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APPIANI.

Ta mère te déshérite, ma sœur. Ton père te maudit.

Jésus! Jésus !

Elle tombe

JULIE.

APPIANI.

Si tu me connais, tu sais que je ne pardonne pas. Vis comme tu pourras; je ne viens pas te chercher pour te ramener, comme tu peux le croire; fais-toi entretenir par ton amant. On se passera de toi, fillette.

MARIANI.

Taisez-vous; elle va mourir.

APPIANI.

Qu'elle meure, celle qui a un amant qui ne la défend pas! Corps de Bacchus! quel nom porte celui qui laisse tomber une femme, et ne la relève pas?

MARIANI, assis, comptant sur ses doigts.

Six cents ducats chez Angelo, deux cents ducats chez Battista. La maison peut en valoir quinze cents, avec le jardin...

APPIANI.

Quel nom porte celle qui quitte son père et sa mère pour un gredin qui ne vient pas quand on l'appelle? Holà! n'y a-t-il rien ici qui ressemble à un homme? T'es-tu enlevée toute seule, Julie?

MARIANI.

Les frais du concert et l'éclairage payés, il m'est

resté quinze cents francs... Quinze cents et cinq cents

d'une part....

Il compte à voix basse.

APPIANI.

Qu'est-ce que tu marmottes, valet?

MARIANI.

Avez-vous quelque autre parent, quelque autre protecteur au monde, madame?

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Parce qu'il fallait que je me battisse, et que, si je l'avais laissé faire, il m'aurait tué.

JULIE.

Pourquoi te bats-tu pour moi? Tu n'es pas mon

amant.

MARIANI.

Votre mère vous déshérite; votre père vous a mau

dite. Je vous ai demandé si vous aviez quelque autre protecteur au monde; vous m'avez dit que non. Sans les injures de votre frère, tout pouvait encore se concilier. Votre famille pouvait se laisser fléchir, et révoquer l'arrêt qu'elle a prononcé contre vous; mais votre frère a voulu un duel. Rentrez dans cette chambre, madame, ma vue doit vous faire horreur.

JULIE.

Laissez-moi partir d'ici.

MARIANI.

Où allez-vous? La maison de votre père est fermée.

JULIE.

J'ai un père là-haut qui a la sienne ouverte.

MARIANI.

Dieu ne console pas les pauvres, madame, et vous ètes déshéritée. Si vous croyez qu'on se fait religieuse comme on veut, vous vous trompez.

Mourir, alors!

JULIE.

MARIANI.

Si vous mourez, j'ai commis un crime inutile.

JULIE.

Que voulez-vous donc de moi?

MARIANI.

J'ai fait avertir Fiorasanta, votre amant.

JULIE.

Vous le connaissez?

MARIANI.

Oui. Êtes-vous fière, fille des Appiani?

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Parce que c'est un lâche. Maintenant, êtes-vous capable d'écouter ce que j'ai à vous dire, ou voulez-vous que je vous laisse seule jusqu'à la pointe du jour? je ne puis rester plus longtemps ici; mon adversaire est tué sans témoin, et le meurtre est puni de mort.

JULIE.

Qu'est-ce que vous voulez me dire?

MARIANI.

Pouvez-vous supporter ma vue patiemment?

JULIE.

Parlez.

MARIANI, s'asseyant.

Cherchez bien dans votre mémoire; il vous reste un moyen de vivre en paix pendant quelques mois, peutêtre pendant quelques années, jusqu'à ce que votre famille veuille vous pardonner et vous recevoir de nou

veau.

JULIE.

Quand les Appiani pardonnent, les rivières changent de cours.

MARIANI.

Je vous laisse cette maison qui est à moi. Vous y resterez sous le nom que vous choisirez; mes habitudes étaient solitaires, et l'on ne saura peut-être pas que ce pauvre taudis a changé de maître.

Et toi?

JULIE.

MARIANI.

Moi, je suis un homme, et un homme vit avec ses bras. Si vous êtes chassée de votre' famille, et privée de vos biens irrévocablement, vous avez de quoi vivre ici. Si vous redevenez riche un jour, vous me rendrez tout cela.

JULIE.

J'ai aussi des bras, je puis me faire ouvrière.

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