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CHAPITRE XLI

LE CULTE DU SAINT-ESPRIT

Disproportion entre le travail et la récompense: explication.

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Prédicateurs de ce culte

Dieu, Notre-
Nécessité plus

doit un culte au Saint-Esprit.
Seigneur, les apôtres, les Pères, l'Église. — Témoignages.

grande aujourd'hui que jamais du culte du Saint-Esprit.

En haut les cœurs : Sursum corda. Les souffrances de ce temps ne sont rien, près de la future gloire qui se révélera en nous. A la pensée du fruit de la vie éternelle, s'il nous reste quelque rayon de vraie lumière, quelque sentiment de noble ambition, nous dirons avec l'Apôtre Pour gagner le ciel, j'ai fait litière de tout. Candidats de l'éternité, nous imiterons le marchand de pierres précieuses dont parle l'Évangile. Il trouve une perle qui, à elle seule, est un trésor. Au lieu de dépenser son temps à chercher, et son argent à acheter d'autres pierres, il achète celle-là, et devient le plus riche et le plus heureux des marchands.

Mais quoi! une si grande récompense pour si peu de travail ! L'infini pour le fini! quel est ce mystère? Le Saint-Esprit est l'amour infini; et le ciel, c'est le règne de l'amour infini. Le comment de la proportion nous est caché; mais le fait est incontestable. Il nous est garanti par la parole divine, et rendu sensible par des images présentes à tous les yeux. Qui n'a vu la beauté,

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la grandeur, la prodigieuse multiplicité des fruits de certains arbres? Un instant médité, ce spectacle nous dit : Pour obtenir de quoi s'abriter contre les ardeurs du soleil, réchauffer son foyer, couvrir sa table de fruits succulents, pendant des années entières, il suffit à l'homme de faire le sacrifice d'un seul fruit, capable, tout au plus, de satisfaire une légère sensualité.

Celui qui multiplie d'une manière si étonnante le fruit des arbres nous a promis de multiplier, d'après la même loi, le fruit de nos œuvres : Centuplum accipiet. Qui a le droit de douter de sa parole, ou de limiter sa puissance? Les merveilles qui éclatent dans l'ordre matériel ne représentent même que très-imparfaitement les miracles qui s'accomplissent dans l'ordre moral. Autant il y a de différence entre l'humble semence, mise en terre, et l'arbre magnifique, couvert, suivant la saison, de fleurs et de fruits; autant et plus il y en aura entre le plaisir momentané dont nous faisons le sacrifice ou acceptons volontairement la privation, et les torrents de voluptés éternelles dont nous serons inondés.

Or, le fruit naît du fruit. Le fruit de la vie éternelle naît des fruits du temps, et nous les connaissons. Il reste à dire comment il faut les cultiver. Il faut les cultiver en cultivant l'arbre qui les porte : cet arbre n'est autre que le Saint-Esprit lui-même (1). De quelle manière le cultiver? En lui rendant le culte qu'il mérite. De là, deux questions: Le monde doit-il un culte au Saint-Esprit ? quel est ce culte?

(1) Et tu colis Deum, et coleris a Deo. Recte dicitur, colo Deum : quomodo autem color a Deo ? Invenimus apud Apostolum, Dei agricultura estis... Colit te ergo Deus, ut sis fructuosus; et colis Deum, ut sis fructuosus. Tibi bonum est quod te colit Deus; tibi bonum est quod colis Deum, etc. S. Aug., Enarrat. in ps. 145, n. 11, opp. t. IV, p. 2323, edit. noviss.

1o Le monde doit-il un culte au Saint-Esprit? Quand je veux obtenir la réponse à une question d'histoire ou d'astronomie, j'interroge les historiens ou les astronomes. Pour savoir si le monde doit un culte au SaintEsprit, je m'adresse aux maîtres de la science divine. Ces maîtres sont: Dieu lui-même, Notre-Seigneur, les Apôtres, les Pères, l'Église. Depuis l'origine du monde. tous ces maîtres n'ont qu'une voix pour dire, de génération en génération, à l'éternel soldat qu'on appelle le genre humain : Tes ennemis les plus redoutables ne sont pas ceux que tu vois, les hommes de chair et de sang. Pour toi, la vraie lutte est contre l'Esprit du mal et ses bataillons invisibles. Veux-tu connaître leur nature? elle est supérieure à la tienne. Leur caractère? ils sont la méchanceté même. Leur nombre? il est incalculable. Leurs artifices? ils sont les pères du mensonge. Leur demeure? ils habitent l'air que tu respires et fondent sur toi plus rapides que l'oiseau de proie. Seul, un esprit peut lutter contre un esprit, et l'Esprit du bien, contre l'Esprit du mal. Se tenir caché sous l'aile de l'Esprit du bien, ou tomber sous la griffe de l'Esprit du mal, est l'inévitable condition de ton existence (1) Ainsi parlent tous ensemble les maîtres de la science. Écoutons-les chacun en particulier.

Dieu. Afin de rendre toujours présente à l'homme la nécessité du culte du Saint-Esprit, Dieu a écrit deux grands livres le monde et la Bible. Avec une égale éloquence ces deux livres racontent les gloires du Saint-Esprit, son amour impérissable pour l'humanité et l'indispensable nécessité de son assistance. Le ciel avec ses soleils, la terre avec ses richesses, la

(1) Eph., vi, 12; Corn. a Lap., ibid; I Petr., v, 8.

mer avec ses lois, le chaos lui-même qu'il débrouille et qu'il féconde, parlent de Lui, comme ils parlent du Fils et du Père. Plus de cent cinquante fois, l'Ancien Testament nomme, en la bénissant, la troisième personne de l'adorable Trinité. Deux cent dix fois le même hommage lui est rendu dans le Nouveau Testament.

Que révèle cette répétition si fréquente, sinon le rôle souverain et éternel du Saint-Esprit dans l'œuvre de la création, du gouvernement et de la rédemption du monde? Que prêche-t-elle, sinon le devoir imposé aux hommes et aux anges de le tenir constamment, avec le Père et le Fils, en tête de leurs pensées, de leurs prières et de leurs adorations? Ajoutons que si, dans ce culte incessant, une préférence devait avoir lieu, ce serait en faveur du Saint-Esprit. Amour substantiel du Père et du Fils, il ne se révèle que par des bienfaits. Tous les dons de la nature et de la grâce viennent directement de lui.

Notre-Seigneur. A la voix de la Bible et des créatures se joint celle de la Vérité en personne, le Verbe incarné. Exemples et paroles, le divin Précepteur du genre humain n'a rien omis pour nous faire aimer le SaintEsprit et mettre en lui toute notre confiance. Ce qu'était Jean-Baptiste à son égard, il semble l'être lui-même à l'égard du Saint-Esprit. Le fils de Zacharie, le plus grand des enfants des hommes, est choisi pour le précurseur du Messie. Le fils de Dieu lui-même prend le rôle de précurseur à l'égard du Saint-Esprit, et paraît n'avoir d'autre but que de préparer le monde à le recevoir.

Il a résolu de se faire homme, mais il veut que sa mère soit l'épouse du Saint-Esprit. Il veut que son corps

soit formé par l'opération du Saint-Esprit. Il veut qu'au jour de son baptême le Saint-Esprit descende visiblement sur lui et qu'il le conduise au désert, afin de le préparer à sa mission. Pendant tout le cours de sa vie mortelle, il se montre constamment sous la dépendance du Saint-Esprit. Arrive l'heure solennelle où il doit sauver le monde par son sang : c'est le SaintEsprit qui le conduit au Calvaire. Il meurt, et c'est le Saint-Esprit qui le retire vivant du tombeau (1).

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Faut-il défendre les droits du Saint-Esprit? il semble oublier les siens. Lui-même a prononcé cette sentence: «Quiconque aura dit une parole contre le Fils de l'homme, elle lui sera pardonnée; mais celui qui l'aura dite contre le Saint-Esprit, le pardon ne lui sera accordé ni en ce monde ni dans l'autre (2). » Faut-il lui faire place dans les âmes? il n'hésite pas à se séparer de tout ce qu'il a de plus cher au monde, dans la crainte que sa présence ne soit un obstacle au règne absolu du Saint-Esprit (3). Telles ont été les paroles et la conduite de la seconde personne de la Trinité à l'égard de la troisième. Jamais le ciel et la terre n'ont entendu, jamais ils n'entendront rien de si éloquent, sur l'excellence du Saint-Esprit, sur le culte qui lui est dû et sur la nécessité de son règne.

Les Apôtres. Instruits à l'école du Verbe et formés par le Saint-Esprit lui-même, les apôtres parlent de sa plénitude. Devant les nouveaux fidèles et devant les persécuteurs, dans leurs écrits et dans leurs discours, toujours ils ont le Saint-Esprit sur les lèvres. Aux diacres le soin de nourrir les pauvres; à eux, la mission d'an

(1) Matth., iv, 1; xn, 18, 28; Hebr., 1x, 14; Rom., viii, 2. (2) Matth., x11, 32.

(3) Joan., XVI, 7.

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