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828. Le créancier peut exiger le rachat ou le remboursement du capital de la rente dans les trois ças suivants : 1o si le débiteur ne fournit pas les sûretés promises par le contrat; 2° s'il laisse passer deux années sans payer la rente; 3° s'il tombe en faillite ou en déconfiture (1).

Lorsque le débiteur d'une rente rembourse ou est forcé de rembourser le capital, il n'a pas droit de réclamer les intérêts qu'il a payés jusqu'alors; car le créancier les a perçus en vertu d'un titre légitime.

A la différence de la rente viagère, qui peut être constituée au taux qu'il plaît aux parties contractantes de fixer (2), la rente perpétuelle ne peut excéder l'intérêt légal, qui est le cinq pour cent.

Ce que nous avons dit du rachat des rentes s'applique à toutes sortes de rentes perpétuelles: suivant la loi du 18 décembre 1790, « toutes les rentes foncières perpétuelles, soit en nature, soit en « argent, de quelque espèce qu'elles soient, quelle que soit leur origine, à quelques personnes qu'elles soient dues,... même les «< rentes de dons et legs pour cause pie ou de fondation, sont ra« chetables.

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ARTICLE VII.

Des Monts-de-Piété.

829. Les monts-de-piété consistent dans un fonds d'argent des-. tiné à faire des prêts sur gages à ceux qui sont dans le besoin. On y exige un intérêt, non en vertu du prêt, mais à raison des frais nécessaires pour l'entretien de l'établissement. Cet intérêt n'est point usuraire aussi le concile de Latran, de l'an 1515, a-t-il approuvé les monts-de-piété, comme établissements utiles aux pauvres et aux indigents; et ils leur sont vraiment utiles, tant que administrateurs se renferment dans les règles de la justice et de la charité, qui doivent en diriger toutes les opérations.

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Ces règles sont: 1o que l'intérêt qu'on reçoit soit aussi modique que possible; 2° qu'on donne à ceux qui empruntent un temps suffisant pour retirer leurs gages, afin qu'ils puissent les recouvrer sans frais, ou qu'ils ne soient pas forcés de les abandonner.

(1) Cod civ. art. 1912 et 1913.-(2) Ibidem. art. 1976.

ARTICLE VIII.

Du Change.

830. Le change, en latin cambium, est, comme le mot l'indique, un changement d'argent monnayé, une permutation d'argent avec d'autre argent. Les théologiens distinguent le change réel, où l'on change véritablement un argent pour un autre, et le change fictif, qui n'est qu'une fiction de change, qui n'en a que l'apparence. Ce dernier change n'est qu'un moyen inventé par la cupidité, qui cherche à pallier l'usure ou l'injustice sous les apparences d'un contrat licite et honnête.

Le change réel se divise en change menu et en change local.

Le change menu a lieu lorsqu'on donne une espèce de monnaie pour en avoir une autre; de vieilles pièces, par exemple, pour en avoir de nouvelles qui ont cours, ou des pièces d'argent pour avoir des pièces d'or; ou de la monnaie de France pour avoir de la monnaie d'Allemagne, d'Angleterre, d'Espagne, d'Italie, ou d'autres pays.

Cette espèce de change est très-utile au public; car, dans le commerce de la vie civile, on a souvent besoin de pièces d'or ou d'argent pour les voyages, ou de petite monnaie pour acheter les choses nécessaires à l'entretien, ou d'une monnaie différente de celle de son pays, quand on se trouve sur une terre étrangère. Or, on ne peut raisonnablement exiger que ce change soit gratuit : le changeur a évidemment droit d'en exiger un profit, soit à raison de la peine qu'il a de se procurer de l'argent, et des chances de perte qu'il court en le conservant, soit à raison des frais qu'il est obligé de faire pour former et entretenir son établissement. Mais le prix du change ne doit pas être excessif; on ne pourrait, sans injustice, se prévaloir de la nécessité où se trouve, par exemple, un voyageur, pour exiger un profit qui excéderait le prix fixé par l'usage ou la coutume du pays.

831. Le change local est celui qui se fait par lettre, en donnant son argent à un banquier de telle ou telle ville, et prenant de lui une lettre en vertu de laquelle on reçoit, ou l'on fait recevoir dans une autre ville, le payement de son argent. De là les lettres de change. Le change local, quand il est réel et effectif, est certainement licite ; il est en quelque sorte nécessaire pour le commerce. On doit donc regarder comme justement acquis le profit qu'en tirent

les banquiers. Les mêmes raisons que nous avons indiquées plus haut justifient le profit de ceux qui font la banque. Mais le profit doit être modéré; il faut qu'il soit réglé suivant le cours du lieu où la lettre de change sera tirée, eu égard à celui où la remise sera faite.

CHAPITRE XII.

De la Vente.

ARTICLE I.

De la nature du Contrat de vente.

832. La vente est une convention par laquelle l'un des contractants, qui est le vendeur, s'oblige a livrer une chose à l'autre contractant, qui est l'acheteur, moyennant une certaine somme d'argent que celui-ci s'oblige réciproquement à lui payer. La vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée, ni le prix payé. Cependant, lorsque des marchandises ne sont pas vendues en bloc, mais au poids, au compte ou à la mesure, la vente n'est point parfaite, en ce sens que les choses vendues sont aux risques du vendeurjusqu'à ce qu'elles soient pesées, comptées ou mesurées; mais l'acheteur peut en demander ou la délivrance ou des dommages-intérêts, s'il y a lieu, en cas d'inexécution de l'engagement. Si, au contraire, les marchandises ont été vendues en bloc, la vente est parfaite, quoique les marchandises n'aient pas encore été pesées, comptées et mesurées. A l'égard du vin, de l'huile, et des autres choses que l'on est dans l'usage de goûter avant d'en faire l'achat, il n'y a pas de vente tant que l'acheteur ne les a pas goûtées et agréées.

La vente peut être faite purement et simplement, ou sous une condition, soit suspensive, soit résolutoire : et étant faite à l'essai,

elle est toujours faite sous une condition suspensive. Elle peut aussi avoir pour objet deux ou plusieurs choses alternatives (1).

833. Suivant notre Code, la promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix (2). Cependant, il ne faut pas confondre la promesse de vendre avec la vente elle-même. Celui qui vend une chose en transfere par le fait la propriété à l'acheteur; dès lors, si elle périt sans qu'il y ait faute de la part du vendeur, c'est l'acheteur qui en supporte la perte. Tandis que celui qui promet de vendre une chose en conserve la propriété, cette chose demeure à ses risques : si elle vient à périr avant d'être vendue, c'est pour lui seul qu'elle périt (3).

Si la promesse de vendre a été faite avec des arrhes, chacun des contractants est maître de s'en départir: celui qui les a données, en les perdant, et celui qui les a reçues, en restituant le double. Il n'en est pas de même des arrhes qu'on a données, lorsque la vente est parfaite; car alors on n'est plus libre de se désister, en perdant ou en doublant les arrhes (4).

ARTICLE II.

Qui peut acheter ou vendre?

834. La vente, étant de droit commun comme tous les contrats, peut avoir lieu entre toutes personnes qui ne sont pas déclarées par la loi incapables de vendre ou d'acheter. Il y a en effet des personnes auxquelles la loi prohibe la disposition de leurs biens en tout ou partie. Tels sont les mineurs, les interdits, les femmes en puissance de mari, pour les cas exprimés par la loi. La vente faite par un mineur de ses immeubles, sans l'observation des formalités prescrites, est nulle. Il en est de même de la vente d'un immeuble faite par une femme mariée, sans l'autorisation de son mari ou de la justice. La vente entre époux ne peut même avoir lieu, si ce n'est dans quelques cas particuliers (5).

Les tuteurs ne peuvent, sous peine de nullité, acheter, même en adjudication publique, ni par eux-mêmes, ni par personnes interposées, les biens de ceux dont ils ont la tutelle. Il en est de même

(1) Cod. civ. art. 1583 et suiv. —(2) Ibid. art. 1589.-(3) Voyez le Traité du Contrat de vente, par Pothier, etc. — (4) Pothier, ibidem; Malleville, Analyse du Code civil; Delvincourt, Cours du Code civil; Pailliet, Manuel du Droit français; Rogron, etc. ~ (5) Voyez le Cod. civ. art. 1595.

des mandataires, pour les biens qu'ils sont chargés de vendre; des administrateurs des communes et des établissements publics, pour les biens de ces communes ou établissements; des officiers publics chargés de la vente des biens nationaux, pour ceux de ces biens dont la vente se fait par leur ministère.

Les juges, leurs suppléants, les magistrats remplissant le ministère public, les greffiers, huissiers, avoués, défenseurs officieux et notaires, ne peuvent également, à peine de nullité, et de tous dépens, dommages et intérêts, devenir cessionnaires des procès et droits litigieux qui sont de la compétence du tribunal dans le ressort duquel ils exercent leurs fonctions (1).

ARTICLE III.

Des Choses qui peuvent être vendues.

835. On ne peut vendre qu'une chose qui existe ou qui peut exister. Celle qui n'existait plus au moment de la vente n'a pu être l'objet d'un contrat. Si une partie seulement était périe, l'acquéreur a le choix, ou de renoncer à la vente, ou d'exiger la partie qui reste, dont le prix est alors déterminé par une nouvelle estimation (2). On peut vendre non-seulement les choses qu'on possède actuellement, mais encore celles qu'on peut avoir par la suite. Ainsi les choses futures, une espérance, une chance incertaine, comme un coup de filet, sont du ressort de la vente. Cependant on ne peut vendre une succession qui n'est pas ouverte (3).

On peut vendre et acheter un droit incorporel, tel qu'un usuFruit, une servitude, une créance, une hérédité (4). On peut même vendre à un éditeur un ouvrage d'esprit, une propriété littéraire; mais, dans une vente de ce genre, l'éditeur ne saurait jamais acquérir la propriété absolue de l'ouvrage; il ne pourrait effacer le nom de l'auteur pour y mettre le sien, ni faire des changements ou corrections au manuscrit. Bien plus, il doit recevoir toutes celles que l'auteur juge nécessaires. Toutefois, si les changements que l'auteur veut introduire sont tellement considérables et onéreux que l'éditeur coure la chance d'être privé des bénéfices qu'il espérait, celui-ci peut demander la résiliation du mar

(1) Cod. civ. art. 1596 et 1597. Pour ce qui regarde le saisi et le failli, voyez le Code de procédure, art. 692, 693, 713; et le Code de commerce, art. 442, 443, 444. — (2) Cod. civ. art 1601. (3) Ibid. art. 1130. — (4) Ibid. art. 1689 et suiv.

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