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14. Mais si le cultivateur est libre de cultiver son champ comme il l'entend, il se trouve gêné lorsqu'il s'agit de vendre des blés encore en vert; au nom d'un principe d'intérêt public on lui conteste le droit de vendre avant la coupe et la maturité; d'un autre côté, on défend au créancier de saisir avant les six semaines qui précèdent cette même époque.

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15. Enfin la loi, dans le but de protéger l'agriculture, ne regarde pas comme commerçant celui qui ne fait que vendre le produit de sa terre. La jurisprudence, conforme à l'esprit de la loi, étend même ce principe à des actes qui se rapprochent essentiellement du commerce à la condition que la spéculation ne soit pas le principal mobile du contractant et que ces actes puissent, être regardés comme une conséquence de l'exploitation même.

16. Mouture des grains. La mouture, c'est-à-dire la transformation du grain en farine, n'est soumise à aucune règle spéciale; un décret de la période révolutionnaire avait bien fixé un taux de blutage, mais l'administration a compris qu'il valait mieux laisser toute latitude au meunier, et aujourd'hui la mouture est complétement libre (1).

17. Elle se fait dans des moulins à eau (de pied ferme ou à nef), à vent et à vapeur. Pour chacun de ces moulins et principalement pour les premiers, existent de nombreuses règles administratives fixant les modes d'établissement, d'entretien, de modification, de démolition, etc. De son côté, la jurisprudence a maintes fois tranché la question de savoir si la propriété des moulins comprend

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(1) Voir seulement pour le cas de réexportation après mouture,

celle des canaux de conduite et de leurs francs-bords. 18. Enfin, arrivent les règles relatives aux meuniers; l'exercice de leur profession ne les rend pas commerçants, aussi ne le sont-ils pas lorsqu'ils ne font que moudre à façon; mais ils le deviennent, s'ils achètent des grains pour les moudre et les revendre en farines.

19. Commerce des grains. Le commerce des grains est loin d'être aussi libre que la production et la mouture; il est au contraire réglementé de la manière la plus complète et la plus minutieuse.

20. Ainsi, le trafic en est interdit à certaines personnes qui pourraient abuser de leur position pour exercer une influence dangereuse sur le cours des céréales; ce sont notamment les commandants des divisions militaires, les préfets, les sous-préfets, les courtiers de marchandises, et à Paris plus spécialement les facteurs à la halle aux blés ainsi que le directeur, le caissier et autres employés de la caisse de la boulangerie.

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21, Le commerce des grains est exercé par les blatiers qui achètent et revendent les céréales en grains; les marchands en gros de grains ou de farines et les marchands de farines en détail, qui ne sont plus aujourd'hui soumis les uns et les autres qu'à la palente spéciale fixée pour chacun d'eux.

22. En principe le commerce des céréales doit comme tout autre avoir la faculté de s'exercer partout; cependant nous avons déjà vu que l'on reconnaît aux maires la faculté de défendre la vente hors des marchés : il n'est pas besoin de dire qu'ils usent largement de leurs droits.

23. Le prix du blé est aujourd'hui librement débattu entre le vendeur et l'acheteur; le maximum est, il faut l'espérer, pour jamais aboli. Le taux des ventes faites à

chaque marché est constaté et forme la mercuriale.

24. Le commerce des céréales, le plus important assurément à tous les points de vue, donne lieu à plusieurs natures de marchés qui sont les marchés au comptant, les marchés à terme et les marchés en filière.

Les marchés au comptant sont trop simples pour donner lieu à de nombreuses contestations.

Les marchés à terme sont plus compliqués. Ils peuvent être faits livrables à une ou plusieurs époques déterminées, ou bien encore à l'arrivée d'un navire que le vendeur désigne soit immédiatement, soit en un temps fixé entre les parties. Cette nature de marchés assez fréquente dans le commerce des céréales donne lieu à de très-nombreuses contestations, et cache quelquefois le jeu ou le pari. De là le devoir pour les tribunaux de distinguer les marchés sérieux des marchés fictifs, devoir d'autant plus difficile que le jeu prend plus de soin à se cacher.

Les marchés en filière sont les marchés soit au comptant, soit à terme qui passent de main en main et forment une série d'opérations appelée filière. Dans ces marchés l'exécution a lieu le plus ordinairement entre le premier vendeur et le dernier acheteur.

25. A côté de ces règles nombreuses relatives au commerce de grains se place la protection qui lui est accordée par la loi.

26. Ainsi, le pillage des grains qui peut effrayer le commerce et arrêter les transactions est sévèrement réprimé par la loi pénale; celle-ci rend même la commune responsable et donne par ce moyen une puissante garantie au propriétaire dépossédé.

27. Le législateur frappe également les coupables

manœuvres de ceux qui, dans un but quelconque, font hausser ou baisser le prix des céréales.

28. Enfin il protége le commerce des grains comme tous les autres, contre les abus auxquels se livrent les négociants déshonnêtes et punit la tromperie tant sur la quantité que sur la nature et la qualité des grains ou farines vendus.

Telles sont en quelques mots les règles générales applicables à tous les commerces de grains.

29. Le commerce des grains se divise en commerce intérieur et commerce extérieur, soumis chacun à des règles spéciales et complétement distinctes.

50. Le commerce intérieur comprend la circulation ainsi que les achats et ventes.

31. La circulation est en principe complétement libre dans l'intérieur de la France continentale et la loi punit même sévèrement toute atteinte portée à la liberté de cette circulation.

Lorsqu'elle a lieu par chemin de fer, le maximum du prix de transport est fixé aux compagnies par le gouvernement. Lorsqu'elle a lieu par eau, elle est en principe soumise aux droits de navigation déterminés d'ailleurs pour toute espèce de commerce.

32. Mais à ce principe de la liberté de la circulation à l'intérieur de nombreuses restrictions sont apportées en ce qui concerne le rayon frontière.

Ainsi, lorsque les céréales sont présentées à un bureau de douane, il faut de la part de celui qui les conduit une déclaration exacte des quantités, qualités et poids; la douane délivre sur cette déclaration un passavant sans

lequel la circulation dans le rayon frontière ne pourrait avoir lieu.

Certaines facilités sont seulement accordées lorsque les grains transportés au moulin ou les farines en revenant n'excèdent pas soixante kilogrammes, ou lorsque produites sur le sol du rayon frontière les céréales n'en sortent pas; mais il faut dans ce dernier cas un certificat d'origine constatant que les grains ont été récoltés dans le rayon frontière.

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A l'égard des denrées, dont l'exportation serait défendue, les règles à observer seraient à peu près les mêmes, mais fixées par une loi spéciale, elles devraient être plus rigoureusement exécutées, et en cas de contravention la peine serait plus sévère. Il est du reste à observer que dans ce cas, les entrepôts de grains dans le rayon frontière seraient prohibés.

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35. Le transport par mer des céréales, entre deux ports de France, est soumis à de nombreuses formalités, et cela se comprend, car il y a véritablement dans le cabotage une exportation et une importation.

Le cabotage, qui est, en principe, laissé exclusivement aux bâtiments français, peut, malgré les termes de la loi, être aujourd'hui en pratique exercé sans permission administrative, mais ceux qui font ainsi le transport des grains doivent fournir un cautionnement, c'est-à-dire ou un dépôten argent ou l'engagement d'une personne reconnue solvable. Les lois exigent encore un acquit-à-caution, qui doit être rapporté dans un délai déterminé selon la longueur du voyage. Enfin, des formalités spéciales sont, déterminées à l'arrivée du navire pour le déchargement.

Certaines facilités sont seulement accordées par l'administration pour le cas où les grains, n'étant pas vendus

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