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Message du prince Alexandre-Jean Ier du 27 avril 1864.

Messieurs les Députés,

Ensuite du vote de défiance que la majorité du Corps législatif a émis contre mon ministère, parce que ce dernier avait présenté le projet d'une loi rurale, le ministère a déposé sa démission entre mes mains.

Mai je n'ai pu accepter cette démission parce que vous, Messieurs les Députés, vous avez émis le vote de défiance sans avoir discuté le moins du monde la question si importante de l'amélioration du sort des paysans, que l'article 46 de la Convention de Paris leur a garantie, et que le pays tout entier attend avec une impatience légitime, dans l'intérêt même de la sûreté des propriétés foncières.

C'est pour ce motif que j'ai chargé mon ministère de vous présenter le projet d'une nouvelle loi rurale, que les hautes Puissances signataires de la Convention de Paris ont eu en vue, et qui, depuis longtemps, a été réclamée par le pays, et aussi par vous-mêmes à plusieurs reprises.

Aujourd'hui plus que jamais, une réforme de la loi électorale est devenue un besoin impérieux, car c'est par cette réforme seule que la Roumanie peut obtenir un Corps législatif, dans lequel les intérêts de toutes les classes de la société soient plus complétement représentés.

Toutefois, comme les fêtes saintes de la Résurrection du Sauveur de l'humanité approchent, et que je désire, Messieurs les Députés, que vous retourniez pour quelque temps dans vos foyers, afin que là, à la source même de votre mandat, vous vous convainquiez des sentiments de la nation, et, en même temps, du fait que, grâce à la Providence, l'ordre public n'a été troublé ou menacé dans aucune partie de la Roumanie, je proroge le Corps législatif, sur la proposition de mon Conseil des ministres, jusqu'au 2 (14) mai 1864, en sorte que la Chambre est convoquée de nouveau pour ce jour-là en session extraordinaire, en vue de procéder à la discussion et au vote du nouveau projet de loi électorale.

Sur ce, Messieurs les Députés, je prie Dieu qu'il vous ait en sa sainte garde.

Donné à Bucharest, le 15/27 avril 1864.

ALEXANDRE-JEAN Ir.

Proclamations du prince Alexandre-Jean à la population et à l'armée le 14 mai 1864.

Roumains,

Six années seront bientôt écoulées, depuis que l'existence politique de la Roumanie a été solennellement reconnue et proclamée dans un traité auquel ont pris part la Sublime-Porte, notre suzeraine, et les grandes Puissances de l'Europe. Cet acte international, la Convention du 19 août 1858, a doté le pays d'institutions libérales et bienfaisantes, dont le développement progressif aurait assuré notre prospérité, et cependant la Roumanie est restée à peu près stationnaire. .... D'où vient le mal?

Élevé au trône par les votes unanimes des deux Assemblées électives; j'avais le droit de compter sur le concours de ceux qui m'ont imposé la glorieuse mais difficile mission de réorganiser le pays. Tout au contraire, j'ai trouvé devant moi une opposition implacable.

En vain j'ai donné les preuves multipliées du plus scrupuleux respect pour les priviléges parlementaires, et j'ai appelé successivement tous les partis au pouvoir. En vain j'ai fait concessions sur concessions aux Assemblées : j'ai poussé l'esprit de conciliation jusqu'à tolérer des empiétements graves sur mes attributions. En vain j'ai été jusqu'à faire l'abandon spontané de certaines prérogatives souveraines. Tout a été inutile.

L'union des Principautés sœurs accomplie; les propriétés monastiques, la cinquième partie du sol roumain, restituées au domaine national, de si grands résultats acquis par mon Gouvernement, tout a été oublié.

L'intérêt du pays et sa dignité, vos vœux, vos besoins urgents, tout a été sacrifié à de coupables passions. Pour prix de son dévouement à la cause nationale, l'élu des Roumains n'a recueilli que l'outrage et la calomnie, et, malgré la sagesse d'un certain nombre de Députés, une oligarchie factieuse a sans cesse entravé mes efforts pour le bien public, et réduit mon Gouvernement à l'impuissance.

Que me restait-il à faire? J'ai résolu de tenter un dernier appel au patriotisme de l'Assemblée; j'ai voulu, comme le veulent les Augustes signataires des traités qui ont relevé la Roumanie, comme le veulent les grands principes d'égalité et de justice de notre époque, j'ai voulu que tout Roumain pût librement posséder, au prix de son travail, parcelle de notre sol.

une

Comment l'Assemblée a-t-elle répondu à la présentation de la loi

rurale? Vous le savez tous. Elle a infligé un vote de blâme à mon Gouvernement. C'est une loi d'équité, ce sont les espérances légitimes de trois millions de paysans, c'est la propre pensée du Chef de l'État, qu'elle frappait dans la personne de ses ministres.

Une telle situation ne pouvait durer plus longtemps.

J'ai voulu vous rendre tous juges entre l'Assemblée et l'élu des Roumains. Dans ce but, j'ai présenté à l'Assemblée une nouvelle loi électorale dont l'utilité est attestée par la Convention elle-même et qui assure au pays une représentation plus complète et vraiment nationale.

L'Assemblée a refusé de discuter cette loi. Il ne me reste plus qu'à faire appel à la nation, aux citoyens de tout rang et de toute fortune.

Roumains,

Vous allez être convoqués dans vos comices. Je soumets à votre acceptation la nouvelle loi électorale repoussée par l'Assemblée et un projet de statut qui complétera les dispositions bienfaitrices de la Convention. Délibérez paisiblement et en toute liberté.

A vous, à vous seuls de décider si le pays doit être plus longtemps livré aux stériles agitations qui, depuis plus de cinq années, le déconsidèrent, compromettent sa sécurité et lui interdisent tout progrès.

A vous de décider si la nation roumaine est digne des libertés publiques dont j'ai voulu la doter, et qu'une majorité de privilégiés lui refuse.

A vous tous, Roumains, de montrer à l'Europe par votre sagesse que nous méritons les hautes sympathies qui nous sont acquises.

A vous tous de prouver que nous sommes vraiment unis, aujourd'hui comme aux 5 et 24 janvier, devant une situation d'où dépendent la prospérité, l'avenir, les grandeurs de la Roumanie.

Vive la Roumanie!

Signė: ALEXANDRE-JEAN, M. COGALNICEANO, général Mano,
BALANESCO, P. ORBESCO, BOLINTINIANO.

A L'ARMÉE.

Officiers, sous-officiers, caporaux et soldats,

De grands événements se sont accomplis.

L'Assemblée élective a refusé son concours à mon Gouvernement pour des mesures qui devaient développer nos libertés publiques et prospérité du pays.

Je l'ai dissoute.

La nation entière est appelée maintenant à déclarer sa volonté. Votre devoir est de maintenir l'ordre public et de veiller à ce que la volonté des Roumains se puisse manifester en toute liberté.

Montrez-vous comme toujours fidèles défenseurs de l'ordre et de la discipline.

Après avoir contenu si longtemps, grâce à votre inébranlable fidélité, les passions mauvaises, vous aurez maintenant l'honneur non moins grand de contribuer, par votre attitude loyale et énergique, à donner enfin au pays la liberté et à réduire à l'impuissance tous ceux qui compromettraient les intérêts et la dignité de notre pays. Officiers, sous-officiers, caporaux et soldats,

J'ai toujours compté sur vous, et vous vous êtes toujours montrés dignes de ma confiance. Aujourd'hui encore, j'en suis sûr, vous saurez vous tenir à la hauteur de la mission que je confie à votre patriotisme.

Signé: ALEXANDRE-JEAN.

Le ministre de la guerre,

Signé Général MANO.

Bucharest, 2/14 mai 1864.

Habitants de Bucharest,

Le Prince des Roumains, l'élu des 5 et 24 janvier 1859, après avoir usé d'une longue patience, a dû écouter la voix de la patrie. Il a fermé une Assemblée basée sur une loi électorale restreinte, une Assemblée qui, depuis cinq ans, empêche la Roumanie de progresser, en s'opposant à la réalisation des grands et libéraux principes de la Convention du 7-19 août 1858.

Alexandre-Jean Ier, par son décret d'aujourd'hui, fait appel au peuple roumain : il l'invite à se déclarer sur le statut destiné à développer la Convention, sur la nouvelle réforme électorale, qui nous donnera une Assemblée qui soit la véritable représentation de la nation.

Le Prince a pris l'initiative de ces actes importants, dans l'intérêt de l'union des Principautés sœurs, que les ambitieux et les factieux de l'Assemblée supprimée cherchaient, d'une manière insensée, à conduire au séparatisme, dans l'intérêt de la nation, qui se trouvait éloignée de toute participation à la vie publique, dans l'intérêt du pays, qui, depuis plus de cinq ans, attend en vain son développement moral et matériel.

Alexandre-Jean I soumet sa conduite au jugement de la nation, aux appréciations de l'Europe éclairée.

Dans la grande ère où nous entrons, l'ordre et le calme sont les premiers besoins du pays : c'est ce qu'avant tout nous réclamons de vous. Je fais donc appel à votre patriotisme. Donnez l'exemple de l'ordre. Que tous les citoyens honnêtes et pacifiques se pressent autour du Gouvernement pour l'aider à remplir sa grande mission.

Habitants de Bucharest, mettez toute votre confiance en votre Prince. Aujourd'hui il vous appelle à l'exercice de vos droits politiques. Deinain, grâce au concours de la future Assemblée, élue cette fois par la nation entière, il vous donnera la paix et le bien-être moral et matériel.

Fils de la capitale de la Roumanie, soyez les premiers à donner l'exemple de la tranquillité.

Pour moi, je saurai empêcher et punir tous ceux qui chercheraient à la troubler.

Circulaire du ministre de l'intérieur aux préfets, 2/14 mai 1864.

Monsieur le Préfet, l'Assemblée élective qui n'a voulu ni discuter ni voter les projets de lois rurale et électorale, seules lois qui pouvaient consolider la liberté et la prospérité de la Roumanie, cette Assemblée restreinte a été dissoute aux applaudissements de toute la population de Bucharest.

Au reçu de la présente circulaire, vous ferez afficher dans toutes les communes urbaines et rurales de votre district la proclamation du prince Alexandre-Jean Ier, qui appelle à l'exercice des droits politiques une nation entière déshéritée. Vous enverrez ensuite à toutes les autorités communales les décrets et les circulaires que je vous adresse, ainsi que le modèle des registres de vote.

Vous veillerez à la stricte observation de ce qui est compris dans ces décrets et circulaires. Vous demanderez une adhésion écrite à tous les fonctionnaires publics, en faveur de la grande mesure prise par le Gouvernement. Vous suspendrez tout fonctionnaire de l'ordre administratif qui ne vous donnera pas cette adhésion ou qui refusera le concours que vous êtes en droit de réclamer de lui. Quant aux fonctionnaires relevant d'un autre ministère et qui s'opposeraient aux dispositions prises par le Gouvernement, vous m'en ferez rapport immédiatement par voie télégraphique.

Vous arrêterez tout individu que vous trouverez dans votre district cherchant à troubler l'ordre public.

Je compte, monsieur le Préfet, sur votre zèle et votre dévouement. Comme je vous laisse toute liberté dans l'emploi des mesures relatives

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