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unir étroitement à vous dans ce Sacrement, selon la belle parole que vous aviez dite, au jour de votre promesse : « Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang, demeure en moi, et moi en lui '. » Mais, en vous donnant, vous vous cachez. Ne faut-il pas, en effet, exercer pleinement notre foi? Déjà votre divinité, à mon Sauveur, était comme enveloppée d'un nuage, pendant votre vie mortelle ; et Thomas qui la publiait en s'écriant « Mon Seigneur et mon Dieu,» Thomas la croyait sans la voir, et vous l'avez déclaré bienheureux d'avoir eu cette foi. Je suis encore plus heureux que lui, sous ce rapport, puisqu'en m'approchant de votre autel, je ne vois pas et je ne touche pas, comme cet apôtre, le corps que vous avez pris pour mon salut; et cependant je l'y crois présent sur votre parole, et je vous crie avec lui : « Vous êtes mon Seigneur et mon Dieu.»

Oui, vous y êtes. Mes yeux, sans doute, ne le disent pas; mais ils ne sont point chargés de le dire. Ils me rapportent exactement ce qui est de leur ressort, la couleur et la forme des saintes espèces. Quant à la substance qu'elles recouvrent, et qui n'est plus le pain, mais votre corps, puisque vous l'avez dit, c'est ma foi qui

1 Joan. c. 6 = 2 Dominus meus et Deus meus.

est chargée de m'en instruire; cette foi qui vient par « l'ouïe » et qui suffit, elle seule, pour me rassurer pleinement sur la vérité de votre présence 2.

Mon Dieu, mon Dieu, c'est parler trop longtemps; je devrais être à genoux, pour vous adorer dans le silence de l'admiration et de la reconnaissance.

SECONDE ÉLÉVATION

Continuation du cénacle dans nos églises.

Frappé de la simplicité de vos paroles et de la grandeur de votre puissance, j'ai dû croire, ô mon Jésus, que vous vous êtes donné comme aliment à vos apôtres, puisque votre Evangile en fait soi. Mais n'est-ce point pour cette seule circonstance que vous aviez réservé ce bienfait ? ce grand pouvoir, qui ne m'étonne pas dans un Dieu, ne sera-t-il point peut-être restreint à vous seul? Ecoutons jusqu'au bout les divins oracles :

3

« Faites ceci en mémoire de moi ; » c'est-à

1 Fides ex auditu. = 2 Auditu solo tutò creditur. = 3 Luc. c. 22, 19, et I Cor. c. 11, & 24.

dire ce que je viens de faire. Or qu'avez-vous fait, mon Sauveur? Vous avez pris du pain, vous l'avez béni, rompu, et, après l'avoir consacré, c'est-à-dire en avoir fait votre corps et votre sang, vous l'avez offert pour nous à Dieu votre père, comme il devait l'être bientôt sur la croix, et enfin vous l'avez distribué à vos disciples, qui l'ont reçu, comme une céleste nourriture. Voilà ce que vous avez fait eh! bien, c'est « ceci » que vous nous dites de faire; et l'apôtre saint Paul, complétant votre ordre, nous avertit de le faire jusqu'a ce que « vous veniez1» pour juger le monde, c'est-à-dire jusqu'à la fin des temps.

:

Mais puisque vous dites à vos apôtres de <«< faire ceci,» sans aucun doute vous leur en donnez le pouvoir; car il serait étrange ( j'adoucis mes expressions par respect) il serait étrange d'ordonner une chose à quelqu'un en le laissant privé des moyens indispensables pour la faire. Evidemment cela ne serait pas sage; et vous êtes, mon Dieu, la sagesse même. Si donc, vous avez dit «< Faites ceci, » comme l'Evangile nous l'atteste, je dois nécessairement conclure que, par un effet de votre puissance divine, vous avez donné à vos prêtres le pouvoir de con1 I Cor. c. 11, † 26.

sacrer et d'offrir comme vous l'aviez fait vousmême; rien ne pouvant vous empêcher de leur communiquer ce grand pouvoir, comme vous leur aviez donné, pour certaines occasions, le pouvoir non moins étonnant de faire des miracles'.

Il est vrai que vous ne dites point de paroles qui expriment la concession de ce pouvoir; mais, puisque vous le mettez, pour ainsi dire, en action, dans la personne de vos apôtres, puis-je ne pas reconnaître qu'il se trouve en eux ?

Quand il s'est agi du sacrement de Pénitence, vous avez dit : « Les péchés seront remis à ceux à qui vous les remettrez 2. » Cela me suffit; je n'ai pas besoin de remonter plus haut, pour chercher une page où il soit écrit en toutes lettres : « Je vous donne le pouvoir de remettre les péchés. » Il est bien évident, pour moi, que vous le leur avez donné, puisque vous me renvoyez à eux afin d'en obtenir mon pardon. M'eussiez vous obligé à cette démarche, s'ils n'avaient pas eu le pouvoir de me remettre mes péchés?

C'est absolument la même chose quand il s'agit de l'Eucharistie. Vous dites à vos apôtres.

1 Marc. c. 16, † 17 = 2 Joan. c. 20, † 23.

« Faites ceci; » ils peuvent donc le faire; la conséquence est rigoureuse.

Ainsi, mon Dieu, voilà le cénacle dans nos églises. Tout ce qui s'est fait là, se fait encore ici. Quel bonheur! puisse ma foi, ma piété, la convenance parfaite de mon intérieur et de mon extérieur, rappeler et reproduire exactement la conduite de vos disciples, de ceux dont le cœur était selon votre cœur, et qui ont donné à tous les siècles chrétiens le modèle de la manière dont il faut recevoir le grand bienfait de la communion. En les étudiant de près et avec soin, je ne trouve rien en eux qui sente la négligence, ni rien non plus qui accuse l'affectation. Ils obéissent à vos moindres ordres; ils écoutent avec une religieuse attention toutes vos paroles; ils vous répondent et vous interrogent de la manière la plus respectueuse ; ils font avec vous la préparation et l'action de graces3. Mon Dieu, quel beau modèle! ah! ne permettez pas que j'aie jamais le malheur de me mettre en désaccord avec eux, et de défigurer aujourd'hui, comme Judas le fit alors, ce cénacle auguste, qui ne doit pas être moins saint pour moi que pour vos apôtres. Remplissez-moi, Seigneur, de cet esprit de religion, qui était en

1

1 Ev. Passim. = 2 Luc. c. 22, 23 = 3 Joan. c. 13, Ỳ 1.

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