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la qualité d'infamante dans les peines, et par conséquent pour le cas des peines criminelles seulement.

1684. Mais nous savons comment il n'y a dans tout cela de réel, de véritablement au pouvoir du législateur, apte à produire des effets judiciaires, que les déchéances ou incapacités de droits, soit qu'il s'agisse d'en frapper le condamné, soit qu'il s'agisse de l'en relever (ci-dess., nos 1612 et suiv.). Or déjà d'après le Code pénal de 1810 il pouvait arriver, et cet effet, par suite des lois spéciales venues après 1830, et surtout par d'autres qui ont suivi la révolution de 1848, est devenu bien plus fréquent encore, que des condamnations de police correctionnelle emportassent des déchéances ou des incapacités de droit pour toute la vie (ci dess., no 1621). On voyait donc le contraste des condamnés aux peines criminelles admis à l'espoir de se faire restituer un jour, par leur bonne couduite, dans l'intégrité de leurs droits, tandis que les condamnés à des peines correctionnelles ne pourraient jamais l'être. Des projets de révision étaient élaborés sur ce point avant la révolution de 1848; le Gouvernement provisoire y pourvut transitoirement par un décret du 22 avril 1848; et enfin la loi du 3 juillet 1853, en revisant les articles du Code, a étendu le bienfait de la réhabilitation aux cas de peines correctionnelles comme à celui des peines criminelles (1).

(1) Code d'instruction criminelle, liv. II, tit. VII, ch. 4, De la réhabilitation des condamnés (revisé, dans tout ce chapitre, par la loi du 3-6 juillet 1853.)

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Art. 619. Tout condamné à une peine afflictive ou infamante, ou à une peine correctionnelle, qui a subi sa peine, ou qui a obtenu des lettres de grâce, peut être réhabilité.

Art. 620. La demande en réhabilitation pour les condamnés à une peine afflictive ou infamante ne peut être formée que cinq ans après le jour de leur libération. Néanmoins ce délai court, au profit des condamnés à la dégradation civique, du jour où la condamnation est devenue irrévocable, ou de celui de l'expiration de la peine d'emprisonnement, si elle a été prononcée, Il court, au profit du condamné à la surveillance de la haute police prononcée comme peine principale, du jour où la condamnation est devenue irrévocable. - - Le délai est réduit à trois ans pour les condamnés à une peine correctionnelle.

Art. 621. Le condamné à une peine afflictive ou infamante ne peut être admis à demander sa rehabilitation s'il n'a résidé dans le même arrondissement depuis cinq années, et pendant les deux dernières dans la même commune. Le condamné à une peine correctionnelle ne peut être admis à demander sa réhabilitation s'il n'a résidé dans le même arrondissement depuis trois années, et pendant les deux dernières dans la même

commune.

Art. 622. Le condamné adresse la demande en réhabilitation au procureur impérial de l'arrondissement, en faisant connaître : 1o la date de sa condamnation; 2o les lieux où il a résidé depuis sa libération, s'il s'est écoulé après cette époque un temps plus long que celui fixé par l'article 620.

Art. 623. Il doit justifier du payement des frais de justice, de l'amende et des dommages-intérêts auxquels il a pu être condamné, ou de la remise qui lui en a été faite. A defant de cette justification, il doit établir qu'il a subi le temps de la contrainte par corps déterminé par la loi, ou que la partie lésée a renoncé à ce moyen d'exécuS'il est condamné pour banqueroute frauduleuse, il doit justifier du payement

tion.

-

1685. La nouvelle loi a fait un nouveau règlement des condi tions exigées pour que le condamné soit admis à demander sa réhabilitation; elle détermine comment et jusqu'à quel point il faut qu'il ait: 1 satisfait à la condamnation pénale; 2° satisfait aux condamnations civiles et au payement des frais; 3° qu'il s'en soit montré digne par sa conduite ultérieure. La loi règle aussi les formes à suivre. Les autorités qu'elle appelle à concourir à celle mesure sont l'autorité municipale, par des attestations qui lui sout demandées; l'autorité judiciaire, par un avis de la cour impériale qui, s'il est négatif, empêche la demande d'aller plus loin;

du passif de la faillite, en capital, intérêts et frais, ou de la remise qui lui en a été

faite.

Art. 624. Le procureur impérial provoque, par l'intermédiaire du sous-préfet, des attestations délibérées par les conseils municipaux des communes où le condamné a résidé, faisant connaître : - 1o la durée de sa résidence dans chaque commune, avec indication du jour où elle a commencé, et de celui auquel elle a fini; - 2o sa conduite pendant la durée de son séjour; — 3o ses moyens d'existence pendant le même temps. Ces attestations doivent contenir la mention expresse qu'elles ont été rédigées pour servir à l'appréciation de la demande en réhabilitation. - Le procureur impérial prend, en outre, l'avis du maire des communes et du juge de paix des cantons où le condamné a résidé, ainsi que celui du sous-préfet de l'arrondissement.

Art. 625. Le procureur impérial se fait délivrer: 1o une expédition de l'arrêt de condamnation; 2o un extrait des registres des lieux de détention où la peine a été subie, constatant quelle a été la conduite du condamné. Il transmet les pièces avec son avis au procureur général.

Art. 626. La cour dans le ressort de laquelle réside le condamné est saisie de la demande. Les pièces sont déposées au greffe de cette cour par les soins du procureur général.

Art. 627. Dans les deux mois du dépôt, l'affaire est rapportée à la chambre d'accusation; le procureur général donne ses conclusions motivées et par écrit. - Il peut requérir en tout état de cause, et la cour peut ordonner, même d'office, de nouvelles informations, sans qu'il puisse en résulter un retard de plus de six mois.

Art. 628. La cour, le procureur général entendu, donne son avis motivé. Art. 629. Si l'avis de la cour n'est pas favorable à la réhabilitation, une nouvelle demande ne peut être formée avant l'expiration d'un délai de deux années.

Art. 630. Si l'avis est favorable, il est, avec les pièces produites, transmis par le procureur général, et dans le plus bref délai possible, au ministre de la justice, qui peut consulter la cour ou le tribunal qui a prononcé la condamnation.

Art. 631. L'empereur statue sur le rapport du ministre de la justice.

Art. 632. Des lettres de réhabilitation seront expédiées en cas d'admission de la

demande.

Art. 633. Les lettres de réhabilitation sont adressées à la cour qui a délibéré l'avis. - Une copie authentique en est adressée à la cour ou au tribunal qui a prononcé la condamnation. Ces lettres seront transcrites en marge de la minute de l'arrêt ou du jugement de condamnation.

--

Art. 634. La réhabilitation fait cesser pour l'avenir, dans la personne du condamné, toutes les incapacités qui résultaient de la condamnation. - Les interdictions prononcées par l'article 612 du Code de commerce sont maintenues nonobstant la réhabilita tion obtenue en vertu des dispositions qui précèdent. Aucun individu, condamné pour crime, qui aurait commis un second crime et subi une nouvelle condamnation à une peine afflictive ou infamante, ne sera admis à la réhabilitation. Le condamue qui, après avoir obtenu sa réhabilitation, aura encouru une nouvelle condamnation, ne sera plus admis au bénéfice des dispositions qui précèdent. ■

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enfin l'empereur, à qui est confié, en definitive, le pouvoir d'accorder ou de refuser la réhabilitation. Quant aux effets, la loi n'y met aucune restriction : le réhabilité rentre dans la plénitude des droits que lui avait retirés la condamnation pénale (art. 634). 1686. Il ne faut pas confondre la réhabilitation de droit pénal avec la réhabilitation commerciale: tel est admis à la première, qui peut se trouver exclu de la seconde, aux termes de l'article 612 du Code de commerce. La loi nouvelle a pris soin de s'en expliquer (art. 634). Les incapacités produites par la condamuation pénale cessent alors; mais celles qui sont propres à la législation ou aux coutumes commerciales continuent de subsister. La distinction est bien marquée.

1687. Il est certaines déchéances ou incapacités que le gouvernement a, dans certains eas, le pouvoir de faire cesser, sans qu'il soit nécessaire de recourir aux formes de la réhabilitation. Nous l'avons vu en traitant de l'incapacité de donner ou de recevoir par donation entre-vifs ou par testament, qui accompagne les peines afflictives perpétuelles, et aussi en traitant de l'état des condamnés dans les colonies de déportation ou de travaux forcés (ci-dess., n° 1553, 1554, 1557, 1600, 1601 et 1605).

1688. Pour les trois événements que nous venons de passer en revue, la mort du condamné, la prescription, la remise ou abandon du droit, il y a indépendance entière, quant à l'existence, entre le droit d'exécution des condamnations pénales et celui d'exécution des condamnations civiles. Celui-ci, dès qu'il est né par l'effet de la sentence, se trouve toujours séparé de l'autre, et ne se règit plus que par les règles du droit civil privé (C. i. c., art. 642).

JURIDICTIONS PÉNALES.

TITRE PREMIER.

ORGANISATION.

CHAPITRE PREMIER.

NOTIONS GÉNÉRALES, SUIVANT LA SCIENCE PURE.

$ 1er. Idées d'introduction.

1689. Pour produire un effet quelconque, il faut une force, une puissance; et pour mettre celle force, cette puissance en jeu, un procédé. L'effet à produire, en droit pénal, après le précepte ou la détermination de la pénalité, c'est la mise en application de cette pénalité; la force destinée à produire cet effet, ce sont les juridictions pénales, avec l'ensemble des autorités diverses ou des personnes qui concourent à l'effet voulu; et le procédé destiné à mettre cette force en jeu, c'est la procédure pénale (ci-dess,, n's 19 et 23).

1690. Voici diverses préventions contre lesquelles il est bon de se prémunir:

Ne pas confondre, comme on le fait quelquefois, même dans les lois et particulièrement dans nos Codes, ce qui concerne les juridictions avec ce qui concerne la procédure. Sans doute il y a un lien intime du procédé à la puissance: suivant que la force à mettre en jeu sera de telle nature ou de telle autre, le vent, courante, la vapeur, des forces animées, le procédé variera. Mais pour être liées l'une à l'autre, les deux questions ne sont pas identiques Quelle sera la force? quel sera le procédé ?

l'eau

Ne pas mettre, dans la préoccupation des esprits et dans l'étude, la question des juridictions et de la procédure pénales audessous de celle de la pénalité. — La juridiction n'est autre chose qu'une partie de la puissance sociale organisée, liée par conséquent au droit politique, tournant dans l'orbite des constitutions, landis que la procédure tourne à son tour dans celle des juridictions. L'honnète homme, le bon citoyen, peuvent se mettre à l'abri d'une mauvaise pénalité comment se mettront-ils à l'abri d'une mauvaise juridiction ou d'une mauvaise procédure pénale? au total, de bonnes juridictions avec une bonne procédure pénale peuvent servir à corriger, en beaucoup de cas, les vices d'une

- Puis,

mauvaise pénalité c'est ce qui s'est vu constamment en Angleterre; mais que sera la meilleure loi pénale avec une mauvaise juridiction et une mauvaise procédure?

Enfin, ne pas s'imaginer que le règlement des juridictions et de la procédure soit chose arbitraire, de droit purement conventionnel, et que l'empire des principes philosophiques, ou, en d'autres termes, des vérités de la science, n'ait rien à y voir.

§ 2. Fonctions auxquelles il est nécessaire de pourvoir; d'où les diverses autorités à créer.

1691. Pour organiser dans chacune de ses actions la force qu'on veut employer, il faut se fixer préalablement sur chacun des effets particuliers qu'il est nécessaire de produire en détail, afin que l'ensemble en vienne aboutir finalement à l'effet général proposé. - Or, dans l'organisation des juridictions pénales et de tout le système des autorités ou des personnes qui doivent concourir à l'effet général voulu, c'est-à-dire à l'application du droit pénal, la fonction correspond à chaque effet particulier à produire, l'autorité ou la personne chargée de la fonction à chaque rouage de la force à mettre en jeu. Pour savoir quelles sont les autorités à créer, il faut donc savoir préalablement quelles sont les fonctions à faire remplir car c'est pour la fonction qu'est faite l'autorité, et non pour l'autorité la fonction.

1692. Le premier effet, s'il était possible de le produire, serait de prévenir les délits. Les institutions sociales doivent être dirigées vers ce but; non pas en mettant des gènes oppressives à l'activité de l'homme, car là est le danger de tout système préventif; mais en faisant disparaitre ou en átténuant les causes des délits (ci-dess., no 190).—En outre, dans tout ce qui tient à l'exécution, à l'administration, une certaine partie de la puissance publique est chargée, par des mesures prises à propos, par une sollicitude et une surveillance constantes, d'un certain rôle préventif, rôle d'exécution, qui constitue ce qu'on nomme la police administrative (ci-dess., no 612 et suiv.). Ceci n'appartient pas à la mission des juridictions ou autorités de répression.

1693. Cette dernière mission ne commence qu'après le délit commis. Pour arriver en définitive, à l'encontre de tout délit, à l'effet général, c'est-à-dire à l'application du droit pénal, l'analyse et l'observation conduisent à distinguer les quatre effets particuliers qui suivent, comme nécessaires à produire; d'où quatre fonctions essentielles auxquelles, d'une manière ou d'autre, il est nécessaire de pourvoir:

1 Rechercher les délits et les auteurs des délits, recueillir, rassembler les preuves, et livrer le tout à l'autorité chargée de juger. Ce sont ici des opérations préliminaires, qui ont pour but principal de préparer tous les éléments, tous les moyens propres

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