission:
Mais qu'enfin la douleur d'une contrainte extrême
L'a réduite à vouloir se servir de moi-même,
Pour vous rendre averti, comme je vous ai dit,
Qu'à tout autre que moi son cœur est interdit;
Que vous avez assez joué de la prunelle;

Et que,

si vous avez tant soit peu de cervelle, Vous prendrez d'autres soins. Adieu jusqu'au revoir. Voilà ce que j'avois à vous faire savoir.

VALÈRE, bas.

Ergaste, que dis-tu d'une telle aventure?

SGANARELLE, bas, à part.

Le voilà bien surpris!

ERGASTE, bas, à Valère.

Selon ma conjecture,

Je tiens qu'elle n'a rien de déplaisant pour vous
Qu'un mystère assez fin est caché là-dessous,
Et qu'enfin cet avis n'est pas d'une personne
Qui veuille voir cesser l'amour qu'elle vous donne.

SCANARELLE, à part.

Il en tient comme il faut.

VALÈRE, bas, à Ergaste.

Tu crois mystérieux...

ERGASTE, bas.

Oui... Mais il nous observe, ôtons-nous de ses yeux.

SCÈNE IV.

SGANARELLE.

Que sa confusion paroît sur son visage!
Il ne s'attendoit pas, sans doute, à ce message.
Appelons Isabelle: elle montre le fruit

Que l'éducation dans une ame produit;

La vertu fait ses soins, et son cœur s'y consomme Jusques à s'offenser des seuls regards d'un homme.

SCÈNE V.

ISABELLE, SGANARELLE.

ISABELLE, bas, en ́entrant.

J'ai peur que mon amant, plein de sa passion,
N'ait
pas de mon avis compris l'intention;

Et j'en veux, dans les fers où je suis prisonnière,
Hasarder un qui parle avec plus de lumière.

Me voilà de retour.

SGANARELLE.

ISABELLE.

Hé bien?

SGANARELLE.

Un plein effet

A suivi tes discours, et ton homme a son fait.
Il me vouloit nier que son cœur fût malade:
Mais lorsque de ta part j'ai marqué l'ambassade,
Il est resté d'abord et muet et confus;

Et je ne pense pas qu'il y revienne plus.

ISABELLE.

Ah! que me dites-vous? J'ai bien peur du contraire, Et qu'il ne nous prépare encor plus d'une affaire.

SGANARELLE.

Et sur quoi fondes-tu cette peur que tu dis?

ISABELLE.

Vous n'avez pas été plus tôt hors du logis,
Qu'ayant, pour prendre l'air, la tête à ma fenêtre,
J'ai vu dans ce détour un jeune homme paroître,
Qui d'abord, de la part de cet impertinent,
Est venu me donner un bonjour surprenant,
Et m'a, droit dans ma chambre, une boîte jetée
Qui renferme une lettre en poulet cachetée.
J'ai voulu sans tarder lui rejeter le tout;
Mais ses pas de la rue avoient gagné le bout,
Et je m'en sens le cœur tout gros de fâcherie.

SGANARELLE.

Voyez un peu la ruse et la friponnerie!

ISABELLE.

Il est de mon devoir de faire promptement

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