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pagné par les délégués des représentants à Constantinople, qui procéderaient d'un commun accord.

S'il n'était pas fait droit à cette réquisition, le commissaire de la Porte et les délégués signifieraient à l'Hospodar que, vu le refus d'y obtempérer, la Puissance suzeraine et les Puissances garantes aviseraient aux moyens coërcitifs à employer.

En ce cas, les représentants à Constantinople, après avoir reçu les rapports de leurs délégués respectifs, se concerteraient avec la Sublime-Porte sur les mesures qu'il y aurait lieu d'arrêter.

Le Plénipotentiaire de la Porte fait observer que MM. les cinq Plénipotentiaires, en motivant leur proposition sur les éventualités regrettables qui pourraient surgir d'une nouvelle élection et sur les obstacles qui s'opposent à l'application des stipulations de la Convention, admettent eux-mêmes que l'ordre légal se trouve compromis et le repos intérieur menacé dans les deux Principautés et que, dès lors, la Sublime-Porte a raison d'invoquer les stipulations de l'art. 27 du traité et de l'art. 8 de la Convention pour aviser au maintien et au rétablissement de l'ordre légal et pour faire respecter dans leur application les stipulations précitées.

Quant à l'avis de conférer exceptionnellement l'investiture à M. Couza comme Hospodar de Moldavie et de Valachie, il croit que si l'on admettait que les deux Principautés dussent être administrées, tantôt par un, tantôt par deux Hospodars, non-seulement leur organisation cesserait d'être définitive et telle qu'elle a été consacrée par l'entente finale des Puissances consignée dans la Convention du 19 août, mais qu'on tolérerait un état de choses qui ne serait ni l'union, ni la séparation, et qui constituerait une organisation incertaine, mal définie.

Pour ce qui est de la déclaration que les Puissances ne souffriront aucune infraction aux clauses de la Convention, et qu'en cas d'une telle infraction les Cours garantes s'entendront avec la Cour suzeraine sur les moyens à employer pour la faire cesser, le Plénipotentiaire de la Turquie dit qu'il ne peut pas concilier cette déclaration avec l'objection que rencontre la demande actuellement faite par la SublimePorte pour le même motif et dans le même but, ni s'expliquer pourquoi on lui refuse aujourd'hui ce qu'on lui promet pour une éventualité identique, et comment on consentirait alors à ce qu'on objecte aujourd'hui.

Il entre ensuite dans des considérations sur la doctrine des faits accomplis qui enlèverait aux traités leur valeur, rendrait désormais nulle toute garantie internationale, et aurait pour les Principautés elles-mêmes des conséquences funestes, vu qu'un tel précédent encouragerait les divers partis dans la voie des faits accomplis et livrerait les deux provinces à l'anarchie et à la guerre civile.

Il ajoute que, connaissant le haut prix que les Moldo-Valaques attachent à la garantie stipulée en leur faveur dans le traité et dans la Convention de Paris, et ne pouvant leur supposer la prétention de jouir des avantages que ces actes leur confèrent sans remplir les obligations qu'ils leur imposent, il ne doute point du respect avec lequel la décision des grandes Puissances signataires, pour l'application fidèle de la Convention, sera accueillie et exécutée dans les deux Principautés; que, d'ailleurs, pour mieux assurer cette exécution, il est autorisé par son Gouvernement à proposer l'emploi de l'intervention militaire qui serait réservée, comme de raison, à la Puissance suzeraine avec l'assistance d'un commissaire ad hoc de chacune des Puissances garantes, dans le cas où l'on serait obligé de recourir à cette mesure; qu'enfin, son Gouvernement a la certitude qu'il suffira que les Puissances signataires se prononcent unanimement pour cette intervention pour que la mise à exécution en devienne tout à fait superflue.

Le Plénipotentiaire de la Turquie conclut en exprimant l'espoir que • MM. les Plénipotentiaires prendront en considération ces observations et modifieront leur avis.

Les Plénipotentiaires de la France, de la Grande-Bretagne, de la Prusse, de la Russie et de la Sardaigne persistent dans leur opinion et demandent au Plénipotentiaire de vouloir bien soumettre à la considération de son Gouvernement la combinaison insérée plus haut1.

Musurus bey annonce qu'il déférera au vœu qui lui est exprimé.
Le Plénipotentiaire d'Autriche adhère aux observations qui ont été
présentées par Musurus bey; il transmettra toutefois l'avis des cinq
Plénipotentiaires à son Gouvernement qui appréciera.

Signé HÜBNER, WALEWSKI, COWLEY, POURTALÈS,
KISSELEFF, VILLAMARINA, MUSURUS.

Adresse de la Commission centrale des Principautés à Fockshani, en date du 17 juin 1859.

Altesse,

En entrant pour la première fois dans l'exercice de ses fonctions, la Commission centrale croit de son devoir de commencer ses travaux par présenter à Votre Altesse Sérénissime ses félicitations pour la mission à laquelle vous a appelée l'action légale des corps électifs, à

1. Voy. ci-après, à la date du 6 septembre 1859, le Protocole N° 22 qui constate l'adhésion de la Porte et de l'Autriche à la combinaison suggérée par les cinq autres Puissances.

savoir de réunir les Couronnes, jusqu'à présent séparées, des deux Principautés sœurs.

Symbole de leur union, Votre Altesse a compris, par l'initiative qu'elle a prise envers les puissances garantes et par les déclarations solennelles qu'elle a faites aux Assemblées électives des deux Principautés, que le seul moyen de consolider notre union nationale est d'accomplir les vœux des divans ad hoc, manifestés en 1857, après que les grandes puissances de l'Europe eurent consulté ces deux pays. En effet, prince, tant qu'on conservera encore les vestiges de la désunion passée et de la précédente impotence politique, telles que la séparation de l'administration supérieure, l'éligibilité du chef suprême de l'État, les Principautés seront sans cesse exposées à un démembrement au premier souffle d'orage politique, et chacune d'elles isolément, en perdant son centre de gravité, sera plus menacée de périr. L'hérédité dans la personne du chef de l'État saura mettre un frein aux ambitions rivales et symbolisera en même temps avec plus de force l'union des Principautés.

Un prince étranger liera plus étroitement ces deux pays à l'Europe et établira une solidarité entre les familles régnantes et notre gouvernement, en lui assurant de puissants appuis.

L'unité dans la haute administration facilitera aussi l'action du gouvernement et l'entente entre les pouvoirs législatifs de l'Etat, en renouant toutes les branches du service public.

Pénétrés de ces vérités, nous apprécions la haute valeur de l'appel qui nous est adressé par le message de Votre Altesse d'aller au-devant des aspirations généreuses de la nation roumaine qui veut se constituer, et de former les liens de l'union la plus étroite et la plus sincère de ces deux peuples.

En considérant cet appel comme un nouvel engagement que vous contractez envers la nation pour réaliser les vœux qu'elle a manifestés dans toute la maturité de sa conviction, nous prions Votre Altesse de vouloir bien profiter de toutes les occasions favorables qui pourraient se présenter pour agir en sorte que nous puissions atteindre le but de nos vœux, et soyez convaincu, prince, que la commission centrale est prête à vous donner tout son appui et son concours le plus énergique. En conséquence, la Commission centrale fait des vœux pour que Votre Altesse jouisse de la gloire d'accomplir cette grande œuvre, par laquelle elle répondra à l'attente de toute la Roumanie.

La haute Cour de cassation et de justice, commune aux deux Principautés, formera l'objet des premières occupations de la Commission, à l'effet de réaliser au plus tôt l'unité législative, conformément aux principes de la Convention et à l'attente du pays.

Protocole N° 22 des Conférences de Paris, Séance
du 6 septembre 1859.

Présents les Plénipotentiaires de l'Autriche, de la France, de la Grande-Bretagne, de la Prusse, de la Russie, de la Sardaigne et de la Turquie.

M. le prince de Metternich dépose ses pleins pouvoirs, qui sont trouvés en bonne et due forme.

Le Plénipotentiaire de la Turquie annonce qu'il a porté à la connaissance de sa Cour la résolution présentée par les plénipotentiaires de la France, de la Grande-Bretagne, de la Prusse, de la Russie et de la Sardaigne, et insérée au protocole du 13 avril, et qu'il est autorisé à faire, au nom de son gouvernement, la réponse suivante :

La Sublime-Porte, prenant en considération la recommandation faite par cinq des Puissances garantes, confère exceptionnellement et pour cette fois l'investiture au colonel Couza comme hospodar de Moldavie et de Valachie; bien entendu que, pour toute élection et investitures futures des hospodars, il y sera procédé d'une manière rigoureusement conforme aux principes posés dans la Convention du 19 août. En conséquence, et pour maintenir le principe de séparation administrative sur lequel repose la susdite Convention, la Sublime-Porte délivrera au colonel Couza deux firmans, dont l'un conférant l'investiture pour la Moldavie, et l'autre pour la Valachie; et le nouvel hospodar pour les deux Principautés, après avoir reçu ses firmans d'investiture, se rendra à Constantinople, à l'exemple de ses prédécesseurs et comme par le passé, dès que les soins qu'il doit à l'administration des deux Principautés lui permettront de s'absenter. Le prince, exceptionnellement appelé pour cette fois à l'hospodarat de Moldavie et de Valachie, maintiendra dans chacune des deux Principautés une administration séparée et distincte l'une de l'autre, sauf les cas prévus par la Convention.

Comme les Puissances signataires de la Convention du 19 août ont résolu de ne souffrir aucune infraction aux clauses de cette Convention, la Sublime-Porte, dans le cas d'une violation de cet acte dans les Principautés, après avoir fait des démarches et demandé les informations nécessaires auprès de l'administration hospodarale, portera cette circonstance à la connaissance des représentants des Puissances garantes à Constantinople, et, une fois le fait de l'infraction constaté d'un commun accord avec eux, la Cour suzeraine enverra dans les Principautés un commissaire ad hoc, chargé de requérir que la mesure qui a donné lieu à l'infraction soit rapportée; le commissaire de la Sublime-Porte sera accompagné par les délégués des représentants

à Constantinople, avec lesquels il procédéra de concert et d'un commun accord. S'il n'est pas fait droit à cette réquisition, le commissaire de la Sublime-Porte et les délégués signifieront à l'hospodar que, vu le refus d'y obtempérer, il sera avisé aux moyens coërcitifs à employer. En ce cas, la Sublime-Porte se concertera sans délai avec les représentants des Puissances garantes à Constantinople sur les mesures qu'il y aura lieu d'arrêter.

Le Plénipotentiaire de l'Autriche adhère à la déclaration du Plénipotentiaire de la Turquie.

La Conférence prend acte de la réponse du gouvernement ottoman, et, la trouvant conforme de tout point à la résolution insérée au protocole du 13 avril, décide que la déclaration conditionnelle mentionnée dans ladite résolution doit, dès lors, être considérée comme acquise et recevoir, le cas échéant, sa pleine exécution.

Les Plénipotentiaires de la Russie et de la Turquie rappellent que la Conférence, dans la séance du 30 juillet 1858, a décidé qu'il serait accordé un délai d'un an aux parties intéressées, pour s'entendre sur le conflit touchant les biens conventuels; ils font remarquer que, dans l'état d'incertitude où l'on s'est trouvé jusqu'à ce moment dans les Principautés, il n'a pas été permis de s'occuper de cette question. Ils proposent, en conséquence, de décider que le délai d'un an, dont il est fait mention dans le dernier paragraphe du protocole n° XIII, commencera seulement à courir un mois après le jour où M. le colonel Couza recevra l'investiture comme hospodar de Moldavie et de Valachie.

Cette proposition est adoptée.

Le Plénipotentiaire de la Russie rappelle l'engagement contracté par les Plénipotentiaires de l'Autriche et de la Turquie, dans la séance du 18 août 1858, de transmettre à leurs gouvernements respectifs les observations que les Plénipotentiaires de la France, de la GrandeBretagne, de la Prusse et de la Sardaigne ont faites conjointement avec lui, au sujet du règlement de la navigation du Danube, élaboré par les Puissances riveraines, et il exprime l'espoir que la Conférence sera bientôt mise à même de connaître la décision à laquelle ces Puissances se seront arrêtées.

Les Plénipotentiaires de la France, de la Grande-Bretagne, de la Prusse et de la Sardaigne s'unissent à l'espoir exprimé par le Plénipotentiaire de la Russie.

Le Plénipotentiaire de l'Autriche fait remarquer que, ses pouvoirs étant limités à ce qui concerne la double élection du colonel Couza et que ses instructions ne l'autorisant pas à délibérer sur une autre question, il doit se borner à porter à la connaissance de son Gouvernement les observations des Plénipotentiaires.

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