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1638. Pour les peines criminelles: Il faut avoir sous les yeux les deux échelles parallèles des peines, l'une de droit commun, l'autre de l'ordre politique, et placer au-dessous, à cheval sur l'une et sur l'autre, comme formant un dernier échelon pour chacune d'elles, les peines de l'article 401 du Code pénal (1). Le législateur de 1832 a choisi, pour cette destination, cet article 401, comme présentant la réunion la plus convenable à cet effet des diverses peines employées en police correctionnelle.

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Peines de l'article 401.

Emprisonnement d'un an à cinq ans.

Amende facultative, de seize francs à 500 francs.

Interdiction facultative des droits civiques, civils ou de famille, de cinq ans à dix ans.

Mise en surveillance facultative, de cinq ans à dix ans.

Cela posé, la règle générale d'atténuation est que le juge, par suite de la déclaration de circonstances atténuantes, a la faculté, en se tenant toujours sur l'échelle dont il s'agit dans la cause, de descendre d'un ou de deux échelons. Avec ces observations : 1° que les peines de l'article 401 formeront, pour l'une et pour l'autre échelle, un dernier échelon supplémentaire, auquel s'arrête l'atténuation; 2° que les peines du bannissement et de la dégradation civique paraissant trop peu efficaces, et souvent illusoires, le juge les franchira toujours sans s'y arrêter dans son calcul d'atténuation, de telle sorte qu'il arrivera alors d'un seul coup aux peines de l'article 401; 3° que lorsque ces peines de l'ar

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atténuantes, la cour appliquera le minimum de la peine, ou mème la peine inférieure. Dans tous les cas où la peine de l'emprisonnement et celle de l'amende » sont prononcées par le Code pénal, si les circonstances paraissent atténuantes, les tribunaux correctionnels sont autorisés, même en cas de récidive, à réduire l'empri⚫ sonnement même au-dessous de six jours, et l'amende même au-dessous de seize fr.; ils pourront aussi prononcer séparément l'une ou l'autre de ces peines, et même substituer l'amende à l'emprisonnement, sans qu'en aucun cas elle puisse être audessous des peines de simple police. »

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Loi sur la déportation, du 8 juin 1850, art. 2. (Voir le texte de cet article, cidess., p. 686, en note.)

(1) Code pénal. Art. 401. Les autres vols non spécifiés dans la présente section, les larcins et filouteries, ainsi que les tentatives de ces mêmes délits, seront punis • d'un emprisonnement d'un an au moins et de cinq ans au plus, et pourront même

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» l'être d'une amende qui sera de seize francs au moins et de cinq cents' francs au plus. Les coupables pourront encore être interdits des droits mentionnés en l'article 42 du présent Code, pendant cinq ans au moins et dix ans au plus, à compter du jour où ils auront subi leur peine. Ils pourront aussi être mis, par l'arrêt ou le jugement, sous la surveillance de la haute police pendant le même nombre d'années. ▾

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ticle 401 seront ainsi substituées à la réclusion, l'emprisonnement ne pourra pas être moindre de deux ans, et dans les autres cas d'un an;4° que lorsqu'il s'agit d'un cas dans lequel la loi pénale prononce le maximum de la peine, le minimum de cette peine comptera pour le premier degré d'abaissement, et la peine inférieure pour le second; 5° enfin, que lorsqu'il s'agira de la déportation dans une enceinte fortifiée appliquée à raison des crimes prévus aux articles 86, 96 et 97 du Code pénal, l'abaissement ne sera que d'un degré, c'est-à-dire fera descendre seulement à la déportation simple. La loi du 8 juin 1850, art. 2, l'a ainsi ordonné par modification de l'article 463 de 1832, qui voulait qu'on enjambât dans le cas de ces articles, de l'échelle de l'ordre politique à l'échelle de droit commun, et qu'on appliquât les travaux forcés à perpétuité ou les travaux forcés à temps. La loi du 10 juin 1853, qui a modifié l'article 86 du Code pénal, n'a changé en rien cette règle de la loi du 8 juin 1850. Dès que les juges, décidant que le crime dont il s'agit est politique, y appliquent au lieu de la peine de mort la déportation dans une enceinte fortifiée, l'atténuation pour cause de circonstances atténuantes doit suivre la règle de la loi de 1850 et se mouvoir sur l'échelle de l'ordre politique.

1639. Pour les peines correctionnelles ou de simple police, on peut dire véritablement que l'atténuation est à la discrétion du juge, aucun minimum ne lui étant imposé, si ce n'est celui de un franc d'amende. C'est bien, quant à cette atténuation, la démission du législateur dans les mains du juge.- Rappelons-nous ici que, lorsque l'emprisonnement correctionnel ou l'amende sont ainsi abaissés même jusqu'au taux de simple police, ils ne cessent pas pour cela d'appartenir à la police correctionnelle; ce qui a son importance pratique quant à l'emprisonnement, par rapport à l'établissement dans lequel il devra se subir, et quant à l'amende, par rapport à l'allocation différente qui en sera faite (ci-dess., n° 1594).

1640. Le texte de l'article 463 ne s'explique pas sur ce qui regarde les peines accessoires.-Quant aux incapacités ou déchéances de droits qui sont attachées comme une conséquence à la peine prononcée elle-même, il n'y a pas de difficulté: selon que le juge, par suite de l'abaissement pour cause de circonstances alténuantes, applique telle peine ou telle autre, les conséquences de cette peine marchent avec elle. Mais quant aux peines accessoires qui n'ont pas ce caractère, telles que la surveillance de la haute police dans les cas où, au lieu d'être attachée de plein droit à la peine, c'est le juge qui est chargé de la prononcer en vertu de quelque texte particulier, ou la confiscation spéciale de certains objets, nous adoptons les décisions de la jurisprudence pratique, savoir que la reconnaissance des circonstances attenuantes autorise le juge à se dispenser, même en face d'un texte impératif, de

prononcer la mise en surveillance; mais qu'il n'en est pas de même pour la confiscation.

1641. Lorsque la même cause présente à la fois des circonstances aggravantes, des excuses et des circonstances atténuantes, voici comment et dans quel ordre le juge doit opérer. Il doit : 1° Se reporter à la peine édictée par la loi contre le crime ou le délit à l'état normal; 2° Augmenter cette peine comme l'ordonne la loi à raison des circonstances aggravantes constatées; 3o Opérer, sur cette peine ainsi aggravée, l'atténuation voulue par les excuses dont il s'agit; -4° Enfin, sur la peine formant le résultat final de cette dernière opération, effectuer l'abaissement motivé par les circonstances atténuantes (ci-dess., n° 1127 et suiv.).

§ 4. Modification des peines à raison de l'état physique des condamnés.

1642. Les modifications dont il s'agit ici ne constituent pas une différence de mesure dans la quotité de la peine, motivée par des différences de culpabilité morale ou d'intérêt social; elles sont déduites de considérations sur l'état physique des condamnés. Les considérations de cette sorte en notre droit positif sont au nombre de deux le sexe et la vieillesse.

1643. Quant au sexe, nous savons comment, dans l'exécution de l'emprisonnement de peine, les principes rationnels veulent que des établissements distincts, non-seulement par quartiers, mais totalement séparés, soient consacrés aux femmes d'une part et aux hommes de l'autre (ci-dess., n° 1486); et comment, en fait, l'administration tend à arriver à ce résultat, qui n'est pas encore atteint d'une manière complète dans notre pratique. Le système de la loi du 5 août 1850, relative aux jeunes détenus, a élé construit sur cette distinction (ci-dess., p. 703, en note). Mais nous ne trouvons de disposition impérative, dans notre Code pénal, quant à une modification de peine ordonnée à raison du sexe, que celle de l'article 16, qui veut que les femmes ne puissent subir la peine des travaux forcés que dans l'intérieur d'une maison de force (ci-dess., p. 690, note 2). Cette disposition, aux termes de l'article 4 de la loi du 30 mai 1854, cesse d'être applicable du moment qu'il s'agit d'exécuter les travaux forcés par la transportation dans une colonie pénale; les femmes pouvant être transportées dans ces colonies, avec les modifications prescrites par cet article 4 (ci-dess., p. 690, note 3).

1644. Quant à la vieillesse, les articles 70, 71, 72 du Code pénal avaient fixé l'âge de soixante-dix ans accomplis pour limite à laquelle les peines de la déportation et des travaux forcés, soit à perpétuité, soit à temps, ne seraient plus prononcées contre le vieillard, mais devraient être transformées, en conservant chacune leur durée, la première en détention, et les autres en réclusion: la déportation, parce qu'une longue navigation et un changement

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lointain de climat; les travaux forcés, parce que des travaux de force incompatibles avec la faiblesse des ans, seraient, en ce grand âge, des causes indirectes de mort que la loi pénale ne peut vouloir imposer au condamné (1). — A l'égard des travaux forcés, il y avait en outre cela de particulier que, si la prononciation et l'application en avaient eu lieu avant la limite de soixante-dix ans, ils devaient cesser dès que cette limite était atteinte, pour faire place à la réclusion dans une maison de force (C. p., art. 72). La déportation n'était pas soumise à une règle analogue, parce que la longue traversée et l'acclimatation une fois accomplies avant l'âge de soixante-dix ans, il n'y avait plus de raison pour la transformation de la peine à cet age.

Ces dispositions du Code pénal et cette limite de soixante-dix ans accomplis restent toujours les mêmes en ce qui concerne la déportation simple. La loi de 1850 ne les ayant pas étendues à la déportation dans une enceinte fortifiée, malgré les considérations identiques qui les recommandent moralement, elles n'y sont pas obligatoires.

Quant aux travaux forcés, soit à perpétuité, soit à temps, la loi du 30 mai 1854, en vue des besoins coloniaux, des frais de transport et de la population robuste qui est nécessaire dans les établissements, a avancé la limite et l'a placée à soixante ans accomplis (art. 5 de la loi). En même temps, s'agissant de transportation, elle a déclaré abrogé l'article 72 du Code pénal, qui cependant fera défaut, et dont les dispositions nécessaires ne seront plus remplacées que par voie administrative, tant que les travaux forcés continueront à se subir en France, ce qui est encore le cas pour la majeure partie des condamnés.

1645. La difficulté soulevée au sujet de la mort civile, quant à la question de savoir si la détention ou la réclusion perpétuelles devaient entrainer cette mort lorsqu'elles étaient prononcées contre le septuagénaire en place de la déportation ou des travaux forcés à perpétuité, n'existe plus aujourd'hui quant aux incapacités que la loi du 31 mai 1854 a substituées à la mort civile, cette loi attachant formellement ces incapacités à toutes les peines afflictives perpétuelles, sans distinction.

(1) Code pénal. Art. 70. Les peines des travaux forcés à perpétuité, de la dépor tation et des travaux forcés à temps, ne seront prononcées contre aucun individu âgé

⚫ de soixante-dix ans accomplis au moment du jugement. (Modifié en ce qui concerne les travaux forcés, par l'article 5 de la loi du 30 mai 1854.)

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Art. 71. Les peines seront remplacées, à leur égard, savoir: celle de la déportation par la détention à perpétuité; et les autres, par celle de la réclusion, soit à perpétuité, soit à temps, selon la durée de la peine qu'elle remplacera.

Art. 72. Tout condamné à la peine des travaux forcés à perpétuité ou à temps, dès qu'il aura atteint l'âge de soixante-dix ans accomplis, en sera relevé, et sera ren fermé dans la maison de force pour tout le temps à expirer de sa peine, comme s'il n'eût été condamné qu'à la réclusion.» (Déclaré abrogé par l'article 5 de la loi du 30 mai 1854.)

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1646. A part la déportation et les travaux forcés, aucune autre peine, ni celle de mort ni autre, n'est modifiée ou commuée par notre loi à raison de la vieillesse.

TITRE VI.

DES DROITS D'ACTION ET DES DROITS D'EXÉCUTION.

CHAPITRE PREMIER.

DE LA NAISSANCE ET DU CARACTÈRE DES DROITS D'ACTION
ET DES DROITS D'EXÉCUTION.

1647. Le délit donne naissance à deux droits: l'un, qui appartient à la société, celui de punir le coupable; l'autre, qui appartient à la partie lésée, celui de faire réparer le préjudice occasionné. Du premier nait pour la société le droit d'agir devant l'autorité compétente pour obtenir cette punition; du second naît pour la partie lésée le droit d'agir pour obtenir cette réparation : droits sanctionnateurs qui se nomment, l'un action publique, et

l'autre action civile.

La société, être collectif, ne pouvant agir par elle-même, est obligée de déléguer l'exercice de son droit. Elle ne le délégue chez nous qu'à des fonctionnaires ou à certaines administrations publiques, et notamment, en règle générale, à un corps judiciaire ad hoc, nommé collectivement le ministère public. Notez que l'action publique n'appartient pas à ces fonctionnaires; c'est à la société qu'elle appartient; quant aux fonctionnaires, ils n'en ont que l'exercice par délégation, en qualité de mandataires, d'où il suit qu'ils n'ont pas le droit d'en disposer hors des limites de leur mandat. L'action civile, au contraire, est bien la propriété de la partie lésée, qui est libre d'en disposer comme de ses autres droits. On conclura de là, si on remarque les expressions dont s'est servi à cet égard l'article 1 de notre Code d'instruction criminelle, qu'il faut renverser l'ordre de ces expressions (1).

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(1) Code d'instruction criminelle. « Art. 1. L'action pour l'application des peines n'appartient qu'aux fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi. L'action en réparation du dommage causé par un crime, par un délit où par une contravention, peut être exercée par tous ceux qui ont souffert de ce dommage. (Renversez, pour plus d'exactitude, l'ordre des expressions soulignées.)

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