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allèguent pour preuve que leur bréviaire ou leur

missel.

CHAPITRE XII.

Prières des liturgies grecques.

PEUT-ÊTRE que cet argument si simple et si fort leur paroîtra un peu plus savant, quand on leur dira que l'Eglise grecque prie de même que la latine, et demande dans sa liturgie en cent endroits, non pas un simple pouvoir, mais le vouloir et le faire actuel et effectif.

C'est ce qu'on voit dans la liturgie de l'Eglise de Jérusalem sous le nom de saint Jacques, frère de notre Seigneur, lorsqu'on dit à Dieu : Accomplissez en chacun de nous ce qui nous est utile : ameneznous à la perfection, rendez-nous dignes de vos mystères : tournez à vous toutes nos pensées : que nous vivions sans péché : que nous persévérions dans la foi: prions Dieu que nous soyons vigilans, actifs et prompts à faire le bien, etc. (1) Dans la liturgie de l'Eglise d'Alexandrie sous le nom de l'évangéliste saint Marc, ou en tout cas bien certainement de quelque Eglise d'Egypte, puisqu'on y parle du Nil et de ses inondations, on trouve les mêmes demandes à toutes les pages (2). Dans celle de saint Basile, qui est en usage dans toute la Grèce, dans la Syrie, et dans tout l'Orient, je remarquerai en particulier cette prière: Rendez-nous dignes de

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votre ministère. Car c'est vous qui opérez tout en tous : conservez les bons dans le bien : faites que les méchans deviennent bons par votre bonté : ramenez les errans, unissez-les à votre Eglise : faites cesser les schismes et les hérésies par la vertu de votre Saint-Esprit, et accordez-nous la grâce de louer d'une même bouche et d'un même cœur votre saint et glorieux nom (1),

La même messe de saint Basile nous fournit encore cette admirable prière, qui est rapportée il y a onze ou douze cents ans par Pierre, diacre (2), en ces termes: Saint Basile de Césarée, dans l'oraison du saint autel, qui est celle de presque tout l'Orient, dit entre autres choses : Seigneur Dieu des vertus, accordez-nous votre protection; faites bons ceux qui sont mauvais, MALOS BONOS FACITO : conservez ceux qui sont bons dans leur bonté, BONÓS IN BONITATE CONSERVA : car vous pouvez tout, et il n'y a personne qui vous contredise: vous sauvez quand il vous plaít, et nul ne résiste à votre volonté, OMNIA ENIM POTES, ET NON EST QUI CONTRADICAT TIBI CUM ENIM VOLUERIS SALVAS, ET NULLUS RESISTIT VOLUNTATI TUÆ.

En ce peu de mots est comprise toute l'efficace et toute l'économie de la grâce. Saint Augustin en réduit tout l'effet à ces deux choses si expressément marquées dans cette prière : Faites que les mauvais deviennent bons, ce qui comprend la grâce de la conversion : conservez les bons dans leur bonté, ce qui enferme la persévérance. Saint Augustin n'exmieux la certitude infaillible de ces deux pose pas effets, qu'elle est exposée dans ces paroles: Car

(1) P. 46, 54, 55. — (2) De Incarn. et Gr. ad Fulg. c. vi.

vous pouvez tout : nul ne vous résiste, ni ne s'oppose à vos volontés: quand il vous plaît, vous sauvez. Ces derniers mots nous expliquent les momens de Dieu, qui sauve qui il lui plaît, toutes les fois qu'il lui plaît; ce qui tient tous les temps comme toutes les personnes en sa puissance. C'est la même chose que disoit saint Ambroise: Dieu appelle qui il lui plaít: il fait religieux qui il veut : il inspire la dévotion à ceux qui en étoient les plus éloignés. L'Orient et l'Occident parlent le même langage, et toute l'Eglise attribue à une grâce toute-puissante le commencement avec toute la suite de la piété.

CHAPITRE XIII.

Prières de la liturgie attribuée à saint Chrysostome: ce qu'il rapporte lui-même de la liturgie de son temps, et les réflexions qu'il fait dessus.

DANS la liturgie attribuée à saint Chrysostôme, mais plus ancienne que lui dans son fond, du moins en beaucoup d'endroits, comme il paroît par luimême, on fait, les mêmes prières, et par la bouche du diacre les mêmes exhortations que nous avons vues; ce qui se pratique aussi unanimement dans les autres liturgies. On demande donc en celle-ci, que Dieu nous donne une vie pure de péché, que nous passions le reste de notre vie dans la pénitence (1); et sur les catéchumènes en particulier : Fideles, dit le diacre (2), prions pour eux, que Dieu leur révèle son évangile, qu'il les amène à (1) P. 62, etc. 76, 86 et 87, — (a) P. 71.

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L'Eglise. Ce n'est pas pour dire qu'ils n'y viendront pas par leur libre arbitre; mais on prie Dieu de s'en rendre maître, de les conserver, de les défendre, de les garder par sa gráce. Encore en un autre endroit (1); Prions que Dieu les affermisse et les confirme dans le bien. Quel bien ne demande-t-on pas pour eux? Eclairez-les par la foi, fortifiez-les par l'espérance, perfectionnez-les par la charité. C'est toujours l'effet qu'on demande, quoiqu'on sache que cet effet dépend du libre arbitre; parce qu'on sait que Dieu le fléchit. On dit, dans le même esprit pour les fidèles (2) : Purifiez nos lèvres qui vous louent; retenez nos mains; faites qu'elles s'abstiennent des mauvaises œuvres, et qu'elles fassent les bonnes; on ne veut pas que Dieu prenne nos mains par force; mais qu'il règne sur le libre arbitre, au pouvoir de qui il les a mises. Nous en trouverons davantage sur le sujet des catéchumènes dans saint Chrysostôme, et on sera bien aise d'en, tendre ce qu'il nous rapporte des prières de l'Eglise dans la seconde homélie, sur la seconde épître aux Corinthiens, avec les réflexions qu'il fait dessus.

On y trouvera d'abord les mêmes demandes que nous avons déjà vues dans la messe attribuée à ce Père, mais on les y trouvera bien plus étendues et plus inculquées dans cette langue prière que sainį Chrysostôme récite. Les Grecs comme les Latins dans la suite des temps, et quand le zèle s'est ral lenti, ont accourci leur office; mais ils n'ont pas pour cela changé leur doctrine, ni le fond de leurs prières.

(1) Lit. Præf. p. 95.) P. 97.pwd how

Le diacre disoit donc ainsi : Prions pour les catéchumènes. C'étoit là cette exhortation dont saint Augustin nous a parlé, qui précédoit la prière; c'est ce célèbre OREMUS: prions, qui se répète encore si souvent parmi nous. Que cette exhortation se fasse ou par les prêtres, ou par les diacres, il n'importe, et l'intention de la prière qui demande à Dieu, non pas un simple pouvoir, mais avec le pouvoir, l'effet et l'actuelle conversion, y est toujours également marquée. Car voici une des demandes (1): Prions que Dieu sème sa crainte dans leurs cœurs (dans le cœur des catéchumènes); et voici la réflexion de saint Chrysostôme : Ce ne seroit pas assez que Dieu semat seulement, si cette semence étoit de celles qu'on jette sur le chemin ou sur des rochers, où elle ne prít pas : ce n'est pas aussi cela que nous demandons pour les catéchumènes, mais qu'il se fasse en eux des sillons par lesquels cette semence céleste entre bien avant; en sorte que renouvelés dans le fond de l'ame, non-seulement ils la reçoivent, mais encore qu'ils la retiennent avec soin; voilà, dit-il, ce que nous demandons. Or, cela n'est autre chose que demander le consentement intime et profond, qu'on demande comme l'effet de la grâce, selon la remarque de saint Chrysostôme: ce qui aussi, poursuit-il, se confirme par la demande suivante: prions Dicu qu'il affermisse la foi dans leurs cœurs ; c'està-dire, dit saint Chrysostôme, qu'elle n'y demeure pas seulement, mais qu'elle y jette de profondes racines, ce qu'on ne fait qu'en y consentant et en la recevant de tout son cœur. C'est donc, encore un (1) Hom. 11. in II. ad Cor. p. 517.

coup,

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