Profanoit Crosne, sa patrie,
Et, par des sons fastidieux,
Troubloit le charme et l'harmonie
De la fête de ces beaux lieux.
Pour combler les plus tendres nœuds, Que cette union fasse naître D'illustres rejetons nombreux, Dans qui la patrie et le maître Puissent en tout temps reconnoître Des cœurs dignes de leurs aïeux! A l'unanime et vrai suffrage Et de la ville et de la cour, Si du fond d'un simple hermitage On peut allier en ce jour
Un champêtre et naïf hommage; Parmi les lauriers et l'encens, Les roses, les myrtes naissants, Dont les parfums et la parure Entourent deux époux charmants, La bonhomie à l'aventure
Vient mêler une fleur des champs, Le symbole des jeunes gens, Et le bouquet de la nature. Les pompons, les vernis du temps, L'esprit des mots, l'enfantillage, Les gaîtés de tant de plaisants Si facétieux, si pesants, Le sophistique persiflage,
L'air singulier, les tons tranchants, N'ornent point de leurs agréments Ce tribut d'un climat sauvage; Loin des tourbillons enchanteurs Du bel esprit et du ramage, Loin des bons airs et de l'usage, On n'a que les antiques mœurs, Le bon vieux sens de son village, De l'amitié, du radotage, Un cœur vrai, de vieilles erreurs, Avec un gothique langage. Malgré ces défauts importants, Ces miseres du bon vieux temps, Qui seroient l'absurdité même, Et d'un ridicule suprême Aux regards de nos élégants, O vous, pour qui dans ces instants J'ai repris avec confiance Des crayons oubliés long-temps, Pardonnez-en la négligence; Ne voyez que les sentiments Qui me tracent, malgré l'absence, Vos fêtes, vos enchantements, Et me rendent votre présence. Connoissant bien la sûreté De votre goût sans inconstance, la vérité,
Votre amour pour
L'air naturel, la liberté,
Et le style sans importance, Je vous livre avec assurance Mon gaulois et ma loyauté; Et vous m'aimerez mieux, je pense, Dans toute mon antiquité, Que si, séduit par mon estime Pour la bruyante nouveauté, Les grands traits, le petit sublime, Et l'air de confiance intime De tant de modernes auteurs, Je visois au style, aux couleurs, A cette empirique éloquence Au ton neuf et sans conséquence De nos merveilleux raisonneurs, Contemplés comme créateurs
D'un nouveau ciel, d'un nouveau monde, Par cette foule vagabonde
De très humbles littérateurs, D'échos répandus à la ronde, De perroquets admirateurs, De sous-illustres, d'amateurs Qui vont répétant vers et prose, Et d'autrui faisant les honneurs, Pour se croire aussi quelque chose. Mais je me sauve promptement; Je craindrois insensiblement, Pour ma longue petite Épître, L'air d'ouvrage qu'assurément
Elle prendroit sans aucun titre, Si ces riens courent l'univers,
Et que par hasard l'on en cause (Car tel est le destin des vers, Un instant de vogue en dispose, Et bien ou mal la rime expose Au bruit, aux propos, aux faux airs, Aux sots, aux esprits, à la glose Des pédants lourdement diserts, Des freluquets lilas ou verds, Et des oisons couleur de rose, Enfin à cent dégoûts divers
Que n'ont point messieurs de la prose); Si donc, élevés à l'honneur D'une renommée éphémere, Ces vers ont le petit malheur De subir ce froid commentaire De l'importance ou de l'humeur, Malgré la déraison altiere, Et tout ennuyeux argument, Leur gloire sera tout entiere S'ils plaisent au séjour charmant Qui m'en dicta le sentiment, Et les pare de sa lumiere.
TÉLÉMAQUE adoré du Nord,
Et cher à toutes les contrées Où l'ardeur du plus noble essor Guide vos traces desirées, Et des plus belles destinées A l'Europe annonce le sort; Ainsi, dans le printemps de l'âge, Dédaignant l'attrait du repos, L'encens, l'étiquette, et l'usage, Vous leur préférez les travaux, Les observations du sage, Et les fatigues du héros.
Le plus cher, le plus sûr présage, Charme vos états fortunés: Monarque illustre, pardonnez Si j'ose écarter le nuage Dont vos pas sont environnés, Et si la candeur d'un sauvage
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