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Cette amélioration est perdue pour le présent; il faut qu'elle attende son existence des progrès de l'avenir; mais au moins donnons à l'association cantonale, comme le propose la commission, le droit important de l'élection directe d'un membre du conseil général.

Ce projet est combattu par des prévisions que je me permettrai d'appeler chimériques, qui ne s'accordent pas même entre elles, et peut-être aussi par cette secrète pensée que l'élément démocratique y gagnerait une concession qu'il ne faut pas lui faire.

C'est sans doute dans cet esprit que le ministère a déclaré sa préférence pour le système qui appelait l'élection des membres du conseil général au chef-lieu de l'arrondissement.

Or, je le demande, qui de nous, consultant sa conscience, n'avouera pas que l'élection ainsi conduite serait faussée, et donnerait un résultat presque toujours contraire au vou des cantons? La cause en serait dans le déplacement des électeurs, rendu tellement onéreux, qu'ils se trouveraient privés par force de l'exercice de leur droit, et dans l'influence que le chef-lieu de l'arrondissement exercerait sur la plupart des choix de telle sorte que les campagnes, mal représentées, perdraient tout l'avantage qu'elles ont raison d'espérer de ce nouvel ordre de choses. Les élections cantonales, au contraire, répondent, sous ce rapport, à tous les vœux, à tous les intérêts et aux promesses de la Charte; elles seront un progrès administratif dont l'effet direct sera de distribuer aux campagnes les just es améliorations que leurs délégués demanderont au nom de l'équité; et si l'intérêt local peut quelquefois avoir ses exigences, il faut croire aussi qu'elles n'iront pas au point d'être irréconciliables avec les intérêts généraux, que les hommes sensés savent toujours comprendre et favoriser.

Les élections cantonales sont seules capables de réaliser le droit qu'ont les communes d'une si utile représentation au conseil général; et ces assemblées auront d'autant plus de vie, de solennité et d'action, que le mandat aura été plus directement décerné. Tous ces avantages deviennent illusoires, s'ils se confient à l'élection portée au chef-lieu d'arrondissement.

Enfin, l'on ne doit pas craindre que l'élection cantonale puisse amener au conseil général des hommes incapables d'en faire partie, ou que l'aristocratie y soit trop fortement représentée; on ne saurait s'arrêter à cette objection. Les hommes spéciaux ne manqueront pas, et je me confie assez au bon sens des électeurs, pour croire qu'ils ne s'aviliront jamais par des choix indignes d'eux ou nuisibles à leurs intérêts.

Une dernière objection n'a pas été résolue et ne peut pas l'être : c'est celle de l'inégalité de la représentation, qu'il est impossible d'assujettir à un système exactement proportionnel, soit sous le rapport de l'étendue des localités, soit sous celui des populations.

Cette difficulté est vraie, mais a-t-elle bien toute l'importance qu'on y attache? La représentation d'un pays doit-elle toujours se multiplier par sa population? Je ne le pense pas; il est en effet remarquable que les habitants d'un pays ont souvent une grande partie de leurs intérêts répandus sur divers territoires: ce fractionnement d'intérêts, variant à l'infini, est incalculable, et ne peut être assujetti à des règles uniformes.

Les choses étant ainsi, il faut ensuite avoir égard aux divisions cantonales, qu'on ne peut pas refondre à propos de la loi qui nous occupe; aux relations administratives, de justice et de famille qui en sont résultées, que le temps a consacrées, et auxquelles on ne doit pas indiscrètement toucher.

Au reste, cette difficulté secondaire se résoudra quand le mode d'élection aura été déterminé; il m'importait surtout d'établir que l'élection au chef-lieu d'arrondissement est destructive du principe électif promis par la Charte, et de tous les avantages sociaux qui en devaient être la conséquence. Cette vérité est assez sentie; elle a déjà été développée à cette tribune par de nombreux orateurs, et je ne dois pas y insister davantage.

M. Emmanuel Poulle. Je n'abuserai pas des moments de la Chambre, je n'ai que quelques observations rapides à lui présenter. Sí le système de la commission était admis, on arriverait à ce résultat que bien souvent la minorité de la population ferait la loi à la majorité. Il y a pour établir cette preuve des faits incontestables.

A Toulon, par exemple, il y un canton de 3,000 âmes et un autre de 20,000. Serait-il conforme aux règles de la justice d'accorder à l'un et à l'autre le même droit, la même influence? et lorsqu'il s'agira du voté de l'impôt, voulezvous que le membre du conseil général qui représentera une population riche, nombreuse, commerçante, industrielle, n'ait aucun avantage sur celui qui ne représentera qu'une population de 3,000 âmes, pauvre et disséminée sur un sol ingrat?

Le canton de Colobrières, ayant 3,000 âmes de population, ne peut avoir autant de droits qu'un des deux cantons de Toulon, qui est de 20,000.

Je vais citer un exemple plus frappant. Le département du Rhône a deux arrondissements, l'un de six cantons, c'est la ville de Lyon, qui compte, je crois, près de 200,000 âmes; le second est celui de Villefranche, qui a 17 ou 18 cantons. En résultat, l'arrondissement de Villefranche ferait la loi à celui de Lyon, puisqu'il aura 18 membres dans le conseil général, tandis que Lyon n'en a que 6.

Il est évident que l'on doit consulter l'étendue du territoire et la population pour fixer le nombre des membres du conseil général. Les faits ont plus de puissance que tous les raisonnements du monde. En nommant un membre par canton, il en résulterait une grande injustice, car il arriverait que 200,000 habitants seraient représentés par 6 membres, tandis que 30 ou 40,000 habitants, dans d'autres localités, auraient 18 représen

tants.

Il faut que, dans tous les cas, on tienne compte soit de la population, soit de l'industrie, soit de la richesse territoriale. Si vous ne prenez pas ces éléments pour base de la loi que vous faites, elle sera nécessairement défectueuse et incomplète.

Ici, je dois répondre aux objections faites par M. Salverte dans la séance d'hier. L'honorable député de la Seine vous a dit : Cette inégalité n'existe-t-elle pas pour l'élection des députés? N'est-il pas vrai que les uns représentent des arrondissements de 20,000 habitants, tandis que d'autres représentent des arrondissements "de 80,000?

Je commencerai par dire que je ne crois pas qu'il existe d'arrondissement de 20,000 habitants;

ils sont tous au moins de 40 à 45,000 habitants... | auront lieu par arrondissement électoral oo per (Bruits divers.)

Il y a des cantons de 3.000 âmes et des cantons de 25 à 30,000 âmes. Ainsi, cette objection perdrait beaucoup de sa force, puisqu'il n'existe aucun arrondissement qui soit 10 fois plus peuplé qu'un autre, tandis que je viens de prouver qu'il y a des cantons qui ont 10 fois plus de population que les autres.

On a fait une autre objection, qui naît de la difficulté du scrutin. Mais ce n'est que la première année que le scrutin pourra présenter quelques difficultés; car quand les renouvellements auront lieu, ces renouvellements se faisant par moitié, la difficulté disparaitra.

M. le ministre du commerce et des travaux publics a démontré hier combien le vote par canton offrirait d'inconvénients.

Je ne reviendrai pas sur l'influence du cheflieu d'arrondissement, influence qui peut être paralysée d'après l'amendement de l'honorable M. Pons. Quant au déplacement des électeurs, il n'y a pas la un inconvénient grave, ainsi qu'on paraît le craindre. C'est au chef-lieu d'arrondissement que tous les électeurs ont leurs relations d'intérêts et d'affaires.

Il me semble que toutes ces considérations sont décisives, et doivent faire préférer l'élection par arrondissement; je me réunis donc à l'amendement de M. Pons, qui a été imprimé en même temps que le rapport de l'honorable M. Gillon. M. le Président. La parole est à M. Lherbette.

De toutes parts: Aux voix! aux voix!

(La Chambre consultée ferme la discussion.) M. le Président. La question à décider la première est celle-ci :

L'élection des membres des conseils généraux de département doit-elle avoir lieu par assemblée d'arrondissement? z

La Chambre veut-elle décider cette question d'une manière générale et indépendamment de toute rédaction, ou veut-elle, aù contraire, que je prenne une des rédactions proposées?

M. Gaëtan de La Rochefoucauld. Il me semble indispensable de voter d'abord sur le mot électoral, dont j'ai demandé l'insertion. Ce sousamendement doit passer avant l'amendement.

M. Gillon (Jean-Landry), rapporteur. Il importe que la Chambre se prononce en principe général; car, si elle avait à voter sur une rédaction particulière, la commission aurait à présenter sur chacune de ces rédactions plusieurs observations. Nous abrégerons done singulièrement la longueur de la discussion, si d'abord le principe est adopté. (Appuyé! appuyé !)

M. Emmanuel de Las-Cases. Qu'il soit bien entendu que, si l'on adopte le principe de l'élection par arrondissement, cela n'empêchera pas la division des collèges en une, deux, trois fractions... (Non! non!)

Je crois important que le vote de la Chambre ne soit pas surpris à cet égard.

M. Gillon (Jean-Landry), rapporteur. C'est précisément en vue de maintenir ce principe de liberté que je demande à la Chambre de prononcer en thèse générale.

M. le Président. On expose que, en décidant la question d'une manière générale, on décidera seulement si les élections auront lieu ou n'auront pas lieu par assemblées d'arrondissement; mais il faut expliquer alors si ces assemblées

arrondissement de sous-prefecture. Fran di

vers.)

M. le général Demarcay. Je demande qu'on s'en tienne à la généralité du prisce a que, suivant l'opinion que vient d'appuyer e in torroborer par ses raisons M. Galia, în dente purement et simplement, et d'une manier générale, si l'élection aura lieu par assembl de canton ou par assemblées d'arrondissement. Quand cette question aura ete decoee, alors on pourra, si le mode d'assemblée par arise ment est adopté, soumettre par sousanende ment à la décision de la Chambre la questing savoir si ces assemblées se feront par arrondis sement administratif ou par arrondissement électoral. C'est juste! Appuye!.

M. le Président. Ainsi la Chambre est bien prévenue qu'elle ne va décider que d'une ma nière générale, de la manière la plus générale qu'il soit possible de concevoir, et que us is amendements qui auraient pour objet d'espli quer comment les assemblées seront divisen une fois le principe admis, ces amendements dis-je, seront réservés.

M. Dulong. Il me semble qu'il y a quel chose de plus à réserver. Le but de l'amende ment de M. Gaëtan de La Rochefoucauld n'espe seulement de fractionner les assemblées par atrondissement, mais encore de faire deux asse blées distinctes, s'il y a deux collèges électoral (Oui! oui!)

M. le Président. Vous réservez les division les subdivisions, toutes les manières possiblest fractionner le collège.

La Chambre, consultée, décide, en prin blées d'arrondissement.) général, que les élections auront lieu par asser

M. le Président. Maintenant la discuss est ouverte sur la question de savoir s'il n'yan qu'une assemblée par arrondissement, ou s en aura plusieurs.

M. Boudet a présenté la rédaction suiva

Néanmoins, dans les arrondissements a nistratifs fractionnés en plusieurs arrond ments électoraux, chaque arrondissement toral nommera seul une partie des membre conseil général proportionnée à sa popul M. Aroux en a proposé une autre :

Chaque membre du conseil général nommé par une assemblée électorale comp des électeurs d'un ou de plusieurs cantons. assemblées seront au nombre de 2 au et de 4 au plus par arrondissement, de telle s qu'il en soit réuni une dans chacune des principales de l'arrondissement, et une pour autres cantons au chef-lieu d'arrondissemer au chef-lieu de canton le plus central.

« Il y aura dans les villes composées de sieurs cantons autant d'assemblées que po lection des députés; dans ce cas seulemen nombre de quatre assemblées électorales par rondissement pourra être dépassé. »

Plusieurs voix: Cet amendement n'est pas plicable à la question.

M. le Président. Il est vrai que ce sera moins des assemblées d'arrondissement q assemblees cantonales renforcées : quant a je n'en suis pas juge, je ne puis pas prese d'amendement.

M. de Rambuteau. Je demande la pro pour l'amendement de M. Boudet, qui est la

séquence du principe que la Chambre vient d'adopter.

M. le Président. M. Boudet a la parole.

M. Boudet. Messieurs, désespérant de voir sortir de cette discussion une bonne loi qui embrasse dans son ensemble toute l'organisation départementale, puisque vous avez rejeté la création des conseils de canton, à mes yeux indispensables, j'espérais cependant que vous permettriez à ces cantons, déjà si maltraités, de nommer séparément leurs représentants au conseil général, comme vous l'avait sagement proposé votre commission, ou du moins que vous adopteriez les circonscriptions d'un ou de deux cantons, système de juste milieu encore préférable à celui de M. de Brigode; mais vous avez jugé à propos d'admettre la circonscription d'arrondissement. Je subis votre décision avec de vifs regrets.

Un devoir impérieux seul me fait surmonter le découragement que j'éprouve, et tenter de rendre cette loi un peu moins mauvaise.

Ce n'est donc que pour atténuer les effets désastreux de l'amendement de M. de Brigode que je propose mon paragraphe additionnel.

Messieurs, en réunissant au chef-lieu de l'arrondissement administratif les électeurs de tous les cantons pour nommer, par scrutin de liste, les membres du conseil général, je crois que la Chambre n'a pas aperçu les inconvénients qui en résultent dans l'exécution, ni toutes ses conséquences.

Cette disposition est en contradiction manifeste avec la législation électorale.

En effet, Messieurs, la loi du 19 avril 1831 fractionne les arrondissements administratifs les plus considérables, ordinairement en deux arrondissements électoraux, intra muros et extra muros, et quelquefois même en un plus grand nombre. Elle leur accorde le droit de nommer chacun séparément un député c'est ce qui a lieu au moins dans 86 arrondissements de chefslieux, tandis que vous, Messieurs, vous venez d'ordonner la réunion, en un seul collège, des électeurs de ces différents arrondissements électoraux, pour nommer ensemble quelques membres du conseil général. Cela ne parait pas rationnel pour vous le démontrer plus clairement, permettez-moi d'en faire l'application à une des 172 circonscriptions électorales auxquelles ce cas est applicable.

:

Je prends l'arrondissement de Montauban (Tarn-et-Garonne) composé de 11 cantons. Deux cantons, ceux du chef-lieu, nomment seuls un député et les 9 autres cantons nomment aussi leur député.

D'après votre décision, ces 2 arrondissements électoraux, nommant chacun un membre de cette Chambre, seraient obligés de n'en former plus qu'un pour nommer une partie des membres du conseil général. Ainsi notre législation présenterait cette contradiction: d'un côté, les électeurs à 200 francs d'une circonscription nommant seuls un membre de la Chambre des députés, et ne pouvant pas nommer quelques membres de leur conseil général, après avoir été presque doublés en nombre par l'adjonction des nouveaux électeurs proportionnels et par celle des capacités du jury. Je ne crois pas que ce soit votre intention. Messieurs, j'ajouterai que si la loi électorale a reconnu aux arrondissements ruraux le droit d'être représentés dans cette Chambre, où s'agitent les intérêts de la France entière, à plus

forte raison devez-vous leur reconnaître celui d'être représentés dans le conseil général, où ne se débattent que les intérêts du département.

Soyez persuadés que les membres du conseil général nommés par les arrondissements ruraux ne le céderont en rien, en lumière et en patriotisme, aux autres, et qu'ils apporteront une connaissance plus exacte des besoins matériels des différentes parties du département. Je persiste.

M. Thil. Vous venez d'adopter les assemblées par arrondissement, il me semble qu'il vous faut subir, Messieurs, les conséquences de votre vote: du moment que les électeurs doivent se réunir au chef-lieu d'arrondissement, adopterez-vous le fractionnement qu'on vous propose?

Une voix Il n'est pas décidé qu'on doive se réunir au chef-lieu en une seule assemblée. M. Thil. Si c'était décidé, je ne parlerais pas. M. Vérollot. Il a été fait des réserves expresses. (Bruit.)

Plusieurs voix Parlez! parlez!

M. Thil. Je ferai remarquer à mes honorables collègues que je ne puis répondre à chaque interrupteur. Si je voyais comme ceux qui n'adoptent pas ma manière de voir, nous serions tous d'accord et la discussion deviendrait inutile.

Si, au contraire, je ne pense pas comme une partie de mes collègues, je prie la Chambre de me permettre de dire en quoi mon opinion diffère de la leur.

Voix nombreuses : Parlez! parlez!

M. Thil. Je reviens donc à ce que je disais tout à l'heure :

La Chambre a adopté le mode d'assemblée au chef-lieu d'arrondissement... (Non! non!)

Je ne veux pas abuser des moments de la Chambre; si mes collègues ne jugent pas à propos de m'entendre... (Si! si!, je suis prêt à quitter la tribune (Non! Parlez!)

Dans mon opinion, et malgré toutes les observations qui ont été faites avant que la Chambre émit son vote, dans mon opinion, dis-je, il résulte de son vote cette conséquence naturelle et nécessaire qu'il doit y avoir au chef-lieu de chaque arrondissement une assemblée unique. (Dénégation... Interruption prolongée.)

Quelques voix Parlez! Continuez!

M. Thil (descendant de la tribune). Je n'entends pas développer plus longtemps mon opinion.

M. le Président. La Chambre ne vous contredit que sur un point vous dites que la réunion au chef-lieu d'arrondissement d'une assemblée unique résulte de son vote; si vous disiez que cela résulte de votre opinion...

M. Thil. Je me suis suffisamment expliqué pour être entendu. J'ai dit que, dans mon opinion, c'est une conséquence nécessaire du vote émis par la Chambre, dans mon opinion et malgré toutes les observations qui ont été faites.

Plusieurs voix : Continuez! continuez! (M. Thil descend de la tribune.)

M. Peyre. Messieurs, il me semble qu'avant d'entrer dans la question soumise à la Chambre, il faut d'abord s'entendre sur le sens, sur la portée que la Chambre a voulu donner à son vote antérieur.

il me semble que, contrairement à l'opinion de l'honorable préopinant, la Chambre n'a pas voulu voter autre chose, mais qu'elle admettait en principe les assemblées d'arrondissement.

Quelle est donc la portée du vote de la Chambre? Il me semble que, d'après la précision qu'a mise M. le président à lui poser la question, elle a voulu se réserver le droit de décider plus tard comment seraient composées ces assemblées.

Ainsi, encore une fois, il n'y a pas obligation de réunir les électeurs au chef-lieu d'arrondissement; et si l'on reconnaissait des inconvénients à faire voter autrement qu'au chef-lieu, on pourrait, passez-moi l'expression, donner domicile aux électeurs à ce même chef-lieu, ou sur tout autre point de localité.

Messieurs, votre liberté est entière, et la question de savoir comment il faut entendre, et la composition de ces collèges électoraux, et le lieu où ils se tiendront, reste aussi tout entière à décider.

L'amendement de M. Boudet, qui n'admet qu'un seul collège par arrondissement électoral, ne me paraît pas devoir être adopté.

Il veut que, dans les arrondissements où il n'existe que deux collèges électoraux, il n'y ait que deux assemblées. Il me semble que ce moyen qu'il propose est tout à fait insuffisant, et que vous tomberiez dans tous les inconvénients que vous avez voulu éviter.

Il faut examiner de quelle manière devront se scinder ou se diviser les assemblées d'arrondissement. La question est de savoir si le fractionnement de ces assemblées n'est pas beaucoup plus utile que la réunion que l'on a proposée. Je dis que la fraction est indispensable, afin que, d'après la nature des pouvoirs qui seront conférés, le caractère de ceux qui les donneront, tous les intérêts soient représentés.

En principe, on reconnaît qu'il faut que les pouvoirs des assemblées électorales et leurs circonscriptions soient en rapport avec la nature même des pouvoirs qu'ils sont chargés de con

server.

Ainsi, vous avez voulu que, dans la Chambre des députés, les arrondissements fussent représentés, et vous avez décidé que les arrondissements éliraient les députés. Vous avez reconnu que pour cette Chambre, vis-à-vis des immenses pouvoirs qui lui sont propres, le fractionnement par arrondissement suffirait.

Mais vouloir que le même fractionnement soit en rapport avec les conseils généraux de département, et qu'il serve de base à l'élection de leurs membres, cela est impossible.

En principe, il faudrait que chaque commune fût représentée; car, soit pour les contributions, soit pour l'assiette du terrain, elle a un intérêt distinct; mais il est impossible d'aller jusque-là : il faut donc s'en rapprocher le plus que l'on peut, et c'est ce qui me fait trouver l'amendement de M. Boudet insuffisant.

Il faudrait, non le fractionnement des collèges au chef-lieu, mais le fractionnement des localités, et personne ne peut mieux l'établir que le gouvernement.

Vous voulez que tous les intérêts soient représentés, et vous n'y arriverez pas par l'élection aux chefs-lieux d'arrondissements. L'influence de ces chefs-lieux aura sur l'assemblée une influence incontestable, et ce seront toujours les hommes puissants de l'arrondissement qui seront nommés.

Voilà ce qu'il importe d'éviter, il faut un principe inégal de représentation, à mesure que les pouvoirs que l'on donne sont plus ou moins étendus.

Partant de plus haut, ceux de la Chambre des députés ne peuvent pas avoir la même origine,

le même point de départ que ceux des conseils généraux. L'amendement de M. Boudet confond des choses si distinctes, qu'il faut donc le repousser.

M. de Rambuteau. Une pensée a présidé à la création du système électoral que vous avez adopté, c'est celle-ci : donner à tous les intérêts, à tous les besoins, une expression, un défenseur. J'ai eu l'honneur de le rappeler à la Chambre relativement à la loi qui nous occupe aujourd'hui, et le grand nombre de voix qui se sont élevées de toutes les parties de cette Chambre pour demander que la question des circonscriptions fût réservée, a démontré combien cette pensée est partagée.

Dans l'amendement de M. Boudet, que j'ai appuyé, je crois qu'il y a quelques changements de rédaction à faire; je demande la permission d'en soumettre un autre à la Chambre :

« Les membres des conseils généraux sont nommés par les collèges d'arrondissements élec

toraux.

« Néanmoins, dans les circonscriptions qui renferment plusieurs arrondissements administratifs, chaque arrondissement administratif formera un collège séparé.

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Quand un collège est formé de cantons appar tenant à deux arrondissements, la circonscription administrative sera préféréé alors à la circonscription électorale. »

Je crois que toutes les difficultés sont résolues par cette rédaction.

Il y a d'abord trois principes à réserver : celui du nombre des électeurs, celui des membres du conseil général, et celui de la répartition entre les arrondissements ou fractions d'arrondissement. Il est impossible de les juger dans la discussion actuelle.

S'il faut accorder une bonne représentation à la propriété rurale, il ne faut pas non plus abondonner les intérêts urbains; les uns et les autres doivent obtenir une égale protection. Les premiers seraient privés de toute influence, de toute protection, si l'élection n'était pas fractionnée.

L'amendement de M. Boudet préjuge donc ure question à réserver, et c'est pourquoi je demande la radiation de ces derniers mots « Proportionne à la population. » Le territoire et les contributions devront aussi être pris en considération.

M. Boudet. Je consens au retranchement.

M. Duréault. Messieurs, la résolution que vous avez adoptée en rejetant le vote par canton, et en décidant que l'élection des membres des conseils généraux de département aurait lieu par arrondissement, me paraît funeste au principe électoral, tel qu'il doit dériver d'un gouverne ment franchement représentatif, et votre loi reaferme déjà à cet égard un germe de mort. Auss ai-je protesté par mon vote contre votre dernière décision.

Mon opinion se rattachait au projet de votre commission, par les motifs si bien développes par son honorable rapporteur, et si j'eusse ete obligé d'abandonner ce système pour choisir entre le projet du gouvernement et celui qu'en fin vous avez adopté, je n'eusse pas hésité, je m'empresse de le dire, de donner la préférence à l'œuvre ministérielle, parce que là, du moins, il faut le reconnaître, je trouve la pensée franche de conserver le principe de l'élection par le vote par canton, et même par l'agrégation de cantons. Prétendez-vous faire faire des élections sincères

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et sérieuses par le vote par arrondissement? J'ai l'intime conviction du contraire, et que vous n'avez vu dans cette question la France que dans ses villes, et nullement dans ses populations rurales si nombreuses.

Eh bien! je vous prédis que, par votre loi, vous n'aurez qu'un simulacre d'élection, et par suite qu'un simulacre de représentation des intérêts généraux du département. La plus grande masse des électeurs ruraux ne se rendront pas au cheflieu de l'arrondissement, tandis qu'ils auraient tous accouru au chef-lieu de canton.

Honoré de la confiance du gouvernement dans les fonctions de juge de paix d'un canton rural qu'il a daigné me confier, je connais assez les mœurs et les habitudes des habitants des campagnes, leur plus ou moins de lumières, et le degré de leur zèle et de leur patriotisme pour pouvoir vous dire que votre foi sera en trop d'endroits inexécutée, d'une part par les trop grandes distances qu'ils auront à parcourir pour se rendre au chef-lieu électoral (8, 10 à 12 lieues à faire), d'un autre côté par l'absence trop prolongée pour eux de leur domicile, où des affaires journalières les retiennent.

Il n'est personne de vous, Messieurs, qui ne sache que ces considérations que je viens de vous présenter en retiennent, par un sentiment étroit d'égoïsme, un grand nombre chez eux, lorsqu'il s'agit de la nomination du député de leur arrondissement.

Que sera-ce quand il s'agira d'élections bien moins élevées et moins importantes?

Vous n'aurez, tenez-le pour certain, quand nous en viendrons à l'application de la loi telle que vous l'avez faite, que des électeurs urbains en masse et quelques électeurs ruraux çà et là. De sorte que vos élections seront entièrement à la merci et de l'administration et des électeurs de la cité. Vous aurez des conseillers généraux de département uniquement dans ce sens ; mais des représentants des intérêts des cantons ruraux, point; ou seulement ceux dont la ville chef-lieu de l'arrondissement daignera, suivant son bon plaisir, les gratifier.

Eh bien! je le demande, Messieurs, aurons-nous là des élections sérieuses? N'est-ce pas au contraire un système faux et mensonger et qui tend à tuer le système électoral ou à en dégoûter? Et cependant je me plais à le reconnaitre, il n'est pas un de nous, dans cette enceinte, qui ne veuille de bonne foi que les intérêts généraux du département soient représentés, qui ne cherche à s'éclairer, et qui n'ait la louable et généreuse ambition de vouloir faire du bien et d'être utile à son pays; de le doter enfin de bonnes lois et surtout de facile exécution. En conséquence, je voterai pour le fractionnement le plus large de l'arrondissement électoral, et je propose par amendement que l'assemblée électorale se divise en autant de sections qu'il y a de cantons, que chaque section soit composée des électeurs d'un canton, et nomme un membre au conseil général du département.

M. Gaëtan de La Rochefoucauld. Je demande la parole pour le rétablissement de l'ordre de la discussion. Il me semble que la Chambre a adopté les assemblées par arrondissement, en réservant toutes les questions de fractionnement des arrondissements. La proposition de M. Pelet est complexe, elle renferme deux questions. Il résulte en effet de cette proposition: 1° que chaque arrondissement électoral nommera une

partie des membres du conseil général, et c'est ce que je demande; 2° que le nombre des membres du conseil général nommés par chaque arrondissement sera proportionné à la population de cet arrondissement.

C'est là une question qui n'est pas encore en discussion, et si vous adoptiez l'amendement de M. Pelet, vous décideriez deux questions au lieu d'une.

Je demande donc la priorité pour mon amendement, qui consiste à joindre au mot arrondissement le mot électoral.

Mais il s'élève une autre difficulté, c'est celle où deux ou plusieurs arrondissements administratifs ne composent qu'un seul arrondissement électoral. Ce sera là la matière d'une exception sur laquelle vous prononcerez ultérieurement.

Quant à présent, vous devez simplement voter le principe, que chaque arrondissement électoral nommera une partie des membres du conseil général; quant à la question de savoir si le nombre de ces membres sera proportionné à la population ou aux contributions, ou bien à la population et aux contributions tout ensemble, il est nécessaire que vous renvoyiez cette question à la commission qui, d'après les tableaux des contributions et de la population, pourra faire la répartition des membres du conseil général entre les divers arrondissements électoraux.

M. Gillon (Jean-Landry), rapporteur. La diversité des amendements qui vous sont présentés prouve que nous sommes arrivés au point le plus difficile de la question. Aucun de ces amendements ne nous paraît, quant à présent, pouvoir être soumis à un examen attentif et sérieux. Il nous semble surtout extrêmement difficile de faire coordonner tous ces amendements au milieu d'une discussion publique.

Ainsi, pour ne parler que de l'amendement de M. Pelet, il paraît offrir le moyen le plus facile d'opérer l'élection au chef-lieu d'arrondissement. Cet amendement a besoin d'être sous-amendé; un sous-amendement a été produit par M. de La Rochefoucauld, et cependant, ce sous-amendement ne pourvoit pas à toutes les nécessités qui peuvent se présenter. Je vais le prouver en peu de mots.

M. Boudet veut que, dans les arrondissements administratifs fractionnés en plusieurs arrondissements électoraux, chaque arrondissement électoral nomme seul une partie des membres du conseil général, proportionnellement à sa population.

Notre honorable collègue s'occupe donc du cas où un arrondissement administratif est fractionné en plusieurs arrondissements électoraux; mais il est une autre hypothèse que son amendement n'embrasse pas. Ainsi, il est des collèges électoraux qui se composent des citoyens réunis de plusieurs arrondissements administratifs; il est, par exemple, tel département où trois arrondissements administratifs ont été réunis pour ne former qu'un même collège électoral politique.

Ni l'amendement de M. Boudet, ni celui de M. de La Rochefoucauld ne peuvent résoudre la difficulté, et, en effet, l'amendement de M. de La Rochefoucauld porte que chaque membre du conseil général est nommé par une assemblée électorale réunie au chef-lieu d'arrondissement électoral.

L'amendement de M. de Rambuteau ne pourvoit pas non plus aux différents cas qui peuvent se présenter, et d'un autre côté cet amendement a

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