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ment, eft une des principales causes des variations que l'on y remarque : & quelle autre raison peut-on donner pourquoi l'état d'un Inftrument qui n'a point changé de place, lequel par conféquent n'a fouffert aucune altération, foit par le tranfport, foit par quelque autre accident, varie fouvent & affez fenfiblement? J'ai déja fait à ce fujet différentes recherches dont je donnerai les résultats,lorfque j'aurai fait un affez grand nombre d'Observations, pour pouvoir reconnoître toutes les regles de ces variations.

Nous vérifiâmes fur la terraffe de l'Obfervatoire, le Quartde-Cercle deftiné pour prendre les angles fur le Terrein. L'horizon de ce lieu, qui s'étend à une assez grande distance, fournit plufieurs objets bien distincts, & dont les pofitions refpectives ont déja été déterminées par différens Inftrumens. On trouva conftamment que la fomme de quatre angles pris dans la circonférence de l'horizon, étoit de 360° moins 30 à 40′′, lefquelles diftribuées proportionnellement fur la grandeur de chaque angle, ne pouvoient produire qu'une erreur de huit à dix fecondes fur l'arc de 90 degrés ; & il reftoit toujours incertain fi cette différence appartenoit toute à l'Inftrument, ou fi elle ne provenoit point de la difficulté de pointer de la même maniere à un objet, auquel on eft obligé de fe diriger deux fois.

MUNIS de pareils Inftrumens, dont nous avions éprouvé la précision, je communiquai à l'Académie les motifs qui me déterminoient à vérifier la Meridienne de Paris; les vûes que je me propofois dans l'exécution de cer Ouvrage; les moyens que je devois employer pour y parvenir, qui confiftoient principalement à obferver les trois angles de chaque triangle ; à n'en admettre aucun au-deffous de 29 à 30 degrés, à n'employer que ceux qui auroient été obfervés directement, & avec le même Inftrument; à choisir des

objets les plus proches proches de la direction du Meridien, & à men furer le plus grand nombre de bafes qu'il feroit poffible, principalement dans les lieux où fe terminoient les différens arcs que l'on vouloit comparer. Nous jugions toutes ces précautions néceffaires pour la précision de notre Our

vrage.

L'ACADEMIE ayant approuvé ce projet, je partis pour P'exécuter avec M. l'Abbé de la Caille au mois de Mai de l'année 1739. Nous avions Nous avions pour nous aider MM. Saunaç & le Gros, exercés depuis long-tems à ces fortes d'Observations; & M. le Monnier, le Medecin, fe joignit à nous pour faire la recherche des Plantes & des curiofités naturelles, qui pourroient fe trouver dans le pays que nous devions parcourir. Nous fuivîmes les premiers triangles de la Meridienne jusqu'à Orleans; de-là nous en formâmes une nouvelle fuite, dans la direction de la Meridienne, jusqu'à Bourges. Nous fîmes conftruire dans cette Ville un Obfervatoire pour placer le Secteur, & nous y féjournâmes près d'un mois, uniquement occupés à vérifier la direction de la Meridienne par les amplitudes du Soleil, & à obferver les diftances au Zenith de plufieurs Etoiles, dont la plûpart avoient déja été obfervées à Paris, & les autres devoient fervir pour la détermination des arcs fuivans. Le limbe de notre Inftrument, qui comprenoit plus de 52 degrés, nous permit de déterminer la hauteur folftitiale du Soleil, obfervation d'autant plus importante, que les Aftronomes ne font point d'accord entre eux fur l'obliquité de l'écliptique, qui en eft dépendante. D'ailleurs elle pouvoit être employée pour déterminer la différence entre les paralleles de Paris & de Bourges, par la correfpondance qu'elle devoit avoir avec les Obfervations que mon pere faifoit en même-tems

à la Meridienne tracée dans le fallon fupérieur de l'Obfervatoire.

TOUTES Ces Obfervations, tant des Etoiles, faites à Paris & à Bourges, que de celles du Soleil faites avec le Secteur & à la Meridienne, étant comparées enfemble, on trouva que la différence de latitude entre ces deux Villes étoit de 1° 45′ 12′′, plus petite qu'elle ne devoit être, en fuppofant le degré de 57060 toifes, tel que M. Picard l'avoit déterminé. J'envoyai d'abord à l'Académie le résultat des Obfervations aftronomiques, fans entrer dans le détail des nouvelles mesures geométriques, qui, fondées sur la base de M. Picard, ne s'accordoient point avec la nouvelle base que nous venions de mesurer aux environs de Bourges; & je fufpendis mon jugement, jufqu'à la nouvelle vérificaque je me propofois de faire à Rodés.

tion

IL réfultoit cependant, tant des anciennes que des nouvelles mesures, que le degré entre Paris & Bourges, étoit considérablement plus grand que celui de Paris à Amiens, ce qui paroiffoit confirmer les Obfervations faites en Franoù l'on avoit trouvé que la grandeur des degrés diminuoit, à mesure qu'on s'approchoit des Poles.

ce,

la

ETANT arrivé à Rodés, j'appris que M. de Maupertuis, quelque déférence qu'il eût paru avoir jufqu'alors pour mesure de M. Picard, fe propofoit de la vérifier. Cette nouvelle me fit d'autant plus de plaifir, qu'étant perfuadé que le feul moyen de reconnoître la verité, eft de la chercher par différentes voyes, j'efperois trouver le dénouement des difficultés que j'avois fur la bafe de M. Picard. D'ailleurs fuivant le projet que j'avois exposé à l'Académie, je devois vérifier l'année fuivante la partie feptentrionale de la Meridienne, dans laquelle la mesure de M. Picard se trouve comprise, à

l'exception de la distance de l'Obfervatoire à Malvoifine, que je venois de déterminer par mes propres Obfervations.

Les nouvelles Observations que j'avois faites à Rodés, m'avoient donné le degré compris entre cette Ville & Bourges, plus petit que celui de Bourges à Paris. Cette détermination se trouvoit contraire à celle qui réfultoit de la comparaison de ce dernier degré à celui d'Amiens; de forte que l'on ne pouvoit plus concilier les Observations, qu'en fuppofant une erreur considérable dans les opérations de M. Picard, ou une irrégularité dans la figure de la Terre ; & comme la base que je venois de mesurer à Rodés, s'accordoit exactement avec celle de Bourges, la mesure de M. Picard devenoit de plus en plus douteufe.

Nous continuâmes nos opérations jufqu'à Perpignan, qui étoit le troifiéme & le dernier terme où nous devions faire des Observations. Le degré qui en résulta fut trouvé à peu-près de la même grandeur que celui de Bourges à Rodés, mais toujours plus petit que celui de Paris à Bourges; ce que l'on ne pouvoit concilier avec la grandeur du degré déterminé par M. Picard.

Nous pouvions cependant, indépendamment de la mefure de M. Picard, comparer les trois arcs confécutifs que nous venions de mesurer, & examiner la figure de la Terre qui en réfultoit; mais le peu de différence que nous avions remarquée dans la grandeur des deux degrés extrêmes, & l'incertitude où nous étions fur la véritable longueur du premier arc, ne nous permettoit point encore de rien décider.

Nous jugeâmes donc devoir tenter un autre moyen pour reconnoître la figure de la Terre, qui confiftoit à déterminer la grandeur des degrés de longitude, & leurs rapports avec ceux de latitude. Cette recherche supposoit des Ob

fervations d'une nature bien différente de celles que l'on employe pour les latitudes. S'il se trouvoit dans le Ciel un Aftre à une grande distance, lequel, dans le fyftême de Copernic, eût une révolution périodique de l'Occident vers l'Orient égale à celle de la Terre autour de fon axe, cet Aftre paroîtroit immobile, & on détermineroit les longitudes immédiatement, en mefurant fa distance au Meridien de l'Observateur.

Au défaut d'un pareil objet, on eft obligé d'avoir recours à différentes Méthodes, entre lefquelles la plus exacte, qui eft fondée sur l'Observation des phases des Satellites de Jupiter, ne pouvoit donner une précision suffisante, au cas que l'inégalité d'un degré à l'autre, ne fût pas plus grande que celle que l'on avoit trouvée dans les degrés de latitude. La difficulté de faire ces Obfervations, qui fuppofent les plus excellentes lunettes, des Obfervateurs également exercés, des tems fereins de part & d'autre, nous engagea à pratiquer une Méthode plus fimple, mais fondée fur le même principe.

Nous en avions déja fait un effai en 1738, dans les expériences fur la propagation du Son. Nous avions remarqué deux montagnes, éloignées l'une de l'autre de près de quarante lieues, & à peu-près fur le même parallele, où nous avions déja fait quelques expériences, pour reconnoître avec quel degré d'évidence on pouvoit appercevoir la lumiere de la poudre à canon allumée dans l'air libre, & l'on vit très-diftinctement d'une de ces montagnes, la lumiere de fix livres de poudre allumée sur l'autre.

CE Signal devoit fe voir dans le même inftant de tous les lieux dont on pourroit le découvrir, de la même maniere qu'une phase des Eclipfes des Satellites de Jupiter, paroit

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