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A bas le dictateur, le César, le Cromwel; la constitution ou la mort; eux qui, peu de temps auparavant, avaient intention de tout bouleverser, lorsqu'ils firent faire, par le général Jourdan, la motion de déclarer la patrie en danger. Cependant, dans le moment même où ils vont détruire la constitution, tous ces députés sur la motion de M. Grandmaison, l'un d'eux, jurent fidélité à la constitution.

Néanmoins Bonaparte est appelé aux deux conseils; à celui des anciens, il est assez bien reçu; seulement le député Colombel s'écrie, par opposition à ce qu'il voit faire: La constitution de l'an 3!

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« La constitution, reprend Bonaparte, com<<ment pouvez-vous l'invoquer? qu'est-elle «< autre chose,à présent, qu'une ruine?ne l'avez« vous pas foulée aux pieds le 18 fructidor, «le 22 floréal, le 28 prairial. La constitution! « n'est-ce pas en son nom qu'on a organisé << toutes les tyrannies, à qui peut-elle désor<< mais offrir une garantie réelle ? son insuffi«sance n'est-elle pas attestée par les nom« breux outrages qui lui ont été prodigués « par ceux-mêmes qui lui jurent, en ce mo«ment, une fidélité dérisoire »?

Lorsque Bonaparte se présenta au conseil

AN. 8.

A

AN 8, des cinq-cents, il se manifesta un désordre épouvantable; on demanda qu'il fût mis hors de la loi, quelques députés voulurent l'assassiner, on parla d'un grenadier qui reçut dans ses habits un coup de poignard qui lui était destiné. Il fut contraint de sortir sans pouvoir se faire entendre ; on voulut forcer son frère de mettre aux voix le décret qui devait le faire égorger; mais il déposa sur le bureau son costume de député, et déclara qu'il donnait sa démission. Le général, in quiet de son sort, envoya des grenadiers qui le proté-' gèrent et l'entraînèrent hors de la salle;" mais bientôt un roulement de tambours se fait entendre. Le général Murat entre au pas charge, à la tête d'une colonne de grenadiers; il invite les députés à se retirer; tous se précipitent par toutes les issues, sans en excepter les fenêtres, et s'enfuient à toutes jambes, en jetant leur costume de députés qui désormais peut être pour eux un signe de reconnaissance funeste. Ainsi finit le règne du corps législatif de l'an 3, et l'on peut dire par des chansons, car ce fut en chansons que cette catastrophe fut célébrée; on lui prodigua tous les sarcasmes de la malignité.

de

Quant aux trois directeurs, lorsqu'ils voulurent donner des ordres à M. Jubé, com

mandant de leur garde, il leur répondit qu'il n'y a plus de garde. Après uue pareille réponse ils virent bien qu'il n'y avait plus de directoire. L'anéantissement de ce pouvoir terrible, d'une manière aussi ridicule, est une des choses les plus remarquables de la révolution.

MM. Gohier et Barras donnèrent leur démission d'un pouvoir qui avait cessé d'être, et M. Moulin s'esquiva par la porte de son jardin ; on ne sait pas ce qu'il est devenu. On pourrait comparer la réalité de son aventure, à la fable du Dormeur éveillé.

Après l'expulsion des députés jacobins les autres reprirent leur séance; et M. Villetard proposa d'exclure de l'assemblée soixante de ses collègues, pour les excès auxquels ils s'étaient constamment livrés. Cette mesure fut sur-le-champ réglée. Au nombre des exclus, on remarque ceux qui s'étaient élevés avec le plus de violence contre les fructidorisés, tels que MM. Poulain-Grandpré, De moor, Moreau de l'Yonne, et autres.

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Le corps législatif fut suspendu jusqu'au mois de ventôse; deux commissions tenant la place des deux conseils, furent chargées de la rédaction des réglemens d'urgence. Le gouvernement directorial fut aboli, et remplacé par un consulat de trois membres, Bonaparte,

AN 8

AN 8. MM. Syeyes et Roger Ducos. M. Maret fut nommé secrétaire d'état. Toutes ces mesures prises, l'on s'occupa d'une constitution nouvelle. Il fut reconnu enfin, et cet aveu fut fait par les principaux auteurs de la révolution du 18 fructidor, que tout ce qu'on avait fait depuis 1789 était absurde, et qu'il fallait se replacer sur le terrain qu'on avait abandonné à cette époque, pour donner la liberté aux Français; on ne fit plus de sermens, mais on promit fidélité au régime re* présentatif. L'atroce démagogie vit cesser şon empire, et le peuple français rentra insensiblement dans les principes de la so ciabilité. Les proscrits furent rappelés. Les Français commencèrent à retrouver leur patrie; il fut permis aux émigrés de jeter les yeux sur la France, avec l'espoir de pouvoir y rentrer dans un terme prochain; enfin les fidèles purent respirer, et chercher dans le libre exercice de la religion, une consolation de leurs longues infortunes. La révolution du 18 brumaire ne coûta pas une goute de sang; elle fut promulguée à Paris et dans toute la France, au bruit des acclamations univer◄ selles.c

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FIN DU SIXIÈME ET DERNIER VOLUME.

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LIVRE PREMIER, contenant l'historique des événe-
mens pendant les années 1787, 1788 et les pre-
miers mois de 1789, jusqu'à l'ouverture des
états-généraux.

LIVRE DEUXIÈME, Tableau des opérations des états-
généraux, de l'assemblée nationale et de leurs
effets en France, jusqu'à l'entrée du roi à Paris,
après la journée du 14 juillet 1789...

DEUXIÈME VOLUME.

LIVRE PREMIER. Analyse des délibérations de l'as-
semblée nationale; rapports des divers événe-
mens depuis le 14 juillet 1789, jusqu'à l'arrivée
du roi à Paris, après les événemens des 5 et 6
octobre 1789...

...

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I'

93

LIVRE DEUXIÈME. Tableau des opérations de l'as-
semblée nationale; événemens divers depuis la
fixation de la résidence du roi à Paris jusqu'à
l'établissement de la constitution dite de 1792... 202

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