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contraire, qu'avec une certaine atténuation s'il s'agit de peines perpétuelles (travaux forcés à perpétuité ou déportation). Ces dernières peines, en effet, seront remplacées à son égard, en cas de circonstances de lui ignorées, par la peine des travaux forcés à temps. Toujours est-il que, même dans ce dernier cas, il subit l'influence aggravante de circonstances à lui inconnues. Qu'il ait recélé, par exemple, des objets, les croyant soustraits par vol simple, tandis qu'ils l'avaient été par vol sur un chemin public, de nuit et avec armes, ou au moyen d'un meurtre, ce ne sera point la peine du vol simple, mais bien celle des travaux forcés à temps qui devra être prononcée contre lui (ci-dess., no 1305).

1314. A l'égard de l'influence des faits de nature à atténuer la criminalité, il est une disposition particulière de notre Code pénal qui doit être signalée ici. Dans les cas de soustractions commises entre conjoints, entre ascendant et descendant, ou alliés au même degré, lesquelles, aux termes de l'article 380 de ce Code, ne peuvent donner lieu à poursuite pénale, ceux qui n'auront été que complices de pareilles soustractions profiteront de l'excuse absolutoire qui couvre les auteurs, à moins qu'ils n'aient recélé ou appliqué à leur profit, en totalité ou en partie, les objets soustraits, auquel cas ils seront punis comme coupables de vol (1). La même pénalité leur serait applicable si, au lieu d'avoir été simplement complices, ils avaient été coauteurs.

1315. Telles sont les règles touchant la complicité, dans notre droit positif, en fait de crimes ou de délits de police correctionnelle. - Quant aux contraventions de simple police, la complicité, à moins de disposition spéciale contraire, n'y est frappée d'aucune peine. Nous avons l'exemple de semblables dispositions spéciales exceptionnelles dans les articles 479, n° 8, et 480, no 5 du Code pénal, en vertu desquels les complices de bruits ou tapages injurieux ou nocturnes, troublant la tranquillité des habitants (ceux, par exemple, qui auraient sciemment prêté les ustensiles ou instruments destinés à donner un charivari), sont soumis à la même peine que les auteurs.

1316. Indépendamment des règles qui précèdent, sur la complicité, il faut remarquer que la pluralité d'agents se présente quelquefois avec un caractère particulier dans la constitution des crimes ou des délits. Ainsi il peut arriver qu'elle fasse partie des éléments constitutifs eux-mêmes, de telle sorte que le crime ou le délit n'existe pas sans cette pluralité d'agents : sont, par exemple, les délits d'attroupement, d'association de

tels

(1) Code pénal, art. 380: Les soustractions commises par des maris au préjudice de leurs femmes, par des femmes au préjudice de leurs maris... etc., ne pourront donner lieu qu'à des réparations civiles. A l'égard de tous autres individus qui » auraient recélé ou appliqué à leur profit tout ou partie des objets volés, ils seront • punis comme coupables de vol.

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malfaiteurs, d'association non autorisée de plus de vingt personnes, de coalition de maîtres ou d'ouvriers ou de détenteurs d'une marchandise pour agir illicitement sur le prix des salaires ou des denrées, de pillage ou dégât de denrées en réunion ou bande, et autres semblables (1). Il peut arriver, en d'autres cas, qu'elle y forme circonstance aggravante comme dans la rébellion, suivant qu'elle a été commise par une ou deux personnes armées, par trois ou plus jusqu'à vingt, ou bien par plus de vingt; dans la mendicité en réunion; dans les vols commis par deux ou plusieurs personnes (2).

Il faut examiner dans ces divers cas: 1° si la condition constitutive ou la circonstance aggravante sont attachées à une pluralité d'agents en général, ou à un nombre déterminé d'agents; 2o si dans ces agents doivent être comptés tous ceux qui ont participé d'une manière quelconque au crime ou au délit, en une quelconque de ses phases; ou seulement ceux qui ont participé de leur propre personne, par une coopération physique dans l'exécution même. La solution ne sera pas toujours la même. Ainsi, par exemple, dans cette circonstance aggravante que le vol ait été commis par deux ou plusieurs personnes, il est clair qu'il s'agit d'agents ayant coopéré physiquement à l'exécution même du vol, soit comme coauteurs, soit comme auxiliaires; mais ceux qui auraient provoqué, donné des instructions, fourni des instruments ou moyens, sans autre assistance, n'y devraient pas être compris. Au contraire, dans les cas des articles 123, 265, 414, 419 du Code pénal, il en serait autrement. Tout dépend, en cela, de la nature du délit et des dispositions textuelles de la loi.

CHAPITRE V. ·

DE LA PLURALITÉ DE PATIENTS DU DÉLIT.

1317. Le nombre de personnes qui se trouvent directement atteintes par le délit doit entrer indubitablement comme un élément d'aggravation dans la mesure de ce délit, car, d'une part, il y a plus de culpabilité chez l'agent pour avoir embrassé un plus grand nombre de victimes dans son intention et dans ses actes, et, d'autre part, il y a un plus grand préjudice dans l'événement. Mais la question délicate en droit pénal est de savoir précisément s'il peut y avoir unité de délit lorsqu'il y a pluralité de victimes; ou, en d'autres termes, si du moment que l'agent a atteint

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plusieurs personnes par ses acles, il n'y a pas à sa charge autant de délits que de personnes atteintes.

1318. Aucun doute sérieux n'existe lorsque c'est par un seul et même acte que le résultat s'est produit: comme si par l'empoisonnement d'un même breuvage ou d'un même aliment plusieurs personnes ont péri, par un seul et même coup de fusil deux ou plusieurs personnes ont été atteintes et tuées, par la soustraction frauduleuse d'une malle qui contient des effets divers appartenant à des propriétaires différents plusieurs personnes sont volées. Dans ces divers cas, malgré la pluralité de victimes, il n'y a qu'un seul crime ou délit d'empoisonnement, d'homicide, de vol, parce qu'il n'y a de la part de l'agent qu'un seul fait. Il est vrai que si vous considérez la personne des sujets passifs du délit vous trouverez divers droits violés, il est vrai encore qu'il pourra se présenter dans les faits cette singularité que l'une de ces personnes, par exemple, aura été tuée et l'autre seulement blessée, qu'à l'égard de l'une il y aura cu chez l'agent intention criminelle, et à l'égard de l'autre non-intention; mais si vous considérez la personne de cet agent, en laquelle réside le principe fondamental de la culpabilité, vous ne trouverez qu'un acte et par conséquent qu'un délit; le fait principal, le fait le plus grave qui prédomine déterminera le caractère de l'incrimination; les autres événements ne s'y joindront qu'à titre d'accessoires, comme causes aggravantes de cette incrimination (ci-dess., no 1149).

1319. La difficulté est plus grande lorsque c'est par une succession d'actes, liés entre eux par l'unité de dessein, d'impulsion ou d'occasion, que le résultat a eu lieu par exemple, si dans une même rixe et dans la même chaleur de main l'agent a frappé, blessé ou tué par des coups successifs deux personnes; si en dévalisant une maison il a enlevé, dans la même expédition, aux divers étages, des objets qu'il savait appartenir à différents propriétaires. S'il n'y avait qu'une victime il faudrait décider, en un grand nombre de ces cas, que le délit est un, quoique composé d'actes multiples (ci-dess., no 758 et 1150). Mais du moment qu'il y en a plusieurs, le délinquant, que nous supposons avoir agi en connaissance de ce fait, a bien su que l'un de ses actes violant le droit d'une personne, l'acte suivant violait le droit d'une autre ce qui est une raison, à notre sens, pour voir là plusieurs délits, quoique connexes. Il faudrait que le lien entre ces divers actes fùt bien étroit et les hypothèses bien particulières pour en décider autrement. — Il est vrai que cette solution n'a guère d'intérêt pratique chez nous, en présence de notre règle touchant le cumul des délits à punir (ci-dess., nos 1164 et suiv.); elle pourrait cependant en avoir une fort grande dans le cas de l'ar ticle 304 du Code pénal (ci-dess., no 1178).

RÉSUMÉ DU LIVRE PREMIER.

(PART. II, TIT. IV.)

PLURALITÉ DE DÉLITS.

PLURALITÉ D'AGENTS OU DE PATIENTS DU DÉLIT.

Après l'hypothèse simple d'un seul délit, d'un seul agent et d'un seul patient du délit, les données du problème pénal peuvent se compliquer et présenter pluralité soit de délits, soit d'agents, soit de patients des délits. Ces complications sont de différentes sortes et se désignent sous des noms différents.

CUMUL DE DÉLITS OU RÉITÉRATION.

Cette situation est celle dans laquelle l'agent s'est rendu coupable de plusieurs délits n'ayant encore été condamné pour aucun d'où la conséquence que ces délits sont tous encore à punir. Elle est désignée fréquemment sous la dénomination de concours de délits; nous préférons comme plus exacte celle de cumul, et nous dirions volontiers pour plus de précision cumul de délits à punir. L'expression de réitération, aussi employée, convient particulièrement au cas où c'est le même délit qui a été commis plusieurs fois.

Qu'il s'agisse de mêmes délits ou de délits différents, le problème pénal est de savoir quelle peine on fera subir au coupable pour lui faire expier tous les délits cumulés. — Là-dessus, deux systèmes radicaux se sont produits. L'un exprimé par cette formule: « Le cumul des délits emporte cumul des peines; » et l'autre par celle-ci : « La plus forte peine absorbe toutes les autres. » Le premier pèche par excès de peine, le second par insuffisance. Ce dernier ne s'est produit que parce qu'il y a des cas, en effet, où l'absorption est forcée. Ainsi la peine de mort absorbe forcément toutes les autres peines corporelles. Mais à part ces cas, dans lesquels il est impossible qu'il en soit autrement, on n'est pas fondé à transformer en règle générale ce qui n'est qu'une nécessité exception-nelle à subir. La solution rationnelle serait de procéder non pas par addition des peines, mais par aggravation, au moyen de la combinaison d'une peine qui serait comme la résultante générale de tous les délits cumulés.

Notre législateur de 1808, suivant en cela la trace de celui de 1791 et de brumaire an IV, a adopté la règle de l'absorption, formulée seulement dans le Code d'instruction criminelle, en ces termes, article 365: «En cas de conviction de plusieurs crimes ou délits, la peine la plus » forte sera scule prononcée.

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Bien que cet article ne soit placé que sous le titre des affaires soumises au jury, la règle doit être appliquée tant devant les tribunaux de police. correctionnelle que devant les cours d'assises. Bien qu'elle ne soit ré

digée que pour le cas de poursuites simultanées, elle doit être étendue aux cas de poursuites séparées; mais cette dernière hypothèse présente des difficultés pratiques auxquelles il faut donner grande attention, suivant que les poursuites ont commencé par le crime ou par le délit le plus grave, ou par le moins grave; et suivant que le maximum de la peine la plus forte a été ou n'a pas encore été épuisé.

L'article ne parlant pas des contraventions de simple police, et les raisons à l'égard de ces sortes de contraventions n'étant plus les mêmes, la règle de l'absorption ne s'y applique pas : les peines seront additionnées. La règle ne s'applique pas non plus aux crimes ou délits prévus par des lois spéciales lorsque ces lois y font exception expresse, ou même lorsque cette exception, sans être textuellement formulée, résulte, par voie de conséquence, soit de dispositions dans lesquelles elle se trouve implicitement contenue, soit du caractère et de l'esprit particulier de la loi spéciale. Les exemples de pareils cas sont nombreux dans nos lois spéciales. Depuis 1835 notre législateur, en plusieurs de ces lois à part, est entré dans une nouvelle voie : il s'est mis à distinguer entre les crimes ou délits cumulés ceux qui ont été commis avant le premier acte de poursuite et ceux qui ont été commis après, maintenant la règle de l'absorption quant aux premiers, et ordonnant ou permettant le cumul des peines quant aux seconds.

Il est un cas particulier dans lequel le cumul des crimes donne lieu, chez nous, à une aggravation considérable de peine, c'est celui de l'article 304 de notre Code pénal, d'après lequel: « Le meurtre emportera » la peine de mort lorsqu'il aura précédé, accompagné ou suivi un autre

>> crime. »>

RÉCIDIVE.

La récidive est le fait de celui qui, après une première condamnation prononcée contre lui pour infraction à la loi pénale, commet une nou velle infraction. Le mot de récidive est plus énergique que celui de réitération; on peut, en effet, réitérer de bonnes comme de mauvaises actions, tandis que dans le mot récidive (de recidere, en notre vieux langage ren-cheoir), il y a forcément l'idée d'une première et d'une seconde chute.

La situation diffère de la précédente en ce que le seul délit qui soit ici à punir c'est le dernier, celui qui ne l'a pas encore été; quant aux délits antérieurs, ils ont été frappés de condamnation, la peine en a été subie ou est à subir, il n'y a plus à revenir là-dessus.

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au point de vue de La récidive mérite une aggravation de peine : la justice, parce qu'elle dénote chez le délinquant une persistance à enfreindre la loi pénale, qui augmente incontestablement sa culpabilité;

au point de vue de l'utilité sociale, parce qu'elle dénote un danger plus grand d'infraction à la loi pénale de la part du récidiviste, et l'impuissance de la pénalité ordinaire contre ce récidiviste. ·

Sous ce dernier rapport, la science pénale arrive à démontrer qu'à l'égard des crimes ou des délits qui passent facilement à l'état chronique et contagieux, qui tournent en une sorte de métier ou de profession, et fournissent la classe des récidivistes les plus dangereux, ce n'est pas seulement une aggra vation, c'est une transformation de la peine, qui est nécessaire pour garantir la société.

Les récidives se distinguent en récidives spéciales, ou récidives du

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