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d'examiner les autres. La chambre voit avec raison plus qu'un réglement dans un projet de loi dont pres que toutes les dispositions sont législatives et essentiellement constitutionnelles. Elle ne croit pas qu'un pareil réglement puisse être l'objet d'une simple communication, et elle en ordonne le renvoi dans les bureaux, pour qu'il soit discuté conformément à l'ar ticle 18 de la charte constitutionnelle.

Il ne sera pas inutile de faire connaître ici quelques dispositions de ce réglement, et démontrer combien elles avaient besoin d'être examinées.

L'article 4 du titre 1er. est ainsi conçu: « Lorsque le Roi est assis et couvert, il ordonne aux pairs de s'asseoir; les députés attendent que le Roi le leur permette par l'organe de son chancelier. »

Quel bien peut-on attendre de cette disposition? elle ne paraît propre qu'à abaisser la chambre des députés, sans élever celle des pairs. Si l'on jugeait nécessaire d'accorder une espèce de prééminence à celle

ci,

on devait du moins éviter d'humilier celle-là. Or, la disposition de l'article 4 n'est honorable pour la chambre des pairs que parce qu'elle est humiliantė pour celle des députés : « Le Roi ordonne aux pairs de s'asseoir; les députés attendent qu'il le leur permette par l'organe de son chancelier. »

Pour justifier ce que cette disposition offre de choquant, on la présente comme une imitation de ce qui se pratique en Angleterre. Ce n'est point là imiter la constitution anglaise, c'est en faire la parodie: s'il y a quelque chose de peu convenable dans cette cons

titution, ce n'est pas précisément cela qu'il faut y prendre.

Au reste, on ne peut rien conclure ici de ce qui se passe en Angleterre. Si la chose y est établie et consacrée par l'usage, c'est une raison pour qu'elle y soit respectée; mais, comme elle serait nouvelle et contraire à nos mœurs en France, c'est une

meilleure raison encore pour qu'elle n'y soit point établie. L'article 2 du titre 3 est ainsi conçu : « La loi proposée est rédigée en forme de loi, signée par le Roi, contresignée par un ministre et adressée à la chambre, à qui le Roi l'envoie. »

Il n'est presque pas un mot dans cet article qui ne provoque la censure.

La loi proposée : ce ne sont point des lois que l'on présente, ce sont de simples projets. On trouve le même vice de rédaction dans une foule d'articles du réglement. Il semble qu'on veuille réduire les chambres à accorder ou à refuser leur approbation aux lois qui leur sont proposées, saus qu'elles puissent prendre part à leur confection. Ce projet deviendra plus évident, à mesure que nous avancerons dans l'examen qui nous occupe.

La loi proposée est rédigée en forme de loi, Est-il convenable de rédiger en forme exécutoire une loi qui n'existe encore qu'en projet ? Il me semble que c'est compromettre l'autorité du Roi que de vouloir qu'il revête des formules du commandement des actes qui n'ont aucune force, et auxquels personne n'est encore et ne sera peut-être jamais tenu d'obéir. Mais ?

comme je l'ai observé, on veut que ces lois soient lois du moment que la présentation en est faite.

La loi proposée est rédigée en forme de loi, signée par le Roi.

Pourquoi signée par le Roi? Veut-on mettre les chambres dans l'alternative de manquer de respect à Sa Majesté en désapprouvant des actes revêtus de sa signature, ou de trahir leurs devoirs en s'abstenant”, par révérence, de faire des critiques qui leur paraîtront nécessaires? Pourquoi d'ailleurs veut-on que le Roi appose sa signature à une loi qui n'est qu'en projet ? Il suffirait certainement que ce projet fût revêtu de la signature du ministre par l'organe duquel le Roi en fait la proposition; mais on ne veut pas qu'une loi proposée par le Roi paraisse n'avoir que le caractère d'un projet.

L'article 3 du même titre s'exprime ainsi : « Les chambres ne motivent ni leur acceptation ni leur refus; elles disent seulement; la chambre a adopté ; ou, la chambre n'a pas adopté; ce qui veut dire, en d'autres termes, que les chambres ne peuvent point faire de changemens à un projet de loi, et qu'elles sout tenues de l'approuver ou de le rejeter en son entier. Cette disposition s'accorde mal, comme on va voir avec l'article 46 de la charte constitutionnelle, qui autorise les chambres à faire, à certaines conditions, des amendemens au projet de loi que le Roi leur présente; mais il semblerait, d'après l'article 3 du réglement, qu'on a voulu s'assurer des moyens de faire passer, dans les projets de loi, de mauvais ar

ticles à la faveur de quelques bonnes dispositions. Or, il était nécessaire de décider pour cela que les projets de loi seraient adoptés ou rejetés en leur entier, ce qui n'était praticable qu'en mettant de côté l'article 46 de la charte constitutionnelle.

On voit de quelle importance sont les dispositions que nous venons d'examiner; le même projet en renferme un grand nombre d'autres qui ne sont pas moins fondamentales. Et l'on ne saurait trop admirer que le ministre ait pu se tromper assez sur le caractère de ce projet, pour le présenter à la chambre comme un simple réglement destiné à compléter le sien, et ne statuant en quelque sorte que sur des objets d'étiquette. Cela doit faire sentir à la chambre combien il lui importe de se tenir sur ses gardes, et de donner une attention sévère aux propositions qui lui seront faites par les ministres.

Dans la séance du 30 jnin, on a donné à la chambre communication d'une pétition, par laquelle un homme de lettres réclamait contre les justes plaintes auxquelles avait donné lieu l'ordonnance du directeur de la police concernant la célébration des jours fériés. Nous avons démontré jusqu'à l'évidence, dans notre premier numéro, que cette ordonnance était une véritable forfaiture ; et l'on ne peut assez s'étonner que l'on ait osé en prendre la défense devant la chambre : c'est là un scandale qu'elle aurait dû, ce semble, s'abstenir de réndre public.

Le même jour, un député, M. Bouvier a proposé de faire une adresse au Roi, pour le supplier de

présenter à la chambre un projet de loi qui déterminât les mesures à prendre relativement à l'observation des jours de fêtes. Avant de demander un pareil projet, n'eût-il pas été convenable, dans l'intérêt des lois et pour l'édification des hommes qui les respectent, de faire révoquer l'ordonnance de M. le directeur général de la police qui les a enfreintes si ouvertement? La démarche de M. Bouvier semble avoir été faite tout exprès pour justifier ou du moins excuser la faute du ministre, auquel on paraît sacrifier les lois qu'il a violées. La chambre sentira combien un pareil sacrifice est alarmant pour les citoyens.

Dans la séance de ce jour, M. Durbach a développé les motifs de la proposition qu'il avait faite le 28, relativement à la liberté de la presse. Tous les hommes de bien ont remarqué avec satisfaction le courage avec lequel il a défendu la cause des lois : cependant quelques personnes ont trouvé que son discours était écrit avec un peu d'ardeur; c'est un excès, disaient-elles, qui peut avoir de graves inconvéniens; des discours trop animés peuvent communiquer aux têtes des tribunes une chaleur immodérée qu'elles portent ensuite dans le monde, et finit par donner aux esprits une exaltation sans objet qui ne dispose qu'au désordre. C'est là un mal sans doute; mais pourquoi en accuser ceux de MM. les députés qui parlent avec chaleur devant la chambre ? Si certains de leurs collègues étaient moins apathiques, et d'autres mieux intentionnés, ils pourraient s'expliquer avec plus de calme et de modération; alors

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