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Piece ce qu'elles louent elles-mêmes, ou plutôt
ce qui les frappe, malgré elles, dans les Comé-
dies de Moliere. Je ne sais si je ne leur prête
point à l'égard de cet excellent Ecrivain des sen-
timens que, peut-être, elles n'ont pas. Mais au
moins ne peuvent-elles disconvenir du plaisir que
ses Pieces font encore tous les jours aux Specta-
teurs. Diront-elles qu'en faveur de leur ancien-
neté on y rit par complaisance, ou par habitude,
et que ce qui étoit bon autrefois, ne vaut plus
rien aujourd'hui ? Il ne leur reste que ce retran-
chement, où je me garderai bien de les attaquer.
Pour moi, qui fais gloire de prendre Moliere
pour modele,
sans me flatter de pouvoir ja-
mais l'égaler, j'ai voulu faire une Comédie
qui plût sur le Théatre, sans éblouir, et qui
se soutînt à la lecture. Or, je ne vois que le
sentiment et le bon-sens qui puissent produire
ce double effet. Quelques-uns de nos Auteurs
ont beau vouloir mettre en crédit leurs brillans
et leurs saillies, ce prétendu esprit, comme
l'expérience le prouve, ne plaît que dans la nou-
veauté. Sa pointe aiguisée avec affectation s'é-
mousse à la vue, dès qu'on la considere de près,

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et je pourrois citer plusieurs de ces traits d'esprit, applaudis sans réflexion, qui dans le fond ne sont rien moins qu'ingénieux. Ce n'est pas en courant après l'esprit qu'on l'atteint. Jaloux de sa liberté, il fuit ceux qui le cherchent, et ne se présente qu'à ceux qui l'attendent. Je ne prétends pas néanmoins que nos bonnes Pieces manquent d'esprit. Elles ont l'esprit qui convient à la Comédie, c'est-à-dire, l'esprit solide, qui n'est pas celui avec lequel on brille dans les cercles et dans les ruelles, où l'on ne demande qu'un plaisir vif et passager. C'est par cet esprit simple, vrai et naturel que les Pieces de Moliereont toujours plu, et plairont toujours. Le Glo rieux, L'Ecole des Amans, l'Avare amoureux La Pupile, et quelques autres Comédies de notre tems, ont la même destinée, et je crois que c'estlà la scule et véritable Comédie,

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CLEANTE, pendant qu'Orgon, son pere, étoit éloigné de Paris, pour des affaires, a contracté, sans son consentement, un mariage peu avantageux du côté de la fortune. Orgon, de retour à Paris, veut faire casser ce mariage. Cléante, qui en est instruit, vient à Auteuil, où Lisimon, ami d'Orgon, a une maison de campagne, et il y amene, avec lui, Claricè, son épouse, et Toinette, sa suivante. Cléante prie Lisimon de le raccommoder avec Orgon. Lisimon le lui promet, et, afin d'y parvenir plus facilement, il consent à faire passer Clarice pour sa niece, et à la présenter, en cette qualité, à Orgon, qui doit venir le voir ce jour-là même, à ce qu'il apprend par Cléante. Orgon arrive, en effet. Il est charmé de la prétendue niece de Lisimon: il en de-. vient subitement amoureux > et renonçant au

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projet qu'il avoit d'abord eu de rompre le mariage de Cléante, il veut le punir d'une autre maniere, en épousant lui-même Clarice, et en le privant par-là d'une partie de son héritage. Mais Clarice lui oppose une difficulté insurmontable. Elle lui dit qu'elle est mariée. Elle ajoute que c'est aussi à l'insu de son oncle; et elle prie Orgon de solliciter et d'obtenir sa grace auprès de Lisimon. Orgon, forcé d'abandonner son nouveau projet, intercede Lisimon, qui, feignant l'étonnement et la colere, autorise son refus de pardonner par l'exemple d'Orgon même ; et il promet, cependant, de se laisser fléchir en faveur de Clarice, si Orgon cesse d'être inflexible pour Cléante. Clarice et Lisimon réunissent leurs efforts; la premiere en redoublant ses prieres, et le dernier en persistant à ne vouloir se rendre qu'après Orgon. Cléante vient lui-même se jetter aux pieds de son pere, qui ne peut résister davantage, et qui lui pardonne. On apprend à Orgon que cette Clarice, qu'il aime tant, depuis le premier moment où il l'a vue, n'est autre que cette même épouse de Cléante, contre laquelle il montroit tant de courroux,

avant de la connoître. Orgon en est enchanté : il approuve tout, et ne desire plus rien tant que de contribuer à la félicité de ces deux époux, dont il se reproche d'avoir voulu faire le malheur, en les désunissant,

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