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du 31 décembre 1814 au 31 décembre 1817. Il est donc établi que, sous le rapport du droit, les prétentions des pétitionnaires ne peuvent être accueillies.

Le sont-elles davantage sous celui de l'équité, au nom de laquelle ils invoquent l'intervention de la Chambre ?

Relativement à la demande de rappel en activité, nous répondrons avec le savant rapporteur de la commission chargée de l'examen du projet de loi en faveur des officiers réformés de 1813 à 1817, que leurs réclamations ont été examinées avec sollicitude par une commission réunie aussitôt après la Révolution de Juillet 1830, et présidée par un illustre amiral, ministre de la marine, dès l'aurore de la liberté française, et que l'intérêt général du service, l'intérêt de la France a pu seul l'emporter sur la bienveillance qu'on leur portait, par les motifs tirés de ce qu'une interruption de 15 à 18 ans rendait ces officiers généralement impropres au métier de la mer, de ce qu'ils ne pouvaient rentrer avec avancement sans refouler des officiers qui naviguaient avec honneur depuis 15 ans et plus, ou rentrer dans leurs anciens grades sans passer sous les ordres de leurs cadets.

Relativement à la demande d'application de la loi du 18 avril 1831, nous dirons qu'on n'aurait pas pu leur accorder le bénéfice du tarif annexé à cette loi sans leur appliquer aussi les dispositions générales qui exigent 25 ans de service effectif pour obtenir seulement le minimum de la pension, et qu'alors ils auraient perdu au lieu de gagner à cette application (d'ailleurs contraire aux principes), puisque la loi du 30 mars 1831, en maintenant le tarif de l'an II, leur a alloué le minimum de la pension du grade à moins de 10 ans de service, les 5 huitièmes du maximum pour 10 à 15 ans, les 3 quarts du maximum de 15 à 20 ans, et le maximum, lorsqu'ils étaient entrés dans leur vingtième année de service (c'est-à-dire ce qu'on n'obtient, en temps ordinaire, qu'à 45 ans de service.)

Ainsi, à défaut d'un appel à l'activité que l'état des cadres et les droits des officiers en activité ne permettaient pas d'accorder, et que la loi interdit aujourd'hui de la manière la plus formelle, les officiers compris dans les grandes réformes de 1814 à 1817 ont obtenu une large réparation dans le bénéfice de la loi du 30 mars 1831, qui a imposé en leur faveur, à la caisse de la marine, une augmentation de dépense d'environ 400,000 francs par an.

Voilà ce qu'a fait pour les pétitionnaires le gouvernement né de la Révolution de 1830. Bien loin donc d'avoir été repoussées avec mépris, comme les signataires le disent avec une inexcusable inconvenance, leurs réclamations et leurs doléances ont été entendues et jugées après l'examen le plus consciencieux. Le gouvernement, Messieurs, a fait tout ce que lui commande l'intérêt du pays; et nous, pour notre part, nous avons fait, par la loi réparatrice du 30 mars 1831, ce que permettait l'état des finances Convaincue de cette vérité, la commission me charge de vous proposer sur la pétition l'ordre du jour. (Adopté.)

Le sieur Vibert, ancien sergent d'artillerie de la marine, demande que la loi du 30 mars 1831, relative aux retraites des officiers de la marine, soit applicable aux sous-officiers de l'artillerie de cette arme.

La loi du 30 mars 1831 a pour objet de réparer une grande injustice, en rendant à tous les offi

ciers du corps de la marine les avantages que l'ordonnance du 1er août 1815 avait conférés aux officiers de l'armée de terre. Il y avait eu en effet une rigueur extrême de proportionner les pensions qui leur avaient été accordées à la stricte durée des services, sans leur tenir aucun compte, comme on l'avait fait pour l'armée de terre, de l'interruption forcée de leur carrière et de la perte de tout le fruit d'études spéciales. Cette injustice devait être réparée, et elle l'a été pour l'avenir des pensionnaires réintégrés, à partir du 1er août 1830, dans les avantages qu'avait assurés l'ordonnance du 1er août 1815 aux officiers licenciés.

Mais la mesure qui frappa les officiers dans le corps de la marine n'attaquait point les sousofficiers et les soldats: ceux dont les droits à la pension étaient reconnus furent déterminés par les règles et tarifs en vigueur dans les liquidations du département de la guerre. C'est ainsi que le sieur Vibert lui-même a obtenu la pension de 200 francs attribuée à son grade par l'ordonnance du 27 août 1814, pour les sergents de l'armée de terre. Il y a donc eu dans le traitement des sous-officiers du corps de la marine, similitude avec les sous-officiers de l'armée. Par cette considération, votre commission ayant jugé inadmissible la prétention du pétitionnaire, j'ai l'honneur de vous proposer en son nom de passer à l'ordre du jour. (Adopté.)

Les patrons pêcheurs de l'arrondissement de Toulon se plaignent de l'envahissement de leurs côtes par les pêcheurs étrangers, et demandent que le gouvernement prenne des mesures à cet égard.

Cette pétition n'est que la reproduction des plaintes que les mêmes pêcheurs et ceux de plusieurs points des côtes de l'arrondissement maritime de Toulon ont adressées au ministère de la marine, à l'effet d'obtenir, soit l'expulsion, soit la réduction du nombre des pêcheurs étrangers (sardes, catalans, napolitains) qui, concurremment avec eux, se livrent à la pêche devant les côtes de la Provence et du Languedoc.

Le nombre de ces étrangers, ainsi admis au partage de l'industrie des pêcheurs français dans les eaux de notre mer territoriale, est devenu considérable; les uns ont leur domicile en France, les autres viennent chaque année s'établir sur nos côtes, où ils demeurent stationnaires pendant plusieurs mois, c'est-à-dire pendant tout le temps de la pêche.

Cet état de choses est devenu réellement abusif. Le principe de l'abus se trouve dans une loi, très peu précise, dn 12 décembre 1790, qui semblait n'avoir en vue que les pêcheurs catalans, placés sous le bénéfice des stipulations du pacte de famille, et qui, par la manière dont elle est conçue, a déterminé, en fait, l'exercice du même avantage à une foule d'autres pêcheurs étrangers, tels que les Sardes, les Génois et les Napolitains.

Ces étrangers, dans l'exercice de la pêche sur nos côtes, dans le placement des produits de leur industrie sur nos marchés, jouissent des avantages de la nationalité française sans en supporter les charges, du moins sans supporter la plus essentielle, c'est-à-dire l'obligation de servir sur les bâtiments de l'Etat.

C'est cette différence de traitement qui, on doit le reconnaître, légitime les réclamations de nos pêcheurs, dont la situation à cet égard a depuis longtemps éveillé la sollicitude du département de la marine.

Une disposition de la loi précitée, du 12 dé

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cembre 1790, portait (art. 8) que « le ministre des affaires étrangères aurait à concerter avec la cour d'Espagne les moyens d'attacher au service de l'une et l'autre nation les gens de mer français et espagnols domiciliés ou stationnaires sur les côtes de France et d'Espagne ».

Cette disposition est malheureusement restée sans exécution.

Elle eût prévenu l'abus; elle est invoquée aujourd'hui comme remède.

Mais le temps a formé et consolidé des habitudes maintenant fort difficiles à détruire; aux demandes en éviction on oppose la possession; les étrangers s'étayent d'une loi qui, bien que détournée de son but, leur prête son appui; enfin, ils trouvent un autre appui auprès des consommateurs, à qui leur concurrence procure l'avantage d'une plus grande abondance de produits achetés à des prix moindres.

Pour changer cet état de choses, ou pour le régulariser, en conciliant tous les intérêts, l'intervention diplomatique est nécessaire. On arrivera à reconnaître la convenance de soumettre aux délibérations des Chambres, en remplacement de la loi de 1790, une loi nouvelle sur la matière qui conciliera les intérêts des nationaux avec ceux de nos voisins.

Mais avant d'en venir là, il faut que la question ait passé par un examen approfondí; de nombreux points de fait sont à établir; en un mot, il est urgent de s'occuper maintenant de l'instruction de l'affaire, qui a une gravité très réelle, et c'est un objet auquel nous sommes informés que le ministère de la marine consacre actuellement des soins tout particuliers.

Votre commission, par ces motifs, vous propose de prendre en considération cette pétition, et d'en ordonner le renvoi à M. le ministre de la marine et à M. le ministre des affaires étrangères.

M. de Briqueville. Je demande le dépôt au bureau des renseignements.

M. Emmanuel Poulle. Je demande le renvoi au président du conseil.

Ce qu'on aurait peine à croire, c'est que les patrons pêcheurs étrangers sont traités avec plus de faveur que les pêcheurs français. En effet, les pêcheurs sardes peuvent équiper leurs bateaux avec des marins étrangers, tandis que les habitants de Toulon et de Marseille, quand ils veulent équiper des bateaux pêcheurs, sont obligés de prendre des mousses et des patrons français : voilà un premier privilège accordé aux étrangers sur les habitants du pays.

Ensuite, ils ont des filets d'une dimension beaucoup plus considérable que celle qui est prescrite par les règlements.

La loi du 12 décembre 1790, dont votre rapporteur vient de parler, ne me paraît pas, à la rigueur, applicable aux pêcheurs du Piémont. Cette loi ne devrait concerner que les pêcheurs catalans, à cause des relations de bon voisinage qui existaient alors entre la France et l'Espagne. J'appelle l'attention de la Chambre sur la position fâcheuse des patrons pêcheurs de Méditerranée.

En effet, depuis les portes de Nice jusqu'à Toulon et à Marseille, il y a une quantité considérable de bateaux pêcheurs étrangers qui paralysent l'industrie des bateaux français. Aussi les patrons pêcheurs de Toulon sont-ils obligés d'exercer leur profession d'une manière peu lucrative et même misérable. Toutes les charges sont pour eux et les avantages pour les étrangers;

il résulte de là que les patrons pêcheurs ne peuvent soutenir la concurrence avec les étrangers, parce qu'ils sont obligés de payer une patente.

Dans la loi de 1790, il y a bien un article qui oblige les pêcheurs étrangers à un impt qui, d'après l'article 3 de la loi du 12 décembre 1790, était le paiement de la contribution dite la demi paie. Cette loi n'est pas exécutée.

Qu'arrive-t-il ? C'est que les pêcheurs français, se dégoûtant de cet état de choses, et se trouvant dans une position malheureuse, au lieu de donner à leurs enfants la profession de marins, les détournent de cette carrière; et nous perdons ainsi des marins qui, au jour du péril, pourraient rendre les plus grands services à nos bâtiments de guerre. N'est-il pas fâcheux de voir des étrangers maîtres de nos rivages, et d'avoir la certitude, qu'au moindre danger, ils quitteront leur patrie d'adoption, et s'empresse ront de prendre la fuite après avoir emporté notre argent; et quand il s'agit de la garde nationale, de la conscription ou d'autres charges, ils ne veulent en supporter aucune. Cet état de choses ne peut exister.

Je demande donc le renvoi au ministre de la marine et au président du conseil : il n'est pas juste que l'on donne à des étrangers le même avantage qu'aux Français.

Je pourrais citer l'exemple de l'Angleterre qu ne permet pas aux étrangers d'exercer une in dustrie, de faire un commerce au détriment de intérêts nationaux. La ville de Toulon est enva hie par des étrangers qui viennent paralyse entièrement l'industrie des habitants du pays. grand nombre d'étrangers pourrait avoir graves inconvénients, des suites funestes da une épidémie. L'honorable rapporteur de vot commission a demandé le renvoi à M. le mini tre de la marine; mais comme je pense que, une si importante question, nous devons éve l'attention du gouvernement, je demande renvoi à M. le président du conseil des mi tres. (Appuyé! appuyé !) (Le double renvoie ordonné.)

M. Martin (du Nord). Messieurs, votre c mission chargée d'examiner la propositionM. Salverte, relative au déficit Kessner, vien se réunir; elle m'a chargé de vous présenter rapport qui doit contenir la délibération.

Mais ce rapport n'étant pas à l'ordre d je me crois obligé de demander à la Cha l'autorisation de lui en donner lecture. Ce Messieurs, le vœu unanime de la commiss Voix nombreuses: Lisez le rapport!

M. Martin (du Nord), rapporteur. Messier dans votre séance du 7 de ce mois, vous renvoyé à l'examen d'une commission la p position de l'honorable M. Salverte, relative déficit Kessner, que vous avez prise en c dération; la commission que vos bureaux nommée s'est réunie, et je viens en son vous faire connaître le résultat de ses delibe tions.

Vos précédents, et mieux encore la riguer votre règlement, n'ont permis à votre com sion ni de consulter les documents qui exis d'après les travaux auxquels s'est livrée la mission d'enquête nommée le 1er février der ni de rechercher d'autres lumières que qui ont servi de base au rapport qui vous présenté en son nom, et par suite d'éme quant à présent, une opinion quelconque s question de responsabilité qui s'est éleve

moment de la disparition de l'ex-caissier central; votre commission ne s'est trouvée investie que du droit de savoir si la proposition de notre honorable collègue devait ou non être convertie par la Chambre en résolution, et à cet égard, elle n'a pas éprouvé le moindre doute.

Au surplus, elle a pensé devoir vous proposer le mode d'exécution de la résolution dont nous yous soumettrons le projet dans un instant; des documents existent, qu'ils soient consultés ; s'ils sont insuffisants et s'ils peuvent être complétés, que la commission que vous croirez sans doute utile de nommer obtienne de vous les pouvoirs nécessaires pour se les procurer.

En conséquence, la commission m'a chargé, Messieurs, de vous proposer le projet de résolution dont voici la teneur :

« Le préjudice qu'ont porté au Trésor de l'Etat la soustraction de fonds commise par le caissier Kessner et sa disparition, ainsi que la responsabilité qui peut en devenir la conséquence, seront, dans le courant de la session actuelle, soumis à un examen spécial.

A cet effet, la Chambre nommera une commission chargée de lui présenter un projet de résolution, après examen de documents recueillis par la commission de 1832, et de toute autre qu'elle jugerait nécessaire. »

M. le Président. Le rapport sera imprimé et distribué. A quel jour la Chambre veut-elle en fixer la discussion?

Voix nombreuses : A lundi!

Dautres voix: Après la discussion de la loi départementale!

M. Voyer d'Argenson. Je supposais, comme le rapport qui vient de nous être fait n'est qu'un rapport préparatoire, que la Chambre pourrait peut-être, dès aujourd'hui même, délibérer sur la proposition. Je pensais que peut-être la Chambre jugerait à propos de la discuter, afin de hâter

ses travaux.

M. le Président. Je ferai observer à la Chambre que cette proposition n'était pas à l'ordre du jour d'aujourd'hui. Quelques personnes ont proposé de la renvoyer après la foi départementale. Je proposerai de la renvoyer à lundi.

M. de Mosbourg. Je demande le renvoi de cette discussion à samedi.

Voix diverses : A lundi, à l'ouverture de la Séance.

M. Martin (du Nord), rapporteur. Messieurs, la roposition de renvoyer la discussion du rapport que je viens de présenter, après le vote de la loi Forganisation départementale, a pu être motiée par la pensée que la discussion entraînerait [uelques longueurs; mais vous avez pu remarfuer qu'il ne s'agit pas de discuter la question e responsabilité; il s'agit seulement de converir en résolution de la Chambre la proposition de I. Salverte, de savoir si vous devez ajouter à ette proposition le paragraphe présenté par la ommission, qui consiste à faire nommer une ouvelle commission qui serait chargée de doner son opinion sur les documents qu'elle aurait ecueillis.

Il me semble que puisqu'il n'est pas probable ue cela donne lieu à une longue discussion, la hambre pourrait s'occuper de cette question réliminaire au commencement de la séance de ndi, sans interrompre pour cela la discussion

la loi sur l'organisation départementale; et i nommerait de suite la commission chargée

d'examiner la question, qui seule peut entraîner de longs débats dans la Chambre. Je crois donc devoir, au nom de la commission, demander que cette discussion soit renvoyée à lundi.

M. Glais-Bizoin. C'est une affaire très grave! M. le Président. Plusieurs propositions sont faites on a demandé le renvoi à lundi, à samedi, et enfin après la loi sur l'organisation départementale. Je mets aux voix cette dernière proposition.

(Elle est rejetée.)

(La Chambre, consultée de nouveau, décide que la discussion sur la proposition de M. Salverte aura lieu samedi prochain.)

M. le Président. M. Vigier est appelé à la tribune pour continuer le rapport des pétitions. M. Vigier, rapporteur. Messieurs, le sieur Becquet, à Paris, sollicite un secours.

Le pétitionnaire, ancien marin, est pensionné de 96 francs par an, comme ayant été estropié au service. Il sollicite un secours qu'il n'est ni dans les attributions ni au pouvoir de la Chambre de lui accorder. La commission vous propose donc de passer à l'ordre du jour. (Adopté.)

Le sieur Joubert, à Tours, présente divers objets d'intérêt public.

Le sieur Joubert demande à la Chambre de reviser à la fois et nos lois électorales et nos lois financières. Il voudrait que les premières appelassent exclusivement aux emplois et le talent et la vertu. La commission partage bien sincèrement le vœu du pétitionnaire; mais elle n'est pas bien convaincue que le suffrage universel soit un sûr moyen d'arriver à ce résultat; elle ne pense pas non plus que de salarier les fonctions des députés doive ajouter une nouvelle garantie à cette haute marque de la confiance nationale.

Quant aux projets financiers du pétitionnaire destinés à soulager la classe malheureuse, il est probable qu'ils produiraient un effet tout opposé; car ils ne tendent à rien moins qu'à imposer des taxes ruineuses sur l'industrie, sur le commerce maritime, en un mot qu'à tarir toutes les sources de travail et de bien-être de la classe laborieuse, qui trouve ses moyens d'existence et dans l'activité du commerce et dans les dépenses auxquelles les riches consacrent leur superflu.

Le pétitionnaire demande aussi que l'Etat achète et défriche pour son compte nos landes, nos marais, nos terres incultes.

Cette tâche n'appartient qu'à l'industrie particulière le gouvernement lui doit encouragement et protection; mais toute participation directe de sa part dans de semblables opérations est presque toujours également onéreuse au Trésor et aux entreprises.

Enfin, le pétitionnaire reproduit une demande que vous aviez écartée dans votre séance du 14 avril dernier, sur le rapport lumineux de notre honorable collègue M. Delaroche, et qui tendrait à créer une sorte d'inquisition politique, semblable à celle qui a déshonoré les premières années de la Restauration. En conséquence, la commission vous propose de passer à l'ordre du jour sur la pétition du sieur Joubert.

M. Beauséjour (de sa place). L'énoncé du feuilleton ne contient rien de pareil à ce que M. le rapporteur vient de dire. L'énoncé du feuilleton porte: « On demande l'établissement d'une contribution sur les objets de luxe. On propose ensuite un système de perfectionnement dans l'agriculture.

M. le Président. C'est le n° 89 du feuilleton 26.

Il n'y a pas d'opposition, la Chambre passe à l'ordre du jour.

M. Vigier, rapporteur. Les maires des communes riveraines de la Sensée demandent la construction d'une écluse pour l'abaissement des eaux de cette rivière, dont la trop grande élévation est nuisible à l'agriculture.

Les pétitionnaires exposent qu'une semblable demande a été accueillie il y a deux ans par la Chambre; que le ministre de la guerre a levé les obstacles qui pouvaient venir de lui; que ce projet, annoncé depuis 15 ans, et dont l'exécution, si intéressante pour l'agriculture et pour la salubrité, ne coûterait pas, suivant eux, 50,000 francs, n'est arrêté que parce qu'il tient à l'ensemble d'un système général d'améliorations dont le plan ni les dépenses ne sont pas encore définitivement arrêtés. Ils désireraient que, par anticipation, on exécutât immédiatement le travail qu'ils sollicitent.

D'après les renseignements que votre commission s'est procurés à la direction des travaux publics, il résulte qu'en effet les difficultés élevées par le génie militaire sont aplanies, et que le projet de l'écluse demandée et des autres améliorations à exécuter sur tout le cours de l'Escaut est, en ce moment, soumis à la délibération de la commission mixte des travaux publics.

La dépense de l'écluse projetée n'est pas estimée à 50,000 francs, mais bien à plus de 160,000, parce qu'elle doit nécessiter des exhaussements, des digues et des ouvrages accessoires. Il y aurait donc un grave inconvénient à s'occuper isolément d'un travail qui appartient, ainsi que le reconnaissent les pétitionnaires, à l'ensemble d'un grand système; mais, pour hater la décision de I'Administration sur une affaire si intéressante, la commission vous propose de renvoyer cette pétition à M. le ministre des travaux publics. (Adopté.)

Le sieur Bonnet, médecin de Coutances (Manche), demande la suppression du droit de patente; et si l'état des finances ne le permet pas, que les avocats, notaires et avoués deviennent imposables, et soient assimilés aux médecins.

Le pétitionnaire expose que la patente est, à l'égard des médecins, un impôt arbitraire; car aucune loi, à partir de la première, celle du 2 mars 1791, n'à eu en vue de les y astreindre. Il énumère toutes celles qui ont été rendues sur la matière, jusqu'à celle du 1er brumaire an VII, qui est aujourd'hui en vigueur. Dans l'article 2 de cette loi se trouve le tableau des professions sujettes à patente; celle d'officier de santé en fait partie. Le sieur Bonnet pense que le législateur, par cette dénomination d'officier de santé, a voulu établir une différence entre ce grade et celui de docteur-médecin.

Il faut observer que, placés dans les bourgs ou les campagnes, les premiers sont presque tous obligés de tenir une pharmacie et de vendre des médicaments, tandis que les docteurs ne font trafic que de leur science. Le pétitionnaire signale comme abusives les bases qui servent à déterminer la patente du docteur-médecin, et qui sont prises dans l'importance de son logement; il représente que cet impôt est à peu près illusoire, puisque la loi en exempte les médecins des hôpitaux des pauvres, des prisons, des hospices, etc. Toutes ces places étant à la nomination de l'administration, elle en exempte qui elle veut, ce

qui crée l'arbitraire; et comme c'est généralement le médecin en crédit et en réputation, tout le poids de l'impôt retombe sur le médecin qui a moins de pratique, ce qui est injuste. Pour astreindre les docteurs-médecins à la patente, on s'est servi de l'article 35 de la loi de l'an Vill, qui dit que : « Les commerce, industrie et profession qui « ne sont pas désignés dans le tarif, n'en seront pas moins assujettis à la patente.

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Mais pourquoi n'a-t-on pas appliqué cette disposition aux avocats, aux avoués, aux autres professions libérales, aussi bien qu'aux médecins Leurs études sont-elles moins longues, moins coûteuses que celles des hommes de loi? Leur diplôme de docteur n'est-il pas au contraire bien plus cher que celui de licencié?

Le pétitionnaire demande donc, ou que les me decins soient exempts de la patente, ou, si l'eta des finances ne le permet pas, que ce soit un dret fixe, uniforme et sans catégories, et qu'enfin l'in pôt soit étendu aux professions d'avocat, de no taire et d'avoué.

Telle est, Messieurs, l'analyse exacte de la pè tition du sieur Bonnet; la supposition n'est qu trop vraie, et l'état de nos finances ne permet pe encore de renoncer à l'impôt contre lequel il re clame.

En 1834, vous devez reviser les bases de la co tribution personnelle et mobilière, et de celle de portes et fenêtres. Les patentes, qui sont le qu trième impôt direct, seront nécessairement sou mises à votre examen.

Embrassant alors tout l'ensemble de cette le gislation, vous pourrez prononcer en pleine cr naissance de cause une décision qui aurait a jourd'hui l'inconvénient d'être isolée et pro soire; c'est d'après cette considération que commission vous propose d'ordonner que la pe tion du sieur Bonnet soit déposée au bureau d renseignements.

M. Lherbette. Je demande en outre le ren à M. le ministre des finances, attendu que législation sur les patentes doit être revisee tièrement; et ce n'est pas à l'occasion de la des finances qu'on peut accidentellement revis un ensemble de dispositions nombreuses, ca en existe beaucoup d'autres que celle dont pa le pétitionnaire. Il faut une loi spéciale. prouve le fond des réclamations du pét naire; mais il me paraît avoir tort quand mile, sans distinction à cet égard, les méde et les notaires, avoués, et autres propriéta de charges sujettes à cautionnement.

La charge dont sont grevés les autres par patente, ces dernières professions la support par le cautionnement, dont l'intérêt, faible, s dessous du taux ordinaire en matière civile commerciale, n'est pas un dédommagement fisant de la privation de leurs capitaux.

Toutefois, à l'égard de la question de save la profession de médecin devra être assujett la patente, il faudra, ce me semble, se de pour la négative. Elle y a été astreinte à époque où, tout en admettant que le comme seul était sujet à patente, on n'avait pas en bien défini la qualité de négociant, ou même idées n'étaient pas bien arrêtées sur ce point en doit être autrement depuis que le Cod commerce a déterminé que celui-là seul est ne ciant qui achète pour revendre: or, tel n'est le médecin. D'ailleurs, Messieurs, sans préter classer les professions, on doit les distinguer La médecine ne peut être assimilée au

E

merce. Le commerce est une profession de lucre, où l'on ne cherche qu'avantages et bénéfices: la médecine est, en outre, une profession de science et de dévouement à l'humanité. Il n'y a pas de similitude; mais néanmoins le pétitionnaire a raison. La médecine ne peut pas être assimilée au négoce; le négoce ne cherche que son avantage personnel; mais la profession de médecin n'est qu'une profession de dévouement.

J'appuie le renvoi demandé, et je demande en outre que la pétition du sieur Bonnet soit renvoyée à M. le ministre des finances. (Aux voix! aux voix!)

M. le Président. M. Thouvenel a la parole.

M. Thouvenel. J'appelle l'attention de la Chambre sur la pétition qui lui est soumise; depuis longtemps les médecins se plaignent qu'on veut les astreindre à payer l'impôt de la patente. Cette patente s'élève jusqu'à 200 francs à Paris. Cet impôt est une iniquité d'autant plus grande, qu'il frappe autant sur le jeune médecin qui commence son état, que sur celui qui a acquis, par son âge et son expérience, une nombreuse clientèle. La loi qui créé cette espèce d'impôt assimile l'art de guérir aux plus vils métiers; elle ravale une profession scientifique des plus honorables au rang des plus basses industries; cela est injuste et immoral. On dirait que les législateurs ont pensé que l'art de guérir pouvait être celui de s'enrichir. Eh! Messieurs, jamais erreur ne fut plus grande! Ne sait-on pas qu'il est aussi rare de voir des médecins riches que des financiers pauvres? (Rires.)

L'on a oublié d'ailleurs que les médecins payent le droit d'exercer, avant même d'être reçus. La loi les oblige en effet à payer des inscriptions, des examens et des frais de thèse; ces dépenses, jointes à celles qu'ils sont obligés de faire, tant pour leur instruction préparatoire que pour celle qu'on nomme médicale, s'élèvent de 8 à 10,000 fr. La rente de ce capital équivaut bien à une patente; et puis le ministère de leur profession ne s'exerce-t-il pas plus en faveur des pauvres qu'en faveur des riches, et doit-on payer pour avoir le droit d'exercer une fonction d'humanité et de bienfaisance?

Enfin, Messieurs, l'obligation de prendre une patente révolte d'autant plus ceux qui pratiquent l'art de guérir, qu'ils voient d'autres professions, qui marchent sur la même ligne que la leur, en être exemptées, telles que celles d'avocats, de peintres, d'architectes, etc. S'il devait y avoir un privilège, ne serait-ce pas plutôt en faveur de ceux qui passent leur vie à soulager les malheureux? (Très bien! très bien! Aux voix!)

(M. Prunelle monte à la tribune.)

Une voix: Tous les médecins vont donc prendre la parole! (Longue hilarité, à laquelle prend part l'honorable membre lui-même.)

M. Prunelle. Messieurs, je viens demander que la Chambre passe à l'ordre du jour sur la pétition. (Ah! ah!) Je viens demander que les médecins ne soient pas dispensés de concourir aux charges de l'Etat.

Voix diverses: Très bien!

M. Prunelle. La médecine est une profession industrielle; la patente n'est autre chose qu'un impôt sur l'industrie; cet impôt est établi proportionnellement aux profits. Ainsi le jeune médecin, dont la clientèle n'est pas encore faite, ne paie pas l'impôt au même degré que le médecin dont la clientèle est extrêmement nombreuse. Il est cer

taines classes de patentes pour la médecine comme pour toutes les autres classes industrielles. En réclamant, pour les médecins, le payement de la patente, je réclamerai pour que MM. les avocats la paient aussi. (Très bien! très bien !... Rire général).

M. de Briqueville (de sa place). Deux médecins ont pris la parole: Hippocrate dit oui, et Gallien dit non. Pour éviter un débat entre ces messieurs, je demande le renvoi aux ministres du commerce et des finances pour juger la question.

M. Laurence. Ce n'est pas sans étonnement que j'ai entendu l'un des honorables préopinants, en parlant d'une des industries auxquelles s'applique la pétition qui nous est soumise, dire: C'est une basse industrie.

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Messieurs, il n'y a d'industries ni basses, ni hautes; elles sont toutes égales aux yeux de la loi, parce qu'elles sont dans l'intérêt de la société, à laquelle elles profitent.

Le pétitionnaire demande une chose juste. Quelque noble, quelque relevée que puisse être une industrie, il n'en est pas moins vrai que si elle est un objet de profit et de fortune pour celui qui l'exerce, elle doit un tribut à la patrie.

Le pétitionnaire a également raison quand il demande que les médecins soit dégrevés de la patente, ou bien que, s'ils sont tenus de la payer, il faut que les avocats et les avoués la paient aussi. C'est ce sentiment d'égalité qui respire dans la pétition, et devant lequel tout doit s'incliner, qui me porte à en appuyer le renvoi.

M. Dupin ainé. Messieurs, je ne prétends pas établir de hiérarchie entre les industries et les professions. C'est à l'opinion à en faire le partage selon le degré d'utilité dont chacun est au public dans la profession qu'il a embrassée. Sans surtout vouloir refouler aucune espèce de profession, je dois faire remarquer ce qui distingue éminemment l'une d'elles.

Il y a des professions où le gain est le principal motif qu'on se propose; et ce motif n'a rien que d'honorable, lorsque c'est pour recevoir la juste récompense de son travail et de l'office que l'on remplit dans la société. Cela est tellement légitime, que si l'espérance que l'on fondait sur le produit de son travail est trompée, on a action en justice pour obtenir une condamnation. Les médecins sont dans ce cas : si leur honoraire est refusé, ils peuvent se présenter en justice, et ils obtiennent condamnation. Après la mort, ils sont compris dans l'inventaire, et sont même classés, pour leur paiement, parmi les créanciers privilégiés, immédiatement après les frais d'inhumation. (Rires.)

Au contraire, la profession d'avocat, exercée noblement comme elle doit l'être (car autrement elle dégénérerait et ne serait plus la profession exercée dans sa véritable pureté), n'admet pas de réclamation d'honoraires en justice; et tout avocat qui se permettrait d'assigner un client pour être payé de ses honoraires, serait rayé du tableau, et ne pourrait plus exercer sa profession.

Maintenant si tel est le caractère de la véritable profession d'avocat, si ce n'est pas une vaine théorie, si vous la voyez ainsi exercée tous les jours, non seulement envers des clients qui ne seraient pas en état de reconnaître de leur plein gré les services qu'on leur a rendus, mais encore envers quiconque veut être ingrat, n'est-il pas vrai que cette profession mérite quelque faveur, et ne doit pas être confondue avec les autres?

Mais en matière politique vous avez vu les avo⚫

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