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F. Barrière, Necrologie dans le Journal des Débats,
des 16 et 17 août 1881. M. de Royer, Discours de ren-
trée de la Cour de Cassation, le 3 novembre 1854.

JOUBERT (Joseph - Antoine - René, vi-
comte), général français, né le 11 novembre
1772, à Angers, mort le 23 avril 1843 à Paris.
Volontaire de 1791 au 2o bataillon de Maine-et-
Loire, il franchit rapidement les grades in-
férieurs, fit les campagnes de l'armée du nord,
et fut envoyé en Italie avec l'épaulette de lieute-
nant. A Rivoli, à la tête de 50 hommes de la
85 demi-brigade, il surprit un corps de 2,000
Autrichiens, qu'il emmena prisonniers; cette ac-
tion d'éclat lui valut un sabre d'honneur et le
grade de capitaine (an vi). En Égypte, il se dis-
tingua de nouveau aux batailles de Chébréiss et
des Pyramides, passa dans le régiment des dro-
madaires, fut blessé de deux coups de feu devant
le fort d'El-Arisch, et combattit avec la plus
grande valeur à Aboukir et à Héliopolis. Nommé
successivement aide-de-camp du général La-
grange (an Ix), chef de bataillon (an x') et offi-
cier de la Légion d'Honneur (an xi), il fit, à la
grande armée, les campagnes d'Autriche, de
Prusse et de Pologne, devint colonel le 20 jan-
vier 1806, et prit une part importante aux ba-
tailles de Friedland, d'Eckmühl et de Wagram;
blessé à cette dernière journée, il reçut en ré-
compense le titre de baron (1809). Deux ans
plus tard, il était promu général de brigade
(6 août 1811). En cette qualité il commanda en
Russie, contribua à la prise de Smolensk, fit à
Lutzen des prodiges de valeur, et se replia sur
le Rhin avec les débris du sixième corps. Durant
la campagne de France, il donna de nouvelles
preuves de son intrépidité, à Brienne et à Mont-
mirail. La Restauration conserva le général
Joubert dans le cadre d'activité. D'abord inspec-
teur géneral d'infanterie, il commanda ensuite les
département du Morbihan et d'Ille-et-Vilaine. En
1835 il fut admis à la retraite. Il tenait son titre
de vicomte du roi Louis XVIII. P. LOUISY.

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JOVENNEAUX ( Guy), grammairien et théo-
logien français, né dans le Maine, vers le milieu
du quinzième siècle, mort en 1507. La pauvreté
de ses parents ne lui permettant pas de se consa-
crer tout entier à l'étude, il se rendit à Paris,
avant même d'avoir achevé ses humanités, et
se procura la plus modeste subsistance en sur-
veillant l'éducation de quelques enfants. En
1490 il avait acquis de la renommée, occupait
une chaire, et faisait des cours publics, entouré
d'auditeurs. C'est pourtant vers cette époque
qu'il crut devoir chercher au fond d'un cloître
une existence mieux garantie et plus tranquille,
et qu'il alla revêtir la robe noire à l'abbaye de
Chesal-Benoit, récemment réformée. En 1497
nous le voyons institué abbé triennal de Saint-
Sulpice de Bourges, après l'abdication de Jean

ou Guillaume Alabat. Il fut ensuite, suivant dom
Liron, confesseur de Jeanne de France.

Le premier ouvrage publié par Guy Jouen-
neaux est un Commentaire sur Térence, qui
parut d'abord à Paris, chez Marnef, en 1492,
in-fol. On l'a souvent réimprimé. Nous dési-
gnerons ensuite: Guidonis Juvenalis, patria
Cenomani, in Linguæ Latinæ Elegantias tam
a Laurentio Valla quam a Gelio memoriæ
proditas Interpretatio dilucida; Paris, 1494,
in-4°. Dom Liron lui attribue en outre un traité
spécial sur la grammaire, Guidonis Juvenalis
Grammatica, publié à Limoges en 1518. Mais
nous avons vainement recherché cet ouvrage, et
peut-être il ne diffère pas du commentaire sur
les Élégances de Valla. Les œuvres ascétiques de
Guy Jouenneaux sont : une traduction française
de la Règle de Saint-Benoit, publiée, suivant Ca-
therinot, en 1500, suivant dom Liron en 1505,
et un traité intitulé: Vindiciæ, seu defensio
reformationis monasticæ; Paris, 1503, in-8°.
B. H.

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JOUET (Jean), archéologue français, né à
Chartres, en 1629, mort en la dite ville, le 20 no-
vembre 1702. Chanoine de Saint-Piat, cathé-
drale de Chartres, il fut reçu maître de psallette
(musique), le 2 mai 1652, charge dont il se dé-
mit le 10 septembre 1687. On a de lui: Trois
Lettres pour l'éclaircissement de la fonda-
tion de la victoire de Philippe le Bel à
Chartres et à Paris, et de l'offrande de son
cheval et de ses armes à Notre-Dame de
Paris, imprimées, pag. 339 et suiv., dans le
Voyage de Munster et de Hollande par Joly,
chanoine de Paris; Paris, 1672. R. (de Chartres).
Brillon, Add. mss., p. 220. Janvier de Flainville,
Mss., v. auteurs, p. 601.

-

JOUFFROI (Jean DE), en latin Joffredus,
prélat français, né à Luxeuil (Franche-Comté),
vers 1412, mort au prieuré de Rully, le 24 no-
vembre 1473. Né d'une ancienne famille, il
commença ses études à Dôle, et les termina à Co-
logne et à Pavie; il prit l'habit religieux dans
l'abbaye de Saint-Pierre de Luxeuil. Il retourna
ensuite à Pavie, où il professa pendant trois ans
la théologie et le droit canon. A la sollicitation
du pape Eugène IV, il assista au con cile de Fer-
rare (10 janvier 1438), dans lequel il porta plu-
sieurs fois la parole avec distinction. De retour
à Luxeuil, il se mit au service du duc de Bour-
gogne, qui le nomma aumônier de son commun,
l'admit dans son conseil et le chargea de diverses
missions en Espagne, en Portugal et en Italie.
Lorsque Philippe le Bon institua l'ordre de la
Toison d'Or (27 novembre 1430), il envoya Jouf-
froi à Rome solliciter d'Eugène IV l'approbation
de cet ordre de chevalerie. A son retour, le duc
prit Jouffroy pour son secrétaire intime, le fit

élire abbé de Luxeuil et nommer évêque d'Arras. Joubert ne se trouva pas satisfait de sa haute fortune : il s'attacha au dauphin (depuis Louis XI), alors réfugié en Brabant. Ce prince, devenu roi, donna à Jouffroy toute sa confiance, et sollicita pour lui le chapeau de cardinal. Pie II le promit, à condition que le prélat engagerait le roi à supprimer la pragmatique sanction. Jouffroi obtint du monarque une déclaration telle que le pape la souhaitait; mais Louis XI exigeait de son côté que le pape accordât l'investiture du royaume de Naples à Jean de Calabre. Pie II accorda, en 1461, le chapeau rouge à Jouffroy, et le nomma à l'évêché d'Albi; mais il refusa sa protection à Jean de Calabre. Louis XI déclara alors qu'il avait été joué par le pape, et fit de nouvelles ordonnances touchant les réserves et les expectatives, qui étaient presque le seul avantage que l'abolition de la pragmatique sanction avait procuré au souverain pontife. C'était, par le fait, rétablir les choses en leur ancien état. Louis XI ne manifesta pas de déplaisir à Jouffroy; il le fit son aumônier, lui donna l'abbaye de Saint-Denis, et, en 1469, l'envoya en Castille solliciter la main de l'infante Isabelle (la Catholique), sœur du roi Henri l'Impuissant, pour le duc de Guyenne. Isabelle refusa; mais Jouffroy réussit à fiancer le duc de Guyenne avec Juana dite la Beltraneja, fille d'Henri. Il fut ensuite chargé de réduire le duc d'Armagnac, bloqué dans Lectoure; il feignit de vouloir traiter, et, profitant de la confiance des assiégés, il s'introduisit dans la ville, et fit massacrer le duc et ses principaux partisans. Jouffroy suivait l'armée en Catalogne lorsque, surpris d'une fièvre aiguë, il s'arrêta au prieuré de Rully, où il mourut àgé de soixante ans. D'Achery a publié plusieurs discours de ce prélat dans son Spicilegium.

A. L.

Grappin, Éloge historique de J. Jouffroy, cardinal d'Alby; Besançon, 1785, in-8°. Cellier, Journal de Verdun, mars 1758. - Moréri, Le Grand Dictionnaire Historique.

JOUFFROY (Théodore-Simon), célèbre philosophe français, né en 1796, au hameau des Pontets, près de Mouthe, département du Doubs, mort à Paris, le 4 février 1842. Son père était agriculteur et en même temps percep teur de sa commune. Vers l'âge de dix ans, le jeune Théodore fut confié à l'un de ses oncles, ecclésiastique et professeur au collège de Pontarlier. Ce fut au collège de cette ville qu'il fit la plus grande partie de ses études classiques; mais il alla, comme élève de rhétorique, les achever au lycée de Dijon. Il y fut remarqué, parmi les plus brillants élèves, par M. Roger, inspecteur général des études et membre de l'Académie Française, qui, au commencement de l'année 1814, obtint son admission à l'École Normale. Une conférence de philosophie venait d'être confiée à M. Victor Cousin. Le jeune Jouffroy suivit cet enseignement; et de même que, quelques années auparavant, M. Cousin s'était senti philosophe en entendant les leçons

de Laromiguière, de même Jouffroy eut conscience de sa vocation en écoutant les leçons de M. V. Cousin. En 1817 Jouffroy fut nommé élève-répétiteur pour la philosophie à l'École Normale, et, en même temps, il fut chargé d'un cours de philosophie au collége Bourbon, aujourd'hui lycée Bonaparte. Il quitta cette chaire en 1820, et, deux ans après, la suppression de l'École Normale lui fit perdre ses fonctions de répétiteur. Il ouvrit alors chez lu des cours particuliers, et devint en même temps collaborateur à quelques journaux et recueils littéraire, tels que Le Courrier français, Le Globe, La Revue Européenne, L'Encyclopédie moderne. Un grand nombre d'entre les articles qu'il y publia furent reproduits plus tard dans ses Mélanges Philosophiques. En 1828, sous un ministère réparateur, Jouffroy reparut dans l'enseignement public comme suppléant de M. Milon dans la chaire de philosophie ancienne à la Faculté des Lettres de Paris. Mais ce ne fut qu'à la révolution de 1830 que les portes de l'École Normale (1) se rouvrirent pour lui : il y rentra en qualité de maître de conférences de philosophie, en même temps qu'il était nommé, à la Faculté des Lettres de Paris, professeur adjoint de l'histoire de la philosophie moderne, dont le titulaire était alors Royer-Collard. Ce fut là que Jouffroy fit une série de leçons sur le droit naturel, qui, recueillies par la sténographie et imprimées, constituèrent dans leur ensemble, au nombre de trente-deux, le Cours de Droit naturel. En 1833, nous voyons Jouffroy succéder, au Collège de France, à M. Thurot, qui y avait exercé les fonctions de professeur de lettres et de philosophie grecques. Seulement, ce cours fut changé pour Jouffroy en un cours de philosophie grecque et latine. Vers le même temps, Jouffroy fut élu membre titulaire de l'Académie des Sciences morales et politiques d'abord dans la section de morale, puis dans celle de philosophie. En 1835, une première invasion de la terrible maladie qui, sept ans plus tard, devait le conduire au tombeau, força Jouffroy à aller demander la santé au soleil de l'Italie. Ce fut à cette époque qu'il acheva sa traduction des Euvres complètes de Thomas Reid : travail qui, avec la traduction des Esquisses de Philosophie morale de Dugald-Stewart, et les Préfaces ou Introductions annexées par Jouffroy à ces traductions, contribua puissamment à po. pulariser en France cette philosophie écossaise dont Royer-Collard, dans son cours à la Faculté, avait donné de si savantes analyses. De retour à Paris, Jouffroy quitta, en 1838, sa chaire

(1) Cette école, supprimée en 1822 par M. de Corbière, avait été rétablie en 1826, sous le ministère de M. l'abbé de Frayssinous, évêque d'Hermopolis. De 1826 à 1828, elle occupa un des quartiers du collège Louis le Grand, Vers la fin de 1828 elle fut transférée au collège du Plessis. Elle portait alors le modeste nom d'École préparatoire. Son ancien nom, celui d'École Normale, ne lui fut restitué qu'à la révolution de 1880.

:

du Collège de France pour la place de bibliothécaire de l'Université, devenue vacante par la mort de Laromiguière, et en même temps il échangea, à la Faculté des Lettres, la chaire d'histoire de la philosophie moderne contre la chaire de philosophie, que Laromiguière laissait également vacante. Mais dès cette même année, sa santé l'ayant forcé à se faire suppléer, il choisit à cet effet M. Adolphe Garnier (1), l'un de ses anciens élèves, qui l'avait aidé dans sa traduction des Œuvres de Reid. En 1840 M. Cousin, devenu ministre de l'instruction publique, appela Jouffroy au conseil de l'université. Il y siégea jusqu'à sa mort, et fut, à son tour, remplacé par M. Cousin. Dès 1831 Jouffroy appartenait à la chambre des députés, où il avait été envoyé par l'arrondissement de Pontarlier. Jouffroy, dit M. Garnier, qui a publié dans le Dictionnaire des Sciences Philosophiques un excellent travail sur sa vie et ses écrits, n'occupa point à la chambre le rang qui appartenait à son mérite. Il fut d'abord étonné de la multiplicité des questions et de la rapidité avec laquelle on les décidait : la loi est votée, disait-il, avant que j'aie pu la comprendre il ne savait pas encore que souvent l'on adopte ou rejette une loi, moins d'après le mérite de la mesure en elle-même, que d'après le parti auquel on appartient, ce qui abrège le temps et l'étude. Il débuta par proposer à la chambre le changement de son règlement sur les pétitions : il voulait que les commissions fussent juges du mérite des dernandes, et n'offrissent à la chambre que celles qui mériteraient de l'occuper. Il pensait qu'on aurait ainsi plus de temps pour traiter des affaires sérieuses. Mais les assemblées n'aiment pas que les nouveaux venus réforment leurs usages, et la proposition fut rejetée. La promptitude des décisions ne fut pourtant pas ce qui embarrassa le plus Jouffroy; il fut bien plus arrêté par la faiblesse de sa poitrine. Nous dirons, en empruntant une ingénieuse expression de M. Villemain, qu'il aurait pu « se faire entendre à force de se faire écouter »; mais c'eût été au prix d'efforts pénibles pour l'assemblée, plus pénibles encore pour l'orateur. Il monta donc rarement à la tribune. Il y parut cependant en deux occasions éclatantes pour lui: dans la première, il contribua à sauver le ministère par un excellent discours, en montrant qu'il n'y avait entre les ministres et l'opposition qu'une différence de nuances et point de dissentiment fondamental; dans la seconde, c'était en 1840, chargé de rédiger l'adresse, il crut que le ministère nouveau devait se distinguer de celui qu'il remplaçait par quelque différence profonde; il marqua cette différence, et il fut surpris de se voir abandonné de la majorité, et, par conséquent, du ministère lui-même. Cet échec

(1) Voir notre notice biographique sur M. Adolphe Gar

nier.

NOUV. BIOGR. GÉNÉR. -T. XXVn.

exerça une influence funeste sur la santé de Jouffroy, déjà fortement ébranlée. Ses amis le pressaient de retourner dans cette Italie où il avait déjà trouvé son salut: il crut pouvoir résister au mal sans changer de climat; mais il ne fit plus que languir, et en février 1842, après s'être vu lentement affaiblir, il s'éteignit. Il ne démentit pas un seul instant le calme et la fermeté de son âme; il voulut, pendant les derniers jours, se recueillir dans une solitude complète; il n'admit auprès de lui que sa femme et ses enfants. Il ordonna de fermer les volets de ses fenêtres; il se priva même de la société de la luInière, et demeura seul avec sa pensée jusqu'au moment de sa mort. >>

Voici l'indication des divers ouvrages de Jouffroy, dans l'ordre chronologique de leur publication:

Traduction des Esquisses de Philosophie morale de Dugald-Stewart, 1 vol. in-8°; Paris, 1826 (1). A sa traduction du texte anglais, Jouffroy a annexé une Préface, qui, par son développement, et surtout par l'importance des questions qui y sont abordées et résolues, a ellemême la valeur d'un véritable livre. Les principaux points traités dans cette préface sont les suivants: Des Phénomènes intérieurs, et de la possibilité de constater leurs lois; De la Transmission et de la Démonstration des Notions de Conscience; Des Sentiments des Philosophes sur les Faits de Conscience; Du Principe des Phénomènes de Conscience; Traduction des Euvres complètes de Thomas Reid, chef de l'École écossaise, 6 vol. in-8°. Cette publication, commencée en 1828, n'a été achevée qu'en 1835 (2). Jouffroy a joint au tome III et au tome IV de sa traduction plusieurs Fragments historiques et théoriques des leçons faites à la Faculté des Lettres de Paris, de 1811 à 1814, par Royer-Collard, et une Introduction à ces Fragments. Le t. Ier, qui a été publié le dernier des six, s'ouvre par une Préface du traducteur, très-étendue, très-développée, dans laquelle Jouffroy entreprend de fixer la véritable valeur de la philosophie écossaise. A cet effet, il divise son travail en quatre parties, qui ont successivement pour objet : 1o les idées des philosophes écossais sur la science; 2o la critique des idées écossaises sur l'ensemble de la philosophie; 3° la critique des idées écossaises sur les limites de la science de l'esprit; 4° la critique des idées écossaises sur les conditions de la science de l'esprit. Cette préface est suivie de la traduction d'une Vie de Reid par Dugald-Stewart, et d'une liste, aussi complète qu'il a été possible à Jouffroy de la former, de tous les ouvrages philosophiques sortis du mouvement écossais, à le prendre à son origine, c'est-à-dire depuis Hutcheson jusqu'à nous. Cette notice bibliographique

(1) Cet ouvrage n'a eu jusqu'ici (septembre 1858) qu'une édition. (2) Meme observation que de la note précédente, 2

ques, in-8°; Paris, 1842 (1), précédés d'une no-
tice, et publiés, après la mort de l'auteur, par
M. Ph. Damiron, membre de l'Institut, collègue
et ami de Jouffroy. Les morceaux dont se com-
pose ce volume sont les suivants : De l'Orga
nisation des Sciences Philosophiques; De la
Légitimité de la distinction de la Psychologie
et de la Physiologie (2); Rapports sur le Con-
cours relatif aux Écoles Normales; Discours
prononcé à la distribution des prix du collège
Charlemagne (août 1846); Ouverture du Cours
d'histoire de la Philosophie ancienne à la
Faculté des Lettres en 1828, 1re leçon; Faits
et Pensées sur les Signes; Leçon sur la
Cours d'Esthétique; in-8°;
Sympathie (3).
Paris, 1843 (4); publié, après la mort de l'auteur,
par M. Damiron, d'après les rédactions et les
notes de M. Delorme, l'un des auditeurs de ces
cours particuliers professés par Jouffroy de 1822
à 1826. Ce cours, divisé en quarante leçons,
est précédé d'une préface de l'éditeur, et suivi
d'un appendice composé de trois morceaux
ainsi intitulés : Que le Sentiment du Beau est
différent de celui du Sublime, et que ces deux
sentiments sont immédiats;· Beau, Agréa-
ble, Sublime; De l'Imitation. Le premier
de ces trois morceaux était originairement une
thèse pour le doctorat, écrite et soutenue par
Jouffroy en août 1816, lors de sa sortie de l'E-
cole Normale.

donne une idée générale des travaux philosophi- | théoriques;-Nouveaux Mélanges Philosophi ques des Écossais. Pour sa rédaction, Jouffroy a été aidé de renseignements que lui ont fournis deux amis de Dugald-Stewart, MM. Bannatyne et Jackson, de Glascow, et en même temps M. Hercule Scott, professeur de philosophie au collége du Roi à Aberdeen; Mélanges philosophiques; in-8°, 1833 (1). Ce volume se compose de dix-huit morceaux dont voici les titres: Comment les dogm s finissent; De la Sorbonne et des Philosophes; Réflexions sur la Philosophie de l'Histoire; Bossuet, Vico, Herder; Du Rôle de la Grèce dans le Développement de l'Humanité; De l'État actuel de l'Humanité; De la Philosophie et du Sens commun; Du Spiritualisme et du Matérialisme (2); Du Scepticisme; De l'Histoire de la Philosophie; De la Science Psychologique (3); De l'Amour de Soi; De l'Amitié; Du Sommeil; Des Facultés de l'Ame humaine; De l'Eclectisme en Morale; Du Bien et du Mal (4); Du Problème de la Destinée humaine (5). Plusieurs de ces morceaux étaient complétement inédits à l'époque où Jouffroy publia ce volume de Mélanges. Mais la plupart avaient été publiés, soit dans la Revue européenne (6), soit dans Le Globe (7), soit dans l'Encyclopédie moderne de Didot frères (8). Cours de droit naturel. Cet ouvrage a eu jusqu'ici trois éditions. La première, publiée en 1835, 2 vol. in-8°, par Jouffroy luimême, était restée incomplète; elle a été angmentée, en 1842, d'un troisième volume, par M. Damiron, d'après les notes laissées par Jouffroy. La seconde, 2 vol. in-8°, a été publiée en 1843 par M. Damiron après la mort de l'auteur. La troisième, 2 vol. in-12, a paru en novembre 1857. L'auteur de la présente notice a donné ses soins à la publication de cette troisième édition. L'ouvrage se compose de trente-deux leçons, faites à la Faculté des Lettres de Paris par Jouffroy, en qualité de professeur adjoint à la chaire d'histoire de la philosophie moderne, dont le titulaire était Royer-Collard. Après quelques leçons préliminaires, ayant pour objet la description des faits moraux de la nature humaine, l'auteur expose et apprécie le système fataliste, le système mystique, le système panthéiste, le système sceptique, le système égoïste, le système sentimental, enfin le système rationnel, et consacre ses cinq dernières leçons à des Vues

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On voit par les titres de ces divers écrits que, bien que Jouffroy n'ait pas composé ce qu'on pourrait appeler un système complet de philosophie, cependant toutes les grandes questions de la science ont trouvé place dans ses travaux. Toutefois, Jouffroy est avant tout un psychologue, et, comme tel, il s'était formé à la grande et sage école des Écossais. Sans vouloir rien ôter ici au mérite de la remarquable Préface que Jouffroy a mise en tête de sa traduction des Esquisses de Philosophie morale de DugaldStewart, nous devons faire observer qu'avant lui Reid, dans quelques excellents chapitres de ses Essais sur les Facultés intellectuelles de l'homme (5), avait montré la possibilité d'une science psychologique, et indiqué les moyens à employer pour constituer cette science. L'écrivain écossais s'est même mieux tenu que le philosophe français dans les termes de l'exacte vérité, en ce que, tout en décrivant les moyens de connaître les opérations de l'esprit, il n'a pas craint de montrer, et même dans toute leur étendue, les difficultés attachées

(1) N'a eu jusque ici ( sept. 1858) qu'une édition. (2) Rapprocher ce morceau de la Preface des Esquisses ainsi que du morceau des premiers Mélanges, intitulé De la Science psychologique.

(3) 7 février 1834, à la Faculté des lettres de Paris. (4) N'a eu jusqu'ici (sept. 1858) qu'une édition. (5) Essai 1er, chap. V et VI, Intitulés : Des vrais moyens de connaitre les opérations de l'esprit. De la difficulte d'étudier les operations de l'esprit.

à cette étude. Quoi qu'il en soit, il serait injuste de méconnaître le talent et la vigueur avec lesquels Jouffroy, dans la Préface dont nous parlons, a soutenu, contre les prétentions d'un physiologisme exclusif, la possibilité d'une science psychologique. Il commence par démontrer, en faisant appel à la conscience individuelle de chacun de nous et à la conscience générale de l'humanité, qu'il y a toute une variété de phénomènes qui se passent dans le for intérieur, telles que nos idées, nos volontés, nos sensations, et que ces faits internes, dont nous avons conscience, nous paraissent d'une réalité tout aussi assurée que les choses que notre œil voit et que notre main touche. S'il y a ainsi deux vues, l'une sur le dehors par les sens, l'autre sur le dedans par le sens intime, il y a donc aussi deux sortes d'observation, l'observation sensible et l'observation interne. De même que c'est par une attention persévérante et soutenue que le naturaliste dépasse la connaissance vague et imparfaite que le commun des hommes a des choses extérieures, et parvient ainsi à une connaissance plus distincte et plus complète de la nature, de même c'est par la considération volontaire et attentive des phénomènes intérieurs que le psychologue peut élever à l'exactitude d'une notion scientifique l'idée vague que nous avons tous de ce qui se passe en nous. On peut donc constater d'une manière scientifique les lois des phénomènes intérieurs, et en tirer des inductions par le raisonnement; et, à cet égard, la science des faits internes est placée dans les mêmes conditions que celle des faits extérieurs. Mais cette science est-elle susceptible de transmission et de démonstration? Ce second point est résolu par Jouffroy non moins péremptoirement que le premier. Rien ne se passe en nous dont nous n'ayons conscience. Il n'est donc pas un seul phénomène intérieur, parmi les faits constitutifs de notre nature morale, que le dernier paysan, comme le plus grand philosophe, n'ait éprouvé et senti plusieurs fois. Seulement, le philosophe, qui a observé ces phénomènes, en a une idée précise, tandis que la plupart des hommes, qui n'étudient pas ce qui se passe en eux, n'en ont qu'une idée vague, et par là qu'un souvenir confus. Eh bien, c'est à cette idée vague, c'est à ce souvenir confus que s'adresse le philosophe. Il aide ses auditeurs ou ses lecteurs à en faire l'analyse et à en remarquer successivement tous les éléments. Telle est la manière dont Jouffroy estime que peut se transmettre la notion des faits de conscience. Si donc, d'une part, il est possible d'observer et d'étudier en nous les phénomènes du for intérieur, et si, d'autre part, il est possible de transmettre à autrui la notion, ainsi acquise, de ces phénomènes, la psychologie mérite de prendre place parmi les sciences positives; et que deviennent alors les dédains des naturalistes exclusifs, pour qui la science de l'homme se ramène tout entière à la seule

étude des fonctions physiologiques? Jouffroy a pris soin, du reste, de poser d'une manière bien nette la limite qui sépare la psychologie d'avec la physiologie (1). Le monde interne lui paraît de tous points limité par la conscience, et, avec lui, la psychologie, dont l'objet est d'éclaircir ce que la conscience sait du for intérieur. Le corps est donc exclu de l'objet de la psychologie : « chose singulière, dit Jouffroy (2), si le corps était l'homme! Mais le moi ne se reconnaît pas dans cette masse solide, figurée, étendue, et perpétuellement changeante, qui l'enveloppe, et qu'il nomme lui-même le corps. Non-seulement il ne s'y trouve pas, mais il la regarde comme une chose extérieure à lui, qui, à la vérité, agit sur lui, et sur laquelle il agit, mais qui, malgré ces rapports d'action réciproque, ne se confond pas plus avec lui que les planètes qui gravitent dans les cieux ».

Jouffroy s'est moins attaché dans ses écrits à résoudre des questions psychologiques, sauf cependant plusieurs questions de psychologie morale (3), qu'à déterminer avec précision l'objet, la certitude, le point de départ, et la circonscription de la psychologie. Toutefois, on rencontre dans ses premiers et dans ses nouveaux Mélanges plusieurs pages sur l'Amour de soi, sur l'Amitié, sur la Sympathie, qui sont autant de formes de la sensibilité, et notamment une étude sur les Facultés de l'Ame humaine. A l'exemple de Laromiguière (4), Jouffroy ne veut pas que l'on confonde les facultés avec les simples capacités. L'homme seul lui paraît posséder de véritables facultés, parce que chez l'homme seul le pouvoir personnel intervient dans l'exercice des capacités ou propriétés, tandis que dans les choses, c'est la nature, ou plutôt Dieu, qui agit. Cette distinction une fois posée, Jouffroy décrit la méthode qui lui paraît devoir être suivie pour arriver à déterminer les facultés de l'âme humaine. Cette méthode lui paraît devoir être la même que celle par laquelle nous déterminons les propriétés naturelles des choses. Le feu produit de la chaleur : il a donc la propriété de la produire. Certains corps conduisent l'électricité : ils ont donc la propriété d'être conducteurs de ce fluide. En général, on reconnaît qu'une chose a plusieurs propriétés, quand elle manifeste plusieurs phénomènes d'une nature différente; chaque espèce de phénomènes suppose une capacité spéciale, et l'on reconnaît dans une chose autant de propriétés différentes qu'on y aura observé d'espèces distinctes de phénomènes. C'est de la même manière qu'on parvient à dis

(1) Voir, indépendamment de la Preface des Esquisses, l'article intitulé De la Science psychologique, dans les Melanes philosophiques.

(2) Melanges, art. De la Science psychologique. (3) Voir notamment, à cet égard, dans le Cours de Droit naturel, la 2e leçon, intitulée : Faits moraux dc la nature humaine.

(4) Voir plus loin, dans ce recueil, notre article sur LAROMIGUIERE.

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