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Paris, dissoute après l'insurrection de vendé

miaire an IV, et rétablie par un décret. Ils Ax 5. voulaient s'en faire un rempart contre les entreprises du directoire; mais les Parisiens instruits par l'expérience, montraient une répugnance formelle à s'enrôler.

Paris paraissait calme, aucune agitation ne se montrait au dehors, aucun rassemblement ne pouvait inquiéter l'administration; mais une morne tristesse était peinte sur tous les visages. On savait que le comité des inspecteurs de la salle des cinq cents, chargé d'une surveillance active, s'assemblait toutes les nuits; qu'un grand nombre de députés assistaient à ses séances; mais on ne savait pas de quelle nature étaient ses délibérations. Les bruits les plus sinistres circulaient; on assurait que Paris était cerné par des troupes de ligne, et qu'un événement tragique menaçait cette capitale. Chaque jour on annonçait la catastrophe pour le lendemain ; et le père de famille, après avoir passé la journée dans les alarmes, rentrait chez lui avec la persuasion que sa femme et ses enfans seraient réveillés son du tocsin et le bruit du canon.

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par le

1797.

CHAPITRE XXI.

Journée du dix-huit fructidor.

A QUATRE heures du matin, le canon d'a

larme se fit entendre sur le Pont-Neuf. A ce signal, quelques corps de troupes, entrés dans Paris pendant la nuit, et réunis à la garnison de cette capitale, formant en tout huit à dix mille hommes, se mîrent en mouvement. Une partie de l'armée avait ordre d'entourer l'enceinte où siégeaient les deux conseils; l'autre devait s'emparer des ponts, des places, des quais et de tous les postes essentiels.

Le directeur Barthélemy était gardé à vue dans son appartement. Le directeur Carnot avait disparu vers minuit. On parla diversement de cette éclipse; on disait qu'il avait été tué, en se défendant contre ceux qui étaient chargés de l'arrêter par ordre de ses trois collègues Larevellière-Lépeaux, Barras et Rewbel, qu'il se proposait lui-même de faire arrêter à l'issue d'un conseil tenu dans le lieu des séances de la commission des inspecteurs de la salle des cinq cents. Ce conseil était composé d'un grand nombre de députés des deux conseils, qui restèrent assemblés toute la nuit.

La colonne chargée de s'emparer du palais des Tuileries, s'était rangée en bataille entre AN 5. la grande grille du jardin et l'avenue des Champs-Elysées. L'officier qui la commandait, s'avançant jusqu'à la grille, somma, au nom du directoire, les grenadiers du corps législatif qui la gardaient, d'ouvrir les portes. Le commandant du poste demandait le tems de délibérer; on lui accorda cinq minutes, en lui déclarant que les moyens allaient être disposés pour vaincre toute résistance.

Les grenadiers, à la vue des préparatifs hostiles, en arrêtèrent l'effet, en s'écriant ensemble Vive Augereau, vive le directoire ! Les grilles furent sur-le-champ ouvertes; les assaillans, maîtres du jardin, occupèrent les postes autour des salles où s'assemblaient les deux conseils. Le commandant des grenadiers, Ramel, blåmait la conduite tenue à la grande grille du jardin ; il fut arrêté par le général Augereau qui commandait l'expédition, et envoyé au Temple. Un piquet, sous les ordres du général Cherin, eut ordre d'arrêter les députés, assemblés dans la salle de la commission des inspecteurs. Ils n'étaient plus alors qu'au nombre de treize ; du conseil des anciens, Rovère, de Vaucluse; Pérée, de la Manche; Tupinier, de Saône et Loire; Jarry - des Loges, de la Mayenne; de la Meitherie, du Cher; Descourtils de Merlemont, de l'Oise du conseil

des cinq cents, Pichegru, du Jura; Willot, 1797. des Bouches-du-Rhône; Delarue, de la Nièvre;

Dauchy, de l'Oise; Derumare, de la SeineInférieure; Favolle, de la Drôme; Bourdon, de l'Oise. Les autres députés qui formaient cette réunion, s'étaient retirés insensiblement, à la nouvelle des apprêts faits par le directoire.

Au point du jour, les Parisiens éveillés par le bruit du canon, par la marche de troupes, ou que leurs affaires conduisaient dans les rues, ne paraissaient pas étonnés de se trouver au milieu d'un camp, ou plutôt de voir un camp au milieu de Paris; mais ils craignaient les suites de cette journée, avec d'autant plus de raison, , que, depuis près d'un mois, les royalistes se vantaient publiquement qu'ils étaient en mesure d'affronter leurs ennemis et de faire triompher le parti contre-révolutionnaire. On s'attendait à un choc, sans pouvoir en calculer l'issue.

A huit heures du matin, les représentans du peuple se rendaient à leur poste. L'appareil des armes, le bruit public et les arrêtés du directoire, affichés sur les murs, annonçaient qu'une vaste conspiration venait d'être découverte. A huit heures et demie, le général Lemoine se présente, et après avoir fait poser les scellés sur la porte du conseil des anciens, il remet à quelques députés qui se trouvaient dans la salle des séances du conseil des cinq

cents, un arrêté du directoire, portant en substance: «< Le général Augereau est chargé Ax 5. de mettre les scellés sur les portes des deux conseils ; il invitera les représentans du peuple qui s'y trouveront, à s'assembler, les anciens, dans la salle des écoles de santé, les cinq cents, dans celle de l'Odéon , disposées pour les recevoir. » Alors, l'entrée du jardin des Tuileries fut interdite à tout le monde indifféremment, excepté à la force armée.

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Cependant, les députés qui n'étaient pas instruits de ce qui venait de se passer, continuaient à se présenter aux avenues; les factionnaires leur indiquaient les endroits où les deux conseils devaient se réunir. Les uns s'y rendirent, d'autres rentraient chez eux ; d'autres enfin erraient à l'aventure dans les rues de Paris, cherchant à connaître les particularités de l'événement qui se déployait. Quelques-uns d'eux résolurent de se réunir en plus grand nombre possible. Ils choisirent la maison du député Ponsart pour les cinq cents, et celle du député de Marbois pour les anciens. Deux députés de chaque conseil parcouraient les alentours du palais des Tuileries, pour recruter leurs collègues.

A midi, les anciens étaient réunis au nombre de quarante, et les cinq cents au nombre de quatre-vingts. Ils connaissaient alors, dans toute son étendue, l'événement qui avait con

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