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l'objection, il tire la chose en longueur par ce circuit. L'interprétation paradoxe et inconnue à toute l'antiquité de ce socinien a été approuvée de plusieurs unitaires, parce qu'elle a du rapport avec leurs préjugés, et qu'elle EXPRIME SIMPLEMENT el sans aucune métaphore les paroles du texte; mais il est nécessaire en beaucoup d'endroits, surtout dans l'évangile de saint Jean, de recourir aux métaphores pour trouver le sens véritable et naturel. Ainsi, sans nécessité il abandonne au socinien la simplicité de la lettre, pendant que le texte même est évidemment pour les catholiques. Il se réserve, comme pressé par la lettre, à se sauver par la métaphore. Son recours à l'antiquité dans cette occasion aide encore à faire penser qu'il n'a que cette ressource, et il ne travaille qu'à rendre l'erreur invincible du côté de l'Ecriture.

CHAPITRE XI.

Foiblesse affectée de M. Simon contre le blaspheme du socinien Eniedin: la tradition toujours alléguée pour affoiblir l'Ecriture.

C'EST encore ce qui lui fait remarquer ce discours de Georges Eniedin (1), qui reproche aux catholiques, que n'y ayant rien de bien formel dans l'Ecriture, d'où l'on puisse prouver clairement la divinité de Jésus-Christ, ils ont tort, ou pour mieux traduire, ils n'ont ni prudence ni pudeur d'appuyer un mystère de cette importance sur des conjectures

(1) P. 865.

foibles et sur des passages très-obscurs. Est-il permis de rapporter ces paroles, et de les laisser sans réplique? Quoi, nous n'avons que des conjectures, et encore des conjectures foibles et des passages obscurs? Peut-on s'empêcher de démontrer à ce téméraire socinien, qu'il n'y a rien de plus évident que les passages que nous produisons, ni rien de plus forcé et de plus absurde que les détours qu'on y donne dans sa secte? Mais M. Simon aime mieux faire cette réponse embarrassée (1): Sans qu'il soit besoin de venir au détail de cette objection (vous voyez déjà comme il fuit), je remarquerai seulement, poursuit-il, qu'elle est (cette objection d'Eniedin) beaucoup plus forte contre les protestans que contre les catholiques, qui ont associé à l'Ecriture des traditions fondées sur de bons actes. Quelle mollesse! Que la cause de l'Eglise catholique est ravilie dans la bouche de notre critique! Il n'ose dire nettement et absolument à un socinien, que son objection est foible, qu'elle est nulle, qu'elle est sans force il dit seulement qu'elle a plus de force contre les protestans que contre les catholiques; et elle en auroit autant contre les derniers que contre les autres, sans le secours de la tradition. C'est la méthode perpétuelle de notre auteur, et nous voyons que toujours et de dessein prémédité il allègue la tradition pour montrer que l'Ecriture ne peut rien. Les preuves de l'Ecriture tombent ici; la tradition tombe ailleurs; tout l'édifice est ébranlé, et ce malheureux critique n'y veut pas laisser pierre sur pierre.

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(1) P. 865 et 866.

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CHAPITRE XII.

Affectation de rapporter le ridicule que Volzogue, socinien, donne à l'enfer.

Je suis encore contraint d'observer que les objections qu'il affecte le plus de rapporter sont celles où les sociniens ont répondu je ne sais quoi, qui donne un air fabuleux, et par conséquent ridicule à la doctrine catholique. Telle est celle-ci de Volzogue: Si on l'en croit, dit M. Simon (1), tout ce qu'on dit de l'enfer est une fable, qui a passé des Grecs aux Juifs, et ensuite aux Pères de l'Eglise. Qu'est-ce que cela faisoit à la critique? On sait assez que les sociniens rejettent l'éternité des peines; et si M. Simon ne le vouloit pas laisser ignorer à ceux qu'il instruit si bien de cette religion, il pouvoit dire leur sentiment en termes plus simples; mais de choisir un passage où l'on affecte de donner l'idée d'aller chercher dans la fable l'origine des enfers, pour insinuer tout le ridicule qu'on y peut trouver, et représenter les saints Pères dès l'origine du christianisme, comme de débiles cerveaux, qui ont reçu des mains des poètes et de celles des Juifs un conte sans fondement, c'est vouloir gratuitement répéter un blasphême contre le précepte du sage: Ne répétez point une parole malicieuse : NE ITERES VERBUM NEQUAM (2). Ne le faites pas sans nécessité, ne le faites pas sans y joindre une solide réfutation: autrement la répétition de (1) P. 860. — (2) Eccles. xix. 7.

cette

cette parole maligne, comme celle des médisans, sera un moyen de l'insinuer et un art de la répandre. Il ne suffit pas, après l'avoir répétée, de dire en passant et très-froidement que l'Evangile y est contraire, ce que personne n'ignore, et que vous n'appuyez d'aucune preuve. Ce n'est pas ainsi qu'il faut rejeter les idées qui flattent les sens; il faut ou s'en taire ou les foudroyer.

CHAPITRE XIII.

La méthode de notre auteur à rapporter les blasphemes des hérétiques est contraire à l'Ecriture et à la pratique des saints.

Pour moi, je ne comprends pas comment M. Simon a osé répéter tant d'impiétés et tant de blasphêmes sans aucune nécessité, le plus souvent sans réfutation, et toujours, lorsqu'il les réfute, en le faisant très-foiblement et par manière d'acquit. Dieu commandoit de lapider le blasphémateur hors du camp (1), pour en abolir la mémoire et celle de ses blasphêmes. Lorsqu'on accusa Naboth d'avoir maudit Dieu et le Roi (2), on n'osa point répéter le blasphême qu'on lui imputoit, et on en changea, selon la phrase hébraïque, le terme de malédiction, en l'exprimant par son contraire. Saint Cyrille d'Alexandrie, écrivant contre Julien l'Apostat, déclare qu'il en rapporte tout l'écrit pour le réfuter, à la réserve de ses blasphêmes contre Jésus-Christ. Ainsi l'esprit de ce Père étoit que nous eussions une réponse à (1) Levit. XXIV. 14. — (2) III. Reg. xxi. 10.

BOSSUET. V.

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cet apostat, sans en avoir les blasphêmes, et l'esprit de M. Simon est que nous ayons les blasphêmes, sans réfutation.

Pour tout remède contre les écrits des sociniens, il dit à la fin (1), que s'il n'étoit pas obligé de renfermer dans un seul volume ce qu'il a à dire sur leur sujet, il auroit examiné plus à fond les raisons sur lesquelles ils appuient leurs nouveautés, ce qu'on pourra, dit-il, exécuter dans une autre occasion. En attendant, nous aurons tout le poison de la secte, dans l'espérance que M. Simon pourra, dans la suite, non point réfuter ni convaincre, car ce seroit se trop déclarer, mais examiner plus à fond les raisons dont ils soutiennent leurs nouveautés : ce qui leur donne autant d'espérance qu'aux catholiques. Le terme de nouveautés dont on qualifie leurs opinions ne fait rien, puisqu'on en dit bien autant de celles de saint Augustin, qu'on ne prétend pas pour cela proposer comme condamnables, et nous avons tout sujet de craindre que si ce qu'a dit M. Simon est pernicieux, ce qu'il promet ne le soit encore davantage.

CHAPITRE XIV.

Tout l'air du livre de M. Simon inspire le libertinage et le mépris de la théologie, qu'il affecte partout d'opposer à la simplicité de l'Ecriture.

OUTRE les passages particuliers qui appuient ouvertement les sociniens, tout l'air du livre leur est

(1) P. 872.

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