ticuliers & familiers, leur idée pourroit ouvrir l'efprit aux diftractions, fielles étoient mêlées avec les affections.

Enfin, il eft bon d'ufer de quelques colloques dans cet exercice de la volonté ; adreffant la parole tantôt à notre Seigneur, tantôt aux Anges, aux Saints, fur-tout à ceux qui ont eu part au myftere que l'on médite foi-même, à fon propre cœur, aux pécheurs, même aux créatures infenfibles; comme l'on voit que David fait dans fes Pfeaumes, & d'autres Saints en leurs Méditations & en leurs Prieres.

CHAPITRE IX.

Des féchereffes de l'efprit dans la Médi

tation.

SI vous ne trouvez pas de goût à la Méditation, & que vous n'en fentiez pas votre ame confolée, ne vous troublez pas Philothée, je vous en conjure, & tâchez à vous bien fervir des obfervations fuivantes. Faites quelques-unes de ces prieres vocales, qui font les plus douces à votre cœur, plaignez-vous amoureusement à Jefus-Chrift: appellez-le à votre fecours; baifez refpectueufement fon image, fi vous l'avez; confeffez votre indignité dites-lui comme Jacob: Quoiqu'il en foit,

Seigneur, je ne vous quitterai point que vous ne m'ayez donné votre bénédiction, ou bien comme la Canance: Oui, Seigneur, je fuis une chienne; mais les chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leur Maître,

Prenez quelquefois un Livre, & le lifez dévotement jufqu'à ce que vous ayez donné plus d'attention, & une meilleure fituation à votre efprit: Excitez votre cœur le plus vivement que Yous pourrez, par quelque Acte extérieur de dévotion, vous profternant en terre, croisant les mains fur la poitrine, tenant entre vos bras un Crucifix; je fuppofe que vous n'êtes en préfence de perfonne. Si après cela vous vous trouvez dans une égale féchereffe, ne vous en troublez pas encore: Mais continuez à vous tenir en la préfence de Dieu avec beaucoup de refpect. Vous le fçayez, combien y a t'il de Courtisans qui vont cent fois l'année à la Cour, fans aucune espérance de parler au Prince; mais feulement pour être vus de lui, pour lui rendre leurs devoirs, & comme nous difons › pour faire leur Cour? Allons ainfi, Philothée, à la fainte Oraifon avec une fimple & fidele vue de notre devoir. S'il plaît à la divine Majefté de nous y parler par fes infpirations, & de nous y donner en même-temps de quoi lui parler, ce nous fera affurément un grand hon

neur & un délicieux plaifir. Mais s'il ne daigne pas nous faire cette grace, & qu'il nous-laiffe-là fans nous parler, non plus que s'il ne nous voyoit pas, ou que nous ne fuffions pas en fa préfence, nous ne devons pas pourtant en fortir. Au contraire nous devons y demeurer avec attache, avec un grand refpect, & dans une douce tranquillité d'efprit. Alors notre patience & notre perfévérance nous feront trouver grace devant fes yeux tôt ou tard: Et quand nous reviendrons la premiere fois devant lui, il nous recevra avec un regard favorable, il entrera dans le faint commerce de la Méditation avec nous, & nous y fera goûter par fes confolations toute la fuavité de fon efprit. Mais quand cela nous manqueroit encore, contentonsnous, Philothée, de l'honneur que nous avons d'être auprès de lui, & préfent aux yeux de fon adorable Majefté.

CHAPITRE X.

De l'exercice du Matin.

Utre l'Oraifon mentale, & la priere vocale, il y a d'autres temps, & d'autres manieres de prier: Et le premier exercice de tous eft celui du matin, qui doit fervir d'une préparation générale à toute la conduite de la journée : Voici

la méthode de le bien faire.

1. Adorez Dieu avec une profonde vénération: remerciez-le de vous avoir confervé durant la nuit: Et fi votre confcience vous reproche quelque chofe depuis votre examen du foir, demandez-lui-en pardon.

2. Confidérez que le jour préfent vous eft donné pour mériter l'éternité bienheureufe, & faites un ferme propos de l'employer tout entier à cette intention.

3. Prévoyez les affaires dont votre prudence doit s'occuper ce jour-là, les occafions que vous y aurez de glorifier Dieu, & la tentation que la colere ou la vanité , ou quelqu'autre paffion pourroit vous y faire naître. Après cette inspection, préparez-vous par une fainte réfolution à bien profiter de tous les moyens que vous aurez de fervir Dieu, & d'avancer votre perfection: Au contraire, armez-vous de toute la fermeté de votre efprit, pour éviter ou pour combattre & vaincre tout ce qui vous y fera quelque obftacle. Mais cette fimple réfolution ne fuffit pas, il faut la foutenir par la préparation des moyens que vous pouvez avoir de l'exécuter Par exemple, fi je prévois que je doive traiter de quelque affaire avec une perfonne que la colere enflamme aifément, non- feulement je me précautionnerai du mieux que je pourrai pour ne pas l'offenfer; mais afin de pré,

venir fon humeur, je préparerai les manieres de parler les plus douces & les plus honnêtes ou bien pour le contenir, j'engagerai quelques personnes à s'y trouver avec moi. Si je prévois que j'aie à vifiter quelques malades, j'en difpoferai l'heure, toutes les circonstances, les manieres les plus utiles de les confoler, & les fecours que je pourrai leur donner.

cœur,

4. Reconnoiffèz devant Dieu avec humilité, l'impuiffance où vous êtes de rien faire de tout cela, foit pour pratiquer le bien, foit pour éviter le mal: Et comme fi vous teniez votre cœur en vos mains, offrez-le avec toutes vos bonnes résolutions à fa divine Majesté, la suppliant de le prendre en fa protection, & de le fortifier dans fon fervice. Dites-lui: O Seigneur, voilà ce pauvre & miférable à qui votre bonté a fait prendre aujourd'hui tant de bonnes réfolutions : Mais hélas: Il est trop foible & trop inconftant pour faire le bien qu'il defire, à moins que vous ne lui donniez votre fainte bénédiction. C'est à cette intention que je vous la demande, ô Pere des miféricordes, par les mérites de la Paffion de votre Fils, à la gloire duquel je confacre cette journée, & le refte de ma vie. Ajoutez à cette courte Priere, l'invocation de la fainte Vierge, de votre bon Ange, & des Saints, afin qu'ils vous aident de toute leur protection: Au refte, cet exete