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de la Cour de cassation et des auteurs qui soutiennent le système opposé.

La jurisprudence constante des tribunaux, qui jusqu'en 1853, était en faveur de la validité, n'avait jamais soulevé la moindre contestation, et avait, selon nous, sainement jugé la question. En effet, on comprend difficilement cette résistance, toute récente, de la Cour suprême.

En fait, il faut mettre de côté pour la discussion, l'argument tiré de la protection que l'on entend accorder à l'agriculture. La saisie-brandon, faite avant les six semaines peut être un embarras pour le cultivateur, mais elle est assurément, moins préjudiciable que la prohibition de vendre les récoltes pendantes par racines, et cependant il est à remarquer que cette prohibition est formellement reconnue par les auteurs, qui demandent la nullité de la saisie prématurée. Que l'on rende au cultivateur la liberté complète de vendre ses blés encore sur pied, et il pourra supporter sans dommage, la gêne résultant d'une saisie faite avant le terme fixé par l'art. 626.

En droit, la question nous semble résolue d'avance par le législateur lui-même, dans la discussion de l'art. 626 du Code, discussion dont on s'occupe en général trop peu.

Certains auteurs ne veulent interroger dans cette question que le droit pur, c'est évidemment un tort, car pour soutenir leur opinion à ce point de vue, ils sont obligés de fausser le sens de la loi. Ainsi, M. Chauveau dit, en traitant cette question : « Sans doute le législateur a dû << être mû par la considération de ne pas laisser aug<< menter les frais de garde, au caprice des créanciers; <<< mais un motif plus puissant que cette considération se«< condaire, a dicté, selon nous, la disposition qu'on vou

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<«< drait éluder; il se puise, sur le principe même de <«< l'art. 520 du C. Nap. qui déclare immeubles, les fruits << et récoltes pendants par racines. Que ce soit là une << fiction légale, peu importe, la règle générale qu'elle « crée, n'en subsiste pas moins, et à défaut d'une déro<«<gation expresse de la part du législateur même, on ne << peut y contrevenir. » Parler ainsi, c'est véritablement méconnaître l'intention des rédacteurs de la loi, quoique le sens de l'art. 626 ait été très-nettement défini devant le Conseil d'État. Le ministre de la justice disait à ce sujet : <<< Le tribunal arbitrera, si la saisie a été faite, six semaines <<< avant la récolte, et s'il pense qu'elle a été prématurée, il << déchargera le saisi des frais de garde, pour tout le << temps qui excédera les six semaines, sans néanmoins « déclarer la saisie nulle. » Dans la pensée de la section du Tribunat « l'intention de l'article a été d'empêcher «< que les frais de garde ne fussent inutilement augmen« tés. » Enfin, l'orateur du Tribunat faisait ainsi connaître le danger qu'il s'agissait de conjurer. « Il ne << fallait pas, disait-il, autoriser la vente avant le moment <«< où l'on pourrait fixer approximativement la valeur des << fruits saisis. » C'était bien là, en effet, ce qu'il fallait à bon droit éviter; car s'il est juste de permettre au cultivateur de vendre à son gré le produit de sa terre, il n'est pas moins équitable de lui éviter une vente forcée, de la part des créanciers, à une époque où la quantité et la qualité de la récolte ne sont pas encore déterminées d'une manière bien certaine.

119. La saisie-brandon doit être précédée d'un commandement avec un jour d'intervalle, c'est-à-dire que ce dernier est fait l'avant-veille (1).

(1) Code de procédure, art. 62

120. Ce commandement doit contenir élection de domicile jusqu'à la fin de la poursuite dans la commune où doit se faire l'exécution, si le créancier n'y demeure pas, et le débiteur peut faire à ce domicile élu toutes significations, même d'offres réelles et d'appel (1).

121. L'art. 628 du Code de procédure prévoit le cas où les biens sont situés sur deux communes différentes; nous pensons qu'alors l'élection de domicile exigée par l'art. 584, devra avoir lieu dans la commune où sera située la majeure partie des biens (2).

122. L'huissier, lorsqu'il procède à la saisie, doit être assisté de deux témoins français, majeurs, non parents ni alliés des parties ou de l'huissier, jusqu'au degré de cousin issu de germain inclusivement, ni leurs domestiques (3).

123. Il dresse procès-verbal, qui doit contenir les noms, professions et demeures des témoins, l'indication de chaque pièce de terre, sa contenance, sa situation, deux au moins de ses tenants et aboutissants, enfin, la nature des récoltes saisies (4).

124. La partie poursuivante ne peut être présente à la saisie (5).

125. Dans le cas où la saisie doit avoir lieu dans un terrain clos, si les portes sont fermées ou si l'ouverture en est refusée, l'huissier peut établir gardien aux portes pour empêcher le divertissement; il se retirera sur-le-champ, sans assignation, devant le juge de paix, ou, à son défaut, devant le commissaire de police, et dans les communes

(1) Code de procédure, art. 584.

(2) Argument des art. 628, § 2, et 633 du Code de procédure. (3) Code de procédure, art. 585.

(4) Code de procédure, art. 586 et 628.

(5) Code de procédure, art. 585.

où il n'y en a pas, devant le maire, et à son défaut devant l'adjoint, en présence desquels l'ouverture des portes sera faite. L'officier qui se transportera, ne dressera pas de procès-verbal, mais il signera celui de l'huissier, lequel ne pourra dresser du tout qu'un seul et même procèsverbal (1).

126. Le garde champêtre doit être établi comme gardien, à moins qu'il ne soit le saisissant, son parent, ou allié jusqu'au degré de cousin issu de germain inclusivement (2). Il doit signer l'original et la copie du procèsverbal de saisie que l'huissier rédige, sans déplacement; si le garde champêtre ne sait pas signer, il en est fait mention; en tout cas, il lui est laissé copie du procès-verbal (3).

127. S'il n'est pas présent, la saisie doit lui être signifiée. Copie du procès-verbal de saisie doit être laissée au maire de la commune de la situation, et l'original est visé par lui (4).

128. Si les communes sur lesquelles sont situés les biens sont contigues ou voisines, il est établi un seul gardien, autre néanmoins qu'un garde-champêtre; le visa est donné par le maire de la commune du chef-lieu de l'exploitation, et s'il n'y en a pas, par le maire de la commune où est située la majeure partie des biens (5).

129. La garde des objets saisis est protégée par dispositions pénales.

(1) Argument de l'art. 587 du Code de procédure civile. (2) Code de procédure, art. 598 et 628.

procédure, qu. 2117.

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des

Carré, Lois de la

(3) Code de procédure, art. 599.

(4) Code de procédure, art. 628.

(5) Code de procédure, art. 628.

Ainsi, ceux qui par voies de fait empêcheraient l'établissement du gardien ou qui enlèveraient et détourneraient des objets saisis seraient poursuivis devant les tribunaux correctionnels (1).

Comme le gardien est ici le garde champêtre, revêtu d'une fonction publique, de simples voies de fait constituent, selon les circonstances, ou la rébellion, ou les outrages envers un agent de la force publique.

Quant au détournement des récoltes saisies, il est prévu par l'art. 400 du Code pénal, qui frappe d'un emprisonnement de 1 an à 5 ans le saisi qui aura détruit, détourné ou tenté de détourner les objets saisis, confiés à la garde d'un tiers, dans l'espèce, le garde champêtre.

Le même article punit d'une peine égale celui qui aura recélé sciemment les objets détournés, le conjoint, les ascendants et descendants du saisi qui l'auraient aidé dans la destruction ou le détournement de ces objets.

130. Lorsque la vente n'aura pas lieu au jour désigné par les placards, le gardien peut demander sa décharge par assignation en référé devant le juge du lieu de la saisie; si la décharge est accordée, on procède préalablement au récolement des objets saisis, les parties dûment appelées (2).

131. La poursuite doit se continuer, malgré toutes réclamations de la part du saisi, attribuées à la connaissance du juge en référé (3).

132. Si une personne prétend revendiquer un objet saisi comme lui appartenant, elle peut s'opposer à la vente par exploit signifié au gardien et dénoncé au saisissant et

(1) Code de procédure, art. 600.

(2) Code de procédure civile, art. 606. (3) Code de procédure, art. 607.

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