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tiques; un prince sans armée et sans finances; mais fort par le courage que donne le sentiment de ne pas être sorti de la ligne de ses devoirs, osa résister à la volonté du tyran du monde. Le souverain-pontife consentit à fermer ses ports aux ennemis de la France, mais il refusa constamment d'entrer dans une ligue offensive et défensive avec les royaumes d'Italie et de Naples. Il déclara une alliance de ce genre contraire à sa conscience, parce qu'en la contractant, il ne se chargeroit pas seulement de l'obligation d'une simple défense, mais qu'il s'engageroit même à attaquer. «Ainsi, dit-il, le serviteur du Dieu de la paix seroit placé dans un état de guerre permanente; le père s'élèveroit contre ses enfans, et le chef de la religion s'exposeroit au danger de voir rompre ses rapports spirituels avec les puissances envers le quelles la ligue agiroit hostilement 1. »

Pour punir Pie VII de son opposition, Civita-Vecchia et Ancone furent occupées, et tous les gouverneurs de la Marche, qui firent quelque résistance, furent arrêtés. Le 2 février 1808, le général Miollis prit possession de Rome. Ici commence pour le souverain-pontife une succession de vexations et d'outrages qui ne purent ébranler sa fermeté. Dans une note que M. de Champagny remit, le 3 avril 1808, au

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Voy. Note du cardinal Gabrielli du 19 avril 18c8, dans mon Recueil de pièces officielles, T. I, p. 148.

légat apostolique à Paris, on lit les maximes. suivantes qui étoient la base du droit public de Buonaparte: «< Si le Saint-Père adhère à la proposition de la ligue offensive et défensive, tout est terminé; s'il s'y refuse, il annonce par cette détermination qu'il ne veut aucun arrangement, aucune paix avec l'empereur, et qu'il lui déclare la guerre. Le premier résultat de la guerre est la conquête, et le premier résultat de la conquête est le changement de gouvernement; car si l'empereur est forcé d'entrer en guerre avec Rome, ne l'est-il pas encore d'en faire la conquête, d'en changer le gouvernement, d'en établir un autre qui fasse cause commune avec les royaumes d'Italie et de Naples contre les ennemis communs? Quelle autre garantie auroit-il de la tranquillité et de la sûreté de l'Italie, si les deux royaumes étoient séparés par un état où leurs ennemis continueroient d'avoir une retraite assurée? »

Lorsque cette note fut remise au cardinal Caprara Buonaparte avoit signé un décret portant la date de Saint-Cloud, le 2 avril 1808, et qui dit que, considérant que le souverain temporel de Rome s'est constamment refusé à faire la guerre aux Anglois et à se joindre aux rois d'Italie et de Naples pour la défense de la presqu'île d'Italie ; que l'intérêt de ces états et de leurs armées exige que leur communication ne soit plus interrompue par une puissance ennemie; considérant « que Charlemagne, notre

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Traité d'alliance, de Palerme du 30 mai 1808.

glorieux prédécesseur, >> a donné les pays qui

forment l'état de l'église pour le bien de la chrétienté, mais non pour l'avantage « des ennemis de notre sainte religion», Buonaparte réunit au royaume d'Italie les provinces d'Urbino, Ancone, Macerata et Camerino.

On se borna pour le moment à punir Pie VII par la perte des meilleures provinces que la paix de Foligno lui avoit laissées; plus tard nous le verrons, sans aucune provocation de sa part, dépouillé du reste de ses états et traîné en captivité.

Deux alliés restoient aux Anglois, l'un dans le midi et l'autre dans le nord: Ferdinand IV et Gustave IV Adolphe. Le premier comptoit toujours sur leur assistance pour reconquérir le royaume de Naples. Son ministre des affaires étrangères, don Thomas de Somma, marquis de Circello, conclut, le 30 mars 1808, à Palerme, un traité de subside avec M. Drummond, ministre plénipotentiaire de la Grande-Bretagne. En voici les principales conditions:

Les deux parties se prêteront, pendant la présente guerre avec la France, toute aide et toute assistance, dans la proportion de leurs puissances respectives, et tâcheront, par un accord commun, d'empêcher tout ce qui peut leur causer du dommage. Art. 2.

Le roi des Deux-Siciles s'engage à accorder aux troupes britanniques qui qui se trouvent dans les forteresses de la Sicile, ainsi qu'à tous vaist

seaux de guerre anglois, une exemption de droits de tout ce dont les escadres britanniques dans la mer Méditerranée, et des troupes de cette nation, ont besoin, et que le pays peut fournir en provisions et munitions de guerre et de mer. Art. 3.

L'art. 4 accorde la même immunité aux vivres et munitions de guerre dont les vaisseaux de guerre anglois à Malte pourroient avoir besoin.

Le roi des Deux-Siciles ne permettra pas que les ennemis de la Grande-Bretagne conduisent dans ses ports un vaisseau anglois dont ils se seront emparés. Art. 5.

aux

Les ports du roi des Deux-Siciles seront ouverts, pendant la présente guerre, escadres angloises et à tout navire appartenant à des sujets anglois. Art. 6.

L'Angleterre s'engage à défendre, pendant cette guerre, les forteresses de Messine et d'Auguste (Agosta), et pour cela à y entretenir à ses frais un corps de 10,000 hommes, qui sera renforcé s'il étoit nécessaire. Le roi des DeuxSiciles leur fournira le logement. Art. 7.

A dater du 10 septembre 1805, jour où les troupes russes et angloises ont débarqué sur le territoire de Naples, la Grande-Bretagne payera au roi des Deux-Siciles, pendant la durée de la guerre actuelle, un subside annuel de 300,000 liv. sterl. à employer au service des forces de terre et de mer. « Tous les trois mois,

Paix de Paris

La Suède accède

au système continental.

on soumettra au gouvernement britannique le compte de l'emploi que S. M. Sicilienne aura fait des subsides que la Grande-Bretagne lui a payés. » Art. 8.

Il sera prochainement conclu un traité de commerce également avantageux aux deux états. Art. 9.

«S. M. Sicilienne s'engage à ne pas faire de paix séparée avec la France, sans l'Angleterre ; et S. M. Britannique, de son côté, s'engage à ne pas conclure de paix avec la France sans y comprendre l'intérêt de S. M. Sicilienne.» Art. 101.

ou

Gustave-Adolphe avoit payé, en 1808, son du 6 janvier 1810. attachement à la cause de l'Angleterre plutôt sa haine pour Buonaparte, de la perte de la Finlande: sa constance lui coûta, en 1809, le trône de Suède. Son successeur lutta encore, pendant quelque temps, contre la supériorité de la Russie. Forcé à signer, le 17 septembre 1809, la paix de Friedrichshamn2, et d'accéder au système continental, il avoit réservé à ses sujets l'importation du sel, qui manque à la Suède, et celle des productions coloniales que l'usage à rendues nécessaires, surtout aux nations qui n'ont pas de vin; mais Buonaparte, qui ne comptoit pour rien les

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Voy. MARTENS, Rec., T. XII, p. 31.

2 L'histoire de cette paix se trouvera dans la seconde partie de cet ouvrage.

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