VII. AU PRINCE ROYAL DE PRUSSE, SUR SA MALADIE. A Cirey, le 26 février 1739. O nouvelle effroyable! ô tristesse profonde! Quel envieux démon, de nos malheurs avide, Dans ces jours fortunés tranche un destin si beau! A mes yeux égarés quelle affreuse Euménide Vient ouvrir ce tombeau! Descendez, accourez du haut de l'empirée, Descendez, refermez cette tombe entr'ouverte, Arrachez la victime aux destins ennemis. Votre gloire en dépend, sa mort est votre perte: Conservez votre fils. Jusqu'au trône enflammé de l'empire céleste Vous le savez, grand Dieu! languissante, affaiblie Sous le poids des forfaits, je gémis de tout temps, Fédéric me console, il vous réconcilie Avec mes habitants. Le Ciel entend la Terre; il exauce ses plaintes : Minerve, la Santé, les Graces, les Amours, Revolent vers mon prince, et dissipent nos craintes En assurant ses jours. Rival de Marc-Aurèle, ame héroïque et tendre, Que de mes jours encor le fil puisse s'étendre, Je suis né malheureux : la détestable Envie, Un lâche me trahit, un ingrat m'abandonne, Misérables humains, ma douleur vous pardonne: VIII. AU PRÉSIDENT HENAULT, EN LUI ENVOYANT LE MANUSCRIT De mérope. Lorsqu'à la ville un solitaire envoie Juin 1740. Des fruits nouveaux, honneur de ses jardins, Quand par le don de son portrait flatté Elle ressemble à la Divinité Qui veut vous faire adorer son image. Quand un auteur, de son œuvre entêté, Las! je suis loin de tant de vanité. IX. AU ROI DE PRUSSE. SUR M. HONY, MARCHAND DE VIN'. A Bruxelles, le 26 auguste 1740. Le voilà ce monsieur Hony Que Bacchus a comblé de gloire; Il garde un mépris souverain Je crois que quelques rois jaloux, Comme on leur dit que la Sagesse Pour vous réduire à leur espèce. Cher Hony, cette trahison Est un bien faible stratagème; Jamais Bacchus et l'Amour même Le dieu des amours et le vôtre, Sans doute Bacchus et l'Amour Il les reçoit sur son passage, NOTE. 1 Frédéric écrivait à Voltaire, le 16 mai 1739 : « Mon marchand de vin, Hony, vous rendra cette lettre. » Ce n'est donc pas, comme on l'a dit trop souvent, Voltaire qui adressa Hony au roi de Prusse, en 1740. B. |