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SCANARELLE.

Enfin vos propres yeux jugeront de l'affaire,
J'ai fait venir déja commissaire et notaire:
Nous avons intérêt que l'hymen prétendu
Répare sur-le-champ l'honneur qu'elle a perdu;
Car je ne pense pas que vous soyez si lâche
De vouloir l'épouser avecque cette tache,

Si vous n'avez encor quelques raisonnements
Pour vous mettre au-dessus de tous les bernements.

ARISTE.

Moi? Je n'aurai jamais cette foiblesse extréme
De vouloir posséder un cœur malgré lui-même.
Mais je ne saurois croire enfin...

SCANARELLE.

Que de discours!

Allons, ce procès-là continueroit toujours.

SCÈNE VII.

UN COMMISSAIRE, UN NOTAIRE, SCANARELLE, ARISTE.

LE COMMISSAIRE.

Il ne faut mettre ici nulle force en usage,
Messieurs ; et, si vos vœux ne vont qu'au mariage,
Vos transports en ce lieu se peuvent apaiser.
Tous deux également tendent à s'épouser;
Et Valère déja, sur ce qui vous regarde,

A signé que pour femme il tient celle qu'il garde.

La fille...?

ARISTE.

LE COMMISSAIRE.

Est renfermée, et ne veut point sortir Que vos desirs aux leurs ne veuillent consentir.

SCÈNE VIII.

VALÈRE, UN COMMISSAIRE, UN NOTAIRE,
SGANARELLE, ARISTE.

VALERE, à la fenêtre de sa maison.

Non, messieurs; et personne ici n'aura l'entrée
Que cette volonté ne m'ait été montrée.
Vous savez qui je suis, et j'ai fait mon devoir
En vous signant l'aveu qu'on peut vous faire voir.
Si c'est votre dessein d'approuver l'alliance,
Votre main peut aussi m'en signer l'assurance;
Sinon, faites état de m'arracher le jour,
Plutôt que de m'ôter l'objet de mon amour.

SGANARELLE.

Non, nous ne songeons pas à vous séparer d'elle. (bas, à part.)

Il ne s'est point encor détrompé d'Isabelle:

Profitons de l'erreur.

ARISTE, à Valère.

Taisez-vous.

Mais est-ce Léonor?

SGANARELLE, à Ariste..

Mais...

ARISTE.

SGANARELLE.
Paix donc.

ARISTE.

Je veux savoir...

SGANARELLE.

Encor?

Vous tairez-vous? vous dis-je.

VALÈRE.

Enfin, quoi qu'il avienne,

Isabelle a ma foi ; j'ai de même la sienne;
Et ne suis point un choix, à tout examiner,
Que vous soyez reçus à faire condamner.

ARISTE, à Sganarelle.

Ce qu'il dit là n'est pas...

SGANARELLE.

Taisez-vous, et pour cause;

(à Valère.)

Vous saurez le secret. Oui, sans dire autre chose,
Nous consentons tous deux que vous soyez l'époux
De celle qu'à présent on trouvera chez vous.

LE COMMISSAIRE.

C'est dans ces termes-là que la chose est conçue,
Et le nom est en blanc, pour ne l'avoir point vue.
Signez... La fille après vous mettra tous d'accord.
VALÈRE.

J'y consens de la sorte.

SGANARELLE.

Et moi, je le veux fort.

(à part.)

(haut.)

Nous rirons bien tantôt. Là, signez donc, mon frère;

L'honneur vous appartient.

ARISTE.

Mais quoi! tout ce mystère...

SGANARELLE.

Diantre! que de façons! Signez, pauvre butor.

ARISTE.

Il parle d'Isabelle, et vous de Léonor.

SGANARELLE.

N'êtes-vous pas d'accord, mon frère, si c'est elle,
De les laisser tous deux à leur foi mutuelle?

Sans doute.

ARISTE.

SGANARELLE.

Signez donc ; j'en fais de méme aussi.

ARISTE.

Soit. Je n'y comprends rien.

SGANARELLE.

Vous serez éclairci.

LE COMMISSAIRE.

Nous allons revenir.

SGANARELLE., à Ariste.
Or çà, je vais vous dire

La fin de cette intrigue.

(Ils se retirent dans le fond du théâtre. )

SCÈNE IX.

LÉONOR, SGANARELLE, ARISTE, LISETTE.

LÉONOR.

O l'étrange martyre!

Que tous ces jeunes fous me paroissent fâcheux?
Je me suis dérobée au bal pour l'amour d'eux.

LISETTE.

Chacun d'eux près de vous veut se rendre agréable.
LÉONOR.

Et moi, je n'ai rien vu de plus insupportable;
Et je préfèrerois le plus simple entretien

A tous les contes bleus de ces diseurs de rien.
Ils croient que tout cède à leur perruque blonde,
Et pensent avoir dit le meilleur mot du monde,
Lorsqu'ils viennent, d'un ton de mauvais goguenard,
Vous railler sottement sur l'amour d'un vieillard;
Et moi d'un tel vieillard je prise plus le zėle

Que tous les beaux transports d'une jeune cervelle.
Mais n'aperçois-je pas...?

SCANARELLE, à Ariste.

( apercevant Léonor.)

Oui, l'affaire est ainsi.

Ah! je la vois paroître, et sa suivante aussi.

ARISTE.

Léonor, sans courroux, j'ai sujet de me plaindre.
Vous savez si jamais j'ai voulu vous contraindre,
Et si plus de cent fois je n'ai pas protesté

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