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rentes parties de la terre; puis ses enfants les plus chers, crucifiés, brûlés, pendus, broyés, écartelés, torturés, depuis le même temps et sur la même étendue. A ce spectacle, empruntant le langage de Marie, elle dit aux anges et aux hommes : C'est ainsi que j'ai aimé le monde. Pour le sauver, j'ai donné et je donne encore mes fils les plus aimés, l'os de mes os, le sang de mon

sang.

Ajouté à tant d'autres, ce dernier trait de ressemblance nous montre dans les annales de l'humanité deux mères, et deux seulement, Marie et l'Église, qui sacrifient leurs fils pour le salut du monde. O Marie! ô Église! miracles inouïs de charité! que celui qui ne Vous aime pas, soit anathème.

CHAPITRE XVIII

QUATRIÈME CRÉATION DU SAINT-ESPRIT, LE CHRÉTIEN

-

Cette quatrième création but des trois premières et pourquoi. Le chrétien, frère du Verbe incarné, fils de Dieu, participant de la nature divine. Principe de cette filiation ou génération divine. La grâce. Profond mystère de la grâce. - Comment s'accomplit cette divine génération. - Ses principaux effets: la vie divine, la filiation ou adoption, le droit à l'héri tage paternel. Où s'accomplit cette génération. Résumé.

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Les trois premières créations du Saint-Esprit, dans le Nouveau Testament, se rapportent à la quatrième. Marie pour le Verbe incarné; le Verbe incarné pour l'Église; l'Église pour le chrétien; le chrétien luimême, pour diviniser la création tout entière et la ramener à son principe, en multipliant partout les frères du Verbe incarné: ut sit Deus omnia in omnibus. Étudions ce nouveau chef-d'œuvre qui résume tous les autres.

Qu'est-ce, en effet, que le chrétien? C'est le frère du Verbe incarné (1), c'est un autre Jésus-Christ. Or, le Verbe incarné est Dieu, fils de Dieu et héritier de tous les biens de son Père, sur la terre et dans le ciel, dans le temps et dans l'éternité. Au sens où nous allons l'ex

(1) Vade autem ad fratres meos et dic eis: Adscendo ad Patrem meum et Patrem vestrum. Joan., xx, 17. Qui enim sanctificat et qui sanctificantur ex uno omnes, propter quam causam non confunditur fratres eos vocare, dicens: Nuntiabo nomen tuum fratribus meis... Unde debuit per omnia fratribus similari, etc., etc. Hebr., XI, 11, 12, 17.

pliquer, le chrétien est tout cela: Dieu, fils de Dieu, cohéritier de toutes choses avec le Verbe son frère aîné.

Il est Dieu J'ai dit vous êtes Dieux et fils du Dieu vivant (1). « Grâce au Saint-Esprit, ajoute saint Basile, les saints sont Dieux (2). » Et saint Athanase: « De même qu'en s'incarnant, Dieu s'est fait homme, de même par le Verbe incarné, l'homme est Dieu (3). » Le Verbe est fils de son Père par une génération éternelle cette génération est le type de celle du chrétien. De toute éternité, Dieu le Père engendre un Fils consubstantiel et égal à lui en toutes choses. Dans le temps, il engendre des fils qui sont par la grâce, ce que son Fils unique est par nature. Ainsi, le chrétien est un être à part et le résultat d'un fiat spécial (4).

Il n'est fils ni de dieux morts, ni de muettes idoles, ni du sang, ni de la chair, ni de la volonté de l'homme: il est fils du Dieu vivant: Filii Dei viventis. Il est semblable au Verbe dont le Père dit éternellement : Vous êtes mon fils, moi-même je vous ai engendré (5).

Il est cohéritier de toutes choses. Le Verbe incarné, dit saint Paul, est le légataire universel de Dieu (6).

(1) Ego dixi: Dii estis et filii excelsi omnes... filii Dei viventis. Ps. 81. Osee, I, 10.

(2) Sanctos propter inhabitantem Spiritum sanctum esse Deos. Homil. de Spir. sanct.

(3) Ut enim Dominus, induto corpore factus est homo; ita et nos homines ex Verbo Dei fiamus dii. Serm. iv, Cont. Arian.

(4) Exemplar hujus filiationis est filiatio Verbi Dei. Sicut enim Deus Pater ab æterno genuit Filium sibi consubstantialem et æqualem per omnia; ita illius ad instar in tempore gignit filios, qui per gratiam sint id quod Filius Dei est per naturam. Nostra ergo filiatio est imago filiationis divinæ. Corn, a Lap.. in Osee, 1, 10.

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Tout est à lui au ciel et sur la terre. Il ajoute : Et nous sommes tous les cohéritiers du Verbe (1). Ce n'est ni pour les mauvais anges ni pour les méchants qu'ont été faits le ciel et la terre : c'est pour le chrétien. Le ciel; il est son royaume, son pays, son séjour dans l'éternité. La terre; elle est son lieu de passage. Quand le dernier chrétien aura reçu le baptême, et remis son âme entre les mains de son divin Père, le monde finira; et il finira parce qu'il aura perdu sa raison d'être : Omnia propter electos: consummatum est.

mas,

Ineffable grandeur! plus ineffable bonté! Faire sortir du néant le ciel avec les astres et avec les anges, la terre avec ses richesses et avec ses habitants : c'est une création magnifique, instrument attribué au Père. Il en est une autre plus magnifique et dont la gloire revient au Saint-Esprit : c'est la création du chrétien. « Une œuvre peut être appelée grande, dit saint Thoà cause de la grandeur même de l'ouvrage. Sous ce rapport la justification de l'homme, qui a pour but la participation éternelle à la nature divine, est plus grande que la création du ciel et de la terre, qui se termine à la jouissance d'une nature périssable. Aussi, saint Augustin, après avoir dit que faire un juste d'un pécheur est une plus grande chose que de tirer l'univers du néant, ajoute : Car le ciel et la terre passeront, mais la justification et le salut des justes ne passeront pas (2). »

Que l'homme tiré du néant du péché, soit élevé jusqu'à la participation de la nature divine; que le fils de la poussière devienne l'enfant de Dieu; que Dieu appelle l'homme son fils; que l'homme appelle Dieu son (1) Rom., VIII, 17.

(2) I, 2, q. 113, corp.

père; et que cette appellation réciproque soit l'expression de la réalité : « Voilà, continue saint Léon, la création la plus merveilleuse, le don qui surpasse tous les dons. Chrétien, reconnais donc ta dignité : participant de la nature divine, garde-toi de te dégrader par une conduite indigne de ta grandeur (1). »

Quel est le principe de cette génération, cause de notre incomparable noblesse ? comment s'accomplit-elle? quels sont en particulier les effets qui en résultent? où s'accomplit-elle ? Esprit de lumière, daignez nous éclairer au moment où, dans l'intérêt de votre gloire, nous essayons de révéler à vos enfants le ravissant mais profond mystère de leur origine.

Quel est le principe de la génération du chrétien ? C'est la grâce. Mais qu'est-ce que la grâce et comment dire son excellence et sa nature intime? « La grâce, dit saint Pierre, est tout ce qu'il y a de plus excellent dans les trésors de Dieu. C'est un don qui rend l'homme participant de la nature divine (2). » L'Ange de la théologie parle comme le Prince des apôtres. Suivant saint Thomas: «La grâce est une participation de la nature même de Dieu. C'est la transformation de l'homme en Dieu; car c'est le commencement de la gloire en nous (3). » Les catéchismes espagnols ajoutent : « La

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(1) Omnia dona excedit hoc donum, ut Deus hominem vocet filium, et homo Deum nominet Patrem. Serm. vi, de Nativit. Agnosce, o christiane, dignitatem tuam, et divinæ consors factus naturæ, noli in veterem vilitatem degeneri conversatione redire. Id., ibid., Serm. 1.

(2) Maxima et pretiosa promissa donavit; ut per hæc efficiamini divinæ consortis naturæ. II Petr., 1, 4.

(3)... Ipsum lumen gratiæ quod est participatio divinæ naturæ. 12æ, q. 110, art. ш, corp. Gratia nihil aliud est quam quædam inchoatio gloriæ in nobis. 2a2, q. 24, art. 3, ad 2.

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